IMPÔT SUR LE REVENU |
Calcul du revenu |
Déductions |
Fédération des caisses populaires Desjardins de Montréal et de l'Ouest-du-Québec c. Canada
A-739-99
2001 CAF 27, juges Desjardins, Décary et Noël (dissident), J.C.A.
23-2-01
58 p.
Appel d'une décision de la Cour canadienne de l'impôt ((1999), 99 DTC 1275) confirmant la décision du ministre du Revenu national de refuser à l'appelante le droit de déduire une somme de 752 640$--Il s'agissait de déterminer si cette somme, représentant les cotisations patronales et les avantages sociaux que l'appelante devait payer après le 31 décembre 1992, mais qui sont afférents aux indemnités de vacances accumulées par ses employés au cours de l'année 1992, constitue une dépense déductible selon les art. 18(1)a) et 18(1)e) de la Loi de l'impôt sur le revenu--Les employés techniques et professionels de même que les employés de bureau de l'appelante sont régis par des conventions collectives--Aux termes de ces conventions collectives, les employés gagnent leurs vacances pendant la période de référence qui se situe entre le 1er mai et le 30 avril de chaque année--Au 31 décembre 1992, le montant de vacances à payer au cours de l'année subséquente a été établi à 3 010 560$--Ces indemnités pour les vacances gagnées qui n'avaient pas encore été payées en 1992 ont été enregistrées comme dépenses au cours de l'année 1992 et acceptées par le ministre--L'appelante a établi ce taux à 25% du montant des indemnités de vacances à payer au 31 décembre 1992 (25% x 3 010 560$), soit 752 640$--L'intimée a refusé la déduction de ce montant de 752 640$ dans le calcul du revenu de l'appelante pour l'année d'imposition 1992 parce que, selon elle, ce montant correspondait à une provision ou réserve pour obligation future ou éventuelle, et que l'appelante n'avait pas l'obligation de payer ce montant au 31 décembre 1992--Selon le juge de première instance, l'obligation de payer ces cotisations patronales ne prend naissance qu'au moment où les indemnités de vacances sont effectivement versées--Appel accueilli--Le juge Desjardins, J.C.A. (aux motifs desquels a souscrit le juge Décary, J.C.A.): il découle des art. 9, 18(1)a) et 18(1)e) de la Loi que si l'appelante réussit à démontrer que les cotisations patronales en cause constituent un débours ou une dépense «fait ou engagé» par l'appelante en 1992, son droit à la déduction doit être retenu--Une dépense n'est «engagée» au sens de l'art. 18(1)a) que lorsqu'il y a une obligation de payer une somme d'argent--Il importe donc de déterminer à quel moment a pris naissance l'obligation de l'employeur à l'égard des contributions en cause puisqu'il faut déterminer à quel moment ces dépenses ont été «engagées» sur le plan fiscal--Il faut faire une distinction entre le moment où l'obligation de l'employeur de contribuer au régime prend naissance et le moment où l'employeur doit exécuter cette obligation--L'engagement de l'employeur à payer sa contribution prend naissance bien avant le versement de l'indemnité de vacances--La fiction légale établie par l'art. 51(3) de la Loi sur l'assurance-chômage est clairement délimitée par le texte et n'efface pas la réalité--Elle n'empêche pas la création de la dette ou de la rémunération assurable, laquelle est juridiquement née lors de l'acquisition de l'indemnité de vacances en 1992--Dès que les indemnités de vacances sont gagnées, l'obligation de verser les contributions patronales prend naissance--Les indemnités de vacances qui ont toutes été accumulées par les employés de l'appelante au cours de l'année 1992 constituaient, en 1992, une dette envers ces employés même si cette dette n'est pas encore liquidée--Les contributions patronales constituent une obligation réelle, une obligation existante et non une obligation potentielle ou une obligation conditionnelle suspensive--Dans le cas de l'appelante, son obligation de payer les contributions patronales est réelle, mais à terme indéterminé--Elle est suspendue jusqu'au paiement des vacances--La contribution patronale afférente à une indemnité de vacances gagnée en 1992 n'est pas assimilable à la contribution patronale afférente à une période de salaire gagnée en 1993--Le juge Noël, J.C.A. (dissident): le juge de première instance a eu raison de conclure que l'obligation de payer les contributions patronales n'a pas pris naissance pendant l'année d'imposition 1992 de l'appelante et que partant, ces montants ne sont pas déductibles dans le calcul de son revenu pour ladite année en vertu de l'art. 18(1)a) de la Loi--La jurisprudence a établi, en rapport avec l'art. 18(1)a), qu'une dépense n'est pas engagée dans l'année en l'absence de l'obligation légale de payer un montant--L'obligation de l'employeur de verser les cotisations patronales, comme celle de l'employé de verser les cotisations ouvrières, ne prend naissance que lorsque les salaires sont payés--L'art. 51(3) de la Loi sur l'assurance-chômage a pour but évident de faire coïncider l'obligation de l'employeur (et de l'employé) avec le versement de la rémunération assurable dans ces circonstances--Il n'a aucune autre raison d'être--Une dépense doit être engagée dans l'année pour être déduite dans l'année, et elle n'est pas engagée en l'absence de l'existence de l'obligation légale de la payer--C'est à bon droit que le juge de première instance a conclu que la déduction de la dépense de 752 640$ dans le calcul du revenu de l'appelante pour son année d'imposition 1992 est prohibée par l'art. 18(1)a) de la Loi--Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. 1, art. 9, 18(1)a),e)--Loi sur l'assurance-chômage, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. U-1, art. 51(3).