[2012] 3 R.C.F. F-1
aliments et drogues
Contrôle judiciaire de la décision rendue par le Bureau des médicaments brevetés et de la liaison (BMBL), au nom de l’intimé, de refuser d’inscrire un médicament de la demanderesse, le THALOMID, au registre des drogues innovantes parce que l’ingrédient médicinal du médicament, le thalidomide, n’est pas une drogue innovante au sens de l’art. C.08.004.1(1) du Règlement sur les aliments et drogues, C.R.C., ch. 870—Le thalidomide a déjà été approuvé sous les noms de KEVADON et TALIMOL avant d’être retiré du marché en raison de ses effets tératogènes—La demanderesse a commercialisé le thalidomide pour le traitement du cancer et d’autres maladies—Affirmant que les données liées au THALOMID constituent des renseignements exclusifs de nature très délicate et confidentielle, la demanderesse a demandé l’inscription du THALOMID au registre—Selon les dispositions du Règlement relatives à la protection des données (DPD), le BMBL doit examiner si l’ingrédient médicinal a déjà été approuvé par l’intimé à l’égard d’un médicament, conformément à la définition de « drogue innovante » énoncée à l’art. C.08.004.1(1)—Le litige portait principalement sur l’interprétation à donner aux mots « drogues innovantes » et sur la question de savoir si la révocation de l’approbation a eu pour effet de conférer au thalidomide le statut d’ingrédient médicinal nouveau—L’intimé n’a pas interprété les DPD en fonction de leur objet—Les DPD visent à faire en sorte qu’une entreprise n’obtienne pas de protection de données à l’égard d’un produit déjà utilisé et pour lequel aucune innovation n’était nécessaire—Les variantes ou modifications mineures apportées à un médicament déjà approuvé sont exclues de la portée de la protection des données—La demanderesse devait démontrer, par la production de nouvelles données, que le thalidomide est un médicament utile et salvateur—Il est contraire à l’Accord de libre‑échange nord-américain et à l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce de refuser de protéger des données lorsqu’un élément chimique est utilisé à une toute autre fin sur le fondement de données nouvelles en garantissant l’efficacité et l’innocuité—Il serait abusif de conclure qu’un médicament dont l’approbation a été révoquée pour des raisons de sécurité a déjà été approuvé—Il est évident, compte tenu de l’absence de données relatives aux effets nocifs, que l’approbation n’aurait jamais dû être accordée—Même si le KEVADON et le TALIMOL n’étaient pas annulés, mais simplement retirés du marché, les Canadiens ne pouvaient profiter de la découverte et du développement du thalidomide que si de nouveaux médicament pouvaient être approuvés sur le fondement de données et de renseignements nouveaux en démontrant l’innocuité et l’efficacité— L’approbation antérieure du KEVADON et du TALIMOL ne devrait pas faire obstacle à la protection des données relatives à un produit approuvé subséquemment—Demande accueillie.
Celgene Inc. c. Canada (Santé) (T-148-11, 2012 CF 154, juge de Montigny, jugement en date du 6 février 2012, 35 p.)