[2012] 4 R.C.F. F-2
Douanes et Accise
Contrôles judiciaires d’une décision du ministre du Commerce international (le ministre) d’émettre des licences d’importation supplémentaires permettant à Agro‑Farma Canada Inc., membre canadien du groupe d’un transformateur de produits laitiers américain, d’importer une certaine quantité de yogourt de style grec de marque Chobani—Le secteur laitier du Canada est assujetti à la gestion de l’offre—Les deux objectifs de la gestion de l’offre sont établis par l’art. 8 de la Loi sur la Commission canadienne du lait, L.R.C. (1985), ch. C-15—La gestion de l’offre remplit ces objectifs en établissant des mécanismes de contrôle des prix au Canada, de la quantité de lait produit, de la quantité de produits laitiers importés—L’art. 5 de la Loi sur les licences d’exportation et d’importation, L.R.C. (1985), ch. E-19 (LLEI) autorise la création d’une liste des marchandises d’importation contrôlée, C.R.C., ch. 604—Ce yogourt a d’abord été placé sur la liste des marchandises d’importation contrôlée en 1988 en vertu de l’art. 5(1)d) de la LLEI—Le ministre des Affaires étrangères a le pouvoir discrétionnaire d’émettre des licences d’importation supplémentaires à l’égard des biens figurant sur la liste des marchandises d’importation contrôlée en vertu de l’art. 8.3(3) de la LLEI—Dans la pratique, ce pouvoir est exercé par le ministre en sa qualité de ministre des Affaires étrangères—L’art. 8.3(3) de la LLEI confère au ministre le pouvoir d’émettre des licences d’importation supplémentaires à l’égard des biens pour lesquels il a établi une « quantité de marchandises bénéficiant du régime d’accès » ou un contingent tarifaire—Dans le cas présent, les licences à l’égard du yogourt Chobani sont émises en application de l’art. 8.3(3)—Le ministre a publié une série d’« avis aux importateurs » énonçant les critères pris en compte au moment d’exercer son pouvoir discrétionnaire d’émettre des licences en vertu de l’art. 8.3(3) de la LLEI—Selon les lignes directrices, le ministre peut émettre des licences à l’égard des produits déjà produits au Canada si un procédé « unique » a été utilisé et si un investissement est prévu—Agro‑Farma a demandé une licence d’essai permettant d’importer du yogourt Chobani à l’abri des taxes et de le vendre dans la grande région de Toronto pendant trois mois à titre d’essai de commercialisation—Les demandeurs, qui sont d’autres parties prenantes ayant eu connaissance de la demande relative au yogourt Chobani, ont écrit au ministre afin de faire valoir que le yogourt grec n’était pas un produit nouveau et qu’il n’était pas fabriqué au moyen d’un procédé unique—À la conclusion de la rencontre avec Agro-Farma, les représentants d’Affaires étrangères et Commerce international Canada et d’Agriculture et Agroalimentaire Canada ont estimé que le procédé était conforme à l’exigence du procédé unique énoncée dans les lignes directrices—Le pouvoir d’émettre des licences, qui est, dans le cas présent, un pouvoir discrétionnaire, est quasi-absolu—Pour que l’exercice de ce pouvoir par le ministre soit raisonnable, le ministre doit tenir compte de l’incidence de la licence sur la gestion de l’offre—Toute décision d’émettre une licence qui nuirait à la gestion de l’offre à long terme serait déraisonnable—Les facteurs à prendre en considération comprennent la portée géographique, la durée des licences et la conjoncture du marché relativement aux produits en question—Comme la gestion de l’offre présente de nombreux avantages à long terme, le ministre peut tenir compte d’autres objectifs gouvernementaux, comme le soutien des investissements dans les politiques relatives à la fabrication, au moment de décider d’émettre ou non une licence—La décision du ministre est raisonnable dans le cas présent parce que la preuve qui lui a été présentée indiquait que les licences ne nuiraient pas à la gestion de l’offre à long terme—Demandes rejetées.
Ultima Foods Inc. c. Canada (Procureur général) (T-1931-11, 2012 CF 799, juge Simpson, jugement en date du 21 juin 2012, 44 p.)