CITOYENNETÉ ET IMMIGRATION |
Statut au Canada |
Réfugiés au sens de la Convention |
Kanvathipillai c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)
IMM-4509-00
2002 CFPI 881, juge Pelletier
16-8-02
16 p.
Contrôle judiciaire du rejet de revendications du statut de réfugié pour absence d'un minimum de fondement--Après le rejet de leurs premières revendications du statut de réfugié, les demandeurs ont quitté le Canada pour les États-Unis--Ils sont revenus 90 jours après leur départ et ont présenté de nouvelles revendications du statut de réfugié--La SSR a estimé que les demandeurs n'étaient pas crédibles et qu'ils ne s'étaient pas acquittés de la charge de prouver qu'ils avaient une crainte fondée de persécution pour le cas où ils retourneraient au Sri Lanka; la revendication des demandeurs manquait d'un minimum de fondement--1) Les arguments des demandeurs donnent à entendre que, lorsqu'un demandeur n'est pas retourné dans son pays d'origine, le critère du statut de réfugié est le critère de la situation qui a cours dans le pays, étant donné qu'il ne peut y avoir eu de nouveaux cas de persécution si le demandeur n'est pas retourné dans son pays--Cela équivaut à dire que tout ce qu'un demandeur doit montrer, c'est l'élément objectif de sa crainte de persécution--Mais, puisque la définition de l'expression «réfugié au sens de la Convention» comporte un volet subjectif et un volet objectif, une décision selon laquelle une personne est un réfugié uniquement en raison de la preuve de l'élément objectif aurait pour effet d'écarter l'élément subjectif de la définition--Il serait étrange qu'une personne qui présente une première revendication du statut de réfugié doive prouver à la fois l'élément subjectif et l'élément objectif de sa crainte de persécution, mais que, après un séjour de 90 jours aux États-Unis, elle puisse obtenir gain de cause dans sa deuxième revendication en se limitant à montrer pourquoi elle craint objectivement d'être persécutée--Dans l'arrêt Yusuf c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] 1 C.F. 629 (C.A.), le juge Hugessen avait exprimé des doutes sur le rôle de l'élément subjectif lorsque l'élément objectif était démontré--Mais l'on a raison d'insister sur la présence d'une crainte subjective de persécution, et cela parce que le système des revendications du statut de réfugié a pour objet de protéger ceux qui craignent la persécution et pour lesquels il n'existe pas de protection d'État--Ceux dont l'absence de crainte s'explique par une incapacité de comprendre leur environnement peuvent avoir droit à une protection pour d'autres motifs, tandis que ceux qui sont suffisamment robustes pour se protéger eux-mêmes n'ont pas besoin de la protection de la communauté internationale--Les motifs de la SSR ne sont pas un modèle de clarté, mais ils abordent la question de la crainte fondée de persécution en s'appuyant sur des événements survenus après le rejet de la première revendication des demandeurs--2) Il y a, au sein de la Section de première instance, deux écoles de pensée sur la question de savoir si des motifs distincts sont requis lorsque la SSR conclut à l'absence d'un minimum de fondement-- L'argument de ceux qui estiment qu'il n'est pas nécessaire de motiver une telle conclusion est que, pour démontrer le bien-fondé de sa revendication du statut de réfugié, le revendicateur doit produire une preuve crédible au soutien de cette revendication--Par conséquent, lorsque la SSR rédige des motifs exposant les éléments qui l'autorisent à conclure à l'absence de crédibilité, elle expose nécessairement les éléments qui l'autorisent à conclure à l'absence d'un minimum de fondement: Nizeyimana c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2001), 204 F.T.R. 139 (C.F. 1re inst.)--L'argument en faveur d'une conclusion motivée est résumé dans le jugement Foyet c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 187 F.T.R. 181 (C.F. 1re inst.)--La conclusion du juge L'Heureux-Dubé, dans l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, selon laquelle des motifs écrits sont nécessaires pour favoriser une meilleure prise de décision dans les décisions relatives à des demandes fondées sur des considérations humanitaires n'est pas sans résonnance en ce qui concerne les décisions où le tribunal conclut à l'absence d'un minimum de fondement-- Par ailleurs, les conséquences d'une décision où la SSR conclut à l'absence d'un minimum de fondement sont importantes, mais elles sont circonscrites par des sauvegardes procédurales et juridiques contre l'expulsion vers un endroit où il y a véritablement un risque de traitements inhumains-- Lorsque la SSR évalue l'ensemble de la preuve, notamment les témoignages et les documents, les motifs qu'elle aura de conclure que la revendication n'est pas appuyée par une preuve digne de foi indiqueront nécessairement pourquoi elle conclut à l'absence d'un minimum de fondement-- L'application du critère énoncé par la Cour d'appel dans l'arrêt Rahaman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 3 C.F. 537 (C.A.) à propos des cas où la SSR peut disposer d'une revendication en concluant à l'absence d'un minimum de fondement dispensera la SSR d'exposer des motifs distincts justifiant une telle conclusion-- Demandes rejetées.