IMPÔT SUR LE REVENU |
Calcul du revenu |
Déductions |
Novopharm Ltd. c. Canada
A-24-02
2003 CAF 112, juge Rothstein, J.C.A.
5-3-03
29 p.
Appel d'une décision de la Cour de l'impôt (2002 DTC 1037) rejetant l'appel de Novopharm à l'encontre d'une cotisation refusant des déductions--Quatre questions examinées en appel--1) Le droit de l'appelante à la déduction des intérêts pour les années d'imposition 1987 et 1988, en vertu de l'art. 20(1)c)(i) de la Loi de l'impôt sur le revenu-- Quarante opérations ont créé des déductions d'intérêts pour Novopharm, qui réalisait un bénéfice, tandis que le revenu d'intérêts sur les fonds empruntés était attribué à une société qui accumulait les pertes autres qu'en capital et les frais d'exploration et d'aménagement au Canada inutilisés--Le juge de la Cour de l'impôt a statué que les opérations n'avaient d'autre but que l'évitement fiscal--L'art. 20(1)c)(i) prévoit que, pour que l'on puisse déduire les intérêts, l'argent emprunté doit être utilisé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien--La Cour de l'impôt a jugé que l'emprunt en l'espèce ne satisfaisait pas à la condition prévue à l'art. 20(1)c)(i) parce qu'il ne visait qu'à éviter l'impôt et non à tirer un revenu--Arrêt Singleton c. Canada, [2001] 2 R.C.S. 1046 suivi--L'art. 20(1)c)(i) n'envisage pas la possibilité de traiter des opérations individuelles comme une série d'opérations--Lorsque l'on regarde les opérations indépendamment les unes des autres, l'emprunt de l'appelante a été utilisé en vue de tirer un revenu et remplit les conditions de l'art. 20(1)c)(i)--2) Le droit de l'appelante à la déduction des frais de montage financier pour l'année d'imposition 1987, en vertu de l'art. 20(1)e)(ii)--Le raisonnement applicable à la déduction des intérêts s'applique également aux frais de montage financier parce que l'emprunt de l'appelante a été utilisé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien--Les frais de montage financier engagés à l'occasion de l'emprunt satisfont donc aux conditions de l'art. 20(1)e)(ii)--3) Le droit de l'appelante à la déduction des frais de consultation pour l'année d'imposition 1987 en vertu de l'art. 9(1) ou l'interdiction de la déduction par art. 18(1)a)--Autrement dit, la question est de savoir si les frais de consultation satisfont au critère de l'objet prévu à l'art. 18(1)a)--L'art. 18(1)a) interdit la déduction de dépenses à moins qu'elles ne soient engagées dans le but de «gaining or producing income», tandis que l'art. 20(1)c)(i) dit «earning income»--Pour qu'une dépense soit admise en déduction du revenu d'un contribuable, il faut qu'elle ait été faite en vue de réaliser un bénéfice--Il ne suffit pas que la dépense ait été faite en vue d'obtenir un revenu brut--À l'égard de l'art. 20(1)c)(i), le revenu n'est pas l'équivalent du profit ou du revenu net: Ludco Enterprises Ltd. c. Canada, [2001] 2 R.C.S. 1082--L'art. 18(1)a) ne propose aucun critère quantitatif et n'implique pas non plus que le tribunal doive se demander si le revenu a un caractère suffisant--Donc, les frais de consultation engagés en vue de tirer un revenu satisfont aux conditions de déductibilité et l'art. 18(1)a) n'empêche pas leur déduction--4) Si l'appelante avait droit aux déductions des intérêts, des frais de montage financier et des frais de consultation, le droit aux déductions lui était-il dénié en vertu de l'art. 245(1) qui était en vigueur en 1987 et en 1988 et qui a été abrogé depuis?--Pour apprécier si les déductions de l'appelante réduiraient son revenu indûment ou de façon factice pour l'application de l'art. 245(1), deux démarches sont possibles--Le juge de la Cour de l'impôt a suivi la démarche adoptée dans l'arrêt Canada c. Fording Coal Ltd., [1996] 1 C.F. 518 (C.A.)--L'autre démarche est celle empruntée dans l'arrêt Canada c. Mara Properties Ltd., [1995] 2 C.F. 433 (C.A.)--Il ne faut pas suivre l'analyse de l'arrêt Mara Properties parce que, même si une déduction était permise par une disposition expresse de la Loi de l'impôt sur le revenu, il faudrait, dans le cas où elle réduirait le revenu de façon factice, la refuser en vertu de l'art. 245(1)--De plus, depuis l'arrêt Fording, aucun tribunal n'a suivi l'analyse de l'arrêt Mara Properties à l'égard de l'interprétation de l'art. 245(1)--La démarche de l'arrêt Fording suivie--Question de savoir si toute la série d'opérations est pertinente pour l'application de l'art. 245(1)--La prise en compte de la série d'opérations reliées entre elles est conforme au point central de l'art. 245(1), qui, par rapport à l'espèce, est de savoir si les déductions réduisent de façon factice le revenu--L'art. 245(1) emploie les mots «déduction [. . .] faite à l'égard [. . .] d'une dépense [. . .] engagée, relativement à une opération»--Ces mots ne peuvent limiter l'examen dans le cadre de l'art. 245(1) à la seule opération donnant lieu à la déduction--L'art. 245(1) présuppose qu'une opération est effectuée, à l'occasion de laquelle est engagée une dépense que le contribuable cherche à déduire de son revenu--En restreignant l'examen, en l'espèce, à la déduction à l'égard des frais d'intérêt engagés, on esquiverait la question de savoir si la déduction réduirait indûment ou de façon factice le revenu--Pour décider cette question, il faut examiner d'autres faits--Dans le cadre de l'art. 245(1), la question est de savoir si la déduction faite à l'égard d'une dépense réduirait de façon factice le revenu ou, en termes plus simples, réduirait anormalement le revenu--Conformément à l'analyse de l'arrêt Fording, il faut considérer toutes les circonstances pour répondre correctement à la question du caractère factice--Si l'on applique l'analyse de l'arrêt Fording, le résultat de la série d'opérations liées qui ont eu lieu sur une courte période en l'espèce était seulement de créer une déduction nette d'intérêts qui réduisait le revenu de l'appelante, soit l'opposé de l'objet de l'art. 20(1)c)(i), qui est d'inciter à l'accumulation de capitaux susceptibles de produire un revenu--En déduisant ses propres frais d'intérêts nets en l'espèce, l'appelante ne faisait que de l'évitement fiscal et, ainsi que l'a jugé le juge de la Cour de l'impôt, agissait à l'encontre de l'objet et de l'esprit de l'art. 20(1)c)(i)--On a conclu une série d'opérations liées qui étaient déterminées d'avance, circulaires et limitées dans le temps--Au terme de la période relativement courte pendant laquelle les opérations ont été réalisées, rien n'avait changé, si ce n'est les déductions d'impôt demandées par l'appelante--C'est la combinaison du caractère déterminé d'avance des opérations, de leur circularité et du temps limité pendant lequel elles ont toutes été réalisées qui les a fait sortir des habitudes normales du commerce et a rendu factice la déduction des frais d'intérêts par l'appelante--Parce que la déduction des intérêts par l'appelante réduisait de façon factice son revenu, c'est à bon droit que le juge de la Cour de l'impôt a rejeté l'appel dont il était saisi sur le fondement de l'art. 245(1)--Appel rejeté-- Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. 1, art. 9(1), 18(1)a), 20(1)c)(i), e)(ii)--Loi de l'impôt sur le revenu, L.C. 1970-71-72, ch. 63, art. 245(1) (mod. par L.C. 1988, ch. 55, art. 185(1)).