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CITOYENNETÉ ET IMMIGRATION

Pratique en matière d'immigration

Mangat c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)

IMM-4424-99

juge Gibson

18-8-00

13 p.

Contrôle judiciaire d'une décision par laquelle la SSR a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention--Le demandeur est arrivé au Canada le 21 octobre 1998 et y a revendiqué le statut de réfugié--Le 26 avril 1999, le demandeur a été avisé que son audition devant la SSR aurait lieu le 30 juin 1999--Le 28 juin, le demandeur a retenu les services d'une nouvelle avocate, qui a écrit à la Commission pour l'aviser qu'elle ne pourrait se présenter à l'audition, car elle avait été informée de la tenue de cette dernière que très tardivement, et que, de toute façon, le demandeur se présenterait tel que prévu--La SSR a refusé d'accorder l'ajournement que l'avocate avait cherché à obtenir et, tenant l'audition en l'absence de cette dernière, a rejeté la revendication du statut de réfugié--Le demandeur a refusé de témoigner--Demande accueillie--L'art. 69(6) de la Loi sur l'immigration prévoit que la SSR ne peut ajourner une procédure que si elle est convaincue que l'ajournement ne causera pas d'entrave sérieuse--La règle 13(4) des Règles de la section du statut de réfugié énumère les facteurs dont on doit tenir compte pour trancher la question de savoir si l'ajournement causerait une entrave sérieuse--Ces facteurs s'apparentent aux facteurs qui ont été identifiés dans l'arrêt Siloch c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 151 N.R. 76 (C.A.F.) comme étant pertinents à l'égard de l'exercice, par un arbitre, de son pouvoir discrétionnaire d'accorder un ajournement--Il n'y avait pas eu d'ajournement antérieur en l'espèce--La SSR n'a pas demandé de précision sur la durée de l'ajournement que le demandeur cherchait à obtenir et elle n'a pas offert un ajournement plus court au demandeur afin de permettre à sa nouvelle avocate de mieux le connaître et de se familiariser avec les faits qui fondent la revendication et d'examiner davantage la possibilité de joindre sa revendication à celle de son frère--Rien n'indiquait en l'espèce qu'un bref ajournement influerait sur le système d'immigration ou retarderait, empêcherait ou paralyserait indûment la conduite de cette enquête particulière--L'incidence du refus d'accorder l'ajournement en l'espèce était de priver le demandeur de son droit à une audience équitable--Comme dans l'affaire Ahamad c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] 3 C.F. 109 (1re inst.), la norme de contrôle qu'il convenait d'appliquer était celle de la décision raisonnable simpliciter, étant donné que la SSR n'a pas conclu que l'art. 69(6) lui retirait son pouvoir discrétionnaire pour ce qui est de la demande d'ajournement--À première vue, rien n'indique que la SSR a considéré dans ses motifs les facteurs pertinents tels ceux qui sont énumérés dans la règle 13(4)--De la même façon, on ne peut conclure qu'il n'a pas été tenu compte d'une grande partie des témoignages --Le manque de confiance du demandeur à l'égard de son premier avocat grandissait depuis quelque temps déjà, et elle n'a que culminé après qu'il a reçu l'avis d'audition--À l'époque, le demandeur avait 23 ans; il témoignait par l'entremise d'un interprète; il s'efforçait de comprendre les subtilités d'un système d'octroi du statut de réfugié qu'il ne connaissait pas et d'absorber le choc culturel que suscitait son arrivée au Canada--Compte tenu des circonstances, on ne peut considérer que le demandeur a agi de façon déraisonnable en mettant entre deux et trois semaines pour se trouver une nouvelle avocate--La SSR n'a pas expliqué comment elle pouvait conclure, compte tenu du témoignage du demandeur et des franches excuses qu'il a présentées pour avoir tardé à demander un ajournement, qu'il avait une «arrière-pensée» lorsqu'il a changé d'avocat--Les motifs que la SSR a exposés pour étayer sa décision de ne pas accorder l'ajournement demandé ne sont pas valables, car c'est ce qu'il ressort d'un examen assez poussé--On peut déduire de l'art. 69(6), compte tenu d'une «interprétation large et libérale des valeurs sous-jacentes à [la Loi sur l'immigration]» et des «valeurs d'ordre humanitaire centrales dans la société canadienne», auxquelles on a renvoyé dans l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [1999] 2 R.C.S. 817, qu'étant donné que l'art. 69(6) n'empêche pas qu'un ajournement soit accordé, la SSR devrait exercer de façon généreuse son pouvoir discrétionnaire d'accorder des ajournements dans des circonstances où rien n'indique que la partie qui en a fait la demande a agi de mauvaise foi; cette conclusion revêt une importance particulière en l'espèce vu les conséquences énormes qui pourraient découler d'un refus d'accorder un ajournement--Rien n'indique qu'il y a eu mauvaise foi en l'espèce--Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, art. 69(6) (mod. par L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 28, art. 18--Règles de la section du statut de réfugié, DORS/93-45, règle 13(4).

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