Jones c. Canada
A-185-95
juge Décary, J.C.A.
11-12-95
10 p.
Contrôle judiciaire d'une décision de la Cour canadienne de l'impôt (CCI) confirmant l'évaluation faite par le ministre de la juste valeur marchande d'un terrain, et obligeant le requérant à inclure dans son revenu la somme de 26 200 $ au motif qu'il désirait accorder un avantage à son père-Selon l'art. 56(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu, le paiement ou le transfert de biens fait, suivant les instructions d'un contribuable, à toute autre personne à titre d'avantage que le contribuable désirait voir accorder à l'autre personne doit être inclus dans le calcul du revenu du contribuable dans la mesure oú il le serait si ce paiement ou ce transfert avait été fait au contribuable-Le requérant était l'unique actionnaire et administrateur d'Ascot Entreprises Ltd.-En juillet 1987, Ascot avait acheté un terrain à la demande du père du requérant afin de l'inclure dans un vaste projet qu'il mettait sur pied, mais qu'il ne pouvait financer à l'époque-Ascot a payé 59 900 $-Ascot a vendu le terrain 61 800 $ au père en 1990-Au moment de la vente, le terrain était évalué à 59 750 $; sa juste valeur marchande était de 61 800 $-Ascot a déclaré la vente en 1991, déclarant aucun amortissement recouvré, un gain en capital et une perte autre qu'en capital, reportée sur son année d'imposition 1990-Le ministre a fixé une nouvelle cotisation en prenant pour base que la juste valeur marchande était de 88 000 $, obligeant ainsi le requérant à inclure dans son revenu la somme de 26 200 $-Demande accueillie-L'art. 56(2) avait été invoqué à tort-L'art. 56(2) a pour objet de s'assurer que les paiements qui auraient été autrement reçus par le contribuable ne sont pas détournés au profit d'un tiers comme technique d'évitement fiscal-Le «désir» de conférer un avantage est un élément capital de la disposition-L'art. 56(2) ne s'applique pas lorsque le contribuable n'a pas l'intention de recevoir des fonds en s'organisant pour que des paiements soient faits à des tiers sans contrepartie suffisante-Il incombe au contribuable d'expliquer pourquoi les transactions ont été faites-Comme l'art. 15(1) ne s'appliquait pas, l'art. 56(2) entrait en jeu-L'application de l'art. 56(2) ne mène pas à un cas de double imposition-Le fait qu'une transaction unique génère de l'impôt sur le revenu en vertu de dispositions différentes entre les mains de plus d'un contribuable ne constitue pas un cas de double imposition-L'art. 56(2) n'amène pas la Cour à conclure que le requérant n'avait pas suivi une méthode raisonnable pour déterminer la valeur du terrain avant le transfert-Il ne suffisait pas de conclure que la méthode suivie par le requérant pour déterminer la valeur du terrain était déraisonnable-Il fallait conclure que cette méthode équivalait à un désir de voir accorder un avantage-Le juge de la CCI ne l'a pas fait-Aucune preuve n'aurait permis de tirer une telle inférence-Le fait que le requérant n'ait pas pris de mesures raisonnables pour vérifier la valeur réelle du terrain ne mène pas à la conclusion qu'il désirait accorder un avantage à son père au sens de l'art. 56(2)-Rien n'indiquait que le requérant savait ou aurait dû savoir que le terrain valait plus que le prix payé au départ-Il croyait sincèrement que le terrain était vendu à sa juste valeur marchande-Il était impossible d'inférer que le requérant «désirait» accorder à son père un avantage au sens de l'art. 56(2)-Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, ch. 63, art. 15(1) (mod. par L.C. 1988, ch. 55, art. 8), 56(2) (mod. par L.C. 1987, ch. 46, art. 15), 69(1b)(i).