Ghorvei c. Canada ( Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration )
IMM-2254-96
juge en chef adjoint Jerome
16-9-97
8 p.
Contrôle judiciaire de la décision de la ministre selon laquelle le requérant devait être renvoyé du Canada-Le requérant, un citoyen iranien, avait déserté-Il a été arrêté et détenu pendant 23 mois en Iran, période pendant laquelle il a été torturé et battu-Il a été admis au Canada à titre de réfugié au sens de la Convention et il s'est vu accorder le droit d'établissement le 25 janvier 1993-Il a été arrêté et accusé de possession et de trafic de stupéfiants-Il a été condamné à une peine de quatre ans et demi-La ministre a exprimé l'avis selon lequel le requérant constituait un danger pour le public conformément aux art. 70(5) et 53(1)d) de la Loi sur l'immigration-Demande accueillie-L'agente d'immigration a recommandé à la ministre de considérer le requérant comme un danger pour le public en se fondant sur deux prémisses: la crainte de persécution du requérant n'était pas légitime et le requérant avait été déclaré coupable d'une infraction grave-La conclusion selon laquelle il n'y avait pas de crainte de persécution était fondée sur le Rapport conjoint des ambassades, établi par diverses ambassades, dont l'ambassade du Canada, décrivant la situation en Iran en ce qui concerne les droits de la personne-Ce rapport contredit les principales conclusions figurant dans les dossiers d'information sur les pays sur lesquels se fonde normalement la Section du statut de réfugié et la Section d'appel-Dans le Rapport conjoint des ambassades, on concluait que les déserteurs et les personnes déclarées coupables d'infractions dans d'autres ressorts ne sont généralement pas assujettis à une forme de traitement dur lorsqu'ils retournent en Iran-Les autres dossiers d'information sur les pays disaient tous que toute activité antigouvernementale donne lieu à des peines extrêmes-Dans le rapport sur le «danger», il n'était pas fait mention de la désertion du requérant, de son activisme en Iran, ou du fait que le HCNUR avait conclu qu'il était un réfugié-La ministre a commis une erreur en ne tenant pas compte de ces facteurs pertinents-En examinant les déclarations de culpabilité à l'égard des stupéfiants, l'agente d'immigration n'a pas parlé des recommandations favorables et de programmes de réadaptation suivis montrant que le requérant avait réglé son problème de toxicomanie et qu'il était devenu meilleur pendant qu'il était incarcéré-La ministre a un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne la façon dont elle évalue la preuve, mais le fait qu'elle n'a pas parlé de ces nouveaux éléments de preuve donne l'impression qu'il n'en a pas été tenu compte-Dans Shayesteh v. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 112 F.T.R. 161 (C.F. 1re inst.), il a été conclu que le contrôle de l'avis exprimé par le ministre est possible lorsque la validité de l'avis du ministre constitue une question grave à décider-Le rapport de l'agente d'immigration ne permet pas de savoir si elle a tenu compte d'éléments de preuve fort importants ou si elle s'est fondée sur des considérations non appropriées lorsqu'elle a fait sa recommandation à la ministre-Tout avis réel du rapport conjoint sur les ambassades aurait dû être donné au requérant non seulement parce que cela semble être le seul rapport sur lequel l'agente d'immigration s'est fondée, mais aussi, ce qui est encore plus important, parce que le rapport contredit les conclusions des dossiers d'information sur les pays qui sont habituellement utilisés dans les affaires de ce genre-Le document doit non seulement être mis à la disposition du public, mais il doit aussi être facilement disponible-Lorsque l'agent d'immigration se fonde fortement sur un élément de preuve qui n'est pas communément consulté, cet élément doit être communiqué au requérant-Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. 1-2, art. 53 (mod. par L.C. 1992, ch. 49; art. 43; 1995, ch. 15, art. 12), 70(5) (mod., idem, art. 13).