[2018] 3 R.C.F. F-19
Accès à l’information
Appel de la décision de la Cour fédérale (2016 CF 117) qui a rejeté le contrôle judiciaire de la décision rendue par l’intimé, l’Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers, de divulguer le nom de deux employés de l’appelante contenus dans les documents répondant à une demande en matière d’accès à l’information — La demande portait sur des demandes antérieures de renseignements géophysiques et géologiques présentées par des sociétés à l’Office — Les questions en l’espèce se rapportaient à la norme de contrôle applicable; à la question de savoir si les noms et les titres des employés de l’appelante, dans le contexte des documents demandés, constituaient des « renseignements personnels » visés à l’art. 19(1) de la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. (1985), ch. A-1, (qui incorpore le sens de « renseignements personnels » sous le régime de l’art. 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. (1985), ch. P-21); et à la question de savoir si l’Office a conclu à tort que le public avait accès aux « renseignements personnels » en cause et que ceux-ci pouvaient être donnés en communication — Le juge de Montigny, J.C.A. : Dans l’arrêt Blank c. Canada (Justice), 2016 CAF 189, la Cour d’appel fédérale a conclu que la norme de contrôle applicable à l’examen en appel de la décision rendue par un juge de la Cour fédérale dans le contexte d’un contrôle judiciaire présenté au titre de l’art. 41 de la Loi sur l’accès à l’information était la norme habituelle appliquée à tout appel interjeté à l’encontre d’un contrôle judiciaire, suivant l’arrêt Agraira c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, [2013] 2 R.C.S. 559 — L’argument du commissaire à l’information intimé selon lequel l’arrêt Agraira n’a pas écarté l’arrêt antérieur dans Merck Frosst Canada Ltd. c. Canada (Santé), 2012 CSC 3, [2012] 1 R.C.S. 23, au sujet de la norme de contrôle distincte en appel à appliquer dans les affaires de contrôle judiciaire relevant de la Loi sur l’accès à l’information, a été rejeté dans la présente affaire — Il n’existe aucune raison convaincante de distinguer entre le contrôle judiciaire par une cour supérieure d’une décision rendue par un fonctionnaire et celle d’un tribunal administratif en ce qui concerne la norme de contrôle à appliquer par une cour d’appel — En ce qui concerne la question de savoir si les noms et les titres des employés de l’appelante, dans le contexte des documents demandés, constituaient des « renseignements personnels » visés à la Loi sur l’accès à l’information, la disposition liminaire de la définition de « renseignements personnels » révèle que les renseignements qui peuvent être considérés comme des « renseignements personnels » doivent concerner un individu « identifiable » — Ce n’est que lorsqu’un nom peut être associé à d’autres renseignements personnels que sa divulgation sera considérée comme interdite — Les noms qui figurent dans des documents révéleront toujours quelque chose concernant une personne, mais un critère de portée si large ne peut constituer la norme pour décider quand le nom figurant dans un document ne sera pas divulgué — On peut dire que toutes les illustrations figurant aux alinéas a) à h) de la définition de « renseignements personnels » à l’art. 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels ont trait à l’intimité et à l’identité principale d’un individu, et qu’elles renvoient au type de renseignements dont la personne préférerait contrôler la diffusion — En l’espèce, les renseignements qui seraient transmis au sujet des employés de l’appelante si leur nom figurant dans les documents demandés était divulgué importent peu et ne sont guère le type de renseignements qui font partie intégrante de leur dignité ou de leur identité, dont ils souhaiteraient conserver le contrôle — Par conséquent, les noms et titres des membres du personnel de l’appelante, dans le contexte des documents demandés, ne répondaient pas à la définition de « renseignements personnels » de la Loi sur la protection des renseignements personnels — En ce qui concerne la question de savoir si le public avait accès aux « renseignements personnels » en cause et si ceux-ci pouvaient être communiqués, l’appelante n’a pas démontré que l’Office avait commis une erreur, de fait ou de droit, en concluant que le public n’avait pas accès aux renseignements ou en exerçant son pouvoir discrétionnaire pour permettre la communication des renseignements — Le juge Gauthier, J.C.A. (motifs concordants) : L’appelante ne s’est pas acquittée de son fardeau d’établir que la décision de l’Office de donner communication des documents en cause sans la suppression qu’elle avait demandée était déraisonnable — Toutefois, en ce qui concerne la question de savoir si les noms et les titres des employés de l’appelante constituent des « renseignements personnels », il faut faire particulièrement attention, dans les affaires mettant en cause des renseignements personnels et/ou des interprétations des dispositions applicables de la Loi sur l’accès à l’information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels, de ne pas s’aventurer dans des questions qui ne sont pas strictement nécessaires pour trancher un appel — Bien qu’il existe des circonstances dans lesquelles le minimalisme judiciaire ne constitue pas la meilleure approche, le présent appel n’appartenait pas à cette catégorie — Le contexte est capital dans les affaires comme celle en l’espèce, et chacune de ces affaires doit être abordée au cas par cas, sans tenter de définir une approche générale autre que celle établie dans les dispositions législatives applicables — Le présent appel pouvait être tranché en fonction de la seule question de savoir si l’appelante a établi une erreur susceptible de contrôle dans la décision que l’Office a rendue au titre de l’art. 19(2) de la Loi sur l’accès à l’information — Il n’y avait aucune raison de procéder à une analyse des autres sujets mentionnés, comme la norme de contrôle applicable — Selon la thèse des intimés, la correspondance limitée en cause comportant les éléments identificateurs ne révélait aucun autre renseignement personnel concernant les employés que ce à quoi le public avait déjà accès — Il s’agissait d’une question mixte de fait et de droit à l’égard de laquelle il manquait des éléments factuels cruciaux dans le dossier — Cela suffisait pour rejeter l’appel — Appel rejeté.
Husky Oil Operations Limited c. Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers (A-75-16, 2018 CAF 10, juges de Montigny, Gauthier, J.C.A., jugement en date du 12 janvier 2018, 34 p.)