[2019] 1 R.C.F. F-1
Brevets
Pratique
Appel d’une ordonnance rendue par la protonotaire rejetant une requête en ordonnance conservatoire — La demanderesse dans la demande sous-jacente a allégué que la défenderesse a contrefait le brevet canadien no 2 486 935 — Les parties étaient sur le point d’entamer la procédure de communication des éléments de preuve — Elles ont négocié une ordonnance conservatoire afin de dicter la manière dont les renseignements confidentiels et de nature délicate seraient échangés — La protonotaire a conclu que la décision de délivrer une ordonnance conservatoire est une question discrétionnaire qui doit être examinée selon les circonstances propres à chaque affaire — Elle a conclu notamment que la défenderesse ne s’était pas acquittée de son fardeau de prouver la nécessité de l’ordonnance, et que l’ordonnance n’offrirait pas une protection supérieure à celle offerte par la règle de l’engagement tacite — Elle a fait observer que les ordonnances qualifiées soit « de non-divulgation » soit « de confidentialité » contenaient des dispositions permettant aux parties de déposer au greffe des documents sous scellés et que ces ordonnances étaient des versions « hybrides » de ce que l’on entend aujourd’hui des termes « ordonnance conservatoire » et « ordonnance de confidentialité » — Elle a soutenu que le seul critère applicable à la délivrance de telles ordonnances est celui applicable aux ordonnances de confidentialité — Elle a noté que l’ancien critère établi dans les décisions AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé et du Bien-être social), 1998 CanLII 8942 (C.F., 1re inst.) (AB Hassle) et Apotex Inc. c. Wellcome Foundation Ltd., [1993] A.C.F. no 1117 (1re inst.) (Q.L.) (Wellcome) a été remplacé par la règle 151 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, et la décision Sierra Club du Canada c. Canada (Ministre des Finances), 2002 CSC 41, [2002] 2 R.C.S. 522 (Sierra Club) — Il s’agissait de savoir si la protonotaire a erré en droit en omettant d’appliquer le bon critère juridique pour rejeter l’ordonnance conservatoire — La protonotaire n’a pas expliqué pourquoi il faut comprendre que le critère de l’arrêt Sierra Club s’applique exclusivement au dépôt de documents sous scellés devant le tribunal — Rien dans le texte de l’arrêt Sierra Club n’appuie la distinction proposée par la protonotaire — Il est clair que l’ordonnance délivrée dans la décision AB Hassle contenait des dispositions relatives à l’échange de renseignements confidentiels entre les parties — Qualifier cette ordonnance d’ordonnance « hybride » ne justifiait pas une dérogation au critère existant — Le raisonnement qui sous-tend le critère énoncé dans l’arrêt Sierra Club est la protection des renseignements de nature délicate — La tentative de la protonotaire de lire l’arrêt Sierra Club comme s’il ne s’appliquait qu’aux ordonnances de confidentialité consistait en une discussion sur des pointes d’aiguilles — Les deux conditions du critère de l’arrêt Sierra Club ont été respectées dans la présente affaire — Une ordonnance conservatoire a été prononcée — Bien que l’examen de la protonotaire concernant l’évolution de la règle de l’engagement tacite et des ordonnances conservatoires, ainsi que leur application dans le contexte actuel, soit tout à fait fondé, il ne convenait pas qu’un changement majeur à une pratique établie de longue date découle de la jurisprudence de notre Cour — Un tel changement relève du législateur — Appel accueilli.
Seedlings Life Science Ventures, LLC c. Pfizer Canada Inc. (T-608-17, 2018 CF 956, juge Ahmed, motifs de l’ordonnance en date du 27 septembre 2018, 16 p.)