Citoyenneté et Immigration
Pratique en matière d'immigration
Demande d’ordonnance du défendeur, aux termes de l’art. 87 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, visant à interdire la divulgation des renseignements et autres éléments de preuve caviardés dans le dossier certifié du tribunal — Les renseignements que le défendeur cherchait à protéger fournissent la raison de l’annulation du visa du demandeur — Le demandeur, un citoyen du Kazakhstan, a contesté la décision d’un agent des visas d’annuler son visa canadien à entrées multiples au motif qu’il avait « un doute » quant au but de sa visite — Le demandeur, son épouse et sa fille ont utilisé des visas pour un court séjour en avril 2017 afin de rendre visite à la belle-fille du demandeur — Le couple a divorcé peu de temps après — L’épouse a amené leur fille avec elle au Canada sans sa permission en 2018 — Le demandeur a planifié de se rendre au Canada pour faire appliquer le jugement du tribunal de la famille, mais son visa a été annulé parce qu’il n’avait pas été utilisé dans le but visé, soit pour le tourisme — Le défendeur a déposé une requête au motif que la divulgation des renseignements caviardés porterait atteinte à la sécurité nationale ou à celle d’autrui — Il s’agissait de savoir si l’art. 87 s’applique aux éléments de preuve que le défendeur a cherché à protéger dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire — Les renseignements que le défendeur a cherché à protéger en l’espèce n’étaient pas visés par la section 9 de la Loi, et ils ne peuvent être protégés au moyen d’une requête présentée aux termes de l’art. 87 — Le différend en l’espèce était essentiellement une affaire d’interprétation des lois — La section 9 de la Loi définit le terme « renseignements » comme étant les « renseignements en matière de sécurité ou de criminalité et ceux obtenus, sous le sceau du secret, de source canadienne ou du gouvernement d’un État étranger, d’une organisation internationale mise sur pied par des États ou de l’un de leurs organismes » — Seul le juge en chef de la Cour, ou un juge expressément nommé par le juge en chef, a compétence pour entendre les affaires visées par la section 9 — La section 9 ne peut être interprétée comme s’appliquant à tout type de renseignement confidentiel devant être protégé lors de tout contrôle judiciaire mené aux termes de la LIPR — Les limites au champ d’application de la section 9 excluent les renseignements que le défendeur cherchait à protéger dans le cadre de la présente demande de la portée de l’art. 87 — Les modifications apportées aux art. 86 et 87 avaient pour but de rendre la procédure applicable aux instances en interdiction de territoire et autres instances en immigration mettant en cause des renseignements secrets ou classifiés — Il existe une différence importante entre, d’un côté, les renseignements confidentiels, secrets, très secrets ou classifiés visés par différentes lois concernant la sécurité nationale et, de l’autre côté, les renseignements confidentiels ou personnels visés par les lois sur la protection de la vie privée et des renseignements personnels — Le type de renseignement protégé aux termes de l’art. 87 n’est jamais communiqué au résident permanent ou au citoyen étranger et il est utilisé lors de procédures exceptionnelles devant la Cour — L’art. 87 offre aux renseignements secrets ou classifiés une couche de protection robuste et unique qui n’est généralement pas offerte aux renseignements confidentiels ou personnels protégés par les lois sur la protection de la vie privée ou des intérêts commerciaux — L’agent des visas n’était pas préoccupé par des questions de protection de la sécurité nationale, mais plutôt par la protection du droit à la vie privée — L’application de l’art. 87 se limite notamment aux renseignements relatifs à l’identité des personnes faisant l’objet d’une surveillance, aux moyens techniques et aux sources de la surveillance, et au mode opérationnel — Le législateur entendait limiter la « sécurité d’autrui » aux personnes qui pourraient être touchées par la divulgation de renseignements secrets ou classifiés — Il existe d’autres façons de protéger les renseignements personnels et confidentiels, notamment au moyen d’une ordonnance de confidentialité rendue aux termes de la règle 151 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 — L’interprétation de l’art. 87 avancée par le défendeur pourrait mener à un abus, et en bout de ligne influer sur des différends internationaux pour la garde d’enfants — Le défendeur n’a pas convaincu la Cour que la divulgation des éléments de preuve caviardés porterait atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d’autrui — Requête rejetée.
X c. Canada (Citoyenneté et Immigration) (CONF-4-20, 2020 CF 864, juge Gagné, motifs d’ordonnance en date du 24 juin 2020, 19 p.)