[2022] 2 R.C.F. F-27
COURONNE
Sujet connexe : GRC
Contrôle judiciaire de la décision du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile rejetant la demande d’indemnisation du demandeur au titre de la Politique sur les services juridiques et l’indemnisation du Conseil du Trésor (la Politique) — Le demandeur est un ancien membre de la Gendarmerie royale du Canada — En 2009, la GRC a reçu des informations selon lesquelles le demandeur entretenait une relation avec un témoin protégé, ce qui a donné lieu à une enquête — En 2019, le demandeur a plaidé coupable d’abus de confiance et d’entrave à la justice — La Politique prévoit une assistance juridique et une indemnisation pour les fonctionnaires de l’État faisant l’objet de réclamations juridiques liées à leur emploi — La première demande de services juridiques aux frais de l’État (SJFE) du demandeur a été approuvée en 2010 pour la phase de consultation initiale d’une procédure criminelle — En 2012, le demandeur a fait une demande de SJFE pour la phase du procès des accusations criminelles — Cette demande a été rejetée par la GRC — Le décideur a refusé l’autorisation de rétablir la SJFE — En 2018, le demandeur a présenté des factures pour des services juridiques dépassant 50 000 $ — La GRC a demandé au ministre de prendre une décision sur une nouvelle demande de SJFE présentée par le demandeur, déclarant qu’il n’est pas dans l’intérêt public de l’approuver — Le demandeur ne répondait pas aux critères d’admissibilité de la Politique — La question principale était de savoir si la procédure d’examen concernant la demande de SJFE était équitable — Le fait que la GRC n’ait pas transmis au ministre tous les documents soumis par le demandeur dans le cadre de la demande de SJFE au cours de la phase d’instruction constitue une violation de l’équité procédurale — La Politique stipulant, entre autres, que le décideur doit « s’assurer que les fonctionnaires de l’État qui demandent des services juridiques ou une indemnisation en vertu de la présente politique obtiennent une réponse à leur demande en temps opportun, et s’assurer que les plaintes et les menaces de poursuites sont traitées rapidement » (soulignement ajouté) — Les questions de retard excessif relèvent de la doctrine de l’abus de procédure — L’opportunité de la réponse ne nécessite pas un examen approfondi de la question de savoir si la décision a été prise dans le cadre d’une procédure équitable et ouverte, adaptée à la décision prise et à son contexte statutaire, institutionnel et social — Soit la réponse a été reçue en temps utile, soit elle ne l’a pas été — Le besoin de s’assurer que le décideur dispose de tous les documents relatifs à la demande de SJFE afin de prendre une décision en toute connaissance de cause est une exigence fondamentale pour garantir l’équité du processus décisionnel — La procédure de réclamation a duré près de cinq ans — Il a fallu plus de sept ans pour que la demande de SJFE parvienne au décideur approprié, c’est-à-dire au ministre — La GRC n’était pas le décideur approprié en 2012, lorsque la demande de SJFE pour le financement du procès a été initialement rejetée — Il ne fait aucun doute que le délai de sept ans pour soumettre la demande de SJFE au décideur approprié était excessif — Le fait que la demande n’ait été soumise à l’approbation du ministre qu’après que le demandeur a plaidé coupable a été le plus préjudiciable au demandeur — La Politique n’indique nulle part que le décideur doit attendre l’issue de la procédure avant de prendre une décision sur le financement des SJFE — Le fait que la GRC et le ministre se soient appuyés sur le plaidoyer de culpabilité du demandeur pour justifier qu’il ne répondait pas aux objectifs de la politique en matière de financement des SJFE était injuste sur le plan de la procédure — Le retard était contraire à la Politique et a mis le demandeur en danger sur le plan juridique — Le dossier certifié du Tribunal a démontré que certains documents, tels que les rapports psychologiques permettant de comprendre l’état d’esprit du demandeur au moment de la procédure pénale, n’ont pas été transmis au ministre — La GRC avait l’obligation, en vertu de la Politique, de transmettre au ministre toutes les informations soumises par le demandeur dans le cadre de la demande de SJFE — Le fait que la GRC n’ait pas transmis tous les documents constituait une violation de l’équité procédurale — La décision a été annulée, la demande de SJFE du demandeur a été renvoyée au ministre pour une nouvelle décision — Demande accueillie.
Brassington c. Canada (Procureur général) (T-1785-19, 2023 CF 695, juge McDonald, motifs du jugement en date du 18 mai 2023, 28 p.)