64 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1943 1941 BETWEEN: Oct. 29. ERICH RITCHER SUPPLIANT 1943 AND Feb. 5. — HIS MAJESTY THE KING RESPONDENT. Crown—Petition of Right—Custodian—Consolidated Orders—Treaty of Peace (Germany) Order 19.20. The suppliant seeks to recover from the Crown a certain sum with interest, which the Custodian of Enemy Property had under his control and which was realized from the sale of certain shares at one time the property of the suppliant. Suppliant states, in substance, that from 1910 to 1913 he resided in Canada with his family; that he had acquired shares of Spanish River Pulp & Paper Company and three shares of Bell Telephone Company which later increased to five shares. In 1913 he returned to Germany, his country of origin, to work, and was kept there during the war. In 1927 the Custodian placed under his custody suppliant's shares in the above companies. He sold the shares of Spanish River Pulp & Paper Company and one share of Bell Telephone Company, receiving $1,811 68 therefor. He further realized $39 from shares not sold, by way of dividends, which the suppliant claims the Custodian had no right to receive. In 1928 suppliant returned to Canada and in 1934 he was naturalized. Four of the Bell Telephone Company shares not sold were returned to Germany and delivered to suppliant. The suppliant adds interest to his claim and asks for judgment in the sum of $3,366 78. Respondent claims the Petition of Right is unfounded in law and in fact, because: (a) No remedy is asked against His Majesty the King. (b) No fact is alleged giving rise to right of action against His Majesty the King, and (c) That the Petition of Right does not he, even if some right to recover exists. Without prejudice to his defence in law he alleged inter alia
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 65 that save for 4 Bell Telephone Company shares returned to Germany 1943 pursuant to agreement with the said country and which were by it E $ returned to suppliant, the shares in question were sold by the Cus- RITCHER todian and realized $1,128.65. That until 1934 suppliant was a citizen v. of Germany and therefore an enemy since the opening of hostilities in THE KING. 1914. That by virtue of the consolidated orders regarding trading with the enemy, The Treaty of Versailles of 1919 and the Treaty of Peace (Germany) Order 1920, suppliant was deprived of all right, title and interest in the said shares, which thereby became vested in the Custodian of Enemy Properties and their sale as aforesaid was legally exercised and suppliant cannot now ask to have them returned to him, or the revenue received therefrom; that the facts alleged do not give rise to any claim against His Majesty the King and no Petition of Right lies in the premises. Held: That by Order in Council P.C. 755, of 14th April, 1920, all property in Canada belonging to an enemy on the 10th January, 1920, became the property of Canada and was vested m the Custodian, and no action could be instituted by an enemy to recover his property so vested without the written consent of the Custodian. 2. That money received by the Custodian forms no part of the Consolidated Revenue Fund of Canada. It must be held by the Custodian and credited as provided by the Consolidated Orders. After payment by the Custodian of amounts due to British subjects residing in Canada, by German Nationals or by Germany, the balance only becomes the property of Canada. 3. That the Custodian is in possession of the property, rights and interests of enemies as such and not as representative or employee of the Crown, and that the Petition of Right does not lie in the premises. ARGUMENT on questions of law concerning the claim of the suppliant to recover from the Crown the proceeds of certain securities sold by the Custodian of Enemy Property. The argument was heard before the Honourable Mr. Justice Angers, at Ottawa. T. L. Bergeron K.C. for suppliant. Aime Geoffrion, K.C. for respondent. The facts and questions of law raised are stated in the reasons for judgment: Par sa pétition de droit en date du 9 février 1938, dont l'original a été produit au greffe de cette Cour le 21 mai 1940 et dont une copie conforme portant sur l'endos un accusé de réception de la part du Procureur Général a été déposée au dossier le 7 août 1940, le pétitionnaire réclame de Sa Majesté le Roi la somme de $3,366.78, avec intérêt depuis la date de la pétition, et les dépens. 74912-4a
66 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1943 1943 The learned Judge here refers to the pleadings and ERICH continues : RITCHER V. La présente action a été fixée pour audition sur les ques- THE KING tions de droit soulevées dans la défense par ordonnance en Angers J date du 15 octobre 1941, conformément aux dispositions de la règle 149 des règles et ordonnances de cette Cour. La juridiction de cette Cour découle de l'article 18 de la Loi de la Cour de l'Echiquier (S.R.C. 1927, ch. 34), lequel se lit comme suit: 18. La cour de l'Echiquier a juridiction exclusive en première instance dans tous les cas où une demande est faite ou un recours est recherché au sujet de toute matière qui pourrait, en Angleterre, faire le sujet d'une poursuite ou action contre la Couronne; et pour plus de certitude, mais non pas de manière à restreindre la généralité des termes ci-dessus, elle a juridiction exclusive en première instance dans tous les cas où des terrains, effets ou deniers du sujet sont en la possession de la Couronne, ou dans lesquels la réclamation provient d'un contrat passé par la Couronne ou en son nom, Le procureur de l'intimé a invoqué les trois points sui-vants, savoir: le " séquestre " ou " gardien " des propriétés ennemies (" curateur " dans le décret concernant le traité de paix avec l'Allemagne, 1920) n'est pas un employé ou serviteur de la Couronne; le fût-il, ce qu'il a fait en l'espèce ne donnerait pas de recours contre la Couronne; au surplus ce qu'il a fait est conforme à la loi. La prétention de l'intimé que le pétitionaire n'a point de réclamation pour le recouvrement des actions de Spanish River Pulp & Paper Company et de Bell Telephone Company qu'il détenait au moment de son départ pour l'Alle-magne en 1913 ou de leur produit est principalement basée sur le Traité de Paix intervenu entre les Puissances alliées et associées, au nombre desquelles était le Canada, et l'Alle-magne, fait et signé à Versailles le 28 juin 1919. La partie du traité qui nous intéresse particulièrement est la section IV intitulée " Biens, droits et intérêts "; cette section contient deux articles (297 et 298) et une annexe de quinze paragraphes. Certaines dispositions de l'article 297 et quelques paragraphes de l'annexe sont pertinents; j'en citerai la partie essentielle. L'article 297 du traité stipule, entre autres, ce qui suit: La question des biens, droits et intérêts privés en pays ennemi recevra sa solution conformément aux principes posés dans la présente section et aux dispositions de l'Annexe ci-jointe.
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 67 b) Sous réserve des dispositions contraires qui pourraient résulter du 1943 présent Traité, les Puissances alliées ou associées se réservent le droit de retenir et de liquider tous les biens, droits et intérêts appartenant, à la EsIHH IZITCHE$ date de la mise en vigueur du présent Traité, à des ressortissants alle- v. mands ou des sociétés contrôlées par eux sur leur territoire, dans leurs THE KING. colonies, possessions et pays de protectorat, y compris les territoires qui Angers J. leur ont été cédés en vertu du présent Traité. La liquidation aura lieu conformément aux lois de l'Etat allié ou associé intéressé et le propriétaire allemand ne pourra disposer de ces biens, droits et intérêts, ni les grever d'aucune charge, sans le consente-ment de cet Etat. Ne seront pas considérés, au sens du présent paragraphe, comme ressor-tissants allemands, les ressortissants allemands qui acquièrent de plein droit la nationalité d'une Puissance alliée ou associée, par application du présent Traité. d) Dans les rapports entre les Puissances alliées ou associées ou leurs ressortissants d'une part, et l'Allemagne ou ses ressortissants d'autre part, seront considérées comme définitives et opposables à toute personne, sous les réserves prévues au présent Traité, toutes mesures exceptionnelles de guerre ou de disposition, ou actes accomplis ou à accomplir en vertu de ces mesures, telles qu'elles sont définies dans les paragraphes 1 et 3 de l'Annexe ci-jointe. La partie pertinente du paragraphe 1 de l'annexe est ainsi conçue: Aux termes de l'article 297, paragraphe d), est confirmée la validité de toutes mesures attributives de propriété, de toutes ordonnances pour la liquidation d'entreprises ou de sociétés ou de toutes autres ordonnances, règlements, décisions ou instructions rendues ou données par tout tribunal ou administration d'une des Hautes Parties Contractantes ou réputées avoir été rendues ou données par application de la législation de guerre concernant les biens, droits ou intérêts ennemis. Les intérêts de toutes personnes devront être considérés comme ayant valablement fait l'objet de tous règlements, ordonnances, décisions ou instructions concernant les biens dans lesquels sont compris les intérêts dont il s'agit, que ces Intérêts aient été ou non expressément visés dans lesdits ordonnances, règlements, décisions ou instructions. Il ne sera soulevé aucune contestation relative-ment à la régularité d'un transfert de biens, droits ou d'intérêts effectué en vertu des réglements, ordonnances, décisions ou instructions susvisés. Est également confirmée la validité de toutes mesures prises à l'égard d'une propriété, d'une entreprise, ou société, qu'il s'agisse d'enquête, de séquestre, d'administration forcée, d'utilisation, de réquisition, de surveillance ou de liquidation, de la vente, ou de l'administration des biens, droits et intérêts, du recouvrement ou du payement des dettes, du payement des frais, charges, dépenses ou de toutes autres mesures quelconques effectuées en exécution d'ordonnances, de règlements, de décisions ou d'instructions rendues, données ou exécutées par tous tribunaux mi administration d'une des Hautes Parties Contractantes ou réputées avoir été rendues, données ou exécutées par application de la législation exceptionnelle de guerre con-cernant les biens, droits ou intérêts ennemis, ... Le paragraphe 3 de l'annexe se lit comme suit: Dans l'article 297 et la présente Annexe, I'expression `mesures excep-tionnelles de guerre' comprend les mesures de toute nature, législatives, 74912-4?a
68 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1943 1943 administratives, judiciaires ou autres prises ou qui seront prises ultérieu-rement à l'égard de biens ennemis et qui ont eu ou auront pour effet, sans EaICH RITCHEu affecter la propriété, d'enlever aux propriétaires la disposition de leurs V. biens, notamment les mesures de surveillance, d'administration forcée, de THE KING. séquestre, ou les mesures qui ont eu ou auront pour objet de saisir, d'uti-liser ou de bloquer les avoirs ennemis, et cela pour quelque motif, sous Angers J. quelque forme et en quelque lieu que ce soit... Les ' mesures de disposition' sont celles qui ont affecté ou affecteront la propriété des biens ennemis en en transférant tout ou partie à une autre personne que le propriétaire ennemi et sans son consentement, notamment les mesures ordonnant la vente, la liquidation, la dévolution de propriété des biens ennemis, l'annulation des titres ou valeurs mobilières. L'article 297 du traité stipule, en outre, ce qui suit: h) Sauf le cas où, par application du paragraphe f), des restitutions en nature ont été effectuées, le produit net des liquidations de biens, droits et intérêts ennemis où qu'ils aient été situés, faites soit en vertu de la législation exceptionnelle de guerre, soit par application du présent article et généralement tous les avoirs en numéraire des ennemis recevront l'affectation suivante: 1° En ce qui concerne les Puissances adoptant la Section III et l'Annexe jointe, lesdits produits et avoirs seront portés au crédit de la Puissance dont le propriétaire est ressortissant, par l'intermédiaire de l'Office de vérification et de compensation institué par lesdites Section et Annexe; tout solde créditeur en résultant en faveur de l'Allemagne sera traité conformément à l'article 243. 2° En ce qui concerne les Puissances n'adoptant pas la Section III et l'Annexe jointe, le produit des biens, droits et intérêts et les avoirs ea numéraire des ressortissants des Puissances alliées ou associées, détenus par l'AlIemagne sera immédiatement payé à l'ayant droit ou à son Gouver-nement. Chaque Puissance alliée ou associée pourra disposer du produit des biens, droits et intérêts et des avoirs en numéraire des ressortissants allemands qu'elle a saisis conformément à ses lois et règlements et pourra l'affecter au payement des réclamations et créances définies par le présent article ou par le paragraphe 4 de l'Annexe ci-jointe. Tout bien, droit ou intérêt ou produit de la liquidation de ce bien ou tout avoir en numéraire dont il n'aura pas été disposé conformément à ce qui est dit ci-dessus, peut être retenu par ladite Puissance alliée ou associée, et, dans ce cas, sa valeur en numéraire sera traitée conformément à l'article 243... L'article 243 ci-dessus mentionné décrète, entre autres, ce qui suit: Seront portés au crédit de l'Allemagne, au titre de ses obligations de réparer, les éléments suivants: a) Tout solde définitif en faveur de l'Allemagne visé à la Section V (Alsace-Lorraine) de la Partie III (Clauses politiques européennes) et aux Sections III et IV de la Partie X (Clauses économiques) du présent Traité; La partie importante du paragraphe 4 de l'annexe, lequel ne me semble offrir aucun intérêt en l'espèce, peut être citée pour compléter l'exposé de la loi concernant la disposition des biens, droits et intérêts en Canada appartenant à des ennemis:
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 69 Les biens, droits et intérêts des ressortissants allemands dans les terri-1943 toires d'une Puissance alliée ou associée ainsi que le produit net de leur cri vente, liquidation ou autres mesures de disposition, pourront être grevés RRI RYTC H UE R par cette Puissance alliée ou associée: en premier lieu, du payement des y. indemnités dues à l'occasion des réclamations des ressortissants de cette THE KING. Puissance concernant leurs biens, droits et intérêts y compris les sociétés Angers J. ou associations dans lesquelles ces ressortissants étaient intéressés en terri-toire allemand ou des créances qu'ils ont sur les ressortissants allemands ainsi que du payement des réclamations introduites pour des actes commis par le Gouvernement allemand ou par toute autorité allemande postérieu-rement au 31 juillet 1914 et avant que cette Puissance alliée ou associée ne participât à la guerre... Ils pourront être grevés, en second lieu, du payement des indemnités dues à l'occasion des réclamations des ressortis-sants de la Puissance alliée ou associée concernant leurs biens, droits et intérêts sur le territoire des autres Puissances ennemies, en tant que ces indemnités n'ont pas été acquittées d'une autre manière. Ce traité de paix a été mis en vigueur au moyen d'une loi sanctionnée le 10 novembre 1919, intitulée " Loi des Traités de paix, 1919 " (10 George V, chap. 30) et d'un arrêté appelé " Arrêté du Traité de paix (Allemagne), 1920 ", passé le 14 avril 1920. Cette loi contient, entre autres, les dispositions suivan-tes: 1. (1) Le Gouverneur en conseil peut faire les nominations, établir les bureaux, décréter les arrêtés en conseil, et accomplir les choses qui lui paraissent nécessaires pour la mise en vigueur desdits traités, et pour donner effet à l'une quelconque des dispositions desdits traités. (2) Tout arrêté en conseil décrété sous le régime de la présente loi peut statuer sur l'imposition par voie sommaire, ou d'autre façon, des peines qui se rattachent aux infractions aux dispositions dudit traité, et doit être déposé devant le Parlement le plus tôt que faire se peut après qu'il est décrété, et avoir effet comme s'il était édicté en la présente loi, mais il peut être changé ou révoqué par un arrêté en conseil subséquent. Je noterai en passant qu'une loi n'était pas nécessaire pour mettre en vigueur le Traité de paix entre les Puis-sances alliées et associées et l'Allemagne, dont il s'agit en l'espèce; un traité de paix fait loi par lui-même, indépen-damment de toute législation à ce sujet: Secretary of State of Canada and Custodian v. Alien property Custodian for the United States of America (1) . Conformément à la Loi des Traités de paix, 1919'susdite un arrêté relatif au Traité de paix avec l'Allemagne (C.P. 755) a été adopté le 14 avril 1920. Cet arrêté comprend, outre son préambule dans lequel est contenue la définition de l'expression " le Curateur ", cinq parties intitulées res-pectivement " Dettes et office de vérification et de compensation ", " Biens, droits et intérêts ", " Contrats, pres- (1) [19317 S.L.R. 170, 198.
70 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1943 1943 criptions, jugements ", " Propriété industrielle " et " Clauses ERIcx générales ". La partie qui nous intéresse est la deuxième: RUCHER " v. Biens, droits et intérêts " . THE KING. L'article 32, compris dans cette deuxième partie, définit Angers J. l'expression " ennemi " y contenue; il me semble à propos de citer le passage pertinent de cette définition: (1) ̀Ennemi' signifie (a) Un ressortissant allemand qui pendant la guerre a résidé ou exercé son industrie dans le territoire d'une puissance en guerre avec Sa Majesté; (e) Tout autre ressortissant allemand que le Gouverneur en Conseil déclare être un ennemi. pourvu qu'un ressortissant allemand qui a acquis ipso facto, conformément aux dispositions du Traité, la nationalité d'une Puissance alliée ou associée pendant la guerre avec Sa Majesté ne soit pas considéré ressortissant allemand au sens de la présente partie. L'article 33 décrète' ce qui suit: " Tous biens, droits et intérêts en Canada appartenant aux ennemis le 10e jour de janvier 1320, ou appartenant jusque-là aux ennemis et en la possession ou sous le contrôle du Curateur à la date du présent arrêté, appartiendront au Canada et seront par les présentes attribués au Curateur. (2) Nonobstant toute disposition d'un arrêté antérieur attribuant au Curateur des biens, droits ou intérêts quelconques appartenant antérieure-ment à un ennemi, tels biens, droits ou intérêts appartiendront au Canada, et le Curateur les détiendra aux mêmes conditions et avec les mêmes pou-voirs et devoirs, en ce qui les concerne, que les biens, droits et intérêts à lui attribués par le présent arrêté." L'article 35 décrète, entre autres: " Aucune réclamation ou action n'est recevable de l'Allemagne ou de ses ressortissants, en quelque lieu qu'ils aient leur résidence, contre Sa Majesté ou contre une personne quelconque agissant au nom et sous les ordres de toute juridiction ou administration du Gouvernement du Canada, relativement à tout acte ou toute omission concernant les biens, droits ou intérêts des ressortissants allemands Est également irrecevable toute réclamation ou action contre toute personne à l'égard de tout acte ou omission résultant des mesures exceptionnelles de guerre, mesures de transfert ou autres lois ou règlements du Canada. (2) Dans l'article précédent et le présent article l'expression ' mesures exceptionnelles de guerre' comprend les mesures de toute nature, législa-tives, administratives, judiciaires ou autres prises ou qui seront prises ultérieurement à l'égard de biens ennemis et qui ont eu ou auront pour effet, sans affecter la propriété, d'enlever au propriétaire la disposition de ses biens, ... Les ' mesures de transfert' sont celles qui ont affecté la propriété de tous biens ennemis en les transférant en totalité ou en partie à une personne autre que tel ennemi, et sans son consentement, comme les mesures ordonnant la vente, la liquidation ou la dévolution de biens ennemis, ou l'annulation de titres ou valeurs... Un autre article pertinent de l'arrêté est l'article 41; je crois opportun d'en citer les dispositions suivantes:
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Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 71 (2) Au cas de contestation quant à savoir si des biens, droits ou 1943 intérêts appartenaient à un ennemi le 10e jour de janvier 1920 ou avant ERICH cette date, le Curateur ou, avec le consentement du Curateur, le réclamant RITCHER peut demander à la Cour de l'Echiquier du Canada une déclaration quant v. à la propriété de ces biens, droits ou intérêts, nonobstant qu'ils aient été THE KING attribués au Curateur par un ordre antérieurement donné, ou que le Cura- Angers J. teur en ait disposé au ait convenu d'en disposer. Le consentement du Curateur à toute poursuite par un réclamant sera par écrit et pourra être donné sous réserve de telles conditions que le Curateur juge à propos. (3) Si la Cour de l'Echiquier déclare que les biens, droits ou intérêts n'appartenaient pas à un ennemi ainsi que prévu au paragraphe précédent, le Curateur s'en dessaisira, ou, si le Curateur, avant cette déclaration, a, disposé ou convenu de disposer des biens, droits ou intérêts, il en cédera le produit. Il ressort de ces dispositions de l'arrêté du traité de paix avec l'Allemagne (C.P. 755) que les biens appartenant le 10 janvier 1920 à un ennemi, au sens de l'article 32 dudit arrêté, deviennent la propriété du Canada et sont attribués au Curateur. Aucune action ne peut être intentée par un ennemi pour le recouvrement de ces biens sans le consen-tement écrit de celui-ci (article 41). L'article 47 de l'arrêté pourvoit à la disposition des biens d'un ennemi; il est ainsi conçu: Le Curateur peut disposer de tous biens, droits ou intérêts en tels temps et endroits et à telle personne ou telles personnes et à telles conditions et de telle manière, soit publiquement, soit privément, qu'en sa discrétion, il juge à propos. L'article 49 détermine la façon dont le Curateur doit créditer à l'Allemagne par l'entremise de l'Office de Compensation constitué par la partie I de l'arrêté (article 4) ; le premier paragraphe de l'article 49 se lit comme suit: Le Curateur créditera à l'Allemagne, par l'entremise de l'Office de Compensation établi par la Partie I du présent arrêté, toutes sommes jusqu'ici appartenant aux ennemis et en sa possession ou sous son contrôle à la date du présent arrêté, ainsi que le produit net de la vente de tous biens, droits ou intérêts qui lui sont attribués, et il agira conformément au traité relativement à toute balance ou crédit de l'Allemagne résultant de tels crédits ou des opérations de l'Office de Compensation sous le régime de la Partie I du présent arrêté et relativement à toutes sommes payées au Curateur sous le régime des articles 10 ou 11 pour lesquelles aucune récla-mation n'est faite par l'entremise de l'Office de Compensation allemand, ou qui ne sont pas créditées à l'Office de Compensation allemand. L'Office de Compensation dont il est ici fait mention, est créé par l'article 4 de l'arrêté, qui se lit en partie comme suit: Est par les présentes établi dans et pour le Canada, sous le contrôle et la direction du Curateur, un office local de vérification et de compensation
72 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1943 1943 (ci-après désigné sous le nom de Office de Compensation') qui agira comme office central pour le Canada ainsi que prescrit ci-dessous, et qui R M I u C o H n E R conduira toutes les transactions avec l'Office de Compensation allemand v. par l'entremise d'un office de vérification et de compensation central (ci- THE KING. après désigné sous le nom de ` Office central de Vérification et de Compen- Angers J. sation') établi dans le Royaume-Uni. L'article 89, compris dans la partie V de l'arrêté, intitulé " Clauses générales ", ordonne le dépôt chez le Receveur général du Canada des sommes reçues par le Curateur et leur paiement sur l'ordre du Secrétaire d'Etat; cet article se lit ainsi: Toutes les sommes jusqu'ici ou dorénavant reçues par le Curateur seront déposées chez le Receveur général du Canada et seront payées sur l'ordre du Secrétaire d'Etat, tel que prescrit par le présent arrêté. L'argent perçu par le Curateur ne fait pas partie du fonds consolidé du Canada. Il doit être détenu par le Curateur et par lui crédité tel que ci-dessus prévu. Seul ira au Canada le solde qu'il aura entre les mains après paiement de toutes les créances de sujets britanniques résidant en Canada contre des ressortissants allemands ou contre l'Allemagne. En vertu des dispositions du traité, les biens apparte-nant à des ressortissants allemands sur le territoire du Canada, à la date de la mise en vigueur du traité, savoir pour le Canada le 14 avril 1920, jour où a été décrété l'Arrêté du Traité de paix (Allemagne), 1920 conformé-ment à la Loi des Traités de paix, 1919 (10 Geo. V, chap. 30), pouvaient être retenus et liquidés par le Canada; c'est ce qui a été fait, sauf pour quatre actions de Bell Telephone Company qui ont été envoyées au gouvernement allemand et par ce dernier retournées au pétitionnaire, tel qu'admis au paragraphe 9 de sa réponse à la défense. Le procureur du pétitionnaire a prétendu qu'en vertu de la Loi des mesures de guerre, 1914 (5 George V, chap. 2) les pouvoirs du Gouverneur en conseil comprennent, entre autres, la prise de possession, le contrôle, la confiscation et la disposition des biens et de leur usage; ceci découle du sous-paragraphe (f) du premier paragraphe de l'article 6 de la loi. La partie pertinente du premier paragraphe et le sous-paragraphe (f) se lisent ainsi: 6. Le Gouverneur en Conseil a le pouvoir de faire et autoriser tels actes et choses et de faire de temps à autre tels ordres et règlements qu'il peut, à raison de l'existence réelle ou appréhendée de la guerre, d'une invasion ou insurrection, juger nécessaires ou à propos pour la sécurité, la
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 73 défense, la paix, l'ordre et le bien-être du Canada; et pour plus de certi-1943 tude, mais non pas pour restreindre la généralité des termes qui précèdent, il est par la présente déclaré que les pouvoirs du Gouverneur en Conseil EsIc a BITCHES s'étendront à toutes les matières tombant dans la catégorie des sujets ci-v. après énumérés, savoir:— THE KING. f) la prise de possession, le contrôle, la confiscation et la disposition Angers J. de biens et de leur usage. --- Le procureur du pétitionnaire a ajouté que ces pouvoirs ne devaient être en vigueur que pour la durée de la guerre aux termes de l'article 3, qui est ainsi conçu: 3. Les dispositions des articles 6, 10, 11 et 13 de la présente loi ne seront en vigueur que durant la guerre, l'invasion, ou l'insurrection, réelle ou appréhendée. Je ne crois pas que la Loi des mesures de guerre, 1914 régisse le cas qui nous occupe; c'est le Traité de paix du 28 juin 1919 et l'Arrêté du Traité de paix (Allemagne) 1920 (C.P. 755) qui s'appliquent. Le procureur du pétitionnaire a soutenu que le Curateur ne pouvait disposer des biens d'un ennemi si ceux-ci n'avaient pas été saisis et confisqués conformément à la loi. Le Curateur n'avait pas de procédure à faire pour saisir et confisquer les biens du pétitionnaire dont il s'agit en cette cause; ces biens lui étaient attribués automati-quement en vertu de l'article 33 du décret. Le procureur du pétitionnaire a plaidé en outre qu'un accord entre le gouvernement du Canada et le Reich alle-mand a été signé à La Haye le 14 janvier 1930 et qu'il a été ratifié par le parlement. En fait, cet accord a été approuvé par un arrêté en conseil passé le 5 mars 1930 (C.P. 457), lequel a été suivi d'un instrument de ratification en date du 21 juillet 1930. Vu que cet arrêté en conseil n'a pas été publié dans la Gazette du Canada, il me semble à propos de le reproduire ici: The Committee of the Privy Council have had before them a Report, dated 25th February, 1930, from the Secretary of State, submitting that ft was provided by Article 297 of the Treaty between the Allied and Associated Powers and Germany signed at Versailles on the 28th June, 1919, that Canada, being one of the Allied and Associated Powers therein referred to, has the right to attain and liquidate all property, rights and interests in Canada belonging at the date of the coming into force of the said Treaty to nationals of the German Reich; That it is provided by Section 4 of the Annex following Article 298 of the said Treaty that all property, rights and interests in Canada of nationals of the German Reich, and the proceeds of their sale or dealings therein may be charged by Canada in the first place with payment of amounts due in respect of claims by Canadian nationals with regard to property, rights and interest,
74 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1943 1943 including companies and associations in which they are interested in the German Reich or debts owing to them by German nationals; That, in ERICH RITCHER pursuance of the aforesaid provisions in the said Treaty, the Canadian Custodian of Enemy Property, hereinafter called " The Custodian, " took THE KING into his possession certain property, rights and interests in Canada of German nationals, and charged thereon certain claims of Canadian na-Angers J tionals. as provided for by the said Treaty; That the Allied and Associated Powers and the Government of the German Reich, by a Protocol dated the 31st August, 1929, and signed at the Hague, adopted in principle, subject to certain reservations, the Report of the'Committee of Experts generally known as the "Young Plan; " That certain of the property, rights and interests in Canada of German nationals remain unliquidated; That the Government of Canada adheres to the recommendation contained in Article 144 of the Report, dated June 7th, 1929, of the Committee of Experts, and that an Agreement with the Government of the German Reich for putting into force this recommendation in so far as it relates to the return to the German owners of their property, rights and interests not liquid, liquidated or finally disposed of, has been signed on behalf of the Government of Canada by the late the Honourable Peter Larkin, formerly High Commissioner for Canada in London, and on behalf of the German Reich by the Ministerial director de Haas. The Committee, on the recommendation of the Secretary of State, advise that the Agreement above referred to, a copy of which is attached hereto, for the purpose of carrying into effect the return of unliquidated property, as recommended by the Young Plan in the paragraphs of the Report relating to " The Liquidation of the Past," dated the 7th of June, 1929, and the Protocol dated 31st August, 1929, be approved and confirmed. Le procureur du pétitionnaire a invoqué particulière-ment l'article premier de cet accord, dont je crois opportun de reproduire le texte: Sous réserve des dispositions et des stipulations des articles ci-après, le Gouvernement canadien libérera et, le cas échéant, retransférera aux propriétaires allemands primitifs ou à leurs ayants -cause, les biens, droits et intérêts qui leur appartenaient originairement et qui sont actuellement grevés du privilège constitué en vertu du Traité de Versailles, pour autant que lesdits biens, droits et intérêts n'étaient pas déjà liquides ou liquidés ou qu'il n'en avait pas été disposé définitivement à la date du 7 juin 1929. Seuls, les biens, ci-après définis seront considérés comme des biens liquides ou liquidés ou comme des biens dont il avait été disposé défini-tivement à cette date:— a) Les valeurs mentionnées dans l'ordonnance du Gouvernement du Canada N° 114 du 19 janvier 1923 et dont l'administrateur a dis-posé conformément à ladite ordonnance. b) Les biens au sujet desquels l'administrateur canadien a conclu antérieurement au 7 juin 1929 un contrat de vente ayant force obligatoire et étant entendu toutefois que, dans ce cas, le produit de la vente payable après cette date et remise entre les mains de l'administrateur sera transféré au Gouvernement allemand agis-sant comme représentant des anciens propriétaires. c) Les dettes auxquelles s'appliquent les dispositions de l'article 297 du Traité de Versailles pour autant qu'elles ont été recouvrées à cette date par un fonctionnaire ou un mandataire du Gouverne-ment canadien.
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 75 Je dois dire que ce texte est une traduction, faite par le 1943 Bureau des Traducteurs d'Ottawa, l'accord en question ERICH ayant été fait en allemand et en anglais exclusivement. Je RITIER n'ai pas cru devoir en vérifier l'exactitude; je présume THE KING. qu'elle contient la substance du texte original. Je noterai AngersJ. cependant qu'au lieu de traduire le mot " Custodian " du texte anglais par le mot " Curateur " dont on s'est servi dans l'arrêté en conseil (C.P. 755) on a cru devoir utiliser le mot " Administrateur ". Je ferai remarquer incidem-ment que ces variétés de traduction devraient être évitées: elles sont susceptibles d'embrouiller nos lois qui n'en ont pas besoin. Le préambule de cet accord contient, entre autres, les dispositions suivantes: Considérant, d'autre part, que, en exécution des dispositions précitées dudit traité (article 297 et paragraphe 4 de l'annexe), l'administrateur canadien des biens ennemis, ci-après dénommé l'Administrateur ', a pris possession de certains biens, droits et intérêts appartenant à des ressortis-sants allemands au Canada et les a grevés d'un privilège en faveur de certaines réclamations de ressortissants canadiens, comme il est prévu dans ledit traité; Et que le Gouvernement du Reich allemand et les Puissances alliées et associées ont, par un Protocole daté du 31 août 1929 et signé à La Haye, adopté en principe, mals avec certaines réserves, le rapport du comité d'experts généralement connu sous le nom de 'Plan Young'; Considérant, enfin, que certains biens, droits et intérêts, appartenant à des ressortissants allemands au Canada n'ont pas encore été liquidés; Que le Gouvernement du Canada accepte la recommandation contenue à l'article 144 du rapport du Comité d'experts en date du 7 juin 1929 et désire conchu-e immédiatement un accord avec le Gouvernement du Reich allemand en vue de donner suite à cette recommandation, pour autant qu'elle a trait à la restitution aux ayants-droit allemands de leurs biens, droits et intérêts, qui ne sont pas déjà liquides ou liquidés ou dont il n'a encore été disposé définitivement; Et que le Gouvernement allemand prend l'engagement de répartir ces biens non liquidés entre les divers ayants-droit, ressortissants du Reich allemand. Je ne crois pas que l'accord susdit ait d'application en l'espèce vu qu'au moment de son exécution les actions du pétitionnaire qui sont l'objet de la présente pétition avaient été liquidées par le Curateur, tel qu'il ressort du paragra-phe 3 de la pétition et de la lettre pièce 1 31-, partie inté-grante du paragraphe 9 de la réponse à la défense. Au surplus, je crois à propos de faire remarquer que le gouvernement du Canada, en vertu de l'accord, doit régler cette question des biens non encore liquidés appartenant à des Allemands avec le Reich allemand et non avec les sujets allemands.
76 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1943 1943 Le pétitionnaire était le 10 janvier 1920 un ennemi et ERICH l'est demeuré jusqu'à la date de sa naturalisation en 1934. RITCHER Z. Les actions qui appartenaient au pétitionnaire à cette THE KING. date sont devenues la propriété du Canada et ont été Angers J. attribuées au Curateur en vertu des dispositions de l'article — 297 du traité et des paragraphes 1 et 3 de l'annexe y relatif et de celles de l'article 33 de l'arrêté (C.P. 755) Le Cura-teur a disposé de ces actions comme il avait le droit de le faire tant en vertu du traité (article 297) que de l'arrêté susdit (article 33), à l'exception de quatre actions de Bell Telephone Company qui ont été envoyées à l'Allemagne et que le pétitionnaire, au paragraphe 11 de sa réponse à la défense, admet avoir reçues du gouvernement de ce pays. De ce chef la pétition de droit du pétitionnaire est mal fondée et doit être rejetée. Voir Spitz v. Secretary of State of Canada (1). A part cela l'article 35 de l'arrêté décrète, comme nous l'avons vu, qu'aucune réclamation n'est recevable de l'Alle-magne ou de ses ressortissants contre Sa Majesté ou contre une personne quelconque agissant au nom et sous les ordres de toute juridiction ou administration du gouver-nement du Canada relativement à tout acte ou toute omission concernant les biens, droits ou intérêts des ressortis-sants allemands ainsi que contre toute personne à l'égard de tout acte ou omission résultant, entre autres, des me-sures de transfert. Celles-ci sont définies dans le deux-ième paragraphe de l'article 35 de l'arrêté ci-dessus repro-duit. De ce second chef la pétition de droit me paraît également mal fondée. Le Curateur est en possession des biens, droits et inté-rêts des ennemis comme tel et non comme un représentant ou employé de la Courone. Si le pétitionnaire avait un recours, celui-ci ne pouvait être exercé par voie de péti-tion de droit contre Sa Majesté; il devait l'être par action contre le Curateur, avec le consentement écrit de celui-ci, tel que déterminé par le paragraphe (2) de l'article 41 de l'arrêté. Les dispositions de ce paragraphe sont, à mon avis, fatales à la pétition de droit. Le procureur du pétitionnaire a référé aux pages 222 et 223 du texte français du traité. Il s'agit du texte français publié au Canada par l'Imprimeur du Roi en 1935. Ce texte avait d'abord été publié au Canada en 1919. La (1) [1939] Ex. C.R. 162, 180.
Ex. C.R.] EXCHEQUER COURT OF CANADA 77 pagination de l'édition de 1935 diffère de celle de 1919. Les 1943 six documents parlementaires contenus dans la nouvelle ERICH édition, numérotés de 41 à 41e inclusivement, sont paginés RITCHER consécutivement, alors que dans l'édition de 1919 chacun THE KING. de ces documents avait sa propre pagination. Angers J. Nous trouvons sur les pages 222 et 223 la réponse des Puissances alliées et associées aux remarques de la Délé- gation allemande sur les conditions de paix (document parlementaire n° 41d), relativement aux " traitements de droits privés ", adressée au président de la Délégation par monsieur Clémenceau le 16 juin 1919 (document parlemen- taire n° 41c). Ces réponses aux objections présentées par la Déléga- tion allemande, tout intéressantes qu'elles soient, ne font point, va sans dire, partie du traité et n'ont point par con- séquent force de loi; elles peuvent tout au plus servir à expliquer la teneur du traité. Pour toutes ces raisons j'en suis venu à la conclusion que la pétition de droit est mal fondée et que le pétition- naire n'a pas droit au remède qu'il réclame. La pétition de droit du pétitionnaire est en conséquence rejetée, avec dépens. Judgment accordingly.
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