[1996] 1 C.F. 834
T-576-94
La Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada (requérante)
c.
Le ministre des Affaires indiennes et du Nord, l’ingénieure du ministère des Affaires indiennes et du Nord (nommée conformément au Règlement sur l’utilisation des terres territoriales), le procureur général du Canada, Westmin Resources Limited et Newmont Mines Limited (intimés)
et
Le Conseil tribal des Gwich’in, la Yukon Chamber of Mines et la Yukon Prospectors’ Association (intervenants)
T-1136-94
La Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada (requérante)
c.
Le ministre des Affaires indiennes et du Nord, l’ingénieure du ministère des Affaires indiennes et du Nord (nommée conformément au Règlement sur l’utilisation des terres territoriales), le procureur général du Canada, Westmin Resources Limited et Newmont Mines Limited (intimés)
et
Le Conseil tribal des Gwich’in, la Yukon Chamber of Mines et la Yukon Prospectors’ Association (intervenants)
Répertorié : Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord) (1re inst.)
Section de première instance, juge Reed—Vancouver, 26 septembre; Ottawa, 29 novembre 1995.
Environnement — Demande en vue d’une déclaration exigeant que Westmin obtienne un permis d’utilisation des terres conformément au Règlement sur l’utilisation des terres territoriales avant d’entreprendre des travaux d’exploration minière au Yukon, et d’une ordonnance annulant la décision de lui accorder un permis l’autorisant à amener un bulldozer sur le site — Le rapport environnemental a examiné les effets qu’entraînerait le fait de conduire le bulldozer jusqu’au site, non de l’utilisation finale — Les claims ont été obtenus conformément à la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon — L’art. 3(3) de la Loi sur les terres territoriales prévoit que rien dans la présente Loi ne peut être interprété comme limitant l’application de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon — L’art. 76(1) confère le droit d’utiliser la surface du claim dans la mesure où le ministre l’estime nécessaire en vue de l’exploitation efficace et proprement minière des mines — Le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales ne régit pas les travaux d’exploration minière sur les claims miniers au Yukon — Le Règlement n’a rien à voir avec la conduite efficace et proprement minière des activités pas plus qu’il n’est imposé par le ministre — L’examen PEEE n’est pas nécessaire pour déterminer les effets découlant directement de l’activité visée ou les effets cumulatifs — Pas de lien nécessaire entre le fait d’amener des bulldozers sur le site et celui de faciliter les activités exploratoires — Pas de tentative de circonvenir au processus d’examen en tentant de faire évaluer le projet par tranches distinctes — La mise en candidature d’une rivière à la désignation de patrimoine canadien, le fait que le requérant et l’intervenant n’aient pas été avisés sont des considérations pertinentes; par contre, la déclaration est vide de sens car le bulldozer a déjà fait son travail et a été retiré du site.
Il s’agissait de demandes en vue d’une déclaration qui exigerait de Westmin Resources Limited qu’elle obtienne un permis d’utilisation des terres, conformément au Règlement sur l’utilisation des terres territoriales, avant d’entreprendre des travaux d’exploration minière sur ses claims miniers situés au Yukon et d’une ordonnance annulant la décision de lui accorder un permis l’autorisant à amener un bulldozer sur les lieux. Westmin a fait une demande de permis en vue de conduire un bulldozer, en passant par des terres fédérales inexploitées, jusqu’à son claim minier qui chevauchait la rivière Bonnet Plume, laquelle avait été choisie comme candidate à la désignation de rivière du patrimoine canadien. Le bulldozer devait servir à la construction d’une piste d’atterrissage, faciliter l’installation d’un camp et la poursuite de travaux exploratoires sur le claim minier. Ni la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada ni le Conseil tribal des Gwich’in n’ont été consultés avant la délivrance d’un permis d’utilisation des terres. Le rapport environnemental examinait les effets qu’entraînerait le fait de conduire le bulldozer jusqu’au site du claim; il ne se penchait pas sur l’utilisation qui serait faite du bulldozer une fois arrivé sur les lieux.
La Loi sur les terres territoriales s’applique aux terres de la Couronne dans les Territoires du Nord-Ouest et dans le Territoire du Yukon. Le paragraphe 3(3) prévoit que rien dans la Loi n’a pour effet de limiter l’application de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon. Les claims miniers de Westmin ont été accordés en vertu de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon, Loi dont le paragraphe 76(1) confère au détenteur du claim le droit à tous les minéraux trouvés ainsi que le droit d’en utiliser la surface dans la mesure que le ministre estime nécessaire en vue de l’exploitation efficace et proprement minière des mines et minéraux contenus dans le claim. Le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales exige l’obtention d’un permis d’utilisation des terres.
Les questions étaient de savoir 1) si le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales s’appliquait aux travaux d’exploration minière menés sur des claims miniers au Yukon; et 2) si l’examen PEEE avait ignoré des considérations pertinentes, soit : l’utilisation qui devait en fin de compte être faite du bulldozer une fois atteint le site minier et l’emplacement du site des claims sur une rivière candidate à la désignation de rivière du patrimoine canadien.
Jugement : les demandes doivent être rejetées.
(1) L’article 76(1) de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon fait obstacle à l’application du Règlement sur l’utilisation des terres territoriales pour régir l’activité minière exploratoire sur les claims miniers au Yukon. Ce Règlement n’a rien à voir avec la conduite efficace et proprement minière des activités envisagées pas plus qu’il n’a été imposé par le ministre. Il s’agit d’un règlement général touchant l’utilisation des terres, promulgué par le gouverneur général en conseil.
Pour pouvoir réglementer telle ou telle utilisation, il faut être en mesure de l’interdire. Le Règlement ne devrait pas être interprété comme réglementant mais comme n’interdisant pas les droits découlant de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon.
Le simple fait que les dispositions aient clairement pour objet de régir certaines activités exploratoires menées sur des claims miniers ne veut pas dire qu’elles étaient censées réglementer les claims miniers obtenus en vertu de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon. Elles s’appliquent aux Territoires du Nord-Ouest et à certaines activités minières du Yukon qui n’ont pas été exemptées des conditions prévues pour l’obtention d’un permis d’utilisation des terres, soit l’exploitation pétrolière et gazière. Le fait que le paragraphe 3(3) faisait déjà partie de la loi antérieure à 1970 lorsque le champ d’application de celle-ci se limitait à la vente ou à la concession de terres ne limite en rien son application actuelle. Le paragraphe 3(3) a été conservé pour limiter l’application de la Loi dans son entier, y compris les nouvelles dispositions touchant l’utilisation des terres.
Il n’est pas illogique d’exiger l’obtention d’un permis d’utilisation des terres pour mener des bulldozers jusqu’au site sans en exiger pour s’adonner à des activités minières exploratoires. Le détenteur d’un claim a le droit de pénétrer sur les terres comprises dans le claim mais non sur les terres d’un voisin pour parvenir au site du claim minier. Si, afin de pénétrer sur les terres faisant l’objet du claim minier, il est nécessaire de traverser des terres appartenant à autrui, alors il faut au préalable obtenir la permission nécessaire du propriétaire des terres donc, en l’espèce, la Couronne.
Les sites des claims miniers sont des terres territoriales. Un claim minier est un droit foncier. Le fait qu’un droit foncier puisse être dévolu à autrui ne veut pas dire que la terre est elle-même dévolue à autrui. La terre est dévolue à celui qui détient une franche tenure et, étant donné qu’en l’espèce la Couronne n’a jamais accordé une concession en franche tenure, la terre en question reste dévolue à la Couronne. De toutes façons, la Couronne conserve la propriété des droits de surface, ce qui importe aux fins des dispositions sur l’utilisation des terres de la Loi sur les terres territoriales.
(2) La question de la pertinence de l’examen PEEE est quelque peu théorique puisque le bulldozer a terminé son travail et a été retiré du site. Il fallait rejeter l’argument voulant qu’il faille tenir compte des effets découlant de l’activité visée et des conséquences directes qui peuvent en résulter. Il n’y avait pas de lien nécessaire entre les deux activités. Il n’était pas nécessaire que le bulldozer soit utilisé pour faciliter des travaux exploratoires ni qu’il soit conduit sur le site. De même, on ne pouvait accepter l’argument voulant qu’il faille tenir compte des effets cumulatifs. La doctrine des effets cumulatifs a été conçue pour garantir qu’on ne chercherait pas à minimiser l’impact global d’une activité en scindant le projet en plusieurs demandes différentes et en cherchant à avoir chaque partie du projet évaluée séparément sans tenir compte au plan de l’environnement des effets des autres parties. Dans la présente affaire, on n’a constaté aucun effort en vue de circonvenir au processus d’examen en tentant de faire évaluer le projet par tranches distinctes. La situation était simple : un aspect secondaire d’un projet d’exploitation a été soumis à examen car cet aspect-là était subordonné à l’obtention d’un permis délivré par le gouvernement alors que l’activité principale ne l’était pas.
Le rapport d’évaluation initiale n’a pas tenu compte du fait que la rivière Bonnet Plume avait été mise en candidature et acceptée comme candidate à la désignation de patrimoine canadien, facteur pertinent dont il aurait fallu tenir compte. Le fait que la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada tout comme le Conseil tribal des Gwich’in n’aient pas été avisés constitue aussi un facteur pertinent; par contre, une ordonnance déclarant l’invalidité du permis n’aurait guère de sens car les bulldozers ont déjà fait leur travail et ont déjà été retirés.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Décret sur les lignes directrices visant le processus d’évaluation et d’examen en matière d’environnement, DORS/84-467.
Environmental Assessment Act, S.S. 1979-80, c. E-10.1.
Environmental Protection (Impact of Proposals) Act 1974, no 164, 1974 (Aust.).
Loi de l’extraction du quartz dans le Yukon, S.C. 1924, ch. 74.
Loi des terres fédérales, S.R.C. 1927, ch. 113.
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18 (mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 4).
Loi sur les eaux du Yukon, L.C. 1992, ch. 40.
Loi sur les forces hydrauliques du Canada, L.R.C. (1985), ch. W-4.
Loi sur les parcs nationaux, L.R.C. (1985), ch. N-14.
Loi sur les terres territoriales, S.C. 1950, ch. 22.
Loi sur les terres territoriales, S.R.C. 1970, ch. T-6, art. 3.1 (édicté par S.R.C. 1970 (1er Supp.), ch. 48, art. 24), 3.2 (édicté, idem), 3.3 (édicté, idem).
Loi sur les terres territoriales, L.R.C. (1985), ch. T-7, art. 2 « terre », « terres territoriales », 3(3), (4) (édicté par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 7, art. 2), 4, 5, 6, 7, 23a).
Loi sur l’extraction de l’or dans le Yukon, L.R.C. (1985), ch. Y-3.
Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon, L.R.C. (1985), ch. Y-4, art. 50, 57(1), 76(1).
Mineral Act, R.S.B.C. 1936, ch. 181.
Mines Right-of-way Act, R.S.B.C. 1936, ch. 187.
Park Act, S.B.C. 1965, ch. 31 (maintenant R.S.B.C. 1979, ch. 309).
Planning and Development Act (The), R.S.S. 1978, ch. P-13.
Règlement sur l’utilisation des terres territoriales, C.R.C., ch. 1524.
Règlements concernant les mines quartzeuses (1898), 31 The Canada Gazette 2377.
JURISPRUDENCE
DISTINCTION FAITE AVEC :
R. du chef de la province de la Colombie-Britannique c. Tener et autre, [1985] 1 R.C.S. 533; (1985), 17 D.L.R. (4th) 1; [1985] 3 W.W.R. 673; 32 L.C.R. 340; 59 N.R. 82; 36 R.P.R. 291; Québec (Procureur général) c. Canada (Office national de l’énergie), [1994] 1 R.C.S. 159; (1994), 112 D.L.R. (4th) 129; 20 Admin. L.R. (2d) 79; 14 C.E.L.R. (N.S.) 1; [1994] 3 C.N.L.R. 49; 163 N.R. 241; Murphyores Incorporated Pty Ltd. v. The Commonwealth (1976), 136 C.L.R. 1 (H.C. Aust.); Village of Kannata Valley et al. v. Kannata Highlands Ltd. (1983), 13 C.E.L.R. 1; 28 Sask. R. 259 (B.R.); Sunshine Village Corp. c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien), [1995] A.C.F. no 1180 (1re inst.) (QL); Thomas v. Peterson, 753 F.2d 754 (9th Cir., 1985).
DÉCISIONS CITÉES :
Halferdahl c. District minier de Whitehorse (Registraire minier) (1990), 30 C.P.R. (3d) 183; 31 F.T.R. 303 (C.F. 1re inst.); Halferdahl c. Canada (Registraire minier du district minier de Whitehorse), [1992] 1 C.F. 813; (1992), 41 C.P.R. (3d) 533; 140 N.R. 272 (C.A.); Zurich Insurance Co. c. Ontario (Commission des droits de la personne), [1992] 2 R.C.S. 321; (1992), 9 O.R. (3d) 224; 93 D.L.R. (4th) 346; 138 N.R. 1; 55 O.A.C. 81; Canada (Procureur général) c. Mossop, [1993] 1 R.C.S. 554; (1993), 100 D.L.R. (4th) 658; 149 N.R. 1; Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), [1994] 2 R.C.S. 557; [1994] 7 W.W.R. 1; (1994), 92 B.C.L.R. (2d) 145; 4 C.C.L.S. 117; Beakhurst et al. v. Williams, Mining Recorder for Nahanni Mining District and Cadillac Explorations Ltd., [1971] 1 W.W.R. 230 (C. Terr. T.N.-O.); Uranerz Exploration & Mining Ltd. v. Blackhawk Diamond Drilling Inc. (1989), 63 D.L.R. (4th) 350; [1990] 1 W.W.R. 563; 36 C.L.R. 281; 80 Sask. R. 124 (B.R.); Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3; (1992), 88 D.L.R. (4th) 1; [1992] 2 W.W.R. 193; 84 Alta. L.R. (2d) 129; 3 Admin. L.R. (2d) 1; 7 C.E.L.R. (N.S.) 1; 132 N.R. 321; Indian Lookout Alliance v. Volpe, 484 F.2d 11 (8th Cir., 1973).
DOCTRINE
Blue, G. « Exploration Dispositions, Priority and Registration », in Bartlett, R. (ed.), Mining Law in Canada. Saskatoon : Continuing Legal Education, Law Society of Saskatchewan, 1984.
DEMANDES en vue d’une déclaration qui exigerait de Westmin Resources Limited qu’elle obtienne un permis d’utilisation des terres, conformément au Règlement sur l’utilisation des terres territoriales, avant d’entreprendre des travaux d’exploration minière sur ses claims miniers situés au Yukon, et d’une ordonnance annulant la décision de lui accorder un permis l’autorisant à amener un bulldozer sur les lieux. Demandes rejetées.
AVOCATS :
Stewart Elgie, pour la requérante.
Harry J. Wruck, c.r., pour les intimés le ministre des Affaires indiennes et du Nord, l’ingénieure du ministère des Affaires indiennes et du Nord et le procureur général du Canada.
Michael Tourigny, pour l’intimée Westmin Resources.
Brian J. Wallace, c.r. et Ron A. Skolrood, pour l’intimée Newmont Mines.
Brian A. Crane, c.r., pour l’intervenant Conseil tribal des Gwich’in.
Bruce L. Willis, c.r., pour les intervenants Yukon Chamber of Mines et Yukon Prospectors.
PROCUREURS :
Stewart Elgie, Vancouver, pour la requérante.
Le sous-procureur du Canada pour les intimés le ministre des Affaires indiennes et du Nord, l’ingénieure du ministère des Affaires indiennes et du Nord et le procureur général du Canada.
Lang Michener Lawrence & Shaw, Vancouver, pour l’intimée Westmin Resources.
Lawson Lundell Lawson & McIntosh, Vancouver, pour l’intimée Newmont Mines.
Gowling, Strathy & Henderson, Ottawa, pour l’intervenant Conseil tribal des Gwich’in.
Preston, Willis & Lackowicz, Whitehorse (Yukon) pour les intervenants Yukon Chamber of Mines et Yukon Prospectors.
Ce qui suit est la version française des motifs de l’ordonnance rendus par
Le juge Reed : Les présentes demandes soulèvent deux questions. La première, dans le dossier T-1136-94, est de savoir si la Loi sur les terres territoriales, L.R.C. (1985), ch. T-7, s’applique à des travaux d’exploration minière menés sur des claims miniers au Yukon. Dans l’affirmative, et avant que de telles activités puissent être entreprises, il faut, selon le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales[1], obtenir un permis d’utilisation des terres et, selon le Décret sur les lignes directrices visant le processus d’évaluation et d’examen en matière d’environnement[2] (examen PEEE), il faut également procéder à une évaluation environnementale.
La seconde question, dans le dossier T-576-94, est de savoir si l’examen PEEE qui a eu lieu, touchant le « déplacement » d’un bulldozer jusqu’aux claims miniers en question, a ignoré des considérations pertinentes. Les considérations dont il n’aurait pas été tenu compte sont : l’utilisation qui devait en fin de compte être faite du bulldozer une fois atteint le site minier. Le bulldozer devait servir à la construction d’une piste d’atterrissage, faciliter l’installation d’un camp et la poursuite des travaux exploratoires sur le claim minier. Les claims en question chevauchent la rivière Bonnet Plume—rivière dont la candidature a été acceptée aux fins de sa désignation en tant que rivière du patrimoine canadien.
La requérante, la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada, et l’intervenant, le Conseil tribal des Gwich’in, demandent à la Cour, en vertu de l’article 18 de la Loi sur la Cour fédérale [L.R.C. (1985), ch. F-7 (mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 4)], de déclarer que le fonctionnaire compétent du ministère des Affaires indiennes et du Nord (MAIN) doit exiger de l’intimée, Westmin Resources Limited (Westmin) que celle-ci obtienne un permis d’utilisation des terres, conformément au Règlement sur l’utilisation des terres territoriales, avant d’entreprendre sur ses claims miniers, des travaux d’exploration minière. Ils demandent également à la Cour de rendre une ordonnance annulant la décision d’accorder à Westmin un permis autorisant celle-ci à amener des bulldozers sur les lieux.
Les faits
Le 15 juillet 1993, Westmin a déposé au bureau de l’utilisation des terres du MAIN, à Whitehorse, une demande de permis en vue de conduire un bulldozer du lac McQuesten jusqu’à un lieu situé dans la région du lac Fairchild dans la vallée de la rivière Bonnet Plume. L’intimée Westmin, et l’intimée Newmont Mines Limited (Newmont) avaient formé une coentreprise en vue de l’exploitation des claims miniers que Westmin y possède. Les claims chevauchent la rivière Bonnet Plume. Le bulldozer devait être conduit jusqu’à l’emplacement du claim en passant par des terres fédérales inexploitées. Les claims en question avaient été jalonnés par Westmin entre le 27 juin 1992 et le 29 juin 1993. Une liste des claims était jointe à la demande de permis. La traversée devait être de 200 kilomètres et devait suivre des sentiers forestiers déjà tracés.
Les travaux exploratoires à mener sur le site devaient comprendre : l’établissement d’un camp pouvant loger environ 23 personnes; l’utilisation d’une génératrice diesel; la consommation d’environ 6 000 gallons de carburant; des forages exploratoires afin de prélever des carottes sur environ 12 sites différents. Le forage exigerait chaque jour environ 15 000 gallons d’eau. Cette eau devait être tirée de la rivière puis, après utilisation, devait être déversée sur les terrains appartenant au claim. Il était également prévu de prélever des échantillons du fond de la rivière ainsi que de nombreux sites. Pour effectuer cet échantillonnage, on devait prélever à intervalles périodiques des morceaux de roche (de 5 m2).
Le bureau d’utilisation des terres du MAIN a sollicité, auprès des membres d’un certain nombre d’organismes, gouvernementaux et autres, des commentaires sur la demande de permis de conduire le bulldozer jusqu’au site. Ni la requérante, la Société pour la protection des parcs et des sites naturels, ni l’intervenant, le Conseil tribal des Gwich’in, n’a été consulté. Les Na’cho N’y’ak Dun, eux, ont été consultés. Ils ont été considérés comme les peuples autochtones ayant le plus grand intérêt dans la région. Leur objection à la délivrance d’un permis a été notée dans le rapport préalable de l’examen PEEE, dans les termes suivants :
[traduction] Les Nacho N’y’ak Dun—le chef et le conseil de la tribu rejettent la demande. E et LC doivent clarifier la situation auprès de la Première Nation. On ne peut pas refuser l’accès aux claims miniers[3].
Le 31 août 1993, l’évaluation environnementale initiale prenait fin. Le 1er septembre 1993, l’ingénieure du bureau de l’utilisation des terres du MAIN signait le rapport environnemental et délivrait un permis d’utilisation des terres à Westmin. Dans le rapport environnemental on examinait les effets qu’entraînerait le fait de conduire le bulldozer de la région du lac McQuesten jusqu’au site du claim. Dans ce rapport on ne se penchait pas cependant sur l’utilisation qui serait faite du bulldozer une fois arrivé sur les lieux. Selon le permis, il s’agissait, en ce qui concerne l’activité autorisée, de « mener le bulldozer de l’extrémité du lac McQuesten en passant par les pistes déjà tracées… jusqu’à la vallée de la rivière Bonnet Plume pour y mener des travaux d’exploration dans des claims de quartz. » Ce permis a été par la suite modifié afin d’autoriser non plus un mais deux bulldozers, et afin de modifier la route qui devait être empruntée pour que les sept à dix derniers kilomètres puissent être parcourus directement le long de la rivière. En fait, les bulldozers ne s’en sont pas toujours tenus aux pistes déjà tracées. Pour des motifs de sécurité, ainsi que pour d’autres raisons, il est parfois devenu nécessaire de quitter la piste. Il a fallu pour cela abattre des arbres sur une distance totale d’environ sept kilomètres.
Il ressort clairement de l’affidavit de M. Stammers que Westmin et Newmont étaient très soucieuses de la protection de l’environnement alors que les engins à chenille avançaient vers le site des claims. Tout en veillant à la sécurité des opérations, elles ont choisi des voies de rechange qui permettraient de toucher le moins possible à l’environnement. Elles ont pris soin de consulter la communauté de Mayo, la communauté la plus proche du site, ainsi que d’autres qui leur semblaient devoir s’intéresser à leurs activités. Après qu’on eut fait remarquer à Westmin et à Newmont que des arbres avaient été abattus, chose qui n’était pas prévue dans le permis, les deux compagnies ont fait en sorte de remettre en état les terrains affectés. Rien ne permet de dire que Westmin ou Newmont ont agi de manière irresponsable.
À l’époque des faits, la rivière Bonnet Plume avait été choisie comme candidate à la désignation de rivière du patrimoine canadien. Cette désignation résulte d’un système conventionnel instauré au début des années 80 par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Dans le processus de désignation, la première étape consiste à préparer un rapport. Le rapport sur la rivière Bonnet Plume a été terminé en 1992. Le ministre des AIN de l’époque a signé la recommandation en vue de retenir la candidature de cette rivière à la désignation de rivière du patrimoine canadien. Selon cette recommandation, la rivière répondait largement et dépassait même les critères retenus aux fins d’une telle désignation. La recommandation a été acceptée par la Commission des rivières du patrimoine canadien. Ce qui reste à faire, afin de conférer à la rivière le statut à part entière de rivière du patrimoine canadien, c’est d’élaborer un plan directeur pour la rivière. Ce plan est en cours de préparation. Dans son rapport annuel pour l’année 1992-1993, la Commission des rivières du patrimoine canadien a décrit en ces termes la rivière Bonnet Plume :
Lointaine et intacte, la rivière Bonnet Plume est la quintessence d’un cours d’eau sauvage. D’une longueur de 350 km, la Bonnet Plume a été mise en candidature (ainsi que son bassin hydrographique de 12 000 km2) en raison de ses remarquables valeurs naturelles, culturelles et récréatives. Renommée pour ses paysages de montagne d’une beauté saisissante, la Bonnet Plume nous permet de pénétrer certains secrets de l’histoire naturelle de notre planète; elle nous offre de nombreux exemples de relief glaciaire (cirques, moraines), des failles et des plis d’effondrement, un site issu d’un glissement de terrain important (qui crée d’intéressants rapides), des plantes rares et même des ossements d’hadrosaures. La vallée de la Bonnet Plume grouille de vie; ceux qui la descendent ont bien des chances d’apercevoir des caribous, des ours grizzly et des mouflons de Dall. La rivière est aussi connue pour ses valeurs récréatives. Les possibilités de descendre ses rapides en radeau ou en canot et de faire de la randonnée dans les monts Wernecke lui ont taillé à l’échelle internationale une réputation de destination de nature exceptionnelle. Enfin, la Bonnet Plume est inséparable du mode de vie et du développement culturel des Premières Nations de la région, les Gwich’in et les Nacho N ‘y’ ak Dun. Il s’agit vraiment d’une rivière remarquable.
La Loi sur les terres territoriales
La Loi sur les terres territoriales s’applique aux terres de la Couronne situées dans les Territoires du Nord-Ouest ainsi que dans le territoire du Yukon. L’article 4 de cette Loi prévoit l’établissement de zones d’aménagement lorsque cela paraît « nécessaire pour la préservation de l’équilibre écologique ou des caractéristiques physiques d’une région ». Je crois savoir qu’à peu près toutes les terres territoriales des Territoires du Nord-Ouest et du territoire du Yukon ont été déclarées appartenir à cette catégorie. L’article 5 de la Loi prévoit la possibilité d’adopter un règlement pour « la protection, la surveillance, la gestion et l’usage, en surface, des terres » et « la délivrance de permis pour l’usage en surface de ces terres ». C’est au titre de cette disposition qu’a été promulgué le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales. Le paragraphe 3(3) de la Loi sur les terres territoriales prévoit cependant que :
3. …
(3) La présente loi n’a pas pour effet de limiter l’application de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon…
Les claims miniers de Westmin ont été accordés en vertu de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon, L.R.C. (1985), ch. Y-4, modifiée. Cette Loi n’est pas un texte récent. Elle remonte à 1924 et n’a subi pratiquement aucun changement[4]. Elle était fondée sur un règlement de 1898[5]. La Loi instaure ce qu’on appelle un système de libre entrée : un prospecteur peut pénétrer sur des terres vacantes de la Couronne sans obtenir de permission particulière, jalonner un claim, faire enregistrer ce claim et par là même acquérir des droits miniers sur la zone incluse dans le claim. La Loi exige que soient chaque année effectués sur les claims certains travaux sous peine de voir le claim tomber en désuétude. À défaut de travaux, on peut aussi verser, annuellement et pour chaque claim, la somme de 100 $ au registraire minier[6].
Les droits conférés au détenteur d’un claim sont décrits en ces termes au paragraphe 76(1) de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon :
76. (1) Le détenteur par inscription … situé sur des terres territoriales vacantes a :
a) le droit à tous minéraux trouvés dans les veines ou les filons … ainsi que le droit de pénétrer dans le claim et d’en utiliser et occuper la surface, ou telle partie et dans la mesure que le ministre estime nécessaire en vue de l’exploitation efficace et proprement minière des mines et minéraux contenus dans le claim, mais pour nulle autre fin; [Non souligné dans l’original.]
Ce qui est en cause ici c’est l’articulation du paragraphe 3(3) de la Loi sur les terres territoriales et du paragraphe 76(1) de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon. Les intimés et les intervenantes, la Yukon Chamber of Mines et la Yukon Prospectors’ Association, estiment que le paragraphe 3(3) de la Loi sur les terres territoriales fait obstacle à l’application des dispositions exigeant l’obtention d’un permis d’utilisation des terres, obligation que prévoit le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales, pour ce qui concerne l’exploration minière menée sur des claims miniers accordés en vertu de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon.
La requérante et l’intervenant, le Conseil tribal des Gwich’in, soutiennent pour leur part que les dispositions de ces deux textes de loi peuvent faire l’objet d’une application conjointe. Ils estiment que si l’article 3 de la Loi sur les terres territoriales et le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales ne permettent pas de refuser au détenteur d’un claim le droit de pénétrer sur les terrains en question et de les utiliser à des fins d’exploration minière, ces règlements permettent cependant de réglementer l’utilisation qui est faite de ces terrains.
Si l’argument me paraît avoir une certaine valeur, compte tenu notamment de la plus grande importance aujourd’hui accordée aux questions liées à l’environnement, je ne saurais le retenir.
Selon la disposition pertinente de la Loi sur les terres territoriales, le paragraphe 3(3), la Loi « n’a pas pour effet de limiter l’application de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon » (non souligné dans l’original). La disposition pertinente de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon, le paragraphe 76(1), a pour effet d’accorder aux détenteurs de claims un droit « à tous les minéraux … ainsi que le droit de … utiliser … la surface [du claim] … dans la mesure où le ministre [des Affaires indiennes et du Nord] estime nécessaire en vue de l’exploitation efficace et proprement minière des mines et minéraux contenus dans le claim » (non souligné dans l’original). Toute restriction du droit d’utiliser la surface du claim, autre que celle que pourrait imposer, en vertu du paragraphe 76(1), le ministère des Affaires indiennes et du Nord aurait pour effet de limiter l’application de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon. Le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales, qui, selon une des thèses en présence, s’applique en l’espèce, n’a rien à voir avec la conduite efficace et proprement minière des activités envisagées, pas plus qu’il n’a été imposé par le ministre des Affaires indiennes et du Nord. Il s’agit d’un règlement général touchant l’utilisation des terres, promulgué par le gouverneur général en conseil. J’estime que les termes explicites du paragraphe 76(1) nous empêchent d’appliquer le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales aux activités minières qui sont ici en cause.
J’admets également l’argument voulant que toute interprétation des deux dispositions législatives qui aurait pour effet d’accorder à l’une d’elles la possibilité de réglementer mais non d’interdire l’exercice des droits conférés par l’autre texte entraînerait une situation particulièrement épineuse. Pour pouvoir réglementer telle ou telle utilisation, il faut être en mesure de l’interdire. Sans cela, l’autorité réglementaire est dénuée du pouvoir de sanctionner. Qui déciderait alors dans quel cas la réglementation d’une utilisation équivaut en fait à refuser le droit de pénétrer sur un claim pour en poursuivre l’exploitation? À supposer que la réglementation d’une utilisation ait pour effet de rendre économiquement infaisable l’exploitation d’un claim minier, s’agirait-il d’une mesure de réglementation ou d’une interdiction?
Bien que le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales n’ait pas pour effet de réglementer l’activité en question, étant donné le paragraphe 76(1) de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon, l’alinéa 23a) de la Loi sur les terres territoriales laisse au ministre la latitude de soustraire certaines terres territoriales à toute mesure de disposition. Une telle décision aurait pour effet d’empêcher l’enregistrement de claims miniers dans la zone visée par la décision de retrait (voir : Halferdahl c. District, minier de Whitehorse (Registraire minier) (1990), 30 C.P.R. (3d) 183 (C.F. 1re inst.); inf. [1992] 1 C.F. 813C.A.)).
Je note que ce n’est pas toute activité minière qui échappe à la réglementation. S’il était décidé d’entreprendre une exploitation de grande envergure des claims miniers, je crois savoir que le volume d’eau utilisé serait soumis à l’obtention d’un permis, ainsi que le prévoit la Loi sur les eaux du Yukon, L.C. 1992, ch. 40. Cette Loi ne prévoit aucune exception pour l’exploitation minière de gisements de quartz. Cette condition aurait, elle, pour effet de faire jouer l’obligation de procéder à un examen PEEE de l’activité minière en cause avant même que celle-ci ne commence.
L’avocat de l’intervenant, le Conseil tribal des Gwich’in, a développé une argumentation très solide fondée sur les termes mêmes de la Loi sur les terres territoriales et du Règlement sur l’utilisation des terres territoriales promulgué au titre de la Loi, s’attachant à démontrer que ces dispositions étaient censées régir les activités minières menées sur des claims miniers. Mais, comme l’a fait remarquer l’avocat des intimés, le simple fait que les dispositions aient clairement pour objet de régir certaines activités exploratoires menées sur des claims miniers ne veut pas dire que ces mêmes textes étaient censés réglementer les claims miniers obtenus en vertu de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon. La Loi sur les terres territoriales a trait aux terres situées aussi bien au Yukon que dans les Territoires du Nord-Ouest. Dans les Territoires du Nord-Ouest on ne trouve aucune disposition portant exemption comparable au paragraphe 76(1) de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon. Ainsi, les conditions en matière d’obtention de permis, prévues dans le Règlement sur l’utilisation des terres territoriales, ont un champ d’application même si elles n’ont aucun effet dérogatoire par rapport à la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon. De plus, ce ne sont pas toutes les activités minières menées au Yukon qui sont exemptées des conditions prévues pour l’obtention d’un permis d’utilisation des terres. L’exploitation pétrolière et gazière n’est pas exemptée, pas plus que ne le serait, par exemple, l’exploitation de carrières à gravier. Je relève, cependant, que la gamme d’activités minières couvertes par la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon est très large et si, dans les présents motifs, il est principalement fait mention de cette Loi, l’exemption prévue au paragraphe 3(3) s’applique également à la Loi sur l’extraction de l’or dans le Yukon [L.R.C. (1985), ch. Y-3][7].
La Loi sur les terres territoriales, édictée en 1950 [S.C. 1950, ch. 22] en remplacement de la Loi des terres fédérales[8] ne traitait que de la vente, de la concession ou autre mesure de disposition des terres territoriales. Les amendements apportés en 1970 prévoyaient la création de zones d’aménagement et la délivrance de permis pour l’utilisation des terres situées dans ces zones[9]. L’actuel paragraphe 3(3) faisait déjà partie de la Loi lorsque le champ d’application de celle-ci se limitait à la vente ou à la concession de terres territoriales. On fait valoir qu’il y aurait lieu de tenir compte de cela lorsqu’on examine la manière dont s’articulent le paragraphe 3(3) de la Loi sur les terres territoriales et le paragraphe 76(1) de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon. À mon avis, cet argument porte que le paragraphe 3(3) devrait être interprété comme s’appliquant principalement à la disposition des terres (par vente ou par concession) et seulement accessoirement aux prescriptions de la Loi touchant les zones d’aménagement.
Je ne suis pas convaincue de l’importance du fait que l’actuel paragraphe 3(3) se trouvait déjà inscrit dans les textes de loi tels qu’ils existaient en 1970. Lorsque la Loi a été modifiée en 1970, le paragraphe 3(3) n’a pas été limité dans son application aux clauses touchant la disposition des terres. Cette restriction a été conservée, limitant par là même l’application de la Loi dans son entier, y compris les nouvelles dispositions touchant l’utilisation des terres. Il est impossible de penser que ce champ d’application a été maintenu par simple inadvertance.
On fait valoir en l’espèce que la différence entre le libellé des paragraphes 3(3) et 3(4) [édicté par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 7, art. 2] montre bien que la Loi sur les terres territoriales était censée s’appliquer aux activités minières autorisées en vertu de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon. À l’inverse du paragraphe 3(3) qui prévoit que la Loi sur les terres territoriales n’a pas pour effet de limiter l’application de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon, le paragraphe 3(4) prévoit que certaines dispositions de cette deuxième Loi ne s’appliqueront pas à certaines zones indiquées. On ne m’a pas convaincue de l’importance de cette différence entre les termes utilisés. Dans le paragraphe 3(4), il s’agit de dispositions très précises et les domaines qui y échappent sont précisément indiqués. En ce qui concerne le paragraphe 3(3), il s’agit de la manière dont s’articulent entre eux les deux textes de loi et la différence de libellé se justifie donc. Cette différence de libellé ne réduit en rien l’effet de l’exemption que prévoit le paragraphe 3(3).
On a relevé que le paragraphe 76(1) de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon accorde au détenteur d’un claim le droit de pénétrer sur les terres en question mais que le MAIN avait cependant exigé de Westmin et de Newmont qu’elles obtiennent un permis d’utilisation des terres avant de pouvoir conduire des bulldozers jusqu’au site du claim. On fait valoir que l’obtention d’un permis peut être nécessaire avant que le détenteur d’un claim puisse exercer son droit de pénétrer sur les terres en cause, de la même manière qu’un permis peut être exigé avant que des activités minières ne soient entreprises sur le site. Je ne suis pas convaincue qu’on puisse invoquer une telle analogie. Le droit de pénétrer sur les terres qui est accordé au détenteur du claim c’est le droit de pénétrer sur les terres comprises dans les claims. Il ne s’agit pas du droit de pénétrer sur les terres d’un voisin pour parvenir au site du claim minier. Si, afin de pénétrer sur les terres faisant l’objet du claim minier, il est nécessaire de traverser des terres appartenant à autrui, alors il faut au préalable obtenir la permission nécessaire du propriétaire des terres donc, en l’espèce, de la Couronne. Il n’est pas illogique d’exiger l’obtention d’un permis d’utilisation des terres pour mener des bulldozers jusqu’au site tout en affirmant qu’il n’est pas nécessaire d’obtenir un permis pour se livrer, sur le site même, à des travaux miniers exploratoires.
On a cité l’arrêt R. du chef de la province de la Colombie-Britannique c. Tener et autre, [1985] 1 R.C.S. 533. Dans cette affaire, les intimés détenaient des claims miniers sur des terres qui, par la suite, ont été comprises dans les limites d’un parc provincial. Aux termes de la législation provinciale applicable[10], les propriétaires de claims miniers avaient droit à l’ensemble des minéraux du claim et avaient droit à l’utilisation et à la possession de la surface du claim minier afin d’en extraire les minéraux. Par la suite a été édictée une loi, le Park Act[11], aux termes de laquelle toute exploitation d’une ressource naturelle se trouvant dans le parc était subordonnée à l’obtention préalable d’un permis. Le Park Act ne contenait aucune disposition limitant l’application de ce texte en ce qui concerne les claims miniers des intimés. Les tribunaux ont décidé qu’il y avait eu expropriation et ont ordonné à la Couronne provinciale de verser une indemnité. Étant donné que le Park Act ne prévoit aucune exception comparable à celle que contient l’article 3(3) de la Loi sur les terres territoriales, l’arrêt Tener ne me paraît pas d’une grande utilité lorsqu’il s’agit de dire comment s’articulent les paragraphes 3(3) et 76(1). Cet arrêt me paraît cependant utile à l’évaluation d’un des arguments développés par l’avocat de la Yukon Chamber of Mines et de la Yukon Prospectors’ Association.
Selon l’argument auquel j’ai fait allusion au paragraphe précédent, il semblerait que la Loi sur les terres territoriales ne saurait s’appliquer aux droits sur les claims miniers étant donné qu’il ne s’agit pas de terres territoriales. Aux termes de l’article 50 de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon, un claim minier est un « intérêt sur des biens meubles, équivalant à la location, pour un an, des minéraux souterrains ». Dans plusieurs affaires, cela a été interprété comme donnant au détenteur du claim un droit sur la terre. Voir Beakhurst et al. v. Williams, Mining Recorder for Nahanni Mining District and Cadillac Explorations Ltd., [1971] 1 W.W.R. 230 (C. terr. T.N.-O.) et Uranerz Exploration & Mining Ltd. v. Blackhawk Diamond Drilling Inc. (1989), 63 D.L.R. (4th) 350 (B.R. Sask.). On en trouvera également une description dans Blue, « Exploration Dispositions, Priority and Registration », Mining Law in Canada (Continuing Legal Education, Law Society of Saskatchewan, 1984), page 5, aux pages 12 à 14. Ce droit sur la terre qu’acquiert ainsi le détenteur d’un claim minier doit être conjugué avec le droit de pénétrer sur les terres en question et d’en utiliser, selon les besoins, la surface afin d’en extraire les minéraux. Rappelons que ces deux droits sont accordés par la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon. Ainsi, le détenteur d’un claim minier a ce que l’arrêt Tener (précité), décrit, aux pages 540 à 542, comme un « droit d’extraction ». Il s’agit d’un droit foncier.
Selon la thèse ainsi développée c’est justement parce que le détenteur d’un claim minier acquiert un droit foncier que la Loi sur les terres territoriales ne peut pas s’appliquer à ce droit étant donné que ce droit n’appartient plus alors à la Couronne. Selon l’article 2, les « terres territoriales » sont des « terres qui … sont dévolues à la Couronne ou que le gouvernement du Canada peut légalement aliéner » et ces terres, selon l’article 2, comprennent « les mines et les minéraux … servitudes et autres droits de nature immobilière ».
Je ne connais aucune décision antérieure ayant interprété ce qu’on entend par « terres qui sont dévolues à la Couronne » dans la Loi sur les terres territoriales , mais le fait qu’un droit foncier, qu’une concession, puisse être dévolue à autrui, ne veut pas dire que la terre est elle-même dévolue à autrui, au sens qu’on entend généralement ce terme. La terre est dévolue à celui qui détient une franche tenure et, étant donné qu’en l’espèce la Couronne n’a jamais accordé une concession en franche tenure (concession de la Couronne), la terre en question reste dévolue à la Couronne. D’ailleurs, même si cette interprétation n’était pas exacte, la Couronne conserverait non seulement la franche tenure des terres en question mais également la propriété des droits sur la surface des terrains en cause. Bien que le détenteur d’un claim ait le droit de pénétrer sur ces terres, aux fins des dispositions de la Loi sur les terres territoriales relatives à l’utilisation des terres, ce qui importe c’est la propriété des droits de surface. La thèse de l’avocat me semble assimiler « terre » et tout droit sur cette terre, aussi mince soit-il (même s’il ne s’agit que d’une servitude). Selon la définition de terre contenue dans la Loi, rien ne permet de dire que la terre constitue elle-même une servitude ou équivaut à une servitude. On ne m’a pas convaincue que les terres faisant l’objet d’un claim ne sont pas des terres territoriales.
J’estime, en conclusion, que la manière d’interpréter la portée de l’exception prévue au paragraphe 3(3) de la Loi sur les terres territoriales, interprétation acceptée par l’ingénieure nommée par le MAIN, et selon laquelle Westmin n’était pas tenue d’obtenir un permis d’utilisation des terres pour entreprendre sur le claim minier les travaux d’exploration, était juste. Il n’y a pas lieu d’examiner ici la jurisprudence touchant le degré de déférence dû, en matière de demande de contrôle judiciaire, à la manière dont un tribunal a interprété la loi : Zurich Insurance Co. c. Ontario (Commission des droits de la personne), [1992] 2 R.C.S. 321; Canada (Procureur général) c. Mossop, [1993] 1 R.C.S. 554; Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), [1994] 2 R.C.S. 557.
Examen PEEE
L’examen PEEE qui a été effectué concernant la conduite des bulldozers jusqu’au claim minier est contesté sur le fondement de deux moyens : (1) cet examen n’aurait pas été suffisant puisqu’il portait sur les effets que pourrait avoir le fait de mener un ou plusieurs bulldozers sur le site, sans pour cela examiner les effets que pourraient avoir les travaux menés à l’aide des bulldozers une fois que ces engins seraient arrivés sur place; (2) l’examen n’était pas satisfaisant dans la mesure où il n’a pas tenu compte du fait que la rivière Bonnet Plume avait été présélectionnée comme rivière du patrimoine canadien.
Relevons que la question est devenue dans une certaine mesure théorique puisque les bulldozers ont terminé les travaux qui leur avaient été assignés. Ils ont été retirés du site et l’on m’informe qu’ils n’y retourneront pas, bien que le permis délivré ne vienne à expiration que le 31 janvier 1996.
J’aborderai d’abord l’argument selon lequel l’ingénieure du MAIN a commis une erreur de droit en ne considérant pas l’utilisation finale qui devait être faite du ou des bulldozers. Selon la Cour suprême, le Décret sur les lignes directrices visant le processus d’évaluation et d’examen en matière d’environnement doit faire l’objet d’une interprétation libérale en accord avec les objectifs même du texte[12]. On fait valoir dans ce contexte que, selon la jurisprudence, lors d’un examen PEEE : (1) il faut tenir compte non seulement des effets découlant de l’activité visée par le permis mais également des conséquences directes qui peuvent en résulter; (2) il faut tenir compte des effets cumulatifs.
En ce qui concerne le premier argument, celui visant les conséquences qui peuvent en résulter, les affaires Québec (Procureur général) c. Canada (Office national de l’énergie), [1994] 1 R.C.S. 159 (l’affaire du Grand conseil des Cris); Murphyores Incorporated Pty Ltd. v. The Commonwealth (1976), 136 C.L.R. 1 (H.C. Aust.) et Village of Kannata Valley et al. v. Kannata Highlands Ltd. (1983), 13 C.E.L.R. 1 (B.R. Sask.) ont été citées à l’appui.
Dans l’affaire du Grand conseil des Cris, la Cour suprême, aux pages 191 et 192, estime qu’un examen PEEE, auquel était subordonné l’octroi d’un permis d’exportation de courant électrique, devait tenir compte des effets sur le plan de l’environnement qui découleraient non seulement de l’exportation du courant électrique mais également de l’agrandissement des installations nécessaires pour en assurer la production. De la même manière, dans l’affaire Murphyores, la Cour a décidé qu’un ministre habilité à accorder un permis pour l’exportation de certains types de concentrés de minerai, pouvait à juste titre tenir compte des effets que pourrait avoir sur l’environnement le traitement de ces concentrés. Dans l’affaire Village of Kannata, la Cour a accordé une injonction bloquant la construction d’une route d’accès vers des terrains à lotir. Le lotissement n’avait pas encore reçu les autorisations nécessaires. La législation pertinente, en l’occurrence The Planning and Development Act[13], n’exigeait pas d’autorisation préalable pour la construction d’une route, mais exigeait une telle autorisation pour l’aménagement d’un lotissement.
Je ne suis pas convaincue de l’utilité de cette jurisprudence en l’espèce. Dans l’affaire du Grand conseil des Cris, la Cour a estimé qu’il fallait tenir compte des effets que pourrait avoir l’agrandissement des installations de production étant donné que celles-ci étaient nécessaires à l’exécution du contrat d’exportation. On peut en dire autant de l’affaire Murphyores bien que dans cette deuxième affaire, il s’agissait bien sûr du Environment Protection (Impact of Proposals) Act 1974, no 164 australien (common law) et que dans l’autre affaire le ministre avait décidé de tenir compte des effets au niveau de l’environnement alors que les demanderesses tentaient de l’empêcher d’exercer son pouvoir discrétionnaire en la matière. Dans l’affaire Village of Kannata, la Cour a accordé une injonction provisoire permettant de préserver le statu quo. Il s’agissait de savoir si la construction de la route en question constituait un projet devant obligatoirement faire l’objet d’une évaluation en vertu du Environmental Assessment Act de la Saskatchewan[14]. Le juge a effectivement relevé l’existence d’une question importante à trancher, la question de savoir si la construction de la route constituait un « aménagement » devant faire l’objet d’une étude préalable. La route faisait partie intégrante du projet de lotissement. Celle-ci devait être la route principale du lotissement et il est clair que ce lotissement constituait un projet devant faire l’objet d’une étude préalable. Si le projet de lotissement n’était pas approuvé, la route était inutile.
On ne retrouve pas, en l’espèce, ce lien nécessaire entre les deux activités, tel qu’il existait dans les affaires Grand conseil des Cris et Murphyores. Dans ces deux affaires-là, l’activité subordonnée à l’obtention d’un permis exigeait de toute nécessité que soit entreprise l’activité connexe afin que l’activité directement visée par le permis puisse aller de l’avant. En l’espèce, alors que les bulldozers étaient conduits sur le site afin de faciliter les travaux d’exploration, ils pouvaient ne pas être utilisés dans l’immédiat. Ils auraient pu rester garés sur le site (bien que ce ne soit pas ce qui était prévu) et utilisés seulement après qu’il aurait été décidé d’entreprendre l’exploitation minière proprement dite. À l’inverse, on imagine qu’en l’absence de permis autorisant de mener les bulldozers jusqu’au site, on aurait retenu une autre solution et, par exemple, transporté par hélicoptère les bulldozers démontés pour les remonter sur place.
En ce qui concerne l’affaire Village of Kannata, disons encore que cette décision peut être dissociée puisqu’il s’agissait d’une injonction provisoire. Ce qui est plus important, cependant, c’est que l’activité principale par rapport à laquelle la construction de la route était une activité secondaire (aménagement du lotissement), était, elle, de toute évidence soumise à l’obligation d’obtenir l’autorisation préalable et de procéder à une étude environnementale. Il n’en va pas de même en l’espèce puisqu’on demande ici à la Cour de subordonner l’activité principale à une évaluation environnementale étant donné qu’une telle évaluation s’imposait à l’égard d’un aspect secondaire de cette activité. Je ne suis pas convaincue qu’en l’espèce la requérante puisse utilement invoquer l’argument fondé sur les liens directs existant entre l’activité principale et l’activité secondaire.
Examinons maintenant le second argument, celui des effets cumulatifs. On fait valoir que les travaux miniers exploratoires auraient dû faire l’objet d’une évaluation dans le cadre de l’examen PEEE pour ce qui est de la conduite des bulldozers jusqu’au site car de tels examens tiennent obligatoirement compte des effets cumulatifs. On a cité les décisions rendues dans les affaires Thomas v. Peterson, 753 F.2d 754 (9th Cir., 1985), à la page 759 et Sunshine Village Corp. c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien), [1995] A.C.F. no 1180 (1re inst.) (QL) ainsi que le Guide pour l’évaluation initiale du MAIN[15]. D’après moi, la doctrine des effets cumulatifs doit garantir qu’on ne cherchera pas à minimiser l’impact global d’une activité en scindant le projet en plusieurs demandes différentes et en cherchant à avoir chaque partie du projet évaluée séparément sans tenir compte au plan de l’environnement des effets des autres parties. Dans l’affaire Thomas v. Peterson, par exemple, on procédait à l’étude environnementale d’un projet de construction d’un chemin forestier. La Cour a décidé que, dans le cadre de cet examen, il y avait lieu d’évaluer en même temps l’exploitation forestière prévue. Il appert cependant, à la page 760 de cette décision, qu’il aurait également fallu procéder de manière distincte à une évaluation des seules activités forestières. La décision rendue indique qu’il fallait procéder à une évaluation environnementale des ventes de bois, sinon dans le cadre de l’examen du projet de construction d’un chemin forestier, du moins de manière indépendante. La Cour a donc décidé que l’impact sur l’environnement de l’exploitation forestière devait être évalué dans le cadre de l’évaluation environnementale de la construction du chemin. L’avocat cite une autre décision d’importance comparable, rendue dans l’affaire Indian Lookout Alliance v. Volpe, 484 F.2d 11 (8th Circ., 1973), à la page 14.
Encore une fois, dans l’affaire Sunshine Village, il semble évident que ce dont il s’agissait c’était du besoin d’évaluer l’ensemble du projet plutôt que d’en évaluer séparément les parties constituantes. La Cour a décidé que, dans le contexte d’un nouveau projet, les divers aspects d’un projet antérieurement approuvé mais jamais exécuté et qui est repris dans le cadre d’un nouveau projet élargi doivent faire à nouveau l’objet d’un examen. La Cour a décidé que les modifications apportées au plan de 1992 devaient être examinées « à la lumière des effets cumulatifs du projet d’aménagement complet de la zone Sunshine Village Ski », y compris les parties du plan de 1978 qui n’avaient pas été bâties. La situation n’est pas la même qu’en l’espèce. Dans la présente affaire, on ne constate aucun effort en vue de circonvenir au processus d’examen en tentant de faire évaluer le projet par tranches distinctes. La situation est simple : un aspect secondaire d’un projet d’exploitation est soumis à examen car cet aspect-là est subordonné à l’obtention d’un permis délivré par le gouvernement alors que l’activité principale n’est pas soumise à de telles conditions.
Examinons maintenant l’argument selon lequel l’examen PEEE est défectueux car il n’a pas tenu compte du statut de la rivière Bonnet Plume. On répond à cela qu’il s’agit d’une erreur sans conséquence étant donné que, même si cela est exact, on a quand même tenu compte, lors de l’examen, de tous les facteurs pertinents.
Le rapport d’évaluation initiale préparé dans le cadre de l’examen PEEE a décrit en cinq lignes les effets qui pourraient se produire au niveau de l’environnement. La signification de ces effets n’a donné lieu à aucune discussion. Aucune indication ne figure sous les rubriques « Situation de la zone » et « Situation des terres ». Le rapport recommandait la mise à exécution du projet (c’est-à-dire le fait de conduire des bulldozers sur le site). Il est clair que le rapport d’évaluation initiale n’a pas tenu compte du fait que la rivière Bonnet Plume avait été, huit mois seulement auparavant, mise en candidature par le ministre des AIN et acceptée comme candidate à la désignation de rivière du patrimoine canadien. Il s’agissait là d’un facteur pertinent dont il aurait fallu tenir compte. De plus, le fait que la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada n’ait pas été avisée et qu’on ne lui ait pas demandé de fournir ses observations, et qu’on n’ait pas non plus demandé l’avis du Conseil tribal des Gwich’in constituent aussi des facteurs pertinents. Les Gwich’in ont, à l’égard de la zone en question, un intérêt important. Ils seront affectés par l’utilisation des terres dans la zone des claims puisqu’ils utilisent, en aval, les terres et les eaux en question.
Cela dit, je reconnais la force de l’argument développé par les intimés et selon lequel une ordonnance déclarant l’invalidité du permis (de conduire des bulldozers jusqu’au site) n’aurait guère de sens. Les bulldozers ont été conduits jusqu’au site des claims et en ont depuis été retirés. Les travaux auxquels ils étaient destinés ont déjà été exécutés. Cela étant, j’admets que les ordonnances demandées à la Cour ne seraient d’aucune utilité.
Pour les motifs exposés, je suis convaincue qu’il y a lieu de rejeter les demandes.
[1] C.R.C., ch. 1524, modifié.
[2] DORS/84-467.
[3] Dossier de la demande de la requérante, p. 130.
[4] [Loi de l’extraction du quartz dans le Yukon) S.C. 1924, ch. 74.
[5] Règlement concernant les mines quartzeuses, édicté par Arrêté en conseil, no 203 en date du 21 mars 1898, S.C. 1898 à la p. xlviii [aussi (1898), 31 The Canada Gazette 2377].
[6] Art. 57(1) de la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon.
[7] Ainsi qu’à la Loi sur les forces hydrauliques du Canada [L.R.C. (1985), ch. W-4] et à la Loi sur les parcs nationaux [L.R.C. (1985), ch. N-14].
[8] S.R.C. 1927, ch. 113.
[9] S.R.C. 1970 (1er Supp.), ch. 48, art. 3.1 à 3.3 (les actuels articles 4 à 7 de la Loi).
[10] Mineral Act, R.S.B.C. 1936, ch. 181 et le Mines Right-of-way Act, R.S.B.C. 1936, ch. 187.
[11] S.B.C. 1965, ch. 31 (actuellement R.S.B.C. 1979, ch. 309).
[12] Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3, à la p. 40.
[13] R.S.S. 1978, ch. P-13.
[14] S.S. 1979-80, ch. E-10.1.
[15] Évaluation environnementale initiale—Guide à l’intention du personnel du programme des Affaires du Nord, novembre 1992, Couronne fédérale, dossier des intimés, p. 267.