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[1997] 1 C.F. 457

IMM-3320-95

Jeffrey Hugh Williams (requérant)

c.

Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (intimé)

Répertorié : Williams c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1re inst.)

Section de première instance, juge Reed—Toronto, 23 juillet; Ottawa, 29 octobre 1996.

Droit constitutionnel Charte des droits Vie, liberté et sécurité Questions certifiées : l’art. 70(5) de la Loi sur l’immigration, qui donne au ministre le pouvoir discrétionnaire de formuler l’opinion qu’une personne constitue un danger pour le public, fait-il intervenir les droits à la liberté et à la sécurité de la personne conformément à l’art. 7 de la Charte?Dans l’affirmative, l’art. 70(5) est-il incompatible avec la justice fondamentale et inopérant du fait qu’il est d’une imprécision inconstitutionnelle et/ou ne prévoit pas la nécessité de motiver une décision?L’exercice par le ministre d’un pouvoir discrétionnaire, dans le contexte de la procédure utilisée, est-il incompatible avec la justice naturelle et avec l’art. 7 de la Charte lorsqu’aucun motif n’est donné?

Citoyenneté et Immigration Exclusion et renvoi Renvoi de résidents permanents Questions certifiées : l’art. 70(5) de la Loi sur l’immigration, qui donne au ministre le pouvoir discrétionnaire de formuler l’opinion qu’une personne constitue un danger pour le public, fait-il intervenir les droits à la liberté et à la sécurité de la personne conformément à l’art. 7 de la Charte?Dans l’affirmative, l’art. 70(5) est-il incompatible avec la justice fondamentale et inopérant du fait qu’il est d’une imprécision inconstitutionnelle et/ou ne prévoit pas la nécessité de motiver une décision?L’exercice par le ministre d’un pouvoir discrétionnaire, dans le contexte de la procédure utilisée, est-il incompatible avec la justice naturelle et avec l’art. 7 de la Charte lorsqu’aucun motif n’est donné?

Droit administratif Contrôle judiciaire Certiorari Question certifiée : l’omission de motiver une décision rendue en vertu de l’art. 70(5) selon laquelle une personne constitue un danger pour le public, dans le contexte de la procédure utilisée pour cette décision, va-t-elle à l’encontre de la justice naturelle et de l’équité en matière de procédure?

LOIS ET RÈGLEMENTS

Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44], art. 7.

Loi sur l’immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, art. 70(5) (édicté par L.C. 1995, ch. 15, art. 13), 83 (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 73).

JURISPRUDENCE

DÉCISION CITÉE :

Williams c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1997] 1 C.F. 431 (1re inst.).

DEMANDE de certification de questions conformément à l’article 83 de la Loi sur l’immigration. Demande accueillie.

AVOCATS :

Ronald P. Poulton et Victoria Russell pour le requérant.

I. John Loncar pour l’intimé.

PROCUREURS :

Jackman & Associates, Toronto, pour le requérant.

Le sous-procureur général du Canada pour l’intimé.

Ce qui suit est la version française des motifs de l’ordonnance rendus par

Le juge Reed : Le 18 octobre 1996 [[1997] 1 C.F. 431, j’ai exposé des motifs relativement à la présente demande et indiqué que la décision objet du contrôle judiciaire serait annulée et l’affaire renvoyée au ministre pour nouvel examen. J’ai retardé le prononcé d’une ordonnance définitive jusqu’à ce que les avocats aient eu la possibilité de présenter des observations au sujet de la certification d’une question, laquelle certification est requise, conformément à l’article 83 de la Loi sur l’immigration [L.R.C. (1985), ch. I-2 (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 73)], pour permettre le dépôt d’un appel.

L’avocat de l’intimé et celui du requérant ont soumis des textes qui pourraient être utilisés à des fins de certification. Le texte proposé par l’intimé est libellé ainsi :

[traduction] Les principes de justice fondamentale, de justice naturelle et d’équité exigent-ils que le ministre informe un individu des motifs pour lesquels il a jugé que cet individu constitue un danger pour le public au Canada au sens du par. 70(5) de la Loi sur l’immigration?

L’avocat du requérant a proposé ce qui suit :

[traduction] 1. Le paragraphe 70(5) de la Loi sur l’immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, fait-il intervenir les droits à la liberté et/ou à la sécurité de la personne conformément à l’article 7 de la Charte des droits et libertés?

2. Dans l’affirmative, le paragraphe 70(5) est-il incompatible avec les exigences de la justice fondamentale et inopérant du fait qu’il est d’une imprécision inconstitutionnelle et/ou ne prévoit pas l’obligation de motiver une décision selon laquelle une personne constitue un danger pour le public au Canada?

3. Subsidiairement, l’exercice par le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration du pouvoir discrétionnaire d’exprimer l’opinion qu’une personne constitue un danger pour le public au Canada conformément au paragraphe 70(5) est-il incompatible avec les exigences de la justice fondamentale et l’article 7 de la Charte là où il ne motive pas son opinion?

4. L’omission de motiver une décision rendue en vertu du paragraphe 70(5) selon laquelle une personne constitue un danger pour le public au Canada va-t-elle à l’encontre des exigences de la justice naturelle et de l’équité en matière de procédure?

Je constate que le texte proposé par l’intimé manque de clarté. Il est tiré en partie des motifs de l’ordonnance que j’ai rendue, mais sans qu’il soit fait mention de la limite y mentionnée « dans les circonstances de l’espèce ». Concomitamment, on ne semble pas faire de distinction, dans la question, entre une conclusion selon laquelle le paragraphe 70(5) [édicté par L.C. 1995, ch. 15, art. 13] pourrait ne pas être valide parce qu’il n’y a aucune obligation légale de fournir des motifs et une conclusion selon laquelle, même si ce n’est pas le cas, la procédure qui de fait est utilisée (et qui pourrait être modifiée sans modification législative) peut contrevenir à l’un ou à plusieurs des principes de justice fondamentale, de justice naturelle ou d’équité. Le texte soumis par le requérant établit cette distinction plus clairement, et je dois donc lui accorder la préférence.

L’intimé soutient que les questions proposées par le requérant au sujet de l’imprécision inconstitutionnelle ne devraient pas être incluses dans la certification parce qu’il existe une jurisprudence abondante qui a réglé ce point. L’inclusion de ces questions par le requérant correspond à la présentation d’un appel incident de sa part. Ce sont des points sur lesquels le requérant n’a pas obtenu gain de cause dans la plaidoirie qu’il a présentée devant moi. Si la certification n’était pas requise et s’il existait un droit d’appel automatique, un requérant qui aurait obtenu gain de cause pourrait donner suite à un appel formé par un intimé n’ayant pas obtenu gain de cause en contestant les aspects de la décision sur lesquels ledit requérant n’avait pas obtenu gain de cause.

De toute façon, bien qu’il puisse exister une jurisprudence concernant l’imprécision constitutionnelle, les arguments du requérant, selon lesquels cette imprécision existe à cause de l’effet cumulatif d’un certain nombre de facteurs ou parce qu’aucune disposition législative n’exige que l’on motive une décision, ne sont pas des points que j’ai vu aborder. Il s’agit de questions graves de portée générale, comme celles qui concernent la validité de la procédure qui a été adoptée, à supposer que le paragraphe 70(5) soit lui-même valide.

En certifiant un certain nombre de questions, je sais que cela ne signifie pas que la Cour d’appel doive y répondre. Elle choisira, comme elle le jugera bon, celles auxquelles elle répondra. Le fait de certifier les quatre questions soumises par le requérant, cependant, permettra que soient abordées toutes les questions graves de portée générale qui ont été soulevées devant moi. Les questions suivantes seront donc certifiées :

1. Le paragraphe 70(5) de la Loi sur l’immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, fait-il intervenir les droits à la liberté et/ou à la sécurité de la personne conformément à l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés [qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44]]?

2. Dans l’affirmative, le paragraphe 70(5) est-il incompatible avec les exigences de la justice fondamentale et inopérant du fait qu’il est d’une imprécision inconstitutionnelle et/ou ne prévoit pas l’obligation de motiver une décision selon laquelle une personne constitue un danger pour le public au Canada?

3. L’exercice par le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration du pouvoir discrétionnaire d’exprimer l’opinion qu’une personne constitue un danger pour le public au Canada conformément au paragraphe 70(5), dans le contexte de la procédure utilisée pour cette décision, est-il incompatible avec les exigences de la justice fondamentale et l’article 7 de la Charte là où il ne motive pas son opinion?

4. L’omission de motiver une décision rendue en vertu du paragraphe 70(5) selon laquelle une personne constitue un danger pour le public au Canada, dans le contexte de la procédure utilisée pour cette décision, va-t-elle à l’encontre des exigences de la justice naturelle et de l’équité en matière de procédure?

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