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In re North Coast Air Services Limited
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, le juge Walsh et le juge suppléant Sheppard—Prince Rupert (C.-B.), les 28 et 29 février et le ler mars; Ottawa, le 13 mars 1972.
Examen judiciaire—Comité des transports aériens de la Commission canadienne des transports—Permis de trans- porteur aérien—Modification du permis par l'adjonction de conditions interdisant le transport entre certains points des itinéraires d'un transporteur à horaire fixe—Invitation à faire des observations avant que la modification ne soit faite—Les règles de la justice naturelle sont-elles applica- bles—Aucune audition prévue—Loi sur l'aéronautique, S.R.C. 1970, c. A-3, art. 16(6) et (8).
Transports aériens—Comité des transports aériens— Transporteurs aériens—Modification des permis après leur délivrance—Restrictions imposées aux itinéraires—Droit de limiter les itinéraires par modification du permis—Loi sur l'aéronautique, S.R.C. 1970, c. A-3, art. 16(6) et (8).
En 1968, la Cour suprême du Canada jugea nulle une ordonnance générale édictée en 1951 par la Commission des transports aériens qui prévoyait que nul transporteur aérien commercial ne pouvait acheminer du trafic entre des points nommés dans un permis des classes 1 ou 2. En 1970, le comité des transports aériens de la Commission canadienne des transports envoya à 450 transporteurs aériens commer- ciaux une lettre portant que la commodité et les besoins du public exigeaient que les itinéraires des transporteurs des classes 1 et 2 soient protégés en interdisant aux transpor- teurs de classe 4 de les exploiter et qu'il proposait la modification de chaque permis y adjoignant la condition contenue auparavant dans l'ordonnance générale. Toutefois, les 450 titulaires de permis furent invités individuellement à présenter des observations concernant les raisons de ne pas adjoindre cette condition à leur permis. Cinquante-huit titu- laires seulement présentèrent des observations, mais le comité adjoignit la condition à tous les permis de classe 4. L'appelante, transporteur de classe 4 depuis 1959, introdui- sit, en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, une demande d'annulation de la décision du comité et en interjeta simultanément appel en vertu de l'article 64(2) de la Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, c. N-17.
Arrêt: rejet de l'appel et de la demande.
(1) Le juge en chef Jackett et le juge Walsh: les règles de la justice naturelle s'appliquaient et la Commission ne pou- vait modifier un permis de transporteur aérien en vertu de l'article 16(8) de la Loi sur l'aéronautique qu'après avoir accordé au titulaire une possibilité réelle de corriger ou de contredire toute déclaration pertinente préjudiciable à son point de vue. La Commission l'avait fait car (1) elle invita l'appelante à présenter ses observations sur les principes directeurs annoncés par la Commission avant de décider d'adjoindre définitivement la condition à son permis, et (2) bien que la Commission n'ait pas exposé dans sa lettre la situation de fait qui justifiait ses principes directeurs, l'ap- pelante, en tant que transporteur aérien ayant de l'expé- rience, était au courant de la question, c'est-à-dire de l'obli- gation incombant aux transporteurs aériens à horaire fixe d'assurer un service régulier sur des itinéraires quelle que
soit l'importance du trafic. Arrêt suivi: Le Roi c. Port of London Authority [1919] 1 K.B. 176, le juge lord Bankes, à la p. 184; arrêt mentionné: Board of Education c. Rice [1911] A.C. 179.
Le juge suppléant Sheppard: la seule condition posée par le Parlement à l'exercice par la Commission de ses pouvoirs de modification des permis en vertu de l'article 16(8) de la Loi sur l'aéronautique est que la commodité et les besoins du public l'exigent; l'exercice de ce pouvoir est expressé- ment laissé à la discrétion de la Commission, qui peut former son opinion sans audience et sans tenir compte des principes de la justice naturelle. Arrêt suivi: Liversidge c. Anderson [1942] A.C. 206.
(2) Le juge en chef Jackett et le juge Walsh: en vertu de l'article 16(8) de la Loi sur l'aéronautique, la Commission peut adjoindre une condition à un permis par voie de modification tout aussi librement qu'elle peut le faire en délivrant un permis en vertu de l'article 16(6).
APPEL d'une décision du comité des trans ports aériens de la Commission canadienne des transports et demande d'annulation de la décision.
A. A. W. MacDonnell, c.r. pour North Coast Air Services Limited.
J. M. Fortier, c.r. et N. Norton pour le comité des transports aériens.
John B. Hamilton, c.r. pour Canadian Pacific Airlines.
F. Lemieux pour Pacific Western Airlines.
A. Garneau pour le procureur général du Canada.
M. R. Robertson pour Trans -Provincial Airlines.
LE JUGE EN CHEF JACKETT (oralement)—En l'espèce, il est présenté en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale une demande d'examen et d'annulation d'une décision du comité des transports aériens de la Commission canadienne des transports, datée du 20 octobre 1971, qui ajoutait des conditions au permis de service aérien commercial A.T.C. 1016/59(C) de l'appelante, et il est interjeté appel de la même décision en vertu de l'article 64(2) de la Loi nationale sur les transports (S.R.C. 1970, c. N-17) telle que modifié par la Loi sur la Cour fédérale, lu en corrélation avec l'article 10 de la Loi concernant les Statuts révisés (S.C. 1964-65, c. 48). La demande et l'appel ont été
réunis en une seule procédure par ordonnance de la Cour.
Il est utile d'examiner, dans l'ordre chronolo- gique, la série d'événements qui ont conduit à ces procédures.
En 1959, en vertu de la Partie II de la Loi sur l'aéronautique, l'appelante s'est vu accorder un permis d'exploiter, entre autres, un service aérien commercial d'affrètement à partir d'une base sise à Prince Rupert (Colombie-Britanni- que). Il y était stipulé qu'il resterait en vigueur jusqu'à sa suspension ou son annulation. Le 6 août 1968, la toute nouvelle Commission cana- dienne des transports le remplaça par le permis A.T.C. 101 6 / 5 9(C). Lorsque le premier permis fut délivré en 1959, il existait une ordon- nance intitulée Ordonnance générale 5/51, édictée par la Commission des transports aériens le 23 octobre 1951, qui ordonnait que nul transporteur aérien exploitant un service commercial ne fasse de trafic, entre autres, entre des points nommés dans un permis accordé à tout transporteur aérien exploitant un service commercial à horaires fixes de la classe 1 ou entre des points nommés dans un permis accordé à tout transporteur aérien exploitant un service commercial sans horaire fixe de la classe 2 sauf dans certaines circonstances préci- sées dans l'Ordonnance.
En 1967, l'appelante ayant été reconnue cou- pable de la violation de l'Ordonnance générale 5/51, la Cour d'appel de la Colombie-Britan- nique jugea, en appel de ces inculpations, que l'Ordonnance 5/51 était ultra vires (Regina c. North Coast Air Services Ltd. 65 D.L.R. (2 e ) 334).
A l'étape suivante, par suite de l'entrée en vigueur de la Loi nationale sur les transports (S.C. 1966-67, c. 69), le comité des transports aériens de la Commission canadienne des trans ports adopta, le 17 janvier 1968, l'Ordonnance 1968-A-5 dans le but de transformer l'Ordon- nance générale 5/51 et certaines autres ordonnances en ordonnances du comité des transports aériens. Dans l'arrêt North Air Servi ces Ltd. c. La Commission canadienne des transports [1968] R.C.S. 940, la Cour suprême du Canada déclara que l'Ordonnance générale
5/51 et les autres ordonnances mentionnées dans l'Ordonnance 1968-A-5 étaient nulles.
En date du 20 octobre 1971, le comité des transports aériens édicta l'Ordonnance 1971-A-331 qui ajoutait une condition au permis A.T.C. 1016/59(C) de l'appelante l'empêchant, en tant que titulaire du permis, d'acheminer du trafic entre des points d'une route desservie par des transporteurs des clas ses 1 ou 2 excepté dans des circonstances préci- sées dans l'Ordonnance.
Par la présente procédure, la validité de l'Or- donnance 1971-A-331 du 20 octobre 1971 est contestée.
La contestation de la validité de l'ordonnance en question se divise en deux parties, savoir:
a) au premier chef, selon l'appelante la Com mission canadienne des transports n'a pas le pouvoir d'imposer des restrictions à la sphère d'exploitation d'un transporteur donné dans le but de protéger un autre transporteur ou de créer des monopoles, et, en tous cas, elle ne peut pas le faire par voie de modification du permis, et
b) subsidiairement, selon l'appelante, même si la Commission avait le pouvoir d'adjoindre des conditions au permis en question, elle ne l'a pas fait de manière valable.
Les dispositions de la Loi sur l'aéronautique (S.R.C. 1970, c. A-3) portant directement sur les pouvoirs de la Commission d'édicter l'Or- donnance en question, sont les suivantes:
9. (1) Dans la présente Partie
«service aérien commercial» signifie tout emploi d'aéronef dans les limites ou au-dessus du Canada, moyennant un prix de louage ou une rémunération;
16. (1) La Commission peut délivrer, à toute personne qui en fait la demande, un permis d'exploitation d'un service aérien commercial qui revêt la forme du permis demandé ou toute autre forme.
(3) La Commission ne doit pas délivrer de permis de ce genre à moins qu'elle ne soit convaincue que le service aérien commercial projeté est et sera requis pour la commo- dité et les besoins présents et futurs du public.
(6) Lorsqu'elle délivre un permis, la Commission peut prescrire les itinéraires qui peuvent être suivis ou les régions à desservir, et elle peut joindre au permis les condi tions qu'elle juge nécessaires ou désirables dans l'intérêt public; et, sans restreindre la généralité des dispositions qui précèdent, elle peut imposer des conditions concernant les horaires, les ports d'escale, le transport des passagers et des marchandises, ainsi que les assurances, et, sous réserve de la Loi sur les postes, le transport du courrier postal.
(8) La Commission peut suspendre, annuler ou modifier la totalité ou toute partie d'un permis, si, à son avis, la commodité et les besoins du public l'exigent.
17. (1) Nul ne doit exploiter un service aérien commer cial à moins qu'il ne détienne un permis valable et restant en vigueur délivré aux termes de l'article 16.
Ces dispositions suivent la formule tradition- nelle portant création de monopoles et de quasi monopoles dans le domaine des transports pour que, dans la mesure du possible, ce soit l'entre- prise privée qui assure les services demandés par le public. Naturellement, quand on lit le paragraphe (1) de l'article 16 en corrélation avec l'article 17, il ressort que, si un permis d'exploitation est délivré à une personne pour qu'elle exploite un itinéraire particulier et qu'il n'y a pas d'autres titulaires de permis, cette personne détiendra le monopole de cet itiné- raire. En outre, il est tout à fait possible que la Commission ait constaté que le seul moyen d'assurer la desserte à heure fixe d'un itinéraire particulier est d'accorder un permis pour cet itinéraire à une personne à condition qu'elle desserve l'itinéraire—étant entendu que cela ne peut être exigé que si elle est protégée de toute concurrence. Dans un tel cas, il est clair que la Commission peut conclure qu'il faut que, pour la commodité et les besoins du public, les permis d'affrètement accordés à des tiers soient rédigés de manière à protéger de la concurrence l'exploitant d'un tel itinéraire tenu de respecter un horaire. Donc, à mon avis, la condition qui est l'objet de l'ordonnance contestée fait partie de ce que la Commission peut adjoindre à un permis comme étant nécessaire ou souhaitable dans l'intérêt public et je ne trouve rien d'in- compatible avec cette conclusion dans la Partie I de la Loi sur l'aéronautique. De même, il n'y a rien d'incompatible avec cette conclusion dans
les décisions de la Cour d'appel de la Colombie- Britannique et de la Cour suprême du Canada que j'ai mentionnées. Le juge d'appel Tysoe déclarait expressément que [TRADUCTION] «il se peut que la Commission ait le pouvoir d'adjoin- dre au permis de l'appelante une condition l'em- pêchant d'acheminer du trafic entre deux ou plusieurs points désignés dans le permis de la B.C. Airlines Limited» et il mentionna à cet égard l'article 15(1) et (6) de la Loi sur l'aéro- nautique (l'actuel article 16(1) et (6)). Toutefois, il déclara que ce n'était pas la question que la Cour devait résoudre à ce moment-là car l'Or- donnance générale 5/51 était [TRADUCTION] «une ordonnance de portée générale applicable à l'ensemble des transporteurs aériens du Canada appartenant à la catégorie des transpor- teurs commerciaux». En Cour suprême du Canada, le juge Martland, rendant la décision de la Cour, approuva le raisonnement suivi par le juge d'appel Tysoe pour décider que l'article 15 d'alors ne pouvait pas être utilisé à l'appui de l'Ordonnance générale 5/51.
Par conséquent, à mon avis, la condition con- testée fait partie de celle que l'on peut adjoindre à un permis d'affréteur lors de sa délivrance, en vertu de l'article 16(6), si la Commission juge nécessaire ou souhaitable de le faire dans l'inté- rêt public.
En outre, à mon point de vue, si cette condi tion fait partie de celles que l'on peut adjoindre à un permis lors de sa délivrance, alors la Com mission, dans l'exercice de ses pouvoirs, peut l'adjoindre à un permis par voie de modification en vertu de l'article 16(8) «si, à son avis, la commodité et les besoins du public l'exigent». A mon avis, il n'y a rien ni dans les termes ni dans l'esprit de la Loi qui porte qu'une condi tion qu'il était possible d'adjoindre au moment de la délivrance du permis ne peut l'être par voie de modification en vertu de l'article 16(8), à condition toutefois que, de l'avis de la Com mission, ce soit nécessaire pour la commodité et les besoins du public.
Toutefois, l'appelante soutient qu'il ne s'agit pas simplement d'une modification de son permis parce que la Commission a pris en même temps des mesures propres à adjoindre ladite condition au permis de l'appelante et à celui de tous les autres affréteurs existants et qu'il s'a-
gissait donc d'une tentative de faire indirecte- ment ce que la Cour suprême du Canada avait jugé que la Commission ne pouvait faire direc- tement, savoir, prendre une ordonnance géné- rale interdisant à tous les titulaires de permis d'affréteurs d'assurer un service entre des bases sur des itinéraires de classe 1 ou 2 sauf certai- nes exceptions précises. Je ne peux pas déduire du fait que la Commission n'avait pas le pouvoir d'adopter une interdiction par voie d'une ordon- nance générale qu'elle ne pouvait adjoindre à chaque permis une condition ayant le même effet prohibitif. Si la Commission avait eu le pouvoir d'adopter une ordonnance prohibitive générale, elle aurait créé une interdiction légale quelles que soient les circonstances dans chaque cas particulier. Elle n'avait pas le pou- voir d'adopter un tel règlement.' Par contre, la Commission a le pouvoir exprès d'adjoindre à un permis particulier une condition imposant une telle interdiction à son titulaire si elle estime que c'est «nécessaire ou désirable dans l'intérêt public» (art. 16(6)) ou «si, à son avis, la commodité ou les besoins du public l'exigent» (art. 16(8)). Ceci implique que la Commission étudie la situation particulière pour chaque permis, à la lumière des principes généraux d'orientation qu'elle a adoptés. Si, ce faisant, la Commission, par un raisonnement approprié, arrive au même résultat dans chaque cas, le résultat final est un exercice valable de ses pouvoirs même si, en fait, ce résultat est le même que celui qu'elle avait tenté antérieure- ment d'obtenir en utilisant un pouvoir réglemen- taire qu'elle ne possédait pas. Dans un cas, elle a fait ce que le Parlement l'a autorisée à faire. Dans l'autre, elle a tenté de faire ce qu'elle n'était pas en droit de faire.
Ceci m'amène à la deuxième partie de l'af- faire. Selon la prétention de l'appelante, la Commission a, dans son cas, omis de se confor- mer aux exigences de la justice naturelle avant d'édicter l'ordonnance contestée, de telle sorte que cette dernière ne correspondait pas à un exercice valable du pouvoir que l'article 16(8) confère à la Commission.
Dans son mémoire, l'appelante résume ses arguments à l'appui de ce point de vue de la manière suivante:
[TRADUCTION] Si la Cour considère qu'il est loisible à la Commission en vertu de la «Loi sur l'aéronautique» d'édic- ter l'ordonnance en question, bien qu'à notre avis, on ne puisse pas y trouver la moindre justification dans la Loi, alors, la manière dont le permis a été modifié revient à une décision fondée sur une conclusion erronée à laquelle on est arrivé sans tenir compte des éléments présentés à la Commission.
Nous soutenons que le dossier que la Commission a produit, qui constitue les éléments à sa disposition dont elle a tenu compte avant d'édicter l'ordonnance en question, ne révèle rien qui pourrait plus ou moins permettre à la Com mission de conclure à bon droit qu'elle était fondée à modifier le permis de la demanderesse. On n'y trouve aucune étude des problèmes économiques ou autres, ni aucun autre élément pouvant justifier de restreindre les itinéraires d'un transporteur et, en particulier, rien qui, dans le cas de la North Coast Air Services Ltd., justifierait la limitation de ses itinéraires tant dans la région elle exerce son entreprise qu'ailleurs. En outre, la North Coast Air Services Ltd. a avancé des raisons incontestables pour qu'on ne modifie pas son permis.
Nous soutenons que, pour conclure qu'il fallait imposer aux titulaires de permis une protection des itinéraires, la Commission a considérer des questions étrangères aux éléments déposés et, s'il en est ainsi, elle a enfreint les principes de la justice naturelle en ne communiquant pas les autres éléments considérés au titulaire du permis.
Board of Education c. Rice et autres (1911) 80 L.J.K.B. 796 (C. des L.) [[1911] A.C. 179.]
Nous soutenons que, dès le premier appel de la North Coast Air Services Ltd. à la Cour suprême du Canada, le but de la Commission a été de rétablir la protection des itinéraires sans tenir compte des besoins ou de tout autre facteur et que, n'y étant pas parvenu par le biais d'un règlement, elle essaie maintenant de faire indirectement ce qu'elle ne peut pas faire directement.
Nous soutenons que la Commission a agi de manière arbitraire et avec légèreté en prétendant modifier le permis de la North Coast Air Services Ltd. ainsi que 417 autres permis, conformément à une décision prédéterminée datant du 10 août 1970 (ou même antérieure à cette date) et portant que [TRADUCTION] «la commodité et les besoins du public exigent que les itinéraires desservis par les transpor- teurs aériens des classes 1 et 2 soient protégés en interdi- sant aux transporteurs aériens de classe 4 de les exploiter». Cette décision fut prise malgré les raisons incontestables avancées par la North Coast Air Services Ltd. et les autres transporteurs contre l'imposition d'une protection des itiné- raires et bien qu'aucune preuve à l'effet contraire n'ait été versée au dossier.
Pour évaluer la portée de ces objections, si elles en ont une, il faut tout d'abord examiner dans l'ordre chronologique les éléments perti- nents que l'on trouve au dossier. A mon avis, les documents que l'on doit étudier à cet égard sont les suivants:
1. Un extrait de l'Ordonnance générale 5/51, édictée le 23 octobre 1951 : 2
VU que la Commission juge que les transporteurs par air à services commerciaux à horaire fixe des classes 1 et 8, obligés par les règlements de la Commission de mainte- nir un service à intervalles réguliers en conformité d'un horaire publié, même si le trafic qui s'offre est insuffisant pour assurer un vol lucratif, doivent, pour obtenir des charges maxima, être protégés contre toute concurrence injustifiée de la part des transporteurs qui n'ont pas la même obligation; et
VU que la Commission juge que les transporteurs par air à services commerciaux sans horaire fixe des classes 2 et 9-2, obligés par les règlements de la Commission de desservir avec un certain degré de régularité les points spécifiés dans leur permis respectifs de la Commission, et obligés en outre de desservir ces points en suivant un itinéraire défini, doivent également être protégés dans une certaine mesure contre une concurrence injustifiée;
IL EST PAR LES PRÉSENTES ORDONNÉ:
1. QUE nul transporteur par air à services commerciaux ne transporte de trafic entre des points nommés dans un même permis de tout transporteur par air à services commerciaux à horaire fixe de la classe 1 ou de la classe 8, ou entre des points nommés dans un même permis de tout transporteur par air à services commerciaux sans horaire fixe de la classe 2 ou de la classe 9-2, sauf dans les circonstances suivantes, ...
(Bien que, par la suite, cette ordonnance ait été jugée nulle, sa validité n'avait pas été mise en question lorsqu'en 1959, l'appelante a reçu son permis de classe 4. De plus, ses termes reflètent le point de vue de la Com mission des transports aériens au sujet des conditions dans lesquelles les transporteurs aériens commerciaux à horaires fixes et les autres transporteurs aériens commerciaux devaient exploiter leurs lignes et ils l'expli- quent jusqu'à un certain point.)
2. En 1968, la Cour suprême du Canada a jugé en dernier ressort que l'Ordonnance générale 5/51 était nulle.
3. Le 10 août 1970, le comité des transports aériens de la Commission canadienne des transports a envoyé à tous les transporteurs aériens commerciaux par affrètement, y com- pris l'appelante, la lettre suivante:
[TRADUCTION] Le comité étudie l'effet que les services offerts par chaque transporteur aérien de classe 4 ont sur les transporteurs aériens des classes 1 et 2 en ce qui concerne le trafic acheminé entre les points indiqués dans
leurs permis respectifs. Chaque permis de classe 4 en cause est considéré comme un cas particulier.
La commodité et les besoins du public exigent que les itinéraires desservis par les transporteurs aériens des clas ses 1 et 2 soient protégés en interdisant aux transporteurs aériens de classe 4 de les exploiter en affrétant leurs appareils entre les points indiqués dans chacun des permis des transporteurs aériens des classes 1 et 2, sous réserve des dispositions de l'annexe ci-jointe.
Le comité propose de prendre une ordonnance modi- fiant votre permis de classe 4 susmentionné en consé- quence en y adjoignant les conditions prévues dans l'an- nexe ci-jointe.
Nous vous saurions gré d'accuser réception de cette lettre au plus tard le (24 septembre 1970) en signant la copie ci-jointe à l'emplacement prévu et en la renvoyant au soussigné avec vos observations concernant toutes conditions qui selon vous ne devraient pas être adjointes à votre permis.
(Avec cette lettre, à la suite d'une lettre ulté- rieure apportant des modifications, on trou- vait une annexe exposant les conditions qui, par la suite, ont été placées dans l'ordonnance contestée en l'espèce.)
4. Le 25 août 1970, l'avocat de l'appelante écrivit au comité des transports aériens con testant l'action exposée dans la lettre du comité, datée du 10 août, selon l'interpréta- tion qu'il en donnait. Le 19 octobre 1970, le comité répondit à cette lettre. Voici un extrait de cette réponse:
[TRADUCTION] Il semble que vous ayez mal interprété les buts et l'intention de la lettre du comité datée du 10 août 1970. En fait, la lettre exprime l'intention du comité d'examiner au fond le permis de classe 4 de votre cliente dans le but de s'assurer que ce permis, qui a été délivré en 1959 conformément à l'article 15 de la Loi, est conforme aux exigences actuelles de la Loi sur l'aéronautique. Cet examen ne vise pas votre cliente en particulier, puisque tous les permis de classe 4 y sont soumis.
En envoyant à tous les transporteurs de classe 4 notre lettre du 10 août, nous désirions obtenir leur point de vue sur notre projet et solliciter leurs avis pour déterminer s'il y avait des raisons de modifier ledit projet; il ne s'agissait pas d'introduire des règlements concernant la protection des itinéraires et des bases, ni de les faire approuver.
5. Par une lettre datée du 22 septembre 1970, l'avocat de l'appelante a soumis au comité des transports aériens les prétentions de l'ap- pelante en ce qui concernait la «décision du comité» contenue dans la lettre du 10 août.
Ce document exposait en détail ces préten- tions et il les résumait ainsi:
[TRADUCTION] En résumé, la North Coast soutient donc qu'en premier lieu, le comité des transports aériens de la Commission canadienne des transports n'est pas compé- tent pour rétablir la protection des itinéraires de quelque manière que ce soit, cette question ayant été soulevée lors d'une demande d'autorisation d'appel devant la Cour suprême du Canada en 1969, demande qui a été retirée lorsque le comité a convenu de s'associer à la présenta- tion d'un dossier à la Cour suprême du Canada pour qu'elle tranche le problème une fois pour toutes; par conséquent, le comité ne devrait pas s'occuper de la question de la protection des itinéraires et des bases de quelque façon que ce soit avant que la décision sur le dossier présenté à la Cour suprême ne soit rendue.
En deuxième lieu, que, de 1968 jusqu'à présent, sous le régime de la libre concurrence, on n'a constaté aucune détérioration des services et, en fait, le service aérien s'est amélioré et le trafic a augmenté.
En troisième lieu, que, si l'on rétablit la protection des itinéraires et des bases, la North Coast se verra dans l'obligation de mettre fin à son activité commerciale.
En quatrième lieu, que rétablir la protection des itiné- raires entraînerait une détérioration du service aérien plutôt qu'une amélioration.
6. Le 23 septembre 1970, l'un des commis- saires envoya à un fonctionnaire du ministère des Transports une lettre dont voici un extrait:
[TRADUCTION] A la suite de notre conversation télépho- nique, je vous envoie ci-joint les documents suivants:
1. Une copie de la lettre du 10 août 1970, à laquelle j'ai joint les annexes, que j'ai cotées «A» et «13», lettre qui a été envoyée à tous les titulaires de permis de classe 4. Ceux dont on a choisi de protéger les bases ont reçu l'annexe «A». Ceux qui ne voyaient pas leur base protégée ont reçu l'annexe «13».
2. Une copie de la lettre datée du 10 août 1970 concer- nant la protection des itinéraires, qui fut envoyée à tous les titulaires de permis de classe 4, et à laquelle j'ai joint une annexe qui accompagnait la lettre susmentionnée.
La modification des permis de la manière indiquée a pour but de faire face à la situation créée par la décision de la Cour suprême selon laquelle les ordonnances géné- rales de la Commission applicables à ces questions étaient ultra vires. Vous remarquerez que, dans chaque cas, il est clairement indiqué que le comité se propose de modifier les permis comme prévu, mais que le titulaire a la possibi- lité de présenter son point de vue à cet égard.
7. Le 2 juillet 1971, le président de la Com mission canadienne des transports écrivit la
lettre suivante au président de l'Association des transports aériens du Canada:
[TRADUCTION] Dès sa réception, M. Belcher m'a envoyé copie de votre lettre du 29 juin concernant la protection des bases et des itinéraires. Je peux vous assurer que le comité des transports aériens et moi-même, en tant que président de la Commission canadienne des transports, sommes pour le moins aussi préoccupés que votre Asso ciation par l'incertitude actuelle.
On doit cependant rappeler qu'il y a plus d'un an, le comité des transports aériens en venait à la conclusion qu'à défaut d'une modification de la Loi par le Parlement, le moyen le plus efficace de résoudre le problème était de modifier, quand besoin était, les permis de chaque trans- porteur en particulier. Nous avons alors invité votre Association et les autres représentants de l'industrie des transports aériens à présenter leurs observations sur les mesures proposées par le comité.
J'étais présent à la réunion du comité des transports aériens qui s'est tenue aujourd'hui et il a été décidé de donner suite sans délai aux mesures proposées voilà plus d'un an au sujet des modifications des permis individuels.
Bien qu'il soit de toute évidence nécessaire de tenir compte des réponses aux lettres envoyées en août dernier à tous les transporteurs de classe 4 nous avons l'intention de procéder progressivement et systématiquement au rée- xamen de ces permis. Nous nous réjouissons de trouver dans votre lettre du 29 juin l'assurance de l'appui effectif de l'Association des transports aériens du Canada à l'ac- tion que nous entreprenons.
8. Le 20 octobre 1971, le comité des trans ports aériens édicta l'ordonnance contestée par les présentes. Elle est rédigée ainsi:
ATTENDU QUE par permis no A.T.C. 1016/59(C), North Coast Air Services Ltd., est autorisée à exploiter un service aérien commercial d'affrètement de classe 4, d'une base sise à Prince Rupert, B.C. selon les conditions dudit permis;
ATTENDU QUE par lettre recommandée en date du 10 août 1970 relative à l'acheminement du trafic par le titulaire entre les points d'une route desservis dans le cadre d'un permis de classe 1 ou 2, le Comité a avisé le titulaire que, pour les raisons y exposées, il se proposait d'émettre une ordonnance modifiant le permis en ques tion par l'adjonction des conditions énoncées à l'annexe des présentes, sauf par le titulaire à faire connaître éven- tuellement ses représentations à l'encontre desdites con ditions dans un délai n'excédant pas le 24 septembre 1970;
ATTENDU QUE le titulaire a déposé auprès du Comité une représentation par lettre datée du 22 septem- bre 1970.
ET ATTENDU QUE le Comité a étudié tout ce qui se rapporte à ladite modification et qu'il est d'avis que la
commodité et les besoins du public exigent la modifica tion du permis afin de faire entrer dans les faits l'intention et le but de la Loi sur l'aéronautique, Partie II;
IL EST ORDONNÉ QUE:
1. ATTENDU QU'au sens de la présente ordonnance, «route» relativement à un service aérien commercial, désigne la route desservie par un transporteur aérien canadien de la classe 1 ou de la classe 2 entre des points mentionnés dans un permis lorsqu'il assure un service de transport décrit dans son horaire ou son plan horaire déposé auprès du Comité et en vigueur;
2. ATTENDU QU'au sens de la présente ordonnance. «points» en ce qui concerne un service aérien commercial à taux unitaires, désigne la ville, l'agglomération ou le lieu désigné dans le permis et que le titulaire est autorisé à desservir, déterminé si nécessaire par sa position expri- mée en degrés de latitude et de longitude et
a) en ce qui concerne un point d'un permis de classe 1, comprend un cercle de 25 milles de rayon mesuré à partir du bureau de poste principal dudit point ou à partir de la latitude et de la longitude dudit point; et
b) en ce qui concerne un point d'un permis de classe 2, comprend un cercle de 10 milles de rayon mesuré à partir du bureau de poste principal dudit point ou à partir de la latitude et de la longitude dudit point;
3. Le permis A.T.C. 1016/59(C) est modifié par l'ad- jonction à ce permis des conditions supplémentaires suivantes:
Il est interdit au titulaire d'acheminer du trafic entre les points d'une route excepté dans les circonstances suivantes:
a) lorsque le titulaire détient un permis de la classe 1 ou de la classe 2 pour la desserte des points en questions;
b) lorsque, pour ce qui est d'une route, la distance entre deux points quelconques desservis sur cette route et entre lesquels le vol d'affrètement doit être exécuté est supérieure à une fois et demie la distance directe entre ces points;
c) lorsque le vol d'affrètement (classe 4) commence ou prend fin à un point qui n'est pas compris sur une route, à condition que le titulaire n'achemine pas de trafic local entre deux points quelconques de cette route;
d) lorsque, s'agissant d'une route aérienne, il n'existe pas, le jour du vol affrété, de service à taux unitaires à horaire fixe ou à plan horaire et le transporteur titulaire de ladite route n'a pas la possibilité de fournir le transport demandé sur une base comparable;
e) lorsque, pour ce qui est d'un service d'affrètement (classe 4), le titulaire utilise des aéronefs d'un poids maximal autorisé au décollage, sur roues, de 2,500 livres, et lorsque
(i) le plus gros aéronef exploité sur la route par un transporteur aérien de la classe 1 ou de la classe 2, conformément aux indications de son horaire ou de son plan horaire, est un aéronef dont le poids maxi mal autorisé au décollage, sur roues, est inférieur à 25,000 livres, et que,
(ii) le transporteur aérien de la classe 1 ou de la classe 2 n'est pas autorisé à offrir un service d'affrè- tement au moyen d'aéronefs d'un poids maximal autorisé au décollage, sur roues, de 2,500 livres ou, s'il y est autorisé, n'est pas en mesure d'assurer un service au moyen de tels aéronefs dans les trois heures qui suivent la réception d'une demande pré- sentée à cette fin;
f) lorsque, pour ce qui est d'un service d'affrètement de la classe 4, le titulaire utilise des aéronefs d'un poids maximal autorisé au décollage, sur roues, de 7,000 livres, et lorsque:
(i) le plus gros aéronef exploité sur la route par le transporteur aérien de la classe 1 ou de la classe 2, conformément aux indications de son horaire ou de son plan horaire, est un aéronef dont le poids maxi mal autorisé au décollage, sur roues, est égal ou supérieur à 25,000 livres mais ne dépasse pas 50,000 livres et que
(ii) le transporteur aérien de la classe 1 ou de la classe 2 n'est pas autorisé à assurer un service d'af- frètement au moyen d'aéronefs d'un poids maximal autorisé au décollage, sur roues, de 7,000 livres ou, s'il y est autorisé, n'est pas en mesure d'assurer ce service au moyen de ces aéronefs dans les trois heures qui suivent la réception d'une demande pré- sentée à cette fin;
g) lorsque, pour ce qui est d'un service d'affrètement (classe 4), le titulaire utilise des aéronefs d'un poids maximal autorisé au décollage, sur roues, de 18,000 livres et lorsque:
(i) le plus gros aéronef exploité sur la route par le transporteur aérien de la classe 1 ou de la classe 2, conformément aux indications de son horaire ou de son plan horaire, est un aéronef dont le poids maxi mal autorisé au décollage, sur roues, est de 50,000 livres ou plus, et que
(ii) le transporteur aérien de la classe 1 ou de la classe 2 n'est pas autorisé à assurer un service d'af- frètement au moyen d'aéronefs d'un poids maximal autorisé au décollage, sur roues,-de 18,000 livres ou, s'il y est autorisé, n'est pas en mesure d'assurer ce service au moyen d'un tel aéronef dans les trois heures qui suivent la réception d'une demande pré- sentée à cette fin;
h) lorsque le service d'affrètement de la classe 4 est exploité pour des motifs de santé ou de sécurité publique;
i) lorsque le service d'affrètement de la classe 4 est exploité pour une période limitée avec le consentement écrit du transporteur aérien de la classe 1 ou de la classe 2 intéressé;
j) lorsque le Comité autorise expressément le titulaire, par écrit, à assurer un service d'affrètement sur une route aérienne.
k) Les vols d'affrètement autorisés ici ne doivent pas être offerts au public ou exploités avec une certaine régularité ou une certaine fréquence.
Cette ordonnance fera partie du permis A.T.C. 1016/59(C) et devra toujours y être jointe.
Selon mon interprétation de l'argumentation qui nous est présentée, cela constitue tous les éléments du dossier d'après lesquels nous devons juger cette espèce, qui sont censés porter sur la question de savoir si l'Ordonnance no 1971-A-331 du comité des transports aériens était valable.
Tout d'abord, je dois dire que selon moi il ne fait pas de doute que, lorsqu'un permis de ser vice aérien commercial est accordé en vertu de l'article 16(1) de la Loi sur l'aéronautique et que le titulaire a mis sur pied son entreprise confor- mément aux pouvoirs qu'on lui a ainsi accordés, la Commission ne peut exercer son pouvoir de suspension, d'annulation ou de modification de ce permis en vertu de l'article 16(8) que, lors- qu'à son avis, la commodité et les besoins du public l'exigent et après avoir accordé au titu- laire «une possibilité réelle de corriger ou de contredire toute déclaration pertinente préjudi- ciable à (son) point de vue». (Comparez avec l'arrêt Board of Education c. Rice [1911] A.C. 179, le Lord chancelier Loreburn à la p. 182.) On ne nous a pas réellement fait valoir d'argu- ment à l'effet contraire. Je n'ai pas à l'esprit d'arrêt qui applique ce principe à un cas compa rable à celui qui nous occupe actuellement, savoir lorsqu'il n'y a pas de dispositions statu- taires prévoyant une «audition»; je ne connais pas non plus de règle générale dans la jurispru dence permettant de décider quand le principe s'applique et quand il ne s'applique pas. (Com- parez avec l'arrêt Durayappah c. Fernando [1967] 2 A.C. 337, Lord Upjohn aux pp. 348 et suivantes.) Néanmoins, considérant les exigen- ces de la vie commerciale moderne, il me semble que les règles de la justice naturelle sont tout aussi applicables à l'annulation ou à la modification d'un permis de durée illimitée pour l'exploitation d'une entreprise de transports importante qu'ils le sont en cas de dépossession au sens traditionnel.
Selon moi, il y a deux questions importantes à envisager dans cette affaire lorsqu'on considère le point de savoir si l'on peut dire que la Com mission a en fait accordé à l'appelante une possibilité réelle de corriger ou de contredire toute déclaration pertinente qui lui était préjudi-
ciable avant de rendre sa décision portant que la commodité et les besoins du public exigeaient que les conditions en question soient adjointes au permis de l'appelante, savoir:
a) La Commission a-t-elle rendu une décision définitive portant que la commodité et les besoins du public exigeaient que des condi tions soient adjointes au permis de l'appe- lante avant de rédiger sa lettre du 10 août 1970 offrant à l'appelante la possibilité de présenter ses observations? et
b) L'appelante, au moment on lui a donné la possibilité de présenter ses observations, a-t-elle su quelles étaient les déclarations qui lui étaient préjudiciables afin de pouvoir les corriger ou les contredire?
En ce qui concerne la première question, à savoir si la Commission avait pris sa décision définitive portant que la commodité et les besoins du public exigeaient que des conditions soient adjointes au permis de l'appelante avant d'écrire sa lettre du 10 août 1970, il est néces- saire d'étudier ladite lettre. Elle déclarait, sans restriction: [TRADUCTION] «La commodité et les besoins du public exigent que , les itinéraires desservis par les transporteurs aériens des clas ses 1 et 2 soient protégés en interdisant aux transporteurs aériens de classe 4 de les exploi ter en affrétant leurs appareils entre les points indiqués dans chacun des permis des transpor- teurs aériens des classes 1 et 2 sous réserve des dispositions de l'annexe ci-jointe». Il est vrai qu'elle disait aussi que [TRADUCTION] «chaque permis de classe 4 en cause est considéré comme un cas particulier» et qu'en concluant, elle incitait à faire des [TRADUCTION] «observa- tions concernant toutes conditions qui selon vous ne devraient pas être adjointes à votre permis». Néanmoins, la déclaration sur l'exis- tence d'exigences à satisfaire par suite de la commodité et des besoins du public est si caté- gorique qu'elle ne semble laisser aucune possi- bilité de faire des observations significatives. Si la question en était restée là, je crois que j'au- rais me ranger à l'avis selon lequel la Com mission avait pris sa décision finale sans accor- der la possibilité de faire des observations. Toutefois, la Commission a par la suite clarifié
ses interïtions dans sa lettre du 19 octobre 1970 aux avocats de l'appelante, elle disait:
[TRADUCTION] Il semble que vous ayez mal interprété les buts et l'intention de la lettre du comité datée du 10 août 1970. En fait, la lettre exprime l'intention du comité d'exa- miner au fond le permis de classe 4 de votre cliente dans le but de s'assurer que ce permis, qui a été délivré en 1959 conformément à l'article 15 'de la Loi, est conforme aux exigences actuelles de la Loi sur l'aéronautique. Cet examen ne vise pas votre cliente en particulier puisque tous les permis de classe 4 y sont soumis.
En envoyant à tous les transporteurs de classe 4 notre lettre du 10 août, nous désirions obtenir leur point de vue sur notre projet et solliciter leurs avis pour déterminer s'il y avait des raisons de modifier ledit projet; il ne s'agissait pas d'introduire des règlements concernant la protection des itinéraires et des bases, ni de les faire approuver.
Bien qu'entre-temps l'appelante ait déposé ses observations, il lui restait suffisamment de temps après cette lettre pour en faire d'autres avant que l'ordonnance définitive ne soit édic- tée le 20 octobre 1971 si le ton péremptoire de la lettre du 10 août 1970 l'avait induite en erreur. Dans ces circonstances, il me semble que la conduite de la Commission la place du bon côté de la ligne de démarcation tracée par le juge Lord Bankes dans l'arrêt Le Roi c. Port of London Authority [1919] 1 K.B. 176, il déclarait, à la page 184:
[TRADUCTION] D'une part, il y a les affaires dans lesquelles un tribunal exerçant sa discrétion de bonne foi a adopté des principes directeurs et où, sans refuser d'entendre le deman- deur, il les porte à son attention et lui fait savoir qu'après l'avoir entendu il rejettera sa demande, conformément à ces principes directeurs, à moins qu'il n'y ait des facteurs exceptionnels applicables à son cas. Je pense que l'avocat des appelants admettra que, si ces principes directeurs ont été adoptés pour des motifs que le tribunal peut légitime- ment soutenir, on ne peut s'opposer à cette façon de procé- der. D'autre part, il arrive, dans certains cas, qu'un tribunal adopte une règle, ou prenne la décision, qu'il n'entendra pas de demande d'une certaine catégorie quel qu'en soit l'au- teur. Il faut nettement distinguer ces deux catégories....
Dans l'affaire Re Hopedale Developments Ltd. et la Ville de Oakville (1964) 47 D.L.R. (2 e ) 482, le juge d'appel McGillivray a adopté cette appro- che en rendant la décision de la Cour d'appel de l'Ontario, aux pp. 486 et 487, il renvoie à d'autres arrêts appliquant le même principe.
Sur cet aspect de la question, je •pourrais ajouter qu'il ne me semble pas très surprenant que, sur plus de 400 transporteurs par affrète- ment touchés, seulement 58 présentèrent des observations et qu'aucun d'entre eux n'a réussi
à persuader la Commission de modifier ses prin- cipes directeurs. Nous devons présumer que la Commission avait pris soin de mettre au point ses principes directeurs en envisageant tous les problèmes possibles.
J'en viens maintenant à la deuxième question que j'ai mentionnée, savoir: L'appelante, au moment on lui a donné la possibilité de présenter ses observations, a-t-elle su quelles étaient les déclarations qui lui étaient préjudi- ciables afin de pouvoir les corriger ou les contredire?
A cet égard, quand on se rapporte à la lettre du 10 août 1970, il semble que la seule déclara- tion pertinente est celle que j'ai déjà mention- née, savoir, que [TRADUCTION] «La commodité et les besoins du public exigent que les itinérai- res desservis par les transporteurs aériens des classes 1 et 2 soient protégés en interdisant aux transporteurs aériens de classe 4 . .. sous réserve des dispositions de l'annexe ci-jointe». Ce n'est ni plus ni moins qu'une déclaration sur la question qui, en vertu de l'article 16(8), res- sort exclusivement de l'opinion de la Commis sion. Il me semble toutefois qu'une telle opinion doive reposer sur des faits et que c'est cette déclaration concernant ces faits qu'à mon avis, l'appelante devrait avoir eu la possibilité de corriger ou de contredire.
La question est donc de savoir si l'appelante était au courant des faits entraînant la proposi tion d'adjonction de conditions à son permis. Au vu du projet, il ressortait clairement que le permis de l'appelante n'était pas le seul visé. La Commission a conclu de façon générale que les itinéraires desservis par tous les transporteurs aériens des classes 1 et 2 devaient être protégés par l'adjonction aux permis de tous les trans- porteurs aériens de classe 4 des conditions pro posées. Le fondement réel probable, sinon évi- dent, d'une telle conclusion qui vient à l'esprit est celui qui ressort des attendus de l'Ordon- nance générale 5/51, l'on trouve par exemple une référence au fait que les services commerciaux aériens à horaires fixes sont «obligés par les règlements de la Commission de maintenir un service à intervalles réguliers en conformité d'un horaire publié, même si le trafic qui s'offre est insuffisant pour assurer un vol lucratif». Rien n'indique, à mon avis, que
l'appelante se soit trouvée démunie quand elle a voulu déterminer le fondement possible d'une règle générale telle que celle à laquelle elle était confrontée. Si elle avait eu le moindre doute quant aux faits, comme elle était bien représen- tée, je suis sûr qu'elle aurait pris les mesures propres à s'en assurer. En fait, je pense que la prépondérance des probabilités est que toute personne s'occupant ou au courant de ce genre d'industrie réglementée des transports connaît, sans qu'on lui dise, la situation de fait qui rend nécessaire d'envisager certaines formes de pro tection des itinéraires pour les exploitants à horaires fixes.
Avec grande hésitation, étant donné la manière dont la Commission a présenté la ques tion à l'appelante, je conclus que les principes fondamentaux de la justice naturelle ont été respectés.
A mon avis, l'appel et la demande doivent être rejetés.
Avant de clore cette affaire, j'estime qu'il est important de dire que je n'accepte pas le point de vue selon lequel, si le résultat avait été différent et si la décision de cette Cour avait annulé l'ordonnance imposant des conditions au permis de l'appelante aux motifs que cette ordonnance ne respectait pas les principes de la justice naturelle, il en résulterait un coup fatal au mode de réglementation de la Commission. Une fois qu'il est établi que la Commission a le pouvoir d'adjoindre des conditions aux permis, si elle le fait de manière appropriée, la décision d'utiliser ce pouvoir sans accorder une audience équitable n'entraîne pas une nullité absolue mais seulement une nullité relative que la per- sonne directement en cause est seule fondée à demander (voir Durayappah c. Fernando [1967] 2 A.C. 337, Lord Upjohn aux pages 352 et 353). Dans le cas d'une ordonnance contestée en appel pour ce motif et dont la demande de rejet a été accueillie, la question serait proba- blement renvoyée à la Commission pour déci- sion, conformément aux directives que la Cour estimerait alors appropriées. (Article 52(1)c) de la Loi sur la Cour fédérale.) Dans le cas d'une ordonnance qui n'a pas été contestée dans le délai fixé par l'article 64(2) de la Loi nationale sur les transports, il serait probablement trop tard pour la contester, sauf quand des «circons-
tances spéciales» justifient l'extension du délai de demande d'autorisation d'appel.
LE JUGE WALSH (oralement)—Les faits à l'o- rigine de cette action étant exposés de manière concise dans les motifs de jugement du juge en chef, il serait superflu de les reprendre entière- ment ici.
A la suite de la décision de la Cour suprême dans l'affaire North Coast Air Services Ltd. c. La Commission canadienne des transports [1968] R.C.S. 940 déclarant, entre autres, que l'Ordonnance 5/51 de la Commission des transports aériens était nulle car elle n'avait pas été approuvée par le gouverneur en conseil comme l'exigeait la Loi, celle-ci fut modifiée et le nouvel article 14(1)b) prévoyait que la Com mission pouvait établir des règlements «prescri- vant les modalités auxquelles seront assujettis les permis émis en vertu de la présente Partie». Le 11 juin 1969, le comité des transports aériens de la Commission canadienne des trans ports modifia les règlements sur les services aériens commerciaux en y introduisant des interdictions ou des restrictions du genre de celles contenues dans l'ancienne Ordonnance générale 5/51 qui avait été déclaré nulle. La North Coast Air Services Ltd. fit une demande d'autorisation d'appel devant la Cour suprême du Canada, pour, entre autres, contester la com- pétence du comité à adopter des règlements concernant la protection des itinéraires. A la suite d'un échange de vues entre les avocats, il a été convenu, comme l'a confirmé la lettre du 5 septembre 1969, envoyée par M. J. M. Fortier, c.r., au nom de la Commission canadienne des transports, que la Cour suprême serait appelée à se prononcer sur un dossier exposant les faits relatifs à la compétence du comité à adopter des règlements concernant la protection des bases et des itinéraires; en outre, il a été convenu qu'en attendant, les règlements en cause seraient annulés, que le comité des transports aériens n'introduirait ni n'approuverait d'autres règlements sur lesdites questions jusqu'à ce que la Cour suprême ait rendu sa décision et qu'à ces conditions, la North Coast Air Services Ltd. retirerait sa demande d'autorisation d'appel.
La question ne fut jamais présentée à la Cour suprême, mais, comme le comité des transports aériens n'introduisit pas d'autres règlements sur cette question, il s'est conformé aux termes exprès de l'accord. L'appelante, la North Coast Air Services Ltd., soutient cependant que, sans avoir réintroduit de tels règlements d'applica- tion générale en vertu de l'article 14 de la Loi sur l'aéronautique, le comité a obtenu le même résultat en appliquant l'article 16(8) de la Loi pour modifier les permis de tous les transpor- teurs de classe 4, dont l'appelante fait partie, en y incluant des restrictions et des interdictions ayant, au fond, le même effet (excepté certaines dispositions spéciales limitant quelque peu la portée de ces restrictions), accomplissant ainsi indirectement ce qu'il ne pouvait faire directe- ment. Pour accepter cette prétention, il faudrait conclure que la Commission ne pouvait pas adopter un règlement d'application générale en vertu de l'article 14 de la Loi, ce que la Com mission n'admet pas. Étant donné que la Cour suprême n'a jamais eu à rendre de décision, puisqu'on a omis de lui présenter le dossier, on peut dire tout au plus que l'appelante a contesté le droit du comité de procéder ainsi. Puisque ce n'est pas un règlement de ce genre qui est en question devant nous, il serait vain de se demander pourquoi la Commission des trans ports aériens n'a jamais présenté le dossier à la Cour suprême, mais je ne peux conclure qu'en effectuant des modifications aux permis de tous les transporteurs de classe 4 en vertu des dispo sitions de l'article 16(8) de la Loi, la Commis sion faisait indirectement ce qu'elle ne pouvait pas faire directement. A mon avis, le pouvoir d'établir des règlements en vertu de l'article 14 de la Loi est totalement distinct du pouvoir d'accorder des permis en vertu de l'article 16 et, dans l'espèce présente, seules les mesures prises par la Commission en vertu de l'article 16 nous concernent.
L'avocat de l'appelante a soutenu que la Commission peut seulement prescrire les itiné- raires à suivre et les zones à desservir au moment même elle attribue le permis, puis- que l'article 16(6) de la Loi commence par les mots «lorsqu'elle délivre un permis», alors que l'article 16(8) expose simplement:
«La Commission peut suspendre, annuler ou modifier la totalité ou toute partie d'un permis, si, à son avis, la commo- dité et les besoins du public l'exigent.»
En conséquence, il limiterait les amendements aux questions autres que les itinéraires à suivre et les régions à desservir. Je ne crois pas qu'une lecture du texte entier de l'article 16 justifie cette interprétation. L'article traite de l'attribu- tion des permis en général et indique au para- graphe (6) le genre de conditions que peut con- tenir un permis lorsque la Commission décide d'en délivrer un. Je ne crois pas que les mots «lorsqu'elle délivre un permis» se rapportent particulièrement au moment l'on peut impo- ser ces conditions et qu'ils aient pour but d'em- pêcher d'en imposer ultérieurement par voie de modification. Le paragraphe (8) permet non seulement d'amender, mais aussi de suspendre ou d'annuler un permis en tout temps si, de l'avis de la Commission, la commodité et les besoins du public l'exigent. Manifestement, les exigences de la commodité et des besoins du public peuvent varier d'une époque à l'autre et les conditions qui peuvent être adjointes à un permis au moment de sa délivrance, parce que la Commission, à ce moment-là, les juge «nécessaires ou désirables dans l'intérêt public», pour utiliser la formule du paragraphe (6), risquent de devoir être modifiées ultérieure- ment en application du paragraphe (8), parce que «la commodité et les besoins du public» l'exigent.
Le nombre de permis que la Commission peut modifier par application de l'article 16(8) est illimité et, dans le cas présent, elle a choisi de modifier individuellement, de façon identique et au même moment, les permis de tous les trans- porteurs de classe 4, soit environ 450 en tout'. Toutefois, en utilisant l'article 16(8), il est essentiel que dans chaque cas particulier la Commission soit d'avis que «la commodité et les besoins du public» exigent la modification du permis en question; autrement, elle édicterait en fait un règlement d'application générale, ce qu'elle ne peut faire en vertu de l'article 16(8). Dans l'arrêt North Coast Air Services Ltd. c. La Commission canadienne des transports (pré- cité), le juge Martland, rendant la décision de la Cour, déclare en parlant de l'article 15(6) (l'ac- tuel article 16(6)) à la page 945:
[TRADUCTION] En ce qui concerne cette disposition, je partage l'avis du juge d'appel Tysoe dans l'arrêt North Coast Air Services Ltd. à la page 337 ((1968) 65 D.L.R. (2e) 334):
Il me semble que l'article 15 ne se rapporte pas aux titulaires en tant que groupe ou catégorie mais à chaque demandeur particulier de permis et à chaque permis déli- vré à des personnes précises. On ne peut pas appuyer l'ordonnance générale sur cet article.
L'appelante soutient que modifier le permis d'un titulaire de manière à restreindre son exploitation après qu'il a investi des sommes importantes dans l'achat d'avions et d'équipe- ment revient à le priver de droits acquis, mais, à mon avis, cet argument ne peut être opposé aux droits de modification illimités qu'accorde l'arti- cle 16(8) quand, de l'avis de la Commission, «la commodité et les besoins du public» l'exigent. Considérer la commodité et les besoins du public risque, dans certaines circonstances, de porter préjudice aux droits d'un individu, mais ceci ne peut pas empêcher la Commission d'ap- pliquer l'article 16(8). En outre, l'appelante en l'espèce a exploité son entreprise conformé- ment à l'Ordonnance 5/51 qui était entrée en vigueur environ 8 ans avant que l'appelante ne reçoive son permis en 1959. Son permis était soumis à cette ordonnance et ce n'est qu'en 1968, que la Cour suprême l'a déclarée nulle. Les modifications apportées à son permis qui sont actuellement contestées sont plus libérales que les restrictions qu'imposait ladite ordon- nance. Donc, d'un point de vue pratique, elle a seulement réalisé qu'elle détenait un permis sans restriction par suite de la décision de la Cour suprême et ce sont ces droits relativement récents que la modification apportée à son permis vient diminuer.
En vue d'opérer les modifications aux permis de tous les titulaires d'un permis de classe 4 au 10 août 1970, le comité des transports aériens leur a tous envoyé une lettre dont le premier paragraphe indique qu'il étudie l'effet des servi ces offerts par chaque transporteur aérien de classe 4 sur les transporteurs aériens des clas ses 1 et 2 en ce qui concerne le trafic acheminé entre les points indiqués dans leurs permis res- pectifs et que chaque permis de classe 4 était considéré comme un cas particulier. Le paragra- phe suivant précise (ce qui semble constituer une conclusion préalable du comité) que la corn-
modité et les besoins du public exigent que les itinéraires desservis par les transporteurs aériens des classes 1 et de classe 2 soient proté- gés en interdisant aux transporteurs aériens de classe 4 de les exploiter en affrétant leurs appa- reils entre lesdits points (sous réserve des exceptions prévues en annexe). Le troisième paragraphe indique que le comité propose de prendre une ordonnance modifiant le permis de classe 4 du destinataire, en y adjoignant les conditions prévues dans l'annexe. Le dernier paragraphe invite le destinataire à faire des observations, s'il le juge nécessaire, exposant pourquoi on ne devrait pas adjoindre ces condi tions à son permis.
Il est clair que le comité a conclu que la commodité et l'intérêt public exigeaient la pro tection des transporteurs aériens des classes 1 et 2 comme on l'a indiqué et que les termes et les conditions de la modification du permis avaient été fixés avant l'envoi de la lettre, mais il n'y a aucune indication de la nature de la preuve ou des faits sur lesquels se fondent ces décisions. En conséquence, les titulaires en général et l'appelante en particulier n'ont aucu- nement été confrontés avec les faits sur les- quels le comité s'est fondé pour tirer ses con clusions concernant la commodité et les besoins du public ou avec la rédaction des modifications prévues aux permis, ce qui aurait permis aux titulaires d'en discuter la validité, d'apporter une preuve contraire ou de faire leurs observa tions avant que ces conclusions ne soient adop- tées. Au lieu de cela, chaque titulaire a été simplement invité à faire des observations exposant pourquoi on ne devrait pas adjoindre ces conditions à son permis. Aucun des titulai- res n'a été invité à proposer des modifications aux conditions elles-mêmes. Chacun devait soit accepter les conditions qui devaient être adjoin- tes au permis de chaque titulaire de classe 4 telles quelles, soit chercher à en être totalement exemptée. En tout cas, personne n'a bénéficié d'une exemption bien que 58 titulaires aient fait des observations, vraisemblablement pour exposer pourquoi on ne devait pas adjoindre de telles conditions à leurs permis.
Finalement, le 20 octobre 1971, l'Ordonnance 1971-A-331 modifiant le permis de l'appe- lante 1016/59 fut délivrée (et, à la même
date, des ordonnances identiques ont été envoyées aux autres titulaires de classe 4— environ 450 titulaires, y compris ceux qui avaient fait des observations demandant à être exemptés de l'application de l'ordonnance); cette ordonnance se réfère aux observations de l'appelante et ajoute «Attendu que le Comité a étudié tout ce qui se rapporte à ladite modifica tion et qu'il est d'avis que la commodité et les besoins du public exigent la modification du permis»; ensuite, elle édicte la modification sans aucun changement par rapport au projet exposé dans la lettre du 10 août 1970.
Deux lettres sont pertinentes en l'espèce. La première, datée du 2 juillet 1971, vient de M. J. W. Pickersgill, président de la Commission canadienne des transports et elle est adressée à M. A. C. Morrison, président de l'Association des transports aériens du Canada. En voici un extrait:
[TRADUCTION] ... il y a plus d'un an, le comité des trans ports aériens en venait à la conclusion qu'à défaut d'une modification de la Loi par le Parlement, le moyen le plus efficace de résoudre le problème était de modifier, quand besoin était, les permis de chaque transporteur ...
et plus loin
[TRADUCTION] J'étais présent à la réunion du comité des transports aériens qui s'est tenue aujourd'hui et il a été décidé de donner suite sans délai aux mesures proposées voilà plus d'un an au sujet des modifications des permis individuels.
Bien qu'il soit de toute évidence nécessaire de tenir compte des réponses aux lettres envoyées en août dernier à tous les transporteurs de classe 4, nous avons l'intention de procéder progressivement et systématiquement au réexa- men de ces permis ..
La deuxième lettre est une lettre interne du 23 septembre 1970, envoyée par M. J. F. Clark, l'un des commissaires, à M. John T. Gray, avocat représentant le ministère des Transports. En voici le second paragraphe:
[TRADUCTION] La modification des permis de la manière indiquée a pour but de faire face à la situation créée par la décision de la Cour suprême selon laquelle les ordonnances générales de la Commission applicables à ces questions étaient ultra vires. Vous remarquerez que, dans chaque cas, il est clairement indiqué que le comité se propose de modi fier les permis comme prévu, mais que le titulaire a la possibilité de présenter son point de vue à cet égard.
La question importante à trancher est de savoir si la décision prise au sujet de la modifi cation apportée au permis de l'appelante le fut
d'une façon contraire aux principes de la justice naturelle. Il est établi que cette question peut être traitée en appel et il n'est, par conséquent, pas nécessaire de s'arrêter à la question délicate de savoir si la Cour a le droit d'examiner l'or- donnance en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale.
Comme on l'a exposé dans de nombreux arrêts, les exigences de la justice naturelle reviennent en fait à «être équitable» et elles sont respectées si l'on présente à l'appelant tous les faits sur lesquels sont fondées les conclu sions à son encontre, s'il a eu la possibilité d'y répondre et de faire ses propres observations et si on les a écoutées et prises en considération.
Le simple fait qu'une règle générale soit énoncée ou un principe général formulé avant que l'appelant ne soit appelé à faire valoir pour- quoi son cas devrait faire l'objet d'une excep tion ne constitue pas en soi un motif permettant d'attaquer la décision, à condition qu'il ait eu la possibilité d'être entendu. Dans l'affaire Le Roi c. Port of London Authority [1919] 1 K.B. 176, à la p. 184, (citée dans Re Hopedale Develop ments Ltd. et la Ville d'Oakville 47 D.L.R. (2 e ), à la p. 486), le juge Lord Bankes exposait clairement cette règle en déclarant:
[TRADUCTION] D'une part, il y a les affaires dans lesquelles un tribunal exerçant sa discrétion de bonne foi a adopté des principes directeurs et où, sans refuser d'entendre un demandeur, il les porte à son attention et lui fait savoir qu'après l'avoir entendu il rejettera sa demande, conformé- ment à ces principes directeurs, à moins qu'il y ait des facteurs exceptionnels applicables à son cas. Je pense que l'avocat des appelants admettra que, si ces principes direc- teurs ont été adoptés pour des motifs que le tribunal peut légitimement soutenir, on ne peut s'opposer à cette façon de procéder. D'autre part, il arrive, dans certains cas, qu'un tribunal adopte une règle, ou prenne la décision, qu'il n'en- tendra pas de demande d'une certaine catégorie quel qu'en soit l'auteur. Il faut nettement distinguer ces deux catégo- ries....
En l'espèce, mis à part la conclusion de la Commission portant que la commodité et les besoins du public exigent une certaine protec tion des itinéraires des transporteurs des classes 1 et 2 des activités des transporteurs de classe 4, il est évident qu'elle a pris en considération une série d'exceptions à inclure dans les permis modifiés, relativement au poids des aéronefs à utiliser, à la distance entre les points, à la fré- quence des services, à la présence de transports
semblables rayonnant de l'itinéraire du trans- porteur, etc. En demandant simplement à tous les transporteurs de classe 4 de faire des obser vations, sans formuler au préalable certaines des exceptions proposées et sans les leur sou- mettre comme base de discussion, on risquait de créer une situation chaotique chaque transporteur soumettrait des suggestions diffé- rentes. Je ne trouve donc rien à reprocher à la méthode utilisée dans la lettre du 10 août 1970 pour exposer en détail les modifications pré- vues et pour inviter les intéressés à présenter leur point de vue en expliquant pourquoi il ne fallait pas adjoindre ces conditions à leur permis (bien qu'il eut été préférable de deman- der aussi des avis sur la nature des modifica tions proposées).
Cette Cour n'est pas compétente pour exami ner au fond les conclusions de la Commission qu'il en va de «la commodité et des besoins du public», ceci entrant dans le cadre de la compé- tence exclusive de la Commission, mais les principes de la justice naturelle permettent à la Cour d'enquêter sur le point de savoir s'il semble y avoir des éléments de preuve sur lesquels la Commission pouvait fonder ses conclusions.
En l'espèce, deux décisions sont en jeu:
(1) Celle de la Commission portant que la commodité et les besoins du public exigent que les itinéraires desservis par les transpor- teurs des classes 1 et 2 soient protégés des activités des transporteurs de classe 4; et
(2) Celle du comité des transports aériens portant que l'appelante ne serait pas exemp- tée de l'application à son permis des condi tions qu'on prévoyait adjoindre au permis de chaque titulaire d'un permis de classe 4.
Il est bien possible que l'appelante ait eu connaissance des faits sur lesquels la Commis sion s'est fondée pour prendre sa première déci- sion qui découle des déclarations de principe remontant bien avant la période l'appelante a obtenu son permis. Toutefois, même la Com mission concède que ces principes ne sont pas absolus au point de ne pas admettre d'excep- tions et, en fait, elle souligne qu'elle a pris en considération la modification de chaque permis
en particulier pour décider si elle devait faire une exception. En outre, il ressort du fait que si un transporteur de classe 1 comme Air Canada n'est pas protégé de C.P. Air sur l'itinéraire transcanadien, if existe des exceptions et une certaine concurrence est permise sur certains itinéraires. Dans un pays aussi diversifié que le Canada, il est tout à fait concevable que, dans certaines régions, il soit possible que la commo- dité et les besoins du public n'exigent pas qu'on interdise aux transporteurs de classe 4 de faire concurrence aux transporteurs des classes 1 et 2 sur certains itinéraires. Bien que la Commis sion en soit seul juge, elle doit prendre sa déci- sion en se fondant sur la preuve en sa posses sion et de manière équitable, faute de quoi elle enfreint les exigences de la justice naturelle. En ce qui concerne la première décision, je pense que l'on doit présumer que l'appelante, trans- porteur aérien expérimenté, connaissait les motifs de la décision de principe portant que certains transporteurs des classes 1 et 2 doivent être protégés de la concurrence des transpor- teurs de classe 4 en raison de la commodité et des besoins du public et que, si elle désirait s'y opposer, elle se rendait bien compte de la force des arguments auxquels elle devrait faire face; il serait donc superflu d'exiger que la Commis sion révèle, dans la lettre qu'elle a envoyée à tous les transporteurs aériens de classe 4, la preuve volumineuse qu'elle avait, sans aucun doute, preuve accumulée au fil des années par suite de ses enquêtes et qui justifiait cette con clusion. En fait, l'appelante n'a pas soulevé cette question en énonçant son point de vue à la Commission et elle n'a pas demandé qu'on l'en- tende sur la question des principes généraux. Elle s'est contentée de contester la méthode adoptée pour rétablir la protection des itinérai- res et de faire valoir pourquoi, en tous cas, ceci ne devait pas s'appliquer à la région qu'elle desservait. La décision de la Commission sur la question des principes généraux était probable- ment fondée sur des études faites au cours de plusieurs années et remontant même aux pre miers jours de l'aviation commerciale au Canada, ce qui la place dans le cadre du dictum du Lord chancelier Loreburn dans l'arrêt Board of Education c. Rice [1911] A.C. 179 il déclarait, à la page 182, en commentant les tâches des commissions en général:
[TRADUCTION] Il peut obtenir des renseignements de la manière qu'il juge la meilleure, en donnant toujours aux parties engagées dans la controverse une possibilité suffi- sante de corriger ou de contredire toute déclaration perti- nente portant préjudice à leur cause.
Je ne crois pas qu'en l'espèce, on puisse dire que l'appelante n'a pas eu la possibilité d'être entendue. Au contraire, elle a fait valoir ses observations portant pourquoi son permis ne devrait pas être modifié comme prévu. La deuxième question, savoir, si l'on a étudié ses observations de manière appropriée avant de décider qu'il n'y avait pas lieu de faire une exception, est plus délicate.
C'est en fait cette décision que l'appelante cherche à faire annuler. Elle a présenté une étude fouillée d'où il ressort que, malgré ses activités, les affaires de ses concurrents des classes 1 et 2 étaient prospères et s'étaient considérablement développées au cours des trois années antérieures; que si l'on imposait une protection des bases, il y aurait peu d'en- droits elle pourrait se rendre puisque tous les points principaux de sa région étaient déjà attri- bués à ses concurrents; que les services qu'elle offrait n'étaient pas réellement en concurrence avec ceux des transporteurs des classes 1 et 2 de la région; etc. Il revient à la Commission seule d'apprécier la valeur de ces arguments, mais il me semble qu'ils doivent être considérés compte tenu d'un examen de la situation écono- mique des transporteurs aériens et du trafic dans la région environnante et non pas compte tenu de la création de restrictions uniformes imposées à tous les transporteurs de classe 4 au Canada comme étant pour la commodité et les besoins du public. Si la seule raison d'imposer ladite modification au permis de l'appelante, comme elle l'a été à celui de tous les autres transporteurs de classe 4 au Canada, était que cette dernière est un transporteur de classe 4, alors on pourrait dire qu'une étude attentive n'a pas été accordée à son permis en tant que cas particulier pour juger si elle devait donner lieu à une exception.
Le comité déclare qu'il a pris en considéra- tion les observations de l'appelante; il n'y a certainement aucune raison d'en douter, mais rien n'a indiqué à l'appelante ni à la Cour la nature des autres preuves détenues par ce der- nier, s'il en a, concernant la situation économi-
que particulière des concurrents de l'appelante dans la région et la nature des études sur le trafic de la région. Rien non plus n'indique que la décision fut rendue autrement que sur la base des principes généraux applicables à tous les titulaires de permis de classe 4 au Canada. La rédaction de l'ordonnance modifiant le permis de l'appelante est identique à celle des ordon- nances relatives à tous les autres permis de classe 4.
La rédaction de la lettre du 10 août 1970 exposant les motifs et les termes des modifica tions prévues, la rédaction de la lettre de M. Pickersgill et de celle du commissaire Clark, indiquent toutes l'intention de modifier les permis comme prévu, bien qu'elles mentionnent que les titulaires auront la possibilité de faire des observations. Le fait qu'il n'y ait pas eu d'exception en faveur d'un seul des 58 titulaires qui firent des observations peut sembler indi- quer, comme le soutient l'appelante, qu'il y a eu application de principes généraux à tous les titulaires de permis de classe 4 dans l'intérêt de la commodité et des besoins du public plutôt qu'un examen individuel et distinct du cas de chaque titulaire comme l'exige l'article 16(8).
Néanmoins, l'ordonnance délivrée le 20 octo- bre 1971 modifiant le permis de l'appelante déclare: «Attendu que le comité a étudié tout ce qui se rapporte à ladite modification» (les itali- ques sont de moi). Il n'y a ni preuve contraire, ni preuve indiquant que le comité n'avait pas en sa possession les études économiques, les études sur le trafic et les rapports relatifs à la région l'appelante exploite son entreprise, et qu'il ne les a pas réellement pris en considéra- tion avant de rejeter la demande par laquelle l'appelante sollicitait d'être exemptée de la modification. Bien que, selon la jurisprudence, il faille présenter à une partie tous les faits d'après lesquels la décision l'affectant sera prise et ensuite lui donner la possibilité d'y répondre, il semble douteux que cela aille jusqu'à vouloir dire, si elle a fait des observations ou présenté des prétentions, qu'on doit alors la confronter avec tous les faits présentés à l'encontre de ce qu'elle a allégué et lui accorder une nouvelle possibilité de répondre. Pour conclure que la Commission, en décidant de modifier le permis de l'appelante, n'a pas pris en considération la
preuve qui y est directement relative, par rap port à la preuve relative aux transporteurs aériens de classe 4 en général, il faudrait se fonder sur l'hypothèse qu'on doit le déduire du fait que, jusqu'à présent, aucun titulaire de permis de classe 4 n'a reçu d'exemption. Je ne crois pas que l'on puisse faire une telle hypo- thèse au vu de la déclaration positive de l'or- donnance que «tout ce qui se rapporte à ladite modification» (soit la modification au permis de l'appelante) a été étudié.
Il semble que la Commission ait considéré que les exceptions prévues dans la modification étaient suffisamment souples pour qu'on puisse les appliquer, en invoquant «la commodité et les besoins du public», à tous les titulaires de permis de classe 4 et que, malgré les prétentions de 58 d'entre eux, ils pouvaient tous entrer dans le cadre de la modification.
Bien que ce ne soit pas sans une hésitation considérable que j'en suis arrivé à cette conclu sion, il semble que la Commission n'a pas enfreint les règles de la justice naturelle dans sa décision portant sur le permis de l'appelante puisqu'il n'y a aucune preuve réelle dont on puisse déduire que ses prétentions n'ont pas été réellement prises en considération. J'estime que la décision du juge Lord Bankes, dans l'arrêt Le Roi c. Port of London Authority (précité), est directement applicable en l'espèce. On ne peut pas dire que le comité a refusé d'entendre les prétentions de l'appelante, mais il s'est simple- ment prononcé à leur encontre au motif qu'il n'y avait rien d'exceptionnel dans son cas justi- fiant qu'il s'écarte de ses principes généraux portant insertion d'une modification à son permis identique à celle qui touchait tous les autres transporteurs de classe 4. Le comité était en droit de prendre une telle décision.
L'appelante aurait pu faire une demande au Comité des révisions de la Commission pour qu'il examine la décision conformément à la Règle 770 des règles générales de la Commis sion canadienne des transports; elle aurait pu en appeler au Ministre en vertu de l'article 25(2) de la Loi nationale sur les transports; elle aurait pu demander une modification de l'ordonnance au comité; elle aurait pu présenter une requête au gouverneur en conseil en vertu de l'article 64 de la Loi nationale sur les transports; enfin, avec
l'autorisation de la Cour, elle aurait pu interjeter appel à la Cour d'appel sur une question de droit ou de compétence en vertu de l'article 64 de ladite Loi, comme elle l'a fait.
Le fait qu'elle ait adopté la procédure actuelle n'affecte en aucune façon ses droits, mais l'e- xistence de ces différents recours indique l'é- tendue de la protection que nos lois accordent aux titulaires en cas d'annulation ou de modifi cation injustes de leur permis.
A mon avis, le présent appel doit être rejeté sans dépens.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT SHEPPARD—Si l'on estime que la Commission doit respecter les règles de la justice naturelle, ainsi qu'en a décidé le juge en chef, je suis d'avis qu'il faut alors souscrire au résultat de ses motifs du jugement et à son raisonnement. Si l'on estime que c'est le devoir de la Commission, je conviens alors que les résultats obtenus par le juge en chef en découlent nécessairement. Tou- tefois je ne suis pas d'accord avec le savant juge en chef pour dire que la Commission est liée de cette façon.
Quant aux devoirs de la Commission, étant donné qu'elle est un organisme créé par la loi, c'est au Parlement de spécifier dans la loi dans quelles circonstances elle a le pouvoir de modi fier un permis existant. L'article 16(8) de la Loi sur l'aéronautique (S.R.C. 1970, c. A-3) confère ce pouvoir à la Commission «si, à son avis, la commodité et les besoins du public l'exigent.» Il n'y a donc qu'une seule condition, savoir, ce que la commodité et les besoins du public exi gent. C'est la seule condition de l'exercice du pouvoir de modification. En outre, l'article 16(8) déclare qu'il doit s'agir d'une commodité ou d'un besoin, «de l'avis de la Commission». Étant donné que la détermination de la commo- dité ou du besoin est laissée à la Commission, alors cet avis tombe dans le cadre de l'arrêt Liversidge c. Anderson [1942] A.C. 206, et il peut résulter de l'avis motivé des membres de la Commission sans qu'il soit tenu d'audition, en particulier si l'on prend en considération l'arti- cle 11 qui permet à la Commission d'établir un règlement intérieur pour la conduite de ses déli- bérations; il peut aussi résulter d'une audition
menée comme la Commission le désire, confor- mément à l'article 11. En tout cas, aucune obli gation légale n'incombe à la Commission de donner un avis particulier ou d'entendre des représentations quelles qu'elles soient ou même de procéder de manière judiciaire, au sens de l'arrêt United Engineering Workers Union c. Devanayagam [1967] 2 All E.R. 367, [1968] A.C. 356.
Par conséquent l'appel est rejeté.
LE JUGE EN CHEF JACKETT:
Je ne néglige pas de considérer qu'en vertu de l'article 14(1)b), la Commission peut établir des règlements «prescri- vant les modalités auxquelles seront assujettis les permis émis en vertu de la présente Partie». Ce n'est pas ce pouvoir qu'elle essaie d'utiliser en l'espèce et, de toute manière, je doute qu'un tel règlement puisse s'appliquer à un permis délivré avant l'adoption du règlement. Comparez avec les arrêts Chappelle c. Le Roi [1904] A.C. 127 et Le procureur général de l'Alberta c. Huggard Assets Ltd. [1953] 2 All E.R. 951.
2 Cette ordonnance ne faisait pas partie du dossier établi par l'ordonnance du 23 novembre 1971, mais les avocats ont admis pendant l'argumentation que l'ordonnance, telle qu'on la trouve dans La Reine c. North Coast Air Services Ltd. 65 D.L.R. (2e) 334, aux pp. 335 et 336, devrait être considérée comme faisant partie du «dossier».
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LE JUGE WALSH:
Les seuls transporteurs de classe 4 dont les permis n'ont pas encore été modifiés sont ceux dont les permis ont été délivrés après le 10 août 1970, date à laquelle une lettre circulaire a été envoyée à tous les transporteurs de classe 4 pour les aviser de l'intention de modifier leur licence de la façon indiquée et les inviter à faire des observations expo- sant pourquoi il ne fallait pas adjoindre ces conditions à leur permis en particulier. Il est admis que les autres permis seront, en temps opportun, modifiés de la même façon.
2 Dans le cas de l'appelante, on pourrait peut-être dire que la situation a été quelque peu modifiée par une lettre du 19 octobre 1970, envoyée par le secrétaire du comité des transports aériens à son avocat, et dont voici le troisième paragraphe: [TRADUCTION] «En envoyant à tous les trans- porteurs de classe 4 notre lettre du 10 août, nous désirions obtenir leur point de vue sur notre projet et solliciter leurs avis pour déterminer s'il y avait des raisons de modifier ledit projet; il ne s'agissait pas d'introduire des règlements concernant la protection des itinéraires et des bases, ni de les faire approuver».
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