S. Madill Ltd. (Appelante)
c.
Le ministre du Revenu national (Intimé)
Division de première instance. Le juge Kerr—
Vancouver, le 4 octobre 1971; Ottawa, le 10
janvier 1972.
Impôt sur le revenu—Compagnies associées (1968)—Loi
de l'impôt sur le revenu, art. 39(1)a)—Compagnie manufac-
turière et compagnie commerciale—Contrôle de chacune par
des personnes différentes—Constituent-elles ensemble un
«groupe de personnes».
La compagnie appelante, fabricante de produits fores-
tiers, a été assujettie à l'impôt sur le revenu au taux le plus
élevé sur sa première tranche de $35,000 de revenu pour
1966, 1967 et 1968 au motif qu'elle était contrôlée par le
même groupe de personnes que la compagnie qui vendait
ses produits et que, pour cette raison, elle était «associée» à
cette autre compagnie au sens de l'art. 39(4)b) de la Loi de
l'impôt sur le revenu. Pendant ces années, deux frères
contrôlaient la majorité des actions donnant droit de vote en
circulation de la compagnie appelante et deux autres per-
'sonnes contrôlaient la majorité des actions donnant droit de
vote en circulation de l'autre compagnie, tout en étant
administrateurs de la compagnie appelante. Chacune de ces
personnes détenaient des actions dans les deux compagnies,
soit directement soit par l'intermédiaire d'autres compagnies
qu'elle contrôlait.
Arrêt: la cotisation est confirmée. D'après la preuve, les
quatre personnes avaient une communauté d'intérêt et d'ob-
jectif dans l'exploitation des deux compagnies et consti-
tuaient un «groupe de personnes», au sens de l'art. 39(4)b)
de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui contrôlait les deux
compagnies; les deux compagnies étaient donc des compa-
gnies associées.
Renvoi aux arrêts: Vina -Rug (Canada) Ltd. c. M.R.N.
[1968] R.C.S. 193; Aaron's (P.A.) Ltd. c. M.R.N.
[1967] 1 R.C.E. 21.
APPEL de l'impôt sur le revenu.
H. P. Legg et P. N. Howard pour l'appelante.
M. J. Bonner et W. G. Chappell pour l'intimé.
LE JUGE KERR—Il s'agit de l'appel des cotisa-
tions d'impôt sur le revenu, régies par la Loi de
l'impôt sur le revenu, de la Madill Sales Ltd.
pour ses années d'imposition se terminant les
30 juin 1966, 1967 et 1968. Cette compagnie a
par la suite, en juin 1969, fusionné avec la S.
Madill Ltd. pour former une seule compagnie
portant le nom de S. Madill Ltd.
Dans ses déclarations d'impôt sur le revenu,
la Madill Sales Ltd. a calculé son impôt payable
sur le revenu en appliquant le taux fiscal réduit
en vertu de l'article 39(1)a) de la Loi de l'impôt
sur le revenu à sa première tranche de $35,000
de revenu imposable pour chacune des années
d'imposition 1966 et 1968 et à l'ensemble de
son revenu imposable (qui était inférieur à
$35,000) pour son année d'imposition 1967.
L'intimé a appliqué le taux fiscal plus élevé
prévu à l'article 39(1)a) à l'ensemble du revenu
imposable de la compagnie pour ces années,
pour ce motif que la compagnie aurait été asso-
ciée, pour chacune de ces années, à la S. Madill
Ltd. (telle qu'elle existait à l'époque), au sens de
l'article 39(4) de la Loi.
A cette époque, la Madill Sales Ltd. était une
compagnie commerciale et la S. Madill Ltd.
était une compagnie manufacturière. Il s'agit de
savoir si pendant chacune desdites années, la
Madill Sales Ltd., désignée par la suite comme
«l'ancienne compagnie commerciale», et la S.
Madill Ltd., désignée comme «l'ancienne com-
pagnie manufacturière», étaient contrôlées par
le même groupe de personnes et par conséquent
étaient associées au sens de l'article 39(4)b) que
voici:
39. (4) Aux fins du présent article, une corporation est
associée à une autre dans une année d'imposition si, à
quelque moment pendant l'année,
b) les deux corporations étaient contrôlées par la même
personne ou le même groupe de personnes,
Aux fins de cet appel, les parties ont déposé
un exposé conjoint des faits qui comprend,
entre autres, les passages suivants':
[TRADUCTION]-2. L'ancienne compagnie manufacturière
a été constituée en corporation le 21 mai 1942, en vertu des
lois de la province de la Colombie-Britannique, en tant que
compagnie privée portant le nom de Newcastle Ship Build
ing Co. Ltd. Ladite compagnie a adopté le nom S. Madill
Ltd. le 18 novembre 1948. Elle est devenue compagnie
publique en vertu des lois de la province de la Colombie-
Britannique le 8 juillet 1965, puis a continué d'exister en
tant que compagnie publique pendant ses années d'imposi-
tion 1966, 1967 et 1968.
3. L'ancienne compagnie commerciale a été constituée en
corporation en tant que compagnie privée le 25 avril 1962,
en vertu des lois de la province de la Colombie-Britannique,
et elle a continué d'exister en tant que telle pendant ses
années d'imposition 1966, 1967 et 1968.
6. Le 30 juin 1969, l'ancienne compagnie manufacturière
et l'ancienne compagnie commerciale ont fusionné, confor-
mément à l'article 178 de la Companies Act of British
Columbia, en une compagnie publique portant le nom de S.
Madill Ltd. (l'appelante en l'espèce), .. .
9. En ce qui concerne l'ancienne compagnie manufactu-
rière, les actions donnant droit de vote en circulation se
répartissaient comme suit et le nombre de toutes les actions
donnant droit de vote était le suivant:
Nom du propriétaire Au 19 juin Au 19 juin Au 25 juin
enregistré 1966 1967 1968
Mogul Holdings Ltd. 50,000 50,000 50,000
Mammoth Holdings
Ltd. 148,050 148,550 149,050
Carfield Investments
Ltd. 1,600 1,600 2,200
Charles D. Madill 50 50 370
John S. Wilfert 100 100 1,320
Norman W. Madill 50 50 50
Madill Sales Ltd 41,500 41,900 47,340
Total des actions
donnant droit de vote
en circulation 334,990 338,920 340,200
10. La répartition de la propriété des actions donnant
droit de vote en circulation de l'ancienne compagnie manu-
facturière était la suivante, du ler juillet 1965 au 30 juin
1968:
Mogul Holdings Ltd. —propriété jamais infé-
rieure à 14%
Mammoth Holdings Ltd. —propriété jamais infé-
rieure à 43.6%
Carfield Investments Ltd. —propriété jamais infé-
rieure à .46%
Charles D. Madill —propriété jamais infé-
rieure à .01%
Norman W. Madill —propriété jamais infé-
rieure à .01%
John Wilfert —propriété jamais infé-
rieure à .029%
11. Du 26 octobre 1965 au 30 juin 1968, M. Norman
Madill était le propriétaire enregistré de plus de 50% des
actions donnant droit de vote en circulation de la Mogul
Holdings Ltd.
12. Du 26 octobre 1965 au 30 juin 1968, M. Charles
Madill était le propriétaire enregistré de plus de 50% des
actions donnant droit de vote en circulation de la Mammoth
Holdings Ltd.
13. Du 26 octobre 1965 au 30 juin 1968, M. Claire C.
Smith était le propriétaire enregistré de plus de 50% des
actions donnant droit de vote en circulation de la Carfield
Investments Ltd.
14. A toutes les dates pertinentes en cet appel, le nombre
d'actions donnant droit de vote en circulation de l'ancienne
compagnie commerciale s'élevait en tout à 1,000, enregis-
trées au nom des personnes suivantes:
M. John Wilfert — 450
La C. C. Smith Co. Ltd. — 100''`
La S. Madill Ltd. — 450**
* Du 30 janvier 1968 au 30 juin 1969, M. R. Kinnimont
était le détenteur enregistré de l'une de ces actions qu'il
détenait en fiducie pour la C. C. Smith Co. Ltd. Du 5 mai
1962 au 30 juin 1969, M. Claire C. Smith était le déten-
teur enregistré de l'une de ces actions qu'il détenait en
fiducie pour la C. C. Smith Co. Ltd.
** Du 5 mai 1962 au 30 juin 1969, M. Charles D.
Madill était le détenteur enregistré de l'une de ces actions
qu'il détenait en fiducie pour l'ancienne compagnie
manufacturière.
15. A toutes les dates pertinentes en cet appel, la C. C.
Smith Co. Ltd. était une compagnie dont M. Claire C. Smith
était le propriétaire enregistré de plus de 50% des actions
donnant droit de vote en circulation.
Les personnes qui, selon l'intimé, contrô-
laient chacune de ces compagnies pendant les
années d'imposition en cause étaient M. Charles
Madill et son frère M. Norman Madill, MM.
John S. Wilfert et Clair C. Smith.
L'ancienne compagnie manufacturière fabri-
que des produits pour l'industrie forestière. Son
usine, qui représente un investissement en capi
tal d'un à deux millions de dollars, se trouve à
Nanaimo.
M. Charles Madill, qui est président et direc-
teur général de la présente S. Madill Ltd., était,
depuis 1948, associé, ainsi que son frère
Norman et leur père, à l'ancienne compagnie
manufacturière. Le père mort, les deux frères
ont hérité à part égale des actions de la compa-
gnie. Norman a dirigé les activités manufactu-
rières de l'entreprise et Charles les activités
commerciales. Norman a continué à travailler
dans l'entreprise jusqu'en 1958, année où il est
parti vivre en Europe; il n'est pas encore revenu
vivre au Canada. Entre temps, Charles était
président et directeur général.
M. John S. Wilfert était directeur du service
des achats et directeur de l'exploitation de la
Powell River Company, l'un des clients les plus
importants de l'ancienne compagnie manufactu-
rière. C'est à ce titre qu'il a eu de fréquents
contacts avant 1962 avec cette dernière compa-
gnie, ainsi qu'avec MM. Charles et Norman
Madill.
M. Clair C. Smith était au service de la
Powell River Company de 1950 1961; pen
dant une partie de cette période, il a été direc-
teur général de la division de l'abattage et du
façonnage du bois. A ce titre, il a également eu
des relations d'affaires avec l'ancienne compa-
gnie manufacturière et connut MM. Charles et
Norman Madill. Il a quitté la compagnie en
1961 et créé la C. C. Smith Company Ltd.,
exploitant ainsi à Vancouver sa propre entre-
prise d'investissements.
Les témoignages de MM. Charles Madill, Wil-
fert et Smith portaient qu'en 1961, M. Wilfert
travaillait à partir du bureau de sa compagnie à
Vancouver alors que l'organisation de cette der-
nière exigeait un directeur de la division de
l'abattage et du façonnage du bois résidant à
Nanaimo. Il ne voulait pas déménager à
Nanaimo et a décidé de créer sa propre entre-
prise. A ce sujet, il a discuté avec M. Smith,
sous l'autorité duquel il avait travaillé à la
Powell River Company. Il a également discuté
avec M. Charles Madill, qui connaissait ses
intentions de s'installer à son propre compte, et
ce dernier lui a suggéré de venir travailler dans
la branche commerciale de l'ancienne compa-
gnie manufacturière. L'idée a plu à M. Wilfert,
mais il ne voulait pas être un simple employé.
Ils ont alors formulé l'idée de créer une nou-
velle compagnie commerciale qui utiliserait le
nom de l'ancienne compagnie manufacturière et
dans laquelle cette compagnie participerait pour
la moitié. La nouvelle compagnie vendrait les
produits de l'ancienne compagnie manufactu-
rière sur la base d'une commission. MM. Wil-
fert et Madill ont conclu un accord général pour
constituer une nouvelle compagnie sur cette
base, mais ils n'ont fixé aucun des détails con-
cernant la commission et les autres conditions
du contrat à ce moment-là. A la suite de cet
accord général, M. Wilfert a cherché à obtenir
le conseil de M. Smith sur ce projet. M. Smith
lui a souligné les hasards qu'impliquait une par
ticipation 50/50 et a suggéré d'adjoindre à la
compagnie une troisième partie, qui pourrait
jouer le rôle d'arbitre en cas de difficultés et de
désaccords entre les deux propriétaires. En con-
séquence, MM. Madill, Wilfert et Smith se sont
réunis et ont convenu que M. Smith entrerait
dans la compagnie comme troisième action-
naire. L'ancienne compagnie Madill Sales Ltd. a
donc été constituée en corporation, en avril
1962, avec un capital initial de $10,000 apporté
par l'ancienne compagnie manufacturière et M.
Wilfert, chacun prenant et payant 450 actions,
et par M. Smith, qui a pris et payé 100 actions
au nom de la C. C. Smith Co. Ltd. (chaque
action valant $10).
L'ancienne compagnie manufacturière et l'an-
cienne compagnie commerciale ont alors conclu
un accord commercial en date du l ei juin 1963
(pièce 8) qui prévoyait, entre autres, que la
compagnie commerciale serait l'agent commer
cial de la compagnie manufacturière pour la
promotion, la vente et la distribution de ses
produits; qu'elle recevrait une commission cal-
culée sur le volume brut des ventes, comme
suit:
a) Pour les mois de juin à novembre (inclus) 1962, cinq
pour cent (5%) du volume brut des ventes comme défini
précédemment.
b) Après novembre 1962 et pendant la durée de cet
accord, quatre pour cent (4%), par mois, du volume brut
des ventes tel que défini précédemment.
et que chaque compagnie pourrait dénoncer
l'accord sur préavis écrit d'un an à l'autre
partie.
En mars 1965, une lettre de l'ancienne com-
pagnie manufacturière portant la signature de
M. Charles Madill (pièce 9) informait de son
intention de modifier l'accord en réduisant, au
lei juin 1965, le taux de la commission de 4% à
3%. C'est ce taux inférieur qui a été versé par la
suite. M. Wilfert a attribué la réduction à l'aug-
mentation du volume des ventes. Il a déclaré
avoir discuté le changement avec M. Madill et
en avoir convenu. M. Madill s'est montré moins
sûr d'avoir discuté le problème et d'avoir
obtenu l'accord de M. Wilfert à ce sujet. De
toute façon, c'est le taux réduit qui est entré en
vigueur. M. Wilfert a également déclaré que la
réduction du taux de la commission n'entraîne-
rait pas nécessairement une réduction du mon-
tant brut des commissions gagnées, car ce mon-
tant était fonction du volume des ventes. A cet
égard, la déclaration d'impôt sur le revenu de
1967 de l'ancienne compagnie commerciale
indique des commissions au montant de $112,-
139, comparées à $169,232 en 1966.
Le registre de l'ancienne compagnie manufac-
turière (pièce 13) indique le nom des adminis-
trateurs suivants avec la date de leur nomina
tion et celle de leur démission:
Date de Date de
Nom nomination démission
Samuel Madill 30.9.1948 18.3.1953
Norman Madill 30.9.1948 18.6.1965
Charles Madill 30.9.1948
John S. Wilfert 27.5.1964
Robert Clayton Weir 8.7.1965
Louis Berryman Williams 8.7.1965
Clay H. Anderson 29.9.1967
Clair C. Smith 29.9.1967
M. Weir était conseiller juridique et secrétaire
de la compagnie.
M. Anderson était ingénieur en chef de la
compagnie et a plus tard été engagé comme
conseiller. C'était également un actionnaire
important. M. Williams a été mêlé à la souscrip-
tion des actions de la compagnie lorsqu'elle est
devenue une compagnie publique en juillet
1965. M. Charles Madill était également direc-
teur général.
Le registre de l'ancienne compagnie commer-
ciale (pièce R-1) indique le nom des administra-
teurs suivants avec la date de leur nomination et
celle de leur démission:
Date de Date de
Nom nomination démission
Robert C. Weir 25 avr. 1962 5 mai 1962
Eric W. Winch 25 avr. 1962 5 mai 1962
John S. Wilfert 5 mai 1962
Clair Curtis Smith 5 mai 1962
Charles D. Madill 5 mai 1962 jan. 1968
J. Russell Kinnimont 30 jan. 1968
M. Wilfert était également président de la
compagnie et M. Smith secrétaire-trésorier.
Les procès-verbaux des réunions des admi-
nistrateurs et des assemblées des actionnaires
de l'ancienne compagnie commerciale ont été
apportés en preuve (pièce R-2). Ils indiquent
que MM. Charles Madill, Wilfert et Smith
étaient présents à presque toutes les réunions
des administrateurs pendant la période allant du
5 mai 1962 au 30 juin 1968. M. Madill a démis-
sionné de sa fonction d'administrateur le 30
janvier 1968. Les procès-verbaux indiquent
également qu'ils étaient présents aux assem
blées des actionnaires, ainsi que la S. Madill
Ltd., représentée par son fondé de pouvoir M.
Charles Madill, et la C. C. Smith Co. Ltd.,
représentée par son fondé de pouvoir M. C. C.
Smith. Les signatures de MM. Wilfert, Madill et
Smith figurent sur les procès-verbaux des réu-
nions des administrateurs et sur les résolutions
de la compagnie portant déclaration de dividen-
des et traitant d'autres questions.
M. Charles Madill a témoigné qu'il n'avait
jamais assisté à aucune des réunions des admi-
nistrateurs, que la pratique voulait que le con-
seiller juridique de la compagnie rédige les pro-
cès-verbaux et les fasse ensuite circuler pour
signature. M. Wilfert a confirmé ce point et
déclaré qu'il n'y avait pas de réunions officiel-
les, les procès-verbaux étant rédigés sur les
instructions de M. C. C. Smith selon des règles
de base convenues. M. Smith a également
déclaré qu'il ne pensait pas avoir assisté à
aucune réunion. M. Madill a déclaré qu'il n'a-
vait pas assisté en personne aux assemblées des
actionnaires. Il a donné une procuration à M.
Wilfert pour l'assemblée des actionnaires tenue
le 2 octobre 1968.
Les procès-verbaux des réunions des admi-
nistrateurs et des assemblées des actionnaires
de l'ancienne compagnie manufacturière, à
partir du 8 juillet 1965, ont été apportés en
preuve (pièce R-3). Ils indiquent que MM. Char-
les Madill et Wilfert, ainsi que d'autres adminis-
trateurs, une fois nommés, étaient présents aux
réunions des administrateurs. M. Madill a
assisté aux assemblées des actionnaires et y a
utilisé les procurations à lui remises par son
frère Norman et par la Mammoth Holdings et la
Mogul Holdings. M. Wilfert a assisté aux réu-
nions des administrateurs à partir de mai 1964,
lorsqu'il a été nommé administrateur, et il a
utilisé aux assemblées des actionnaires des pro-
curations remises par l'ancienne compagnie
commerciale. M. Smith y a assisté après être
devenu administrateur en septembre 1967. Les
procès-verbaux des réunions des administra-
teurs portent leurs signatures dans presque tous,
les cas. On trouve également leurs signatures
sur les résolutions portant paiement de dividen-
des et réglant d'autres questions.
M. Madill a déclaré qu'il a décidé seul de la
politique de l'ancienne compagnie manufactu-
rière pendant les années en cause: par exemple,
il a décidé, sans consulter les autres administra-
teurs, d'acheter un avion à un coût d'environ
$180,000 et une foreuse Toshiba à un coût
d'environ $650,000. A cet égard, il a exercé ses
pouvoirs de directeur général. Il a déclaré qu'en
raison du contrat de ventes, M. Wilfert l'a con
sulté au sujet des produits disponibles pour la
vente, de leur prix et d'autres problèmes con-
nexes, mais que MM. Wilfert et Smith n'ont
joué aucun rôle dans la gestion de la compagnie,
à part certaines activités exercées en tant qu'ad-
ministrateurs. Il était dans l'intérêt des deux
compagnies de travailler ensemble et il fallait
que l'ancienne compagnie commerciale con-
naisse bien les produits de la compagnie manu-
facturière et, à cette fin, MM. Wilfert et Smith
sont venus plus d'une fois à l'usine de la compa-
gnie manufacturière à Nanaimo.
Quant à l'ancienne compagnie commerciale,
M. Madill a déclaré ne pas avoir eu de raison de
participer à sa gestion. Il était en relation avec
M. Wilfert au sujet des ventes, mais c'était ce
dernier qui dirigeait la compagnie et il le faisait
bien. M. Smith n'est jamais intervenu pour
régler une situation difficile. La compagnie
commerciale rédigeait des états financiers men-
suels et les envoyait à la compagnie manufactu-
rière, mais M. Madill se préoccupait plus des
bénéfices de la compagnie manufacturière que
de ceux de la compagnie commerciale, parce
que les bénéfices de la compagnie commerciale
ne constituaient pas une part importante des
bénéfices de la compagnie manufacturière. Il
n'a discuté des bénéfices de la compagnie com-
merciale avec aucun des administrateurs de
cette dernière. En 1969, il s'est mis en désac-
cord avec M. Wilfert sur la question de la vente
de produits d'autres compagnies par la compa-
gnie commerciale, car il voulait qu'elle vende
seulement des produits de la compagnie manu-
facturière; en conséquence, l'accord de vente a
été dénoncé.
M. Smith a déclaré qu'il ne participait pas à la
gestion de l'ancienne compagnie commerciale;
toutefois, il avait discuté avec M. Wilfert au
sujet des investissements de la compagnie et
avait conseillé d'acheter les actions de l'an-
cienne compagnie manufacturière parce qu'elles
constituaient un bon investissement. Il avait su
en discutant avec M. Charles Madill qu'il était
possible d'acheter certaines des actions de M.
Norman Madill dans la compagnie manufactu-
rière et par suite, il en a acheté à diverses
époques au nom de la Carfield Investments
Limited, compagnie qu'il possédait avec sa
femme. Il est devenu administrateur de la com-
pagnie manufacturière à la demande de M.
Charles Madill; avant de ce faire, il n'avait joué
aucun rôle dans la politique de la compagnie ou
dans l'élaboration de cette politique. M. Madill
a recherché son conseil à plusieurs occasions
sur la situation générale du monde des affaires,
mais non sur l'exploitation de la compagnie
manufacturière. Il a su que la compagnie manu-
facturière achetait un aéroplane lorsqu'un
avocat lui a demandé de signer le contrat qui
portait la signature de M. Madill. Il a téléphoné
à M. Madill qui lui a dit qu'il pouvait très bien
signer, ce qu'il a fait. Il a appris l'achat de la
foreuse Toshiba par la compagnie lorsque la
question a été soulevée à une réunion des admi-
nistrateurs, alors que les dispositions avaient
déjà été prises en vue de cet achat. Jusqu'en
1962, il n'était associé ni à Charles ni à Norman
Madill, ni même à Wilfert. Pendant les années
1966 1968, ses liens se sont renforcés avec
MM. Charles Madill et Wilfert et il s'est trouvé
à même de discuter avec eux de leurs affaires,
mais, à cet égard, son souci principal allait à son
propre investissement financier dans les compa-
gnies et à leurs perspectives à long terme. Il
avait confiance dans les deux hommes et pou-
vait donner conseil si on le lui demandait; il
pouvait en outre agir comme arbitre en cas de
désaccord. Il savait que M. Wilfert exploitait et
agrandissait le marché des produits de la com-
pagnie manufacturière et qu'il dirigeait la com-
pagnie commerciale comme un bon directeur
général. Il a accompagné M. Wilfert 4 ou 5 fois
aux établissements de la compagnie manufactu-
rière sur l'île de Vancouver.
M. Wilfert a témoigné qu'il dirigeait l'an-
cienne compagnie commerciale sans l'aide de
MM. Madill ou Smith. Il traitait les problèmes
commerciaux d'une manière différente de celle
qu'avait adoptée la compagnie manufacturière.
La compagnie commerciale fonctionnait à partir
de Vancouver et comptait un personnel de 3
vendeurs, un comptable et une secrétaire. Ses
états financiers mensuels étaient envoyés à la
compagnie manufacturière et à la compagnie de
M. Smith, parce qu'ils en étaient actionnaires.
M. Madill n'est pas intervenu dans la gestion de
la compagnie commerciale. Le problème de la
répartition des recettes entre les compagnies n'a
jamais été discuté, mais l'ajustement du taux de
la commission commerciale a pu avoir pour
effet d'ajuster lesdites recettes. Il a discuté les
questions financières touchant la compagnie
commerciale avec M. Smith, mais ils ne par-
laient pas des ventes. Les questions relatives à
la déclaration des dividendes ont été discutées
par téléphone avec M. Smith avant de donner
instruction au conseiller juridique de rédiger les
procès-verbaux et les porter à la signature des
administrateurs. Aucune discussion n'a eu lieu
sur ce point avec M. Madill, mais il y a souscrit.
Lorsque M. Madill l'a informé que les actions
de M. Norman Madill dans l'ancienne compa-
gnie manufacturière étaient disponibles, il a dis-
cuté de l'affaire avec M. Smith qui a conseillé à
la compagnie commerciale d'acheter ces actions
en proportion de l'argent disponible. M. Madill
lui a demandé de devenir administrateur de la
compagnie manufacturière ce qu'il a accepté,
sentant qu'il avait quelque contribution utile à
apporter. Il pensait qu'il serait bon de tirer
profit du nom de Madill dans la compagnie
commerciale et M. Madill y consentait. Il était
également avantageux d'avoir la compagnie
manufacturière comme actionnaire dans la com-
pagnie commerciale, parce que cela lui apportait
un partenaire ayant de bonnes ressources et une
bonne réputation. M. Madill et lui-même étaient
de bons amis. M. Madill prenait les décisions
pour la compagnie manufacturière et la diri-
geait; il ne s'est jamais adressé à lui pour obte-
nir l'appui du bloc d'actions que la compagnie
commerciale possédait dans la compagnie
manufacturière. Il a engagé au service de la
compagnie commerciale le vérificateur et le
conseiller juridique que M. Madill lui avait
recommandés. MM. Charles Madill, Wilfert et
Smith n'étaient pas liés les uns aux autres par le
sang, le mariage ou l'adoption.
Voici les arguments principaux présentés au
nom de l'appelante à l'audience:
(1) les compagnies n'étaient pas contrôlées
par le même «groupe de personnes» au sens de
l'article 39(4)b) de la Loi de l'impôt sur le
revenu;
(2) MM. Norman Madill, Charles Madill, Wil-
fert et Smith n'étaient pas unis de façon à
constituer en fait un groupe de personnes;
(3) si, en fait, il existait un groupe, il ne
contrôlait pas la majorité des actions donnant
droit de vote en circulation des deux
compagnies;
(4) quant aux rôles joués dans l'ancienne
compagnie commerciale par MM. Wilfert et
Smith et par l'ancienne compagnie manufactu-
rière, la situation était la suivante:
a) M. Wilfert a insisté pour conserver son
indépendance et l'a fait, il a refusé d'être au
service de la compagnie manufacturière ou de
résider à Nanaimo; il a dirigé la compagnie
commerciale et a exercé un contrôle quoti-
dien; le rôle de M. Smith était seulement celui
d'un arbitre et d'un conseiller sur les ques
tions générales, par exemple la situation géné-
rale du monde des affaires; les actionnaires
de la compagnie commerciale avaient con-
venu à l'unanimité d'agir indépendamment, et
non en tant que groupe; ils se sont même
donnés la peine, pour ne pas agir en groupe,
de donner à M. Smith l'équilibre des pouvoirs
et aucun groupe ne contrôlait la compagnie;
elle était dirigée indépendamment de la com-
pagnie manufacturière, la première ayant son
bureau et son personnel à Vancouver, la
seconde à Nanaimo; la compagnie commer-
ciale a adopté une attitude indépendante, par
exemple en vendant des produits autres que
ceux de la compagnie manufacturière.
b) si la compagnie manufacturière exerçait
quelque contrôle sur la compagnie commer-
ciale, c'était par le truchement du contrat de
vente et non par celui de ses actions; chaque
compagnie avait le droit de dénoncer le con-
trat sur préavis d'un an et ce droit a finale-
ment été exercé lorsque des divergences tou-
chant à la politique de l'entreprise sont nées
entre MM. Wilfert et Charles Madill; le con-
trat de vente était conclu à distance et était
compatible avec l'indépendance de chacune
des compagnies.
(5) quant à l'ancienne compagnie manufactu-
rière, s'il existait un groupe contrôlant la com-
pagnie manufacturière pendant les années en
cause il s'agissait de MM. Norman et Charles
Madill; Charles avait des procurations de
Norman et était directeur général; à ce titre, il
exerçait tous les pouvoirs du conseil d'adminis-
tration; tous les actionnaires savaient que le
contrôle absolu était entre les mains des frères
Madill, qui détenaient plus de 50% des actions
donnant droit de vote en circulation; MM. Wil-
fert et Smith étaient actionnaires minoritaires;
M. Charles Madill dirigeait la compagnie et pre-
nait des décisions importantes sans consulter
MM. Wilfert ou Smith, par exemple, en ache-
tant un avion et la foreuse Toshiba; le rôle de
M. Smith n'était pas plus important que celui
des autres administrateurs MM. Weir, Anderson
et Williams; les participations de MM. Wilfert
et Smith étaient sans effet sur le contrôle
exercé par M. Charles Madill; personne, à l'ex-
ception des frères Madill, ne participait au con-
trôle de la compagnie; le rôle de M. Smith n'a
jamais été autre que celui d'un investisseur dans
la compagnie et on n'a jamais fait appel à lui
pour exercer un contrôle réel;
(6) il n'existait aucun groupe commun con-
trôlant les deux compagnies; la compagnie
manufacturière a abandonné le pouvoir de con-
trôle de la compagnie commerciale en prenant
M. Smith comme arbitre pour maintenir l'équili-
bre des pouvoirs dans une structure de partici
pation où ni M. Wilfert ni la compagnie manu-
facturière n'auraient de contrôle absolu.
Voici pour l'essentiel l'argumentation présen-
tée par l'intimé:
(1) le nombre des actions donnant droit de
vote possédées par MM. Wilfert, Smith,
Norman et Charles Madill, directement ou indi-
rectement, comme l'indique l'exposé conjoint
des faits, suffisait à leur donner le contrôle des
deux compagnies et ils constituaient donc un
groupe qui contrôlait les deux compagnies;
(2) le contrôle qu'envisage l'article 39(4)b)
est un droit de contrôle grâce à une majorité
d'actions donnant droit de vote; si deux ou
plusieurs personnes, dont aucune ne contrôle
seule une corporation particulière, possèdent la
majorité des actions donnant droit de vote de la
corporation et si le même groupe possède la
majorité des actions donnant droit de vote
d'une deuxième corporation, ces faits suffisent
à rendre les deux corporations associées au
sens de cet article;
(3) l'exercice de fait de la gestion et du con-
trôle n'est pas un facteur déterminant pour tran-
cher la question de savoir si les compagnies
étaient contrôlées par le même groupe de per-
sonnes; il n'est pas essentiel que les membres
d'un groupe de contrôle aient un lien commun,
mais, en fait, il y avait en l'espèce un lien
commun et une communauté d'intérêt et d'acti-
vités d'affaires et un exercice du contrôle des
deux compagnies par les quatre personnes men-
tionnées précédemment.
Traitant de la preuve, l'avocat de l'intimé a
soutenu que les frères Madill et MM. Wilfert et
Smith avaient un intérêt commun, un lien et une
communauté d'intérêt d'affaires; M. Charles
Madill représentait les intérêts de son frère et
avait des procurations remises par son frère; M.
Charles Madill voulait engager M. Wilfert et M.
Smith était conseiller d'entreprise auprès de M.
Wilfert; M. Smith a été impliqué dans la compa-
gnie commerciale pour écarter l'éventualité de
situations difficiles qui auraient gêné le fonc-
tionnement de la compagnie, mais la répartition
des actions obéissait au désir de contrôle de ces
personnes et à celui d'éviter une impasse qui
paralyserait la compagnie; un contrat exclusif
de vente était prévu dans lequel la compagnie
commerciale s'occuperait de la promotion des
ventes des produits de la compagnie manufactu-
rière à l'avantage des deux compagnies; MM.
Charles Madill, Wilfert et Smith étaient admi-
nistrateurs des deux compagnies; M. Madill
représentait les actions de la compagnie manu-
facturière dans la compagnie commerciale et,
satisfait de ce qui s'y faisait, il a signé les
procès-verbaux des réunions des administra-
teurs et les résolutions; les destinées des com-
pagnies étaient liées par le contrat de vente,
chacune desdites personnes remplissant ses
tâches respectives à la satisfaction des autres;
MM. Wilfert et Smith ont été nommés adminis-
trateurs de la compagnie manufacturière par M.
Charles Madill, tous ayant fait connaissance
depuis plusieurs années dans l'industrie fores-
tière et étant devenus des bons amis; M. Madill
était directeur général de la compagnie manu-
facturière et exerçait ses fonctions à ce titre,
mais il conservait ce poste à la discrétion du
conseil d'administration et était membre dudit
groupe; M. Smith n'était pas tenu dans l'ombre
en ce qui concerne les affaires de la compagnie
et, bien qu'il ait été administrateur de la compa-
gnie manufacturière pendant seulement une
partie de cette période, il avait, avant cela,
conseillé MM. Madill et Wilfert et porté à leur
intention des choses relatives aux compagnies
lorsque l'occasion s'en présentait; l'une des rai-
sons pour lesquelles la compagnie manufactu-
rière était actionnaire dans la compagnie com-
merciale était de donner à cette dernière une
force financière et il y avait donc un lien finan
cier entre elles.
La jurisprudence suivante a été citée à l'appui
de ces diverses prétentions: Vina -Rug (Canada)
Ltd. c. M.R.N. [1968] R.C.S. 193, 68 DTC
5021; Buckerfield's Ltd. c. M.R.N. [1965] 1
R.C.É. 299, 64 DTC 5301; Yardley Plastics of
Canada Ltd. c. M.R.N. [1966] R.C.É. 1027, 66
DTC 5183; Floor & Wall Covering Distributors
Ltd. c. M.R.N. [1967] 1 R.C.É. 390, 66 DTC
5373; Vineland Quarries and Crushed Stone
Ltd. c. M.R.N. [1966] R.C.É. 417, 66 DTC
5092; Alpine Drywall & Decorating Ltd. c.
M.R.N. 66 DTC 5263; Bert Robbins Excavating
Ltd. c. M.R.N. 66 DTC 5269.
Le sens du mot «contrôle» employé à l'article
39(4)b) a été étudié par la Cour suprême du
Canada dans l'affaire Vina -Rug (Canada) Ltd.
c. M.R.N. (précitée), dans laquelle le juge
Abbott a déclaré au nom de la Cour à la page
196:
[TRADUCTION] Cette Cour a étudié le concept «contrôle»
dans l'arrêt Le ministre du Revenu national c. Dworkin Furs
Limited [1967] R.C.S. 223 (67 DTC 5035). M. le juge Hall,
rendant le jugement au nom de la Cour, a déclaré, à la page
227:
Le mot contrôlé, tel qu'il est employé dans ce paragra-
phe, signifie, selon le président Jackett, contrôle de droit
et non contrôle de fait; sur ce point je partage son avis. Il
a déclaré, dans l'affaire Buckerfield's Limited et autres c.
Le ministre du Revenu national:
Il est concevable qu'il puisse exister plusieurs façons
de comprendre le mot «contrôle» dans un texte législa-
tif tel que la Loi de l'impôt sur le revenu, quand on
applique ce mot à une corporation. Il peut par exemple
se rapporter au contrôle par les «membres de la direc
tion», lorsque la direction et le conseil d'administration
sont distincts, ou il peut se rapporter au contrôle par le
conseil d'administration. Le genre de contrôle qu'exer-
cent les membres de la direction ou le conseil d'admi-
nistration n'est évidemment pas celui que vise l'article
39 en parlant du contrôle d'une corporation par une
autre de même que du contrôle d'une corporation par
des particuliers (voir le par. (6) de l'art. 39). On conçoit
très bien que le mot «contrôle» puisse se rapporter à un
contrôle de fait par un actionnaire ou plus détenant ou
non une majorité des actions. Je crois cependant qu'à
l'article 39 de la Loi de l'impôt sur le revenu, le mot
«contrôlé» recouvre le droit de contrôle qui découle de
la propriété d'un certain nombre d'actions, donnant
droit à la majorité des voix à l'élection du conseil
d'administration. Voir British American Tobacco Co. c.
LC.R. (1943) 1 A.E.R. 13 où le Lord chancelier, le
vicomte Simon, a déclaré:
Les détenteurs de la majorité des voix dans une
compagnie sont effectivement ceux qui ont le con-
trôle réel sur ses affaires et ses destinées.
En appliquant ces principes, une fois établi qu'un groupe
d'actionnaires détient la majorité des actions donnant droit
de vote d'une compagnie et que le même groupe a la
majorité des actions donnant droit de vote d'une seconde
compagnie, ce fait suffit, à mon avis, à faire des compagnies
des associées au sens des dispositions de l'art. 39 de la Loi
de l'impôt sur le revenu. D'ailleurs, en déterminant le con-
trôle de jure, on peut à juste titre décrire plus d'un groupe
de personnes comme un «groupe de personnes» au sens de
l'art. 39(4)b). A mon avis, peu importe que d'autres forma
tions d'actionnaires possèdent ou non une majorité des
actions donnant droit de vote de l'une ou l'autre compagnie,
pourvu que chaque formation soit en position de contrôler
au moins une majorité des voix à une assemblée générale
des actionnaires.
On ne suggère pas que les frères Madill et
MM. Wilfert et Smith se sont associés à l'ori-
gine ou ont agi ensemble par la suite dans le but
de profiter d'un tarif fiscal inférieur ou que
l'ancienne compagnie commerciale a été créée
avec cet objectif comme l'une des raisons moti-
vant sa création. Néanmoins, il se peut que ces
quatre personnes aient constitué un «groupe de
personnes» qui contrôlait les deux compagnies
au sens de l'article 39(4)b). Dans l'arrêt Aaron's
(Prince Albert) Ltd. c. M.R.N. [1967] 1 R.C.E.
21, le juge Thurlow déclarait à la page 25:
[TRADUCTION] ... Comme je le comprends, le but général
des dispositions concernant les compagnies "associées" est
d'empêcher les propriétaires d'actions à revenu variable de
corporation d'obtenir, soit intentionnellement soit autre-
ment, un tel avantage fiscal. Mais la méthode adoptée par
les dispositions est arbitraire et est faite pour dépendre non
pas du droit des actionnaires de profiter des bénéfices, mais
de divers liens entre les actionnaires, dont certains sont
définis en particulier et d'autres non, actionnaires par
lesquels les compagnies concernées sont «contrôlées».
Si MM. Wilfert et Smith n'étaient pas com-
pris dans un «groupe» qui contrôlait l'ancienne
compagnie manufacturière pendant les années
d'imposition en cause, l'appel doit être accueilli,
car, dans ce cas, les deux compagnies n'auraient
pas été contrôlées par le même groupe de per-
sonnes. Il est donc nécessaire de considérer et
de déterminer s'il existait un «groupe de person-
nes», au sens de l'article 39(4)b), qui contrôlait
les deux compagnies.
L'avocat de l'appelante s'est reporté à la défi-
nition du mot «group» dans l'International Dic
tionary de Webster, dont la 3 e édition présente
la définition suivante:
[TRADUCTION] Un certain nombre d'individus liés par une
communauté d'intérêt, de but ou d'action.
En rendant sa décision dans l'affaire Bucker-
field's Limited et autres c. M.R.N. [1965] 1
R.C.É. 299, le président Jackett déclarait à la p.
304:
[TRADUCTION] Le sens à donner au mot «group» tel que le
définit le Shorter Oxford English Dictionary (1959) est
2. génér. Ensemble de choses placées les unes près des
autres et formant une entité collective; noyau (de person-
nes), grappe (de choses). Au début de l'utilisation de ce
mot, il recouvrait souvent une notion d'assemblage
confus.
Le seul autre sens qui pourrait s'appliquer est
3. Nombre de personnes ou de choses dans un certain
rapport ou ayant un certain degré de similitude.
L'avocat des appelantes a mentionné d'autres définitions
tirées des dictionnaires, mais, à mon avis, elles ne se contre-
disent point. Mises à part les prétentions de ces appels,
l'expression «groupe de personnes» peut embrasser les
compagnies détenant les actions de Buckerfield et Green
Valley ou les compagnies détenant les actions de Burrard et
Westland, d'après le sens que je donne à cette expression
avec ou sans l'aide de dictionnaires.
Grâce à leur propriété, directe ou indirecte,
de plus de 50% des actions donnant droit de
vote en circulation de l'ancienne compagnie
manufacturière, les frères Norman et Charles
Madill étaient à même d'exercer le contrôle de
cette compagnie. Mais ceci n'exclut pas néces-
sairement l'existence d'une association ou d'un
groupe plus large de contrôle composé d'eux-
mêmes et des autres actionnaires MM. Wilfert
et Smith. M. Charles Madill représentait les
intérêts de son frère pendant ces années-là. Il a
contribué à obtenir MM. Wilfert et Smith
comme actionnaires et à les faire nommer
comme administrateurs de la compagnie manu-
facturière; ils ont rempli ces fonctions en assis
tant aux réunions, en déclarant les dividendes et
en signant des documents dans le cadre des
affaires de la compagnie. L'ancienne compagnie
commerciale a été créée à la suite d'une discus
sion entre MM. Charles Madill, Wilfert et Smith
et, selon leur plan, son but principal était de
promouvoir et de vendre les produits de la
compagnie manufacturière. La répartition des
actions a été convenue. MM. Charles Madill,
Wilfert et Smith étaient administrateurs des
deux compagnies et les liens entre les deux
compagnies exigeaient de la coopération. La
compagnie commerciale fournissait des états
financiers mensuels à MM. Madill et Smith.
Bien qu'aucune réunion formelle de ses admi-
nistrateurs n'ait été tenue, ils signaient les pro-
cès-verbaux et les résolutions au besoin et en
conformité des règles de base régissant ces
questions. M. Charles Madill était directeur
général de la compagnie manufacturière et en
dirigeait ses opérations quotidiennes; M. Wilfert
faisait la même chose pour la compagnie com-
merciale. Chacun d'eux était capable et compé-
tent; les autres étaient satisfaits et ne voyaient
aucune raison d'intervenir. Quand il y a eu
finalement désaccord, le contrat de vente a été
dénoncé et la compagnie commerciale dissoute.
J'ai résumé une grande partie de la preuve et
des plaidoiries, en particulier les éléments qui
me semblaient les plus importants, et j'en ai tiré
la conclusion, après avoir jugé de la preuve et
de la jurisprudence citée, qu'à toutes les épo-
ques pertinentes, MM. Norman Madill, Charles
Madill, John S. Wilfert et Clair C. Smith avaient
une communauté d'intérêt et d'objectif dans
l'exploitation à la fois de l'ancienne compagnie
manufacturière et de l'ancienne compagnie
commerciale et qu'on peut avec justesse les
décrire comme «un groupe de personnes» au
sens de l'article 39(4)b) de la Loi de l'impôt sur
le revenu; qu'en vertu de la répartition des
actions donnant droit de vote, ils étaient à
même d'exercer le contrôle sur les deux compa-
gnies; qu'ils formaient un groupe de personnes
qui contrôlait les deux compagnies à toutes les
dates pertinentes et que les compagnies étaient
donc associées au sens de l'article 39(4)b) de la
Loi de l'impôt sur le revenu. Je pense que l'in-
timé était en droit de présumer, comme il l'a fait
en imposant l'ancienne compagnie commerciale,
que les deux compagnies étaient contrôlées, au
sens de l'article 39(4)b), par le même groupe de
personnes, c'est-à-dire les quatre personnes
susmentionnées.
L'appel est donc rejeté avec dépens.
1 J'ai donné aux paragraphes la numérotation qu'ils por
tent dans l'exposé conjoint.
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