A-251-72
Le ministre du Revenu national (Appelant)
c.
Yonge-Eglinton Building Limited (Intimée)
Cour d'appel, le juge Thurlow, les juges sup
pléants Lacroix et Sweet—Toronto, le 16 jan-
vier; Ottawa, les 13 et 25 février 1974.
Impôt sur le revenu—Déductions du revenu—Dépenses
engagées lors d'un emprunt d'argent—Déductibles en vertu
de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, art.
11(1)cb), maintenant art. 20(1)e).
En 1962, l'intimée conclut un contrat avec une compagnie
devant lui fournir un prêt pour le financement de la cons
truction d'un immeuble de bureaux. L'intimée s'engageait à
payer (1) des intérêts sur les fonds prêtés, selon les stipula
tions du contrat; (2) un intérêt supplémentaire, pour chaque
année civile où elle tirerait un profit net de l'exploitation de
l'immeuble, égal à un pour cent de son revenu locatif brut.
Les sommes dues en vertu de la clause (2) vinrent à
échéance au cours des années d'imposition 1965-68.
Arrêt (le juge Thurlow et le juge suppléant Lacroix): ces
sommes représentent des dépenses engagées lors de la cons
truction de l'immeuble. On ne peut considérer ces dépenses
engagées avant les années où, l'intimée ayant tiré un profit
net de ses activités, on peut en fixer le montant. L'article
11(1)cb) de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c.
148 et l'article 1 de la Loi de 1955, c. 54, maintenant
l'article 20(1)e), n'exige pas, pour pouvoir déduire une
dépense, qu'elle ait été engagée dans l'année où l'emprunt a
été contracté. Ces sommes étaient donc déductibles en vertu
du sous-alinéa (ii) de cet article et, n'étant pas des «bonis»,
ne relevaient pas de l'exception faite pour les «commissions
ou bonis» au sous-alinéa (iii). L'appel est rejeté.
Le juge Sweet (dissident): pour que ces dépenses puissent
être déduites en vertu de l'article 11(1)cb), elles doivent non
seulement être engagées dans l'année en cause, mais elles
doivent aussi l'avoir été à l'occasion d'un emprunt. Étant
donné que le dernier emprunt a été contracté en 1964 et que
1965 était la première année où une telle dépense a été
engagée, ces dépenses ont été engagées postérieurement aux
emprunts.
Arrêts examinés: Equitable Acceptance Corporation c.
M.R.N. [1964] R.C.E. 859; Consumers Gas Company c.
M.R.N. [1966] R.C.É. 46; Sherritt Gordon Mines Ltd. c.
M.R.N. [1968] R.C.É. 459; Canada Permanent Mort
gage Corporation c. M.R.N. [1971] C.T.C. 694; Riviera
Hotel Ltd. c. M.R.N. [1972] C.F. 645 et Lomax c.
Dixon [1943] 2 All E.R. 255.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
N. A. Chalmers, c.r., et M. R. V. Storrow
pour l'appelant.
J. A. Bradshaw pour l'intimée.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour
l'appelant.
Campbell, Godfrey & Lewtas, Toronto,
pour l'intimée.
LE JUGE THURLOW—Le présent appel porte
sur la question de savoir si l'intimée était en
droit de déduire de son revenu pour les années
d'imposition 1965 à 1968 inclusivement certai-
nes sommes qu'elle avait versées à la Traders
Realty Limited dans ces mêmes années.
Les sommes en question étaient dues en vertu
d'un contrat conclu au mois de juillet 1962 par
lequel la Traders s'engageait à fournir à l'inti-
mée la somme de $6,500,000 pour le finance-
ment provisoire de la construction d'un immeu-
ble de bureaux au coin des rues Yonge et
Eglinton à Toronto sur un terrain que l'intimée
tenait à bail. L'intimée acquérait ainsi le droit
d'emprunter à l'occasion de l'argent à la Traders
jusqu'à une somme limite précise. Voici ce
qu'en retour, la clause 3 du contrat prévoyait:
[TRADUCTION] 3. La Yonge-Eglinton versera à la Traders
des intérêts sur le prêt selon le barême suivant:
a) Les montants dûs à l'occasion aux termes de l'accord
de prêt porteront intérêt (les intérêts non payés portant
eux-mêmes intérêts) payable trimestriellement non par
anticipation à la fois avant et après la date d'échéance et
avant et après défaut de paiement les 30 janvier, avril,
juillet et octobre de chaque année au taux annuel de 9%.
b) Chaque année civile où la Yonge-Eglinton tirera un
profit net de ses activités (tel que certifié par les vérifica-
teurs de cette dernière), elle versera à la Traders à titre
d'intérêt supplémentaire une somme égale à 1% de son
revenu locatif brut (tel que certifié par les vérificateurs de
la Yonge-Eglinton) tiré du projet de construction, ces
paiements venant à échéance 90 jours après la fin de
ladite année civile. Le premier de ces versements sera
payable, après 1964, l'égard de la première année civile
dans laquelle la Yonge-Eglinton aura fait un bénéfice net
p et ces paiements se poursuivront jusqu'à ce que 25 paie-
ments aient été effectués conformément à cet accord.
En outre, dans le cadre de la transaction, bien
que ce ne soit pas inscrit au contrat, il était
prévu, à titre de contrepartie supplémentaire de
l'engagement, que le principal actionnaire de
l'intimée céderait à la Traders 5% des actions
émises de l'intimée pour le montant total de
$5.00.
A la suite de la signature de ce contrat, l'inti-
mée emprunta à l'occasion à la Traders des
fonds qui, à un moment donné, atteignaient
$900,000 et sur lesquels elle paya, ainsi que
prévu, un intérêt de 9%. Mais l'intimée avait
conclu ce contrat principalement dans le but de
l'utiliser en tant que garantie, ce qui lui a permis
d'emprunter quelque $5,475,000 à la Banque de
Montréal à un taux d'intérêt de 5 à 6 % afin de
financer la construction de l'immeuble. Dès jan-
vier 1965, l'intimée avait obtenu auprès d'une
compagnie d'assurances un financement perma
nent au taux de 6i% et elle avait remboursé les
prêts que lui avaient consentis la Traders et la
banque ainsi que les intérêts dûs sur ces prêts.
Cependant, l'obligation qui incombait à l'intimée
en vertu de la clause 3b) du contrat, subsistait et
ce sont les paiements prévus par cette clause
qui vinrent à échéance dans les années d'imposi-
tion 1965 à 1968 inclusivement qui font l'objet
du présent appel. Les montants en question sont
les suivants:
1965 — $11,695.45
1966 — $12,263.98
1967 — $12,584.86
1968 — $13,143.12
Le savant juge de première instance a décidé
que ces sommes ne constituaient pas un intérêt
et qu'elles ne pouvaient par conséquent pas être
déduites en vertu de l'article 11(1)c)' de la Loi
de l'impôt sur le revenu, mais qu'elles pouvaient
être déduites en vertu de l'article 11(1)d) 2
comme faisant partie des paiements en rem-
boursement d'un montant d'argent emprunté et
utilisé pour gagner un revenu provenant d'une
entreprise ou de biens qui, selon l'article 7 3 , doit
être inclus dans le calcul du revenu de l'intimée.
1 11. (1) Par dérogation aux alinéas a), b) et h) du paragra-
phe (1) de l'article 12, les montants suivants peuvent être
déduits dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une
année d'imposition:
c) un montant payé dans l'année, ou payable à l'égard de
l'année (suivant la méthode employée régulièrement par le
contribuable dans le calcul de son revenu), aux termes
d'une obligation juridique de payer de ses intérêts sur
(i) un montant d'argent emprunté et utilisé aux fins de
gagner le revenu provenant d'une entreprise ou de biens
(autre que l'argent emprunté et utilisé pour acquérir des
biens dont le revenu serait exempté ou pour acquérir un
droit portant sur une police d'assurance-vie),
(ii) un montant payable pour des biens acquis en vue
d'en gagner ou d'en produire un revenu ou en vue de
gagner ou de prendre un revenu d'une entreprise (autre
que des biens dont le revenu serait exempt ou qu'un
bien qui est un droit portant sur une police d'assurance-
vie), ou
ou un montant raisonnable à cet égard, selon le moins
élevé des deux montants;
2 11.(1). . .
cl) de la partie d'un paiement
(i) en remboursement d'un montant d'argent emprunté
et utilisé pour gagner un revenu provenant d'une entre-
prise ou de biens (autre que l'argent emprunté et utilisé
pour acquérir des biens dont le revenu serait exempt),
ou
(ii) pour des biens acquis aux fins d'en gagner ou
produire un revenu ou aux fins de gagner ou produire
un revenu provenant d'une entreprise (autres que des
biens dont le revenu serait exempt),
qu'a versée le contribuable pendant l'année, qui, selon
l'article 7, doit être incluse dans le calcul du revenu du
bénéficiaire pour une année d'imposition;
3 7. (1) Lorsqu'un paiement effectué en vertu d'un contrat
ou autre entente peut raisonnablement être considéré en
partie comme un paiement d'intérêt ou autre paieraient à titre
de revenu et en partie comme un paiement à titre de capital,
la fraction du paiement qui peut raisonnablement être consi-
dérée comme paiement d'intérêt ou autre paiement à titre de
revenu est incluse dans le calcul du revenu du bénéficiaire,
sans égard à la date où le contrat ou l'entente a été conclu, à
sa forme ou à son effet juridique.
Après en avoir conclu ainsi, le savant juge de
première instance n'a pas examiné un argument
subsidiaire de l'intimée portant que les sommes
pouvaient être déduites en vertu de l'article
11 (1)cb) de la Loi.
Je suis d'accord avec le savant juge de pre-
mière instance lorsqu'il conclut qu'en dépit du
mot «intérêt» utilisé à la clause 3b) du contrat, il
ne s'agissait pas de paiements d'intérêt au sens
de l'article 11(1)c) et qu'on ne pouvait pas les
déduire en vertu dudit article, mais, en toute
déférence, je considère aussi que les sommes en
question, qu'on les prenne une à une ou ensem
ble et qu'on les considère en elles-mêmes ou par
rapport à l'intérêt et aux autres contreparties
reçues par la Traders, ne peuvent être considé-
rées comme des paiements «en remboursement
d'un montant d'argent emprunté» ou comme des
paiements «pour des biens acquis aux fins de
gagner ou produire un revenu ou aux fins de
gagner ou produire un revenu provenant d'une
entreprise» au sens de l'article 11(1)d. Je ne
considère pas non plus que l'article 7 s'applique
pour exiger que les sommes en question soient
incluses dans le revenu de l'intimée.
Je suis également d'avis que, contrairement à
ce que soutient l'intimée, ce n'est pas au cours
de ses activités commerciales qu'elle a contracté
l'obligation de verser les sommes en question de
sorte que leur déduction serait autorisée par
l'article 12(1)a) de la Loi, mais que ce sont des
dépenses de capital dont l'article 12(1)b) interdit
la déduction.
Reste maintenant à décider si les sommes
relèvent de la catégorie définie par l'article
11(1)cb) et si elles peuvent être déduites en
vertu de ce texte. Cet alinéa, adopté en 1955,
étend la possibilité de déduire des dépenses
relatives au capital utilisé afin de gagner ou
produire un revenu qu'anciennement les articles
11(1)c) et 11(1)ca) limitaient à l'intérêt et à
l'intérêt composé dûs à l'égard d'un tel capital.
Ce texte dispose comme suit:
11. (1) Par dérogation aux alinéas a), b) et h) du paragra-
phe (1) de l'article 12, les montants suivants peuvent être
déduits dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une
année d'imposition:
cb) une dépense engagée dans l'année
(i) à l'occasion de l'émission ou de la vente d'actions du
capital social du contribuable, ou
(ii) à l'occasion d'emprunt d'argent utilisé par le contri-
buable pour gagner un revenu provenant d'une entre-
prise ou de biens (autre que de l'argent employé par le
contribuable en vue d'acquérir des biens dont le revenu
serait exempté),
mais sans comprendre aucun montant à l'égard
(iii) d'une commission ou d'un boni payé ou payable à
une personne à qui les actions ont été émises ou ven-
dues ou de qui l'argent a été emprunté, ou pour ou
concernant des services rendus par une personne
comme vendeur, agent ou négociant en valeurs au cours
de l'émission ou de la vente des actions ou de l'emprunt
de l'argent, ou
(iv) d'un montant payé ou payable à titre ou au titre du
principal de la dette contractée au cours de l'emprunt de
la somme d'argent, ou à titre ou au titre d'intérêt;
Les tribunaux ont eu maintes fois l'occasion
d'examiner ce paragraphe 4 et ils l'ont en général
interprété d'une manière stricte et même, dans
un cas, d'une manière qu'on peut considérer
restrictive. Toutefois, dans aucune de ces affai-
res, on n'a soulevé de question comparable à
celle posée en l'espèce.
4 Equitable Acceptance Corporation c. M.R.N. [1964]
R.C.É. 859; Consumers Gas Company c. M.R.N. [1966]
R.C.É. 46; Sherritt Gordon Mines Ltd. c. M.R.N. [1968] 2
R.C.É. 459; Canada Permanent Mortgage Corporation c.
M.R.N. [1971] C.T.C. 694; Riviera Hotel Co. Ltd. c. M.R.N.
[1972] C.F. 645.
D'après moi, le Ministre soutient non pas que
les sommes ne sont pas des dépenses engagées
lors d'un emprunt d'argent, mais que, pour pou-
voir être déduite, la dépense doit être engagée à
peu près à l'époque où l'emprunt est contracté
et qu'en l'espèce, l'obligation de payer les
sommes en question n'a pas pris naissance lors
de l'emprunt, mais au cours des années posté-
rieures à l'emprunt et qu'elle portait sur des
bénéfices provenant de la gestion de l'immeu-
ble. L'avocat du Ministre a également soutenu
que les sommes en question sont des bonis au
sens du sous-alinéa (iii).
Par contre, l'intimée prétend que l'obligation
de verser les sommes en question est une
dépense née lors de l'emprunt contracté pour
construire l'immeuble, mais qu'on ne peut consi-
dérer ces dépenses engagées avant les années
où, l'intimée ayant tiré un profit net de ses
activités, on peut en fixer le montant. Elle sou-
tient aussi que l'article 11 (1)cb) n'exige pas que,
pour pouvoir déduire une dépense, il faut qu'elle
ait été engagée dans l'année où l'emprunt a été
contracté et que les sommes en question relè-
vent donc de la catégorie définie par le sous-ali-
néa (ii) et que ce ne sont ni des commissions ni
des bonis au sens du sous-alinéa (iii).
Le domaine général englobé par les sous-ali-
néas (i) et (ii) de l'article 11(1)cb) est, à mon
avis, limité par les exclusions expresses des
sous-alinéas (iii) et (iv), car le fait qu'on a jugé
opportun d'exclure expressément les commis
sions et bonis ainsi que les montants payés à
titre ou au titre du principal ou d'intérêt, démon-
tre, à mon sens, que «une dépense engagée dans
l'année» à l'occasion de l'émission ou de la
vente d'actions ou d'emprunt d'argent utilisé
aux fins prévues peut englober une vaste caté-
gorie de dépenses engagées à ces fins. Les
exemples qui viennent le plus aisément à l'esprit
sont les honoraires professionnels relatifs à l'ob-
tention de documents nécessaires et les droits
relatifs à l'enregistrement de documents, mais la
rédaction ne limite pas à ce type de dépenses ou
à des dépenses semblables et, à mon avis, on
n'aurait pas à forcer le sens des termes utilisés
pour considérer qu'ils englobent des sommes
semblables à celles ici en cause. J'estime aussi
qu'on doit considérer ces sommes comme des
dépenses «engagées dans l'année» dans laquelle
elles sont devenues exigibles. La difficulté vient
de l'expression «à l'occasion d'emprunt d'ar-
gent» dans le contexte d'«une dépense engagée
dans l'année à l'occasion d'emprunt» etc.
Je considère qu'à cet égard, le point de vue du
Ministre n'est pas valable. A mon sens il n'est ni
raisonnable ni pratique (et l'avocat du Ministre
ne prétend pas le contraire) de déclarer que la
déduction n'est possible que si l'année d'imposi-
tion dans laquelle les actions sont émises ou
vendues ou l'argent emprunté est la même que
celle dans laquelle la dépense est engagée, car
une telle interprétation excluerait de façon arbi-
traire la déduction, par exemple, d'honoraires
professionnels dûs à l'égard d'une émission
d'actions ou d'un emprunt contracté dans une
année d'imposition antérieure à l'émission d'ac-
tions ou à l'emprunt. Cette interprétation
excluerait également la déduction, encore à titre
d'exemple, des dépenses relatives à l'obtention
de certains documents officiels, prévues par les
accords, mais engagées dans une année d'impo-
sition postérieure à celle dans laquelle l'emprunt
a été contracté sur la foi d'accords provisoires
ou verbaux. La rédaction du texte législatif ne
semble fournir aucune bonne raison d'exclure
les dépenses engagées dans nos deux exemples.
L'argument du Ministre selon lequel la dépense
doit être engagée à l'époque où les actions sont
émises ou vendues ou la somme empruntée pour
l'être «à l'occasion de» l'émission ou la vente ou
l'emprunt, me semble soumettre à un critère
vague et incertain la question de savoir si l'on
peut déduire ces dépenses. Cet argument serait
indéfendable s'il voulait dire que la dépense doit
être engagée dans l'année d'imposition de
l'émission de la vente ou de l'emprunt et comme
il est impossible de savoir ce que recouvre l'ex-
pression «à l'époque», il me semble que ce soit
également indéfendable sur cette base. Le cri-
tère applicable, à mon sens, est de déterminer si
la dépense, quelle que soit l'année d'imposition
où elle s'est produite, résulte de l'émission, de la
vente d'actions ou de l'emprunt d'argent. Il se
peut qu'il ne soit pas toujours facile de décider
si une dépense résulte de telles circonstances,
mais il me semble que l'expression «à l'occasion
de» à l'article 11(1)cb) ne se rapporte pas à
l'époque où les dépenses ont été engagées; elle
est utilisée dans le sens de «relativement à»,
«résultant de» ou «imputable à» et se rapporte
au mode d'exécution ou à ce qui doit être fait
pour réaliser l'émission ou la vente ou l'emprunt
pour lesquels ou relativement auxquels les
dépenses ont été engagées. Ainsi, à mon avis,
les montants ici en question résultant de l'em-
prunt contracté pour financer la construction de
l'immeuble de l'intimée relèvent de l'article
11(1)cb)(ii) en tant que dépenses engagées dans
l'année à l'occasion d'emprunt d'argent, etc. Il
faut donc décider si elles en sont exclues en tant
que commissions ou bonis au sens de l'article
11(1)cb)(iii). Personne n'a soutenu que l'article
11(1)cb)(iv) les excluait en tant que paiements à
titre ou au titre d'intérêt.
En laissant de côté ce qui a trait à l'émission
et à la vente d'actions, l'article 11(1)cb)(iii) vise
et exclut tout montant à l'égard de
(iii) d'une commission ou d'un boni payé ou payable à
une personne ... de qui l'argent a été emprunté, ou
pour ou concernant des services rendus par une per-
sonne comme vendeur, agent ou négociant en valeurs
au cours de ... l'emprunt de l'argent
Rien dans la preuve ne permet de penser que
les montants en question étaient des paiements
effectués à l'égard de services tels que ceux
visés dans la seconde partie du texte précité,
mais, étant donné qu'une partie de l'argent a été
empruntée à la Traders, à qui on a payé les
sommes en question, il devient nécessaire de
décider si ces sommes entrent dans la catégorie
de «commission ou boni» au sens du sous-alinéa
en cause. Je ne me souviens pas que l'avocat du
Ministre ait soutenu que le mot commission
pouvait décrire les montants en question de
façon appropriée et je ne pense pas que ce soit
le cas. Le Shorter Oxford Dictionary donne au
mot commission, dans ce contexte, le sens de
[TRADUCTION] «rémunération proportionnelle
au travail effectué à titre de mandataire» et The
Living Webster Encyclopedic Dictionary en
donne une définition semblable. L'avocat du
Ministre a par contre soutenu que le mot boni
était applicable en l'espèce et, à cet égard, il a
cité une décision du maître des rôles, lord
Greene, dans l'arrêt Lomax c. Dixon 5 . Toute-
fois, dans cette affaire, il ne s'agissait pas de
déterminer si les montants en cause étaient des
bonis, mais s'ils étaient des paiements à titre de
capital ou à titre de revenu et, pour ce motif, cet
arrêt ne nous est pas d'un grand secours en
l'espèce. Les deux dictionnaires auxquels je me
suis référé définissent aussi le mot «boni» de la
même manière; le Shorter Oxford Dictionary en
donne la définition suivante: [TRADUCTION] «un
avantage ou un don dépassant ce qui est norma-
lement dû, une prime pour services rendus ou
escomptés, un dividende supplémentaire payé
avec un surplus de bénéfices, etc.» Je ne pense
pas que cette définition s'applique aux montants
en question, mais, indépendemment de cela, il
me semble qu'en langage ordinaire et s'agissant
de l'émission et de la vente d'actions, le mot
boni vise une partie des actions émises ou ven-
dues et, s'agissant d'emprunt, il vise une somme
supplémentaire à payer à titre de principal ou
d'intérêt. A mon avis, ce terme n'implique pas
un montant du type ici en cause, savoir un
montant qui doit être payé, qu'un emprunt soit
contracté ou non auprès de la personne qui doit
recevoir ledit montant, sans qu'il ne soit ques
tion de somme principale ou d'intérêt à payer
sur celui-ci, et qui n'est en aucune façon un
paiement effectué pour pouvoir utiliser one
somme à emprunter mais simplement un élé-
ment de la contrepartie d'un engagement de prêt
d'argent à certaines conditions et lorsque la
demande en est faite. A mon avis, les sommes
en question ne sont donc pas des bonis au sens
du sous-alinéa (iii) et il s'ensuit que ces sommes
peuvent être déduites en vertu de l'article
11(1)cb).
L'appel doit donc être rejeté avec dépens.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT LACROLx—Je souscris
aux motifs du juge Thurlow et je me rallie à sa
conclusion qu'il convient de rejeter l'appel avec
dépens.
5 [1943] 2 All E.R. 255.
Dans ses, motifs, le juge Thurlow fait remar-
quer, à l'égard de l'article 11(1)cb)(ii), que::
Les tribunaux, ont eu maintes fois l'occasion d'examiner
ce paragraphe et ils, l'ont en général interprété d'une manière
stricte et même,, d'ans un cas, d'une manière qu'on peut
considérer restrictive. Toutefois, dans aucune de ces affai-
res,, on n'a soulevé de question comparable à celle posée en
l'espèce.
C'est justement parce qu'il semble que ce soit
une question jamais posée auparavant à la Cour
que je me suis particulièrement attaché à l'étude
de l'interprétation qu'il convient, à mon avis, de
donner à l'article 11(1)cb)(ii) et à la manière
dont il convient de l'appliquer. C'est pourquoi je
me permets d'ajouter mes propres explications
et motifs de jugement.
En l'espèce, le but principal du contribuable
était de construire un immeuble de bureaux afin
d'en tirer un revenu.
En premier lieu, il s'est porté acquéreur des
droits de surface du terrain où l'immeuble
devait être construit;
En second lieu, il a dû trouver l'argent néces-
saire à cette fin.
Après avoir conclu avec la Manufacturer's
Life Company des accords qui s'avérèrent
insuffisants, l'intimé conclut l'accord avec la
Traders Realty sous forme de prêt automatique-
ment renouvelable à long terme et portant sur la
somme de $6,500,000.00. Cet accord constitue
la pièce n° 8 (page 112—Dossier d'appel).
Il est bien évident qu'afin d'obtenir ou de se
procurer cet argent ou ce prêt, le contribuable a
dû en payer le prix. Autrement dit, il a dû, aux
termes de l'article 11(1)cb) de la Loi de l'impôt
sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148 engager une
dépense afin d'obtenir de l'argent pour gagner
un revenu.
D'après le dictionnaire Webster, une dépense
est un débours direct ou une charge financière.
En l'espèce, cette dépense ou cette charge
financière semble clairement établie par le con-
trat conclu le 3 juillet 1962 en vertu duquel
l'intimée-contribuable s'engage à verser une
contrepartie pour la somme empruntée et ce par
une double forme de paiement ou de débours,
mais, dans les deux cas, il s'agit d'une dépense
engagée par le contribuable dans le même but;
voici la forme qu'a pris cette dépense ou ce
paiement: -
En premier lieu: un intérêt de 9% sur toute
somme empruntée à la Traders Realty confor-
mément au prêt octroyé aux termes de la pièce
8 et,
En deuxième lieu: dans chaque année civile
pour laquelle la Yonge-Eglinton tire un profit
net de ses opérations, elle s'engage à verser une
somme égale à 1% de ses revenus locatifs bruts,
et ce sur une période de 25 ans.
C'est le coût ou le prix que le contribuable a
dû payer ou, aux termes de la Loi (art.
11(1)cb)), c'est la dépense qu'il a dû engager ou
la charge financière qu'il a dû assumer afin
d'obtenir les sommes dont il avait besoin pour
tirer un revenu de son entreprise ou de ses
biens.
A mon avis, il est difficile de ne pas dire que
cette dépense a été engagée ou cette charge
financière assumée ou acceptée par le contri-
buable à l'occasion d'emprunt d'argent utilisé
pour gagner un revenu provenant d'une entre-
prise ou de biens, conformément, cette fois-ci à
l'article 11(1)cb)(ii).
Tout cela fait partie du même contrat conclu
le 3 juillet 1962 (pièce 8) et il importe peu que
les paiements dussent être effectués à une date
ultérieure.
L'obligation découle de l'accord, mais bien
sûr ce n'est qu'au cours des années où les loyers
étaient payés que l'on pouvait chiffrer les
dépenses ou la part du prix ou du coût à payer
et, par conséquent, la dépense ou la part du prix
doit être déduite dans l'année où elle a été
déboursée.
L'appelant, semble-t-il, soutient que les mon-
tants affectés par l'intimée à chacune des
années 1965 à 1968 inclusivement, sont des
dépenses engagées dans ces années respective-
ment, au sens de l'alinéa cb) et qu'afin de pou-
voir être déduites, il faudrait que ces dépenses
aient été engagées à l'occasion «d'emprunt
d'argent».
Dans les années 1965 à 1968 inclusivement,
l'intimée-contribuable n'empruntait pas d'ar-
gent, mais s'acquittait des dépenses qu'il avait
engagées ou de la charge financière qu'il avait
assumée le 3 juillet 1962, alors qu'il contractait
un emprunt auprès de la Traders Realty, ce qu'il
n'a fait qu'une seule fois.
Au risque de me répéter, je puis dire qu'à
l'époque où elle a effectivement emprunté
(1962), ou «à l'occasion d'emprunt d'argent*,
elle ne pouvait pas déterminer les sommes qui
seraient dues dans les années 1965 à 1968 inclu-
sivement. Elle ne pouvait qu'assumer l'obliga-
tion de les payer et c'est justement ce qu'elle fit
au cours des années en question.
Cette partie du coût d'un emprunt ne consti-
tue pas un intérêt. A l'époque où cette somme
fut versée et déduite, l'intimée-contribuable
avait déjà remboursé à la Traders Realty les
sommes qu'elle lui avait empruntées. Étant
donné que le capital avait été remboursé, il
n'existait plus de base à un calcul d'intérêt.
Il ne s'agit ni d'une commission ni d'un boni.
Que nous l'appelions paiement à titre de revenu
ou contrepartie d'un engagement financier, la
somme en question fait très nettement partie du
coût d'emprunt du capital nécessaire à la créa-
tion de biens afin de gagner un revenu.
L'accord du 3 juillet 1962 (pièce 8) a de fait
servi de garantie au contribuable pour emprun-
ter de l'argent ailleurs à un taux d'intérêt infé-
rieur et lui permettre d'achever la construction
de son projet ou entreprise.
Il ressort de la preuve que l'intimée a utilisé le
contrat du 3 juillet 1962, lui donnant un crédit
automatiquement renouvelable, comme garantie
afin d'emprunter $5,000,000.00 à la Banque de
Montréal à un taux d'intérêt de 5 à 6% pour
financer la construction de l'immeuble.
Enfin, le contribuable a atteint son but qui
était de construire un immeuble de bureau dont
il tirerait un revenu.
Il a dû emprunter l'argent à cette fin et, con-
formément aux dispositions de l'article 11(1)cb)
de la Loi, il a dû engager la dépense à l'occasion
d'emprunt d'argent (article 11(1)cb)(ii)).
On ne peut pas oublier que, dans la Loi elle-
même, l'article 11(1)cb) qui autorise les déduc-
tions s'intitule justement «frais d'emprunt
d'argent».
En conclusion, l'intimée-contribuable devait
donc bénéficier du droit aux déductions qu'envi-
sage et qu'autorise l'article susmentionné,
c'est-à-dire l'article 11(1)cb)(ii).
Pour tous ces motifs, il faut rejeter le présent
appel avec dépens.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT SWEET (dissident)—Par
les présentes, il est interjeté appel d'une déci-
sion de la Division de première instance qui a
accueilli l'appel que l'intimée avait interjeté de
ses cotisations à l'impôt sur le revenu pour les
années 1965 à 1968 inclusivement. La question
soulevée à l'égard des cotisations est la même
pour chacune des années, savoir, l'intimée est-
elle en droit de déduire dans le calcul de son
revenu aux fins de l'impôt certaines sommes
payées à la Traders Realty Limited (ici appelée
la Traders).
En 1961, l'intimée a acquis une tenure à bail
sur les droits de surface d'un terrain apparte-
nant à la Commission des transports de Toronto,
terrain convenant à la construction d'un
immeuble. L'immeuble fut effectivement con-
struit. Afin d'obtenir le financement provisoire
de la construction, l'intimée a conclu un accord
avec la Traders, accord «en date du 3 juillet
1962». On s'y reférera sous le nom d'accord
Traders. Il prévoyait que la Traders accorderait
à l'intimée [TRADUCTION] «un prêt automatique-
ment renouvelable à long terme» «jusqu'à un
maximum de $6,500,000». Il prévoyait égale-
ment que tous les prêts consentis en vertu de
cet accord devaient être remboursés le 30 juin
1965 ou plutôt selon des conditions y énoncées.
Aux termes de cet accord, l'intimée convenait
notamment de ce qui suit:
[TRADUCTION] 3. La Yonge-Eglinton versera à la Traders des
intérêts sur le prêt selon le barême suivant:
a) les montants dûs à l'occasion aux termes de l'accord de
prêt porteront intérêt (les intérêts non payés portant eux-
mêmes intérêts) payable trimestriellement non par antici
pation, à la fois avant et après la date d'échéance et avant
et après défaut de paiement les 30 janvier, avril, juillet et
octobre de chaque année au taux annuel de 9 %.
b) Chaque année civile où la Yonge-Eglinton tirera un
profit net de ses activités (tel que certifié par les vérifica-
teurs de cette dernière), elle versera à la Traders à titre
d'intérêt supplémentaire une somme égale à 1% de son
revenu locatif brut (tel que certifié par les vérificateurs de
la Yonge-Eglinton) tiré du projet de construction, ces
paiements venant à échéance 90 jours après la fin de
ladite année civile. Le premier de ces versements sera
payable, après 1964, l'égard de la première année civile
dans laquelle la Yonge-Eglinton aura fait un bénéfice net
et ces paiements se poursuivront jusqu'à ce que 25 paie-
ments aient été effectués conformément à cet accord.
A mon avis, l'intimée était tenue d'effectuer
les versements prévus à l'article 3b) ci-dessus,
quel que soit le montant emprunté à la Traders,
quel que soit le moment où ce montant est échu
et même si l'intimée n'empruntait rien du tout.
Conformément à l'article 3b), l'intimée a
versé à la Traders les sommes suivantes:
1965 — $11,695.45
1966 — $12,263.98
1967 — $12,584.86
1968 — $13,143.12
Ce sont les versements dont l'appelant a
refusé la déduction et qui font l'objet du présent
appel.
En outre, en rapport avec le financement pro-
jeté, Gerhard W. Moog, actionnaire de l'intimée,
a également cédé à la Traders 5% des actions
ordinaires en circulation de l'intimée pour un
prix total de $5.00.
Du 16 juillet 1962 au 23 décembre 1964, la
Traders a consenti plusieurs avances conformé-
ment à l'accord qu'elle avait conclu. Pendant
cette période, les soldes exigibles ont varié entre
au moins $200,000 et au plus $900,000. Au 15
janvier 1965, l'intimée avait remboursé toutes
les sommes dues et n'a emprunté aucune autre
somme à la Traders en vertu de l'accord
Traders.
L'intimée a également reçu une aide finan-
cière de la Banque de Montréal. A cet égard,
l'intimée s'était engagée à demander à la Trad
ers, sur demande de la banque, d'effectuer les
versements en vertu de l'accord Traders et de
verser ces paiements à la banque. L'intimée
s'engageait en outre à recevoir en tant que fidu-
ciaire et à verser à la banque tous paiements
qu'elle pourrait recevoir tant que le prêt consen-
ti par la banque ou toute partie de celui-ci
demeurerait impayé.
Il me semble que ces sommes, l'objet du
présent appel, n'ont pas été déboursées ou
dépensées par l'intimée en vue de gagner ou de
produire un revenu tiré de biens ou d'une entre-
prise de l'intimée au sens de l'exception conte-
nue à l'article 12(1)a) de la Loi de l'impôt sur le
revenu.
Même si, au sens large, on pouvait considérer
que ces sommes ont effectivement été dépen-
sées dans ce but, il s'agit de montants afférents
au capital, car elles ont été utilisées pour acqué-
rir des immobilisations, savoir un immeuble de
bureaux, et l'article 12(1)b) de la Loi de l'impôt
sur le revenu en interdit la déduction.
Par conséquent, il faut décider si les sommes
en question peuvent être déduites en vertu de
quelques autres dispositions de la Loi de l'impôt
sur le revenu.
L'avocat de l'intimée soutient que ces
sommes peuvent être déduites en vertu des arti
cles 11(1)c), 11(1)cb) et 11(1)d), dont voici des
extraits:
11. (1) Par dérogation aux alinéas a), b) et h) du paragra-
phe (1) de l'article 12, les montants suivants peuvent être
déduits dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une
année d'imposition:
c) un montant payé dans l'année, ou payable à l'égard de
l'année (suivant la méthode employée régulièrement par le
contribuable dans le calcul de son revenu), aux termes
d'une obligation juridique de payer des intérêts sur
(i) un montant d'argent emprunté et utilisé aux fins de
gagner le revenu provenant d'une entreprise ou de biens
(ii) un montant payable pour des biens acquis en vue
d'en gagner ou d'en produire un revenu ou en vue de
gagner ou de prendre un revenu d'une entreprise .. .
ou un montant raisonnable à cet égard, selon le moins
élevé des deux montants;
cb) une dépense engagée dans l'année
(ii) à l'occasion d'emprunt d'argent utilisé par le contri-
buable pour gagner un revenu provenant d'une entre-
prise ou de biens ...,
mais sans comprendre aucun montant à l'égard
(iii) d'une commission ou d'un boni payé ou payable à
une personne ... de qui l'argent a été emprunté, ou
pour ou concernant des services rendus par une per-
sonne comme vendeur, agent ou négociant en valeurs
au cours de ... l'emprunt de l'argent, ou
(iv) d'un montant payé ou payable à titre ou au titre du
principal de la dette contractée au cours de l'emprunt de
la somme d'argent, ou à titre ou au titre d'intérêt;
d) la partie d'un paiement
(i) en remboursement d'un montant d'argent emprunté
et utilisé pour gagner un revenu provenant d'une entre-
prise ou de biens ..., ou
(ii) pour des biens acquis aux fins d'en gagner ou
produire un revenu ou aux fins de gagner ou produire
un revenu provenant d'une entreprise ..
qu'a versée le contribuable pendant l'année, qui, selon
l'article 7, doit être incluse dans le calcul du revenu du
bénéficiaire pour une année d'imposition;
L'article 11(1)c) vise des «intérêts». Dans
l'accord Traders, les versements en question
sont appelés intérêt. Il est banal de dire qu'il ne
suffit pas d'appeler des versements «intérêts»
pour qu'ils le deviennent. Si les versements ne
possèdent pas les caractéristiques nécessaires
permettant de les classer dans la catégorie des
intérêts, le simple fait de les appeler intérêts ne
change rien à leur véritable nature. Le savant
juge de première instance a décidé que les ver-
sements en question ne sont pas des intérêts et,
en toute déférence, je souscris à sa conclusion.
En l'espèce, l'intimée était tenue de verser un
montant égal à 1% des loyers annuels bruts de
l'immeuble, quel que soit le montant d'argent
prêté. Les versements à effectuer n'étaient pas
calculés d'après les sommes prêtées ou d'après
la durée du prêt. Les sommes dues en vertu de
cet engagement ne se rapportaient pas au princi
pal. Aux termes de l'accord, ces sommes étaient
dues même si l'intimée n'empruntait rien à la
Traders.
A mon avis, les paiements devant être versés
à la Traders et calculés sur les loyers bruis
n'étaient pas de l'intérêt au sens de l'article
11(1)c). Et, d'après moi, le fait qu'il y avait des
avances d'argent à l'égard desquelles une autre
clause de l'accord prévoyait le paiement d'un
intérêt de 9% par an, n'y change rien.
A mon avis, rien à l'article 11(1)c) n'autorise
la déduction.
Je ne pense pas non plus que l'article 11(1)cb)
autorise la déduction.
Il me vient à l'esprit que les dépenses visées
par l'alinéa cb) peuvent simplement être ces
frais accessoires auxquels un emprunteur doit
souvent faire face, des honoraires par exemple
et non des versements périodiques comme c'est
le cas ici. Mais l'appelant n'a pas présenté cet
argument et il n'est donc pas en litige. De toute
manière, étant donné mon point de vue sur la
question, je n'ai pas à la trancher et je ne vais
pas le faire. Je vais maintenant examiner l'af-
faire comme si les sommes en question étaient
une «dépense» au sens de l'alinéa.
L'expression essentielle de l'alinéa cb) est:
«une dépense engagée dans l'année ... à l'occa-
sion d'emprunt d'argent».
Les parties reconnaissent, me semble-t-il, que
les sommes en question affectées par l'intimée à
chacune des années 1965 à 1968 inclusivement,
sont des dépenses engagées dans ces années au
sens de l'alinéa cb). Si je me suis trompé quant à
la position des parties à cet égard, je considère
en tout cas que l'expression «dépenses enga
gées» doit être interprétée comme voulant dire
les dépenses effectivement faites.
Pour que ces dépenses puissent être déduites
en vertu de l'alinéa cb), elles doivent non seule-
ment être «engagées dans l'année», mais elles
doivent également l'avoir été «à l'occasion
d'emprunt d'argent».
L'obligation de l'intimée d'engager lesdites
dépenses est née de l'accord Traders «en date
du 3 juillet 1962». A mon sens, on peut donc
dire que l'accord Traders a été conclu à l'occa-
sion d'emprunt d'argent et que les obligations
incombant à l'intimée en vertu de cet accord
sont nées à l'occasion d'emprunt d'argent. Il ne
faut cependant pas confondre le fait de promet-
tre d'engager une dépense dans certaines circon-
stances à venir et la dépense elle-même lorsque
se produisent ces circonstances.
Étant donné que le dernier emprunt à la Tra
ders remonte au 23 décembre 1964 et que 1965
était la première année où une telle dépense a
été engagée, je ne pense pas qu'on puisse dire
que les dépenses ont été engagées à l'occasion
d'emprunt d'argent étant donné qu'elles l'ont été
après qu'ait été effectué le dernier prêt.
Si le Parlement avait voulu autoriser la déduc-
tion de toutes les dépenses engagées en vertu
d'un accord conclu à l'occasion d'emprunt d'ar-
gent, il aurait très bien pu le dire en termes
clairs. Mais il ne l'a pas fait. L'alinéa cb) ne
mentionne que les dépenses engagées à l'occa-
sion d'emprunt d'argent.
Il reste à examiner l'article 11(1)cî). Pour pou-
voir être déduit en vertu de cet article, le «paie-
ment» doit, en tout cas, être effectué soit en
remboursement d'un montant d'argent emprunté
(sous-alinéa (i)) soit pour des biens acquis (sous-
alinéa (ii)). Lesdits paiements n'entrent dans
aucune de ces deux catégories. Ils n'ont pas été
effectués en remboursement d'un montant d'ar-
gent, car l'argent emprunté était complètement
remboursé au 15 janvier 1965. Ils n'ont pas non
plus servi à acquérir des biens.
Même si les paiements étaient de nature à
pouvoir entrer dans les catégories définies au
sous-alinéa (i) ou au sous-alinéa (ii) de l'alinéa
d), le contribuable ne pourrait les déduire que si,
en vertu de l'article 7, on devait les inclure dans
le calcul du revenu du bénéficiaire pour une
année d'imposition. (C'est moi qui souligne.)
La seule partie de l'article 7 qui pourrait
s'appliquer, en l'espèce est le paragraphe (1),
que voici:
7. (1) Lorsqu'un paiement effectué en vertu d'un contrat
ou autre entente peut raisonnablement être considéré en
partie comme un paiement d'intérêt ou autre paiement à titre
de revenu et en partie comme un paiement à titre de capital,
la fraction du paiement qui peut raisonnablement être consi-
dérée comme paiement d'intérêt ou autre paiement à titre de
revenu est incluse dans le calcul du revenu du bénéficiaire,
sans égard à la date où le contrat ou l'entente a été conclu, à
sa forme ou à son effet juridique.
Vu sa rédaction, ce paragraphe ne traite que
des paiements qui sont en partie un paiement
d'intérêt ou autre paiement à titre de revenu et
en partie un paiement à titre de capital.
Les paiements effectués conformément à l'ar-
ticle 3b) de l'accord Traders ne comportent
aucune ambiguïté. A mon avis, ces paiements
n'étaient pas du type de ceux décrits à l'article
7. En tout cas, cela rendrait l'article 7(1) inappli
cable en l'espèce, ce qui, à son tour, rendrait
l'article 11(1)d) inapplicable.
A mon avis, les sommes suivantes, dont l'inti-
mée demande la déduction dans le calcul de son
revenu pour chacune des années indiquées,
savoir
1965 - $11,695.45
1966 - $12,263.98
1967 - $12,584.86
1968 - $13,143.12
ne peuvent pas être déduites et l'appelant était
bien fondé d'en refuser la déduction.
J'accueillerais l'appel avec dépens, devant
cette cour et en première instance.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.