T-1311-72
M.W.A. Gas and Oil Limited (Demanderesse)
C.
Le ministre du Revenu national (Défendeur)
Division de première instance, le juge Catta-
nach—Calgary, les 12 et 13 novembre 1973; le
21 janvier 1974.
Impôt sur le revenu—Déductions—Dépenses d'exploitation
d'une entreprise de prospection de gaz et de pétrole—Au
cours de la même année d'imposition, l'entreprise de cons
truction a été remplacée par une entreprise de prospection de
gaz et de pétrole—Cette dernière est-elle l'entreprise principa-
le—La compagnie a droit à la déduction—Loi de l'impôt sur
le revenu, art. 83A(3b)a).
La compagnie demanderesse a abandonné son entreprise
de construction en mars 1968. Il y eut un intervalle entre ses
activités durant lequel elle mit fin à son entreprise de
construction. Elle reprit ses activités en octobre 1968, lors-
qu'elle commença à exploiter son entreprise de prospection
de gaz et de pétrole, à laquelle sont imputables les dépenses
d'exploration se chiffrant à $995,000. En 1969, la compa-
gnie modifia sa raison sociale qui devint le nom qui figure
dans l'intitulé de la cause.
Arrêt: l'appel est accueilli; l'entreprise de construction de
la compagnie a été remplacée par l'entreprise de prospection
de gaz et de pétrole en tant qu'«entreprise principale» de la
compagnie pendant l'année d'imposition 1968. La compa-
gnie est autorisée à déduire de son revenu les sommes
dépensées, en vertu de l'article 83A(3b)a) de la Loi de
l'impôt sur le revenu.
Arrêts analysés: Sorbara c. M.R.N. [1965] 1 R.C.É.
191; American Metal Company of Canada c. M.R.N.
[1952] C.T.C. 302 et M.R.N. c. Consolidated Mogul
Mines Limited 68 DTC 5284.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
J. G. McDonald, c.r., et D. C. Nathanson
pour la demanderesse.
F. Dubrule, c.r. et F. Fryers pour le
défendeur.
PROCUREURS:
McDonald & Hayden, Toronto, pour la
demanderesse.
Le sous-procureur général du Canada pour
le défendeur.
LE JUGE CATTANACH—Par les présentes, la
demanderesse interjette appel de la cotisation à
l'impôt sur le revenu qu'a établie le Ministre
pour l'année d'imposition se terminant le 31
octobre 1968.
La question portée en appel et les arguments
opposés des parties sont très précisément
délimités.
Il s'agit de savoir si l'entreprise principale de
la demanderesse, dans son année d'imposition
1968, était la production, le raffinage ou la mise
en vente du pétrole ou des produits du pétrole
ou du gaz naturel, ou l'exploration ou le forage
en vue de découvrir du pétrole et du gaz naturel
au sens de l'article 83A(3b)a) de la Loi de l'im-
pôt sur le revenu.
Si c'est le cas, la demanderesse peut alors, en
vertu de l'article 83A(3b), déduire dans le calcul
de son revenu conformément à la Partie I de la
Loi, le total des dépenses de forage et d'explo-
ration engagées dans l'année, dans la mesure où
ces dépenses n'ont pas déjà été déduites.
Ces dépenses s'élèvent au total de $955,000.
La demanderesse a dépensé $55,000 pour l'ex-
ploration et le forage en vue de découvrir du
pétrole en octobre 1968 et elle s'est portée
acquéreur au cours du même mois, au prix dé
$900,000, de droits de prospection de pétrole et
de gaz.
Le Ministre reconnaît que la demanderesse a
effectivement dépensé $900,000 pour acquérir
des droits d'exploration et de forage au sens de
l'article 83A(5a) et que ces dépenses sont, aux
fins de l'article 83A(3b), réputées être des
dépenses de forage et d'exploration au sens de
l'article 83A(5 a).
Voici l'extrait de l'article 83A(3b) qui nous
intéresse:
83A. (3b) Une corporation dont l'entreprise principale est
a) la production, le raffinage ou la mise en vente du
pétrole ou des produits du pétrole ou du gaz naturel, ou
l'exploration ou le forage en vue de découvrir du pétrole
ou du gaz naturel,
peut déduire, dans le calcul de son revenu sous le régime de
la présente Partie pour une année d'imposition, le moindre
des....
On trouve ensuite aux alinéas j) et g) du
paragraphe (3b) de l'article 83A les formules
permettant de calculer les sommes à déduire,
mais le litige ne porte pas sur la faculté de
déduire la somme de $955,000 si la demande-
resse est effectivement une compagnie dont
l'entreprise principale répond aux exigences que
pose l'alinéa a) du paragraphe (3b) de l'article
83A tel qu'il apparaît ci-dessus.
La demanderesse soutient que, dans l'année
de l'imposition en question, son entreprise prin-
cipale répondait aux exigences de l'alinéa a)
alors que, selon le Ministre, son entreprise prin-
cipale portait sur d'autres activités. C'est préci-
sément sur cette question que porte le litige.
La demanderesse a été constituée en corpora
tion conformément aux lois de la province de
l'Ontario, par lettres patentes en date du 18 mai
1966, sous la raison sociale McDougall Wal-
bridge Aldinger (Ontario) Limited, pour exercer
les activités d'entrepreneur général de construc
tion. La Walbridge, Aldinger Company de
Détroit (Michigan) et la W. A. McDougall Ltd.
de London (Ontario) en sont les fondateurs et
chacune d'elles possédait 50% des actions
émises du capital-actions de la demanderesse.
De fait, la compagnie demanderesse réunissait
les ressources des deux compagnies, l'une ayant
son siège social à Détroit et l'autre à London.
La compagnie de Détroit avait déjà effectué des
travaux pour la Ford Motor Company et celle
de London possédait du matériel de construc
tion dans la région.
La compagnie demanderesse, ainsi constituée,
obtint l'adjudication pour la construction d'une
usine de montage automobile pour le compte de
la Ford Motor Company of Canada Limited
(ci-après appelée la Ford) à St-Thomas
(Ontario).
Le contrat signé à l'origine avec la Ford por-
tait sur les travaux de fondations, d'empatte-
ments, de coffrages et de béton. Si j'ai bonne
mémoire, il ressort de la preuve que la soumis-
sion de la demanderesse s'élevait à environ
$5,000,000. Toutefois, pendant les 14 mois qui
suivirent le début des travaux en 1966, le con-
trat a subi quelque 338 demandes de change-
ments ou modifications si bien que la demande-
resse s'est occupée de manière continue de la
construction de cette usine de montage pour
pouvoir la remettre à la Ford en état de marche.
Je crois me souvenir que le coût total de cons
truction s'élevait à environ $27,850,000. Il
s'agissait d'un contrat clefs en main.
En octobre et en novembre 1967, 200
employés de la demanderesse, tous ouvriers
métallurgistes, achevaient les travaux de cons
truction de la chaîne de montage de l'usine.
La Ford a commencé la fabrication avant
Noël 1967. McDougall acheta une automobile
qui était sortie de la chaîne de montage en
décembre 1967.
Au l er février 1968, aucun employé de la
demanderesse ne travaillait plus sur les lieux, ni
aucun des sous-entrepreneurs, sauf quelque 20
ouvriers terminant les travaux de jardinage.
Le chef des travaux quitta le chantier en
novembre 1967 et retourna travailler pour la W.
A. McDougall Limited sur ses chantiers en
cours dans l'est du Canada.
McDougall déclara que les travaux étaient
terminés le l er février 1968, sauf certains tra-
vaux de nettoyage auxquels ses employés ont
consacré quelque 200 jours-hommes et les
employés des autres sous-entrepreneurs, 400
jours-hommes.
La demanderesse soutient que la construction
était terminée en février 1968.
L'avocat pour le Ministère soutient pour sa
part que l'entreprise de construction de la
demanderesse s'est poursuivie pendant tout
l'exercice financier de cette dernière prenant fin
le 31 octobre 1968 et même pendant l'exercice
financier suivant.
Pour fonder cette prétention, il fait une analo-
gie avec le raisonnement tenu dans l'arrêt Sor-
bara c. M.R.N. 1 où à la page 199, il est déclaré:
[TRADUCTION] ... A mon avis, l'entreprise qui consiste à
acheter un terrain afin de le revendre en réalisant un profit
s'entend de toutes les opérations essentielles au succès du
projet, notamment, non seulement la vente ou autre cession,
mais également la perception du prix de vente.
Il a ensuite relevé l'existence d'à peu près 20
demandes de modifications de travaux dont les
[1965] 1 R.C.É. 191.
factures portaient des dates comprises entre
avril 1968 et août de cette même année.
McDougall a expliqué que le travail avait été
accompli et que les dirigeants de la demande-
resse étaient en train de négocier avec la Ford
les sommes dues à la suite des demandes de
modifications de travaux. Une fois cette ques
tion réglée, les factures furent établies. Les diri-
geants de la demanderesse se réunissaient
chaque mois avec la Ford afin de négocier les
sommes dues.
Le chef des travaux avait reçu une prime de
$67,000. Il quitta le chantier en automne 1967.
Le mois de juillet précédent, il avait reçu
$15,000. Le solde de $52,000 lui fut versé au
mois d'août 1969, soit à une date déjà avancée
de l'exercice financier suivant de la demande-
resse.
L'état financier de la demanderesse pour l'an-
née prenant fin le 31 octobre 1968 fait apparaî-
tre à l'actif la somme de $378,000 due par la
Ford.
Le 23 octobre 1968, soit sept jours avant la
fin de l'exercice financier, la compagnie envoya
à la Ford, la dernière facture d'un montant de
$318,000 qui fut réglée en novembre 1968.
La différence entre $378,000 et $318,000
s'explique par le fait qu'à la suite de négocia-
tions avec la Ford la moindre des deux sommes
fut retenue.
La demanderesse avait à l'origine été consti-
tuée pour la réalisation d'un seul projet, à savoir
l'usine de montage de la Ford. L'entreprise de
construction de la demanderesse prendrait donc
fin automatiquement une fois le projet terminé.
Il ressort de la preuve que l'usine a été achevée
avant le , ler mars 1968 et qu'il ne restait qu'à
négocier avec la Ford au sujet des sommes dues
et à les encaisser.
Une fois achevée la construction de l'usine
Ford, la Walbridge Aldinger Company de
Détroit a voulu se retirer de la compagnie
demanderesse. Son retrait fut organisé. On pro-
céda à la répartition des bénéfices résultant de
la construction de l'usine Ford. La W. A.
McDougall Ltd. devint ainsi l'unique actionnaire
réel de la compagnie demanderesse à qui il
restait des liquidités d'à peu près $1,273,000,
somme qui représente sa part normale des béné-
fices réalisés dans l'entreprise de construction.
La demanderesse s'est donc mise à la recher-
che d'autres genres d'activités commerciales.
Après avoir étudié la question, elle a opté pour
des activités dans le domaine du pétrole et du
gaz.
Par lettres patentes supplémentaires en date
du 16 octobre 1968, la demanderesse a radié de
ses statuts les objets l'autorisant à exploiter une
entreprise de construction et elle y a substitué
des objets lui permettant de s'occuper d'une
entreprise de prospection de pétrole et de gaz.
Au mois d'octobre 1968, la demanderesse a
en outre obtenu de la province de l'Alberta un
permis provincial supplémentaire l'autorisant à
exercer son activité commerciale dans ladite
province.
Par lettres patentes supplémentaires en date
du 30 avril 1969, la demanderesse a modifié sa
raison sociale qui, de McDougall Walbridge Ald-
inger (Ontario) Limited, devint la M.W.A. Gas
and Oil Limited, nom qui figure dans l'intitulé
de la cause.
Comme nous l'avons déjà dit, la demande-
resse a engagé la somme de $55,000 dans le
forage et l'exploration en vue de découvrir du
pétrole et du gaz et elle s'est portée acquéreur,
au prix de $900,000 de droits d'exploration et
de forage pour le pétrole et le gaz. Elle régla ces
deux sommes par chèques au mois d'octobre
1968.
Dans son année d'imposition 1968, la deman-
deresse a tiré un revenu de $8,124 de son entre-
prise de prospection de pétrole et de gaz et,
dans chacune de ses années d'imposition 1969,
1970 et 1971, elle en a tiré un revenu d'à peu
près $350,000. Il ressort de ces chiffres que la
demanderesse a recouvré ses dépenses en 3 ans.
Le Ministre soutient, si je comprends bien,
que l'article 83A(3b), disposant qu'«Une corpo
ration dont l'entreprise principale est» implique
nécessairement qu'une compagnie ne peut avoir
qu'une seule entreprise principale dans une
année d'imposition et qu'on ne saurait attacher
plus d'importance à une période donnée de l'an-
née d'imposition plutôt qu'à une autre.
Supposant exacte la prétention du Ministre, je
dois donc décider laquelle des deux entreprises,
savoir l'entreprise de construction et l'entreprise
d'exploration et de forage de gaz et de pétrole,
exploitées par la demanderesse dans son année
d'imposition 1968, était son entreprise
principale.
Au contraire, la demanderesse prétend que
jusqu'au 1 O7 mars 1968, elle exploitait exclusive-
ment son entreprise de construction. S'agissant
de sa seule entreprise à l'époque, c'était son
entreprise principale.
La demanderesse prétend aussi que l'activité
de son entreprise de construction a pris fin le ler
mars 1968, le projet étant achevé, et qu'elle est
restée en sommeil de cette date jusqu'au mois
d'octobre 1968, époque à laquelle elle s'est
lancée dans son entreprise de prospection de
gaz et de pétrole.
A mon avis, le point capital de l'argumenta-
tion de la demanderesse porte qu'une compa-
gnie peut avoir deux entreprises principales
dans une année d'imposition du moment qu'un
intervalle sépare la fin d'une entreprise du début
de l'autre.
Dans l'arrêt American Metal Company of
Canada Ltd. c. M.R.N. 2 le juge Cameron eut à
examiner la question de savoir laquelle des deux
entreprises exploitées en même temps par une
compagnie était l'entreprise «principale». La
partie pertinente de l'article en vigueur à ce
moment disposait: «une corporation s'occupant
principalement d'exploitation minière ou d'ex-
ploration pour la découverte de minéraux, a
droit de réduire de son revenu» les dépenses de
prospection, d'exploration et de mise en valeur
dans l'année d'imposition.
Le juge Cameron déclarait à la page 306:
[TRADUCnoN] L'expression «corporation s'occupant prin-
cipalement» n'est définie dans aucune des Lois et cette
expression, pour autant que je sache, n'a fait l'objet d'au-
cune interprétation des tribunaux. A mon avis, c'est une
question de fait qu'il convient de trancher en examinant et
2 [1952] C.T.C. 302.
en comparant tous les faits relatifs aux divers types d'entre-
prise qu'exploite la compagnie.
Dans l'arrêt M.R.N. c. Mogul Mines Limited 3 ,
le juge Spence, au nom de la Cour suprême du
Canada, a cité cette déclaration du juge Came-
ron en l'approuvant et a fait application du
critère posé dans l'arrêt American Metal
(précité).
Il relevait que le texte législatif examiné alors
ne comportait aucune définition de l'expression
«entreprise principale» bien que le mot «entre-
prise» soit défini à l'article 139(1)e) d'une façon
n'ayant rien à voir avec la question en litige.
Il en est de même en l'espèce. Il n'y a pas lieu
de faire la distinction entre l'adjectif «principal»
et l'expression «s'occupant principalement». Ce
sont des expressions synonymes dans leurs con-
textes respectifs.
Sans prétendre trancher la question, j'en
reviens maintenant à l'argument du Ministre qui
soutient qu'une compagnie ne peut, dans une
année d'imposition, avoir qu'une seule entre-
prise principale.
Comme je l'ai déjà dit, l'argument selon
lequel une compagnie ne peut avoir qu'une
entreprise principale implique qu'il faut décider,
comme étant une question de fait, laquelle des
entreprises de la demanderesse dans son année
d'imposition 1968 était son entreprise princi-
pale.
A la suite de sa constitution en 1966, la seule
entreprise de la demanderesse était la construc
tion de l'usine de montage Ford à St-Thomas
(Ontario). La compagnie demanderesse fut
constituée dans ce seul but. Cette conclusion est
amplement justifiée. La compagnie de Détroit
faisait depuis longtemps affaire avec la Ford et
jouissait d'une bonne réputation auprès de cette
dernière. La compagnie de London possédait
une bonne expérience de la construction dans
cette région. La compagnie de Détroit devint
actionnaire de la compagnie demanderesse, uni-
quement pour la construction de l'usine en ques
tion. Le fait qu'à l'achèvement des travaux de
l'usine, elle s'est dissociée de la compagnie
demanderesse, vient confirmer ce point.
3 68 DTC 5284.
L'usine était en état de marche au mois de
décembre 1967 et dès ce mois-là, des voitures
Ford sortaient de la chaîne de montage. Il ne
restait qu'à terminer certains travaux de net-
toyage, d'aménagement des jardins ainsi que
l'installation de clôtures de fer à l'extérieur. Ces
travaux furent terminés le ler mars 1968. A
partir de cette date, la demanderesse n'avait
plus aucun employé sur ce chantier, et son chef
de travaux avait quitté le chantier et cessé d'être
son employé en novembre 1967. Avant cette
date, tous les employés des sous-entrepreneurs
avaient quitté le chantier.
Bref, la construction proprement dite de
l'usine était terminée à cette date. Il ne restait
aux dirigeants de la demanderesse qu'à s'enten-
dre avec la Ford pour le paiement des travaux
effectués conformément aux demandes de
modification et à accepter le paiement de ces
sommes une fois fixées. Les travaux en cause
dans ces négociations avaient déjà été entrepris
et la demanderesse les avait terminés avant le
l er mars 1968.
Je n'accepte pas la déposition de McDougall
selon laquelle la compagnie demanderesse a
cessé ses activités et est restée en sommeil
jusqu'en octobre 1968, date à laquelle elle s'est
lancée dans l'exploration et le forage en vue de
découvrir du gaz et du pétrole. Dans l'intervalle,
elle a accompli de nombreux actes en tant que
compagnie. J'accepte cependant le fait que la
demanderesse a cessé de s'occuper activement
de construction à compter de cette date. A
toutes fins utiles, la demanderesse a cessé son
activité dans la construction à cette date, pour
ne jamais la reprendre. D'ailleurs, dès le début,
la compagnie n'avait pas l'intention de continuer
de s'occuper de construction au delà de l'achè-
vement de l'usine Ford en question. Après cette
date, les activités de la compagnie avaient pour
seul but de mettre fin à son entreprise de
construction.
Il est tout à fait exact que, dans son année
d'imposition 1968, la demanderesse a tiré de
son entreprise de construction des revenus
supérieurs aux revenus de l'entreprise de pros-
pection de pétrole et de gaz dont elle s'est
occupée à partir du mois d'octobre 1968. De
même, les bénéfices provenant de l'entreprise
de construction, perçus par la demanderesse
dans son année d'imposition 1968, dépassent de
très loin les bénéfices que lui a rapportés l'en-
treprise de prospection de pétrole et de gaz dans
cette même année; elle avait en fait subi des
pertes.
M. le juge Cameron a cependant déclaré dans
l'arrêt American Metal (précité) que les revenus
respectifs qu'une compagnie tire de deux entre-
prises dont elle s'occupe constituent un élément
important quand il s'agit de décider laquelle est
l'entreprise principale, mais que cela n'est pas le
seul élément ni même nécessairement l'élément
décisif.
D'autre part, la demanderesse a abandonné
son entreprise de construction pendant l'année
d'imposition 1968 pour se lancer dans la même
année dans une entreprise de prospection de
pétrole et de gaz.
Au cours de ladite année, la compagnie obtint
des lettres patentes supplémentaires l'autorisant
à exploiter une entreprise de prospection de
pétrole et de gaz, à l'exclusion d'une entreprise
de construction, et elle a pratiqué ces change-
ments d'objet en 1968.
A partir de cette date, la seule entreprise de la
demanderesse était l'exploration et le forage en
vue de découvrir du pétrole et du gaz et, dans
ses années d'imposition 1969, 1970, 1971 et
1972, elle en a tiré un revenu considérable.
Étant donné qu'à partir du mois d'octobre 1968,
cette activité constitue la seule entreprise de la
demanderesse, il s'ensuit qu'il s'agit de son
entreprise principale à compter de cette date.
A part ses administrateurs, la demanderesse
n'avait aucun employé s'occupant de l'entre-
prise de prospection de pétrole et de gaz. Elle
fonctionnait en utilisant les installations de la
Voyager Petroleum Limited.
Le juge Cameron a aussi souligné dans l'arrêt
American Metal (précité) que le nombre d'em-
ployés dans les entreprises respectives est un
des éléments à retenir pour décider laquelle des
deux entreprises est l'entreprise principale, mais
que ce n'est pas nécessairement l'élément
décisif.
Il était prévu, dès la constitution de la compa-
gnie, que son entreprise de construction pren-
drait fin une fois l'usine Ford achevée. Il était
facile, dès le début de l'année d'imposition
1968, de prévoir que la construction s'achève-
rait au début de l'année. Tout ce que la deman-
deresse a fait du mois de novembre 1967 au
mois de mars 1968 de son année d'imposition
1968, amenait son entreprise de construction
vers sa fin inévitable. Dans les quatre premiers
mois de cet exercice financier, l'entreprise de
construction de la demanderesse n'a fait que
décroître et au ler mars 1968, elle a cessé toute
activité.
S'ensuit alors une période d'inactivité, si ce
n'est pour des actes de pure administration jus-
qu'à la naissance de l'entreprise de prospection
de pétrole et de gaz qui commença son activité
en octobre 1968.
Dans l'année d'imposition 1968 de la deman-
deresse, son entreprise de construction vivait
ses derniers jours alors que naissait son entre-
prise de prospection de pétrole et de gaz qui,
dynamique, devait arriver à maturité l'année
suivante.
A mon avis, ces faits établissent que, si l'en-
treprise de construction avait bien été l'entre-
prise principale de la demanderesse, elle a été
remplacée par l'entreprise de prospection de
pétrole et de gaz en tant que principale entre-
prise de la demanderesse pour son année d'im-
position 1968.
Pour ces motifs, j'admets comme un fait que
l'entreprise principale de la demanderesse était
l'exploration ou le forage en vue de découvrir
du pétrole ou du gaz naturel et qu'elle répond
ainsi précisément aux conditions posées pour
pouvoir déduire ses dépenses d'exploration et
de forage dans le calcul de son revenu pour
l'année d'imposition de l'année 1968 conformé-
ment à l'article 83A(3b).
Vu ma conclusion, il n'est pas nécessaire de
me prononcer sur les arguments opposés res-
pectivement par les parties, savoir d'une part
l'article 83A(3b) dispose qu'une compagnie ne
peut avoir qu'une seule entreprise principale
dans une année d'imposition et d'autre part une
compagnie peut avoir deux entreprises principa-
les au sens de l'article 83A(3b) dans une année
d'imposition pourvu qu'un intervalle sépare la
fin d'une entreprise et le début de l'autre.
L'appel est donc accueilli et la demanderesse
a droit aux dépens.
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