75-A-78
Corina Kalaam (Requérante)
c.
Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigra-
tion (Intimé)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett—Ottawa, le
20 juin 1975.
Pratique—Commission d'appel de l'immigration rejetant
l'appel—La requérante demande la prorogation du délai pour
obtenir la permission d'interjeter appel en attendant de rece-
voir les motifs de la Commission—Raisons justifiant la proro-
gation—Loi sur la Commission d'appel de l'immigration,
S.R.C. 1970, c. I-3, art. 23(1)—Règle 324 de la Cour fédérale.
La prorogation n'est pas accordée automatiquement. L'ab-
sence de motifs de la Commission ne crée pas une situation
nécessitant la prorogation lorsqu'il n'y a aucune raison valable
d'attaquer la décision. Même à défaut des motifs, il est possible
de soumettre des moyens d'appel. Il peut y avoir des cas où,
pour des raisons valables, on demande à la Cour de surseoir à
statuer sur une demande de prorogation jusqu'à ce qu'on
obtienne les motifs écrits, mais une telle requête doit être
appuyée par des affidavits pertinents.
Arrêts suivis: Benoit c. La Commission de la Fonction
publique [1973] C.F. 962; Lignos c. Le ministre de la
Main-d'oeuvre et de l'Immigration [1973] C.F. 1073 et
Kukan c. Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immi-
gration [1974] 1 C.F. 12.
REQUÊTE par écrit en vertu de la Règle 324.
AVOCATS:
C. A. Rashid pour la requérante.
T. James pour l'intimé.
PROCUREURS:
C. A. Rashid, Toronto, pour la requérante.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE EN CHEF JACKETT: La présente
demande, soumise par écrit (conformément à la
Règle 324) le l er mai 1975, vise la prorogation du
délai pour obtenir la permission d'interjeter appel
d'une décision de la Commission d'appel de l'im-
migration en date du 17 avril 1975.
L'appel en cette matière est prévu par l'article
23 de la Loi sur la Commission d'appel de l'im-
migration dont voici un extrait:
23. (1) Sur une question de droit, y compris une question de
juridiction, il peut être porté à la Cour d'appel fédérale un
appel d'une décision de la Commission visant un appel prévu
par la présente loi, si permission d'interjeter appel est accordée
par ladite Cour dans les quinze jours après le prononcé de la
décision dont est appel ou dans un tel délai supplémentaire
qu'un juge de cette Cour peut accorder pour des motifs
spéciaux.
La documentation soumise à l'appui de la
demande consiste en un affidavit dont voici
l'essentiel:
[TRADUCTION] 1. En ma qualité d'avocat de la requérante en
l'espèce, j'ai connaissance des faits exposés dans les présentes.
2. Le 17 avril 1975, j'ai représenté la requérante à l'audition de
son appel devant la Commission; d'appel de l'immigration à
Toronto (Ontario) au 102 ouest, rue Bloor.
3. Le 24 avril 1975, j'ai reçu une copie certifiée de l'ordon-
nance de la Commission m'informant du rejet dudit appel.
Ladite ordonnance avait été signée le 17 avril 1975.
4. Le 28 avril 1975, j'ai demandé les motifs écrits de ladite
décision. Ci-joint, copie de cette requête, portant la lettre «A».
5. J'estime que les motifs de la décision sont indispensables à la
préparation d'une demande d'autorisation d'appel à la Cour
d'appel fédérale, mais on m'informe, et je le crois sincèrement,
que ces motifs ne seront pas disponibles avant l'expiration du
délai pour présenter une demande d'autorisation d'appel.
La lettre en date du 29 avril 1975, par laquelle
l'avocat de la requérante a transmis la demande au
greffe, ne fournit aucun argument à l'appui de
celle-ci.
Le 26 mai 1975, l'intimé a présenté des observa
tions écrites s'opposant à la demande: Il invoque
notamment les décisions de cette cour selon les-
quelles une telle demande doit être appuyée de
faits démontrant que la procédure envisagée est
justifiée I et affirme que, la pièce soumise par la
requérante ne soulevant aucune question de droit
sérieuse pouvant justifier l'appel envisagé, la
demande de prorogation de délai devrait être
rejetée.
Le 18 juin 1975, l'avocat de la requérante a fait
savoir au greffe qu'il n'avait pas l'intention de
déposer des conclusions.
A mon avis, la demande doit être rejetée pour
les motifs susmentionnés.
Voir Benoit c. La Commission de la Fonction publique
[1973] C.F. 962; Lignos c. Le ministre de la Main-d'oeuvre et
de l'Immigration [1973] C.F. 1073; Kukan c. Le ministre de la
Main-d'oeuvre et de l'Immigration [1974] 1 C.F. 12.
Si j'expose en détail mes raisons de rejeter la
demande, c'est uniquement pour dissiper la fausse
conception sur laquelle celle-ci semble se fonder, à
savoir qu'on accorde automatiquement un délai
supplémentaire si la demande est présentée avant
que la Commission d'appel de l'immigration n'ait
rendu les motifs de la décision dont on veut faire
appel.
Je reconnais que la possibilité d'examiner les
motifs de la Commission d'appel pourrait faciliter
la tâche de démontrer qu'il existe des raisons
défendables de contester sa décision, mais l'ab-
sence de ces motifs ne crée pas, une situation
nécessitant la prorogation du délai d'appel lorsqu'il
n'existe aucune raison de contester la décision dont
on veut faire appel. D'ailleurs, même à défaut de
tels motifs, il est possible d'utiliser des moyens
d'appel invoqués devant la Commission sur les-
quels, faute de connaître les motifs de sa décision,
on semble pouvoir fonder un appel devant cette
cour. Il en est précisément ainsi lorsque l'avocat
qui a plaidé devant la Commission se présente
pour expliquer la position qu'il y a défendue. Tel
peut être aussi le cas lorsque les faits établis dans
l'affidavit soulèvent un point de droit qui mérite
d'être discuté. Il se peut, bien sûr, qu'en raison du
fait que le requérant ne comprend pas suffisam-
ment la langue utilisée devant la Commission, ou
pour d'autres raisons, il y ait des motifs valables de
demander à cette cour de reporter l'audition d'une
demande de prorogation de délai jusqu'à ce que le
dossier des procédures suivies devant la Commis
sion soit disponible, mais une telle requête devrait
être appuyée par des affidavits pertinents.
En l'espèce, il n'y a pas de pièce à l'appui de la
demande pouvant justifier une solution autre que
le rejet de cette demande.
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