A-55-75
H. A. Bambrough (Requérant)
c.
Un comité d'appel établi par la Commission de la
Fonction publique (Intimé)
Cour d'appel, les juges Pratte, Ryan et Le Dain—
Ottawa, les 9 octobre et 7 novembre 1975.
Examen judiciaire Fonction publique Permatri—Le jury
de présélection ajoute des exigences à celles énoncées par le
Ministère—Élimination du requérant—Sans examen des dos
siers personnels—Décision fondée sur la connaissance person-
nelle du requérant Décès d'un membre du jury et son rem-
placement—Le jury de présélection avait-il le pouvoir
d'ajouter des qualités essentielles?—Le processus de sélection
doit-il être annulé et recommencé sur la base du nouvel
énoncé?—Le jury de sélection a-t-il évalué équitablement le
mérite du requérant?—Le jury de sélection était-il valable-
ment constitué? Rejet de l'appel par le comité d'appel Le
comité a-t-il commis une erreur? Loi sur l'emploi dans la
Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32, art. 5a), 8, 10, 12 et
21 et art. 7 du Règlement.
A partir des exigences formulées par le ministère concerné, la
Commission de la Fonction publique consulta les dossiers Per-
matri et un jury de présélection étudia la candidature des 48
employés ainsi identifiés, formula des exigences supplémentai-
res et retint 7 candidatures. Le jury n'étudia pas les dossiers
personnels mais un de ses membres avait une connaissance
personnelle des antécédents professionnels du requérant. Le
requérant fut éliminé. Peu après, le président du jury décéda et
fut remplacé. L'appel du requérant fut rejeté. Il soutient main-
tenant: (1) que le jury n'a pas le pouvoir de formuler des
qualités requises pour un poste; (2) que si les qualités requises
sont établies ou modifiées après le début du processus de
sélection, ce processus doit être suspendu et recommencé sur la
base du nouvel énoncé des qualités requises; (3) que le jury n'a
pas évalué le mérite du requérant ou tout au moins, qu'il ne l'a
pas fait d'une manière juste et équitable; et (4) que le jury
n'était pas valablement constitué.
Arrêt: la demande est rejetée. On a procédé à la sélection des
candidats au poste en deux temps et rien ne l'interdit. La
Commission n'excède pas ses pouvoirs implicites en participant
à la définition des exigences d'un poste, particulièrement lors-
qu'elle le fait avec l'approbation et la participation d'un agent
du ministère concerné. La Commission doit avoir le pouvoir de
s'assurer que les qualités spécifiées correspondent à celles exi-
gées pour un poste et que l'énoncé de ces qualités donne une
assise solide à un processus de sélection selon le mérite. Si la
modification des qualités requises a pour effet de réduire le
nombre de candidats éventuels, elle n'est pas contraire au
principe du mérite et ne cause aucun préjudice au candidat
éliminé. Le simple fait d'avoir été reconnu candidat ne confère
pas au requérant un droit à l'évaluation de son mérite à l'égard
de ces qualités supplémentaires. On n'a pas prétendu en l'es-
pèce que les modifications constituaient un moyen d'avantager
un candidat. Le comité d'appel a conclu à juste titre que les
exigences ainsi formulées étaient raisonnables et que le requé-
rant avait été traité d'une manière juste et équitable. Rien ne
permet de conclure que le jury de présélection ne connaissait
pas suffisamment les renseignements pertinents contenus aux
données répertoriées sur le requérant pour justifier le rejet de sa
candidature. Il n'y a non plus aucune raison de conclure qu'en
l'éliminant sur la base de connaissances personnelles d'un de ses
membres, le jury l'a traité injustement. Puisque le requérant a
été validement éliminé, le changement subséquent des membres
du jury n'a aucun effet en ce qui le concerne.
Arrêts appliqués: Griffon c. Le procureur général du
Canada [1973] C.F. 670; Cleary c. Un comité d'appel de
la Commission de la Fonction publique [1973] C.F. 688;
Barnes c. Le procureur général du Canada (A-197-73) et
Brown c. La Direction des appels de la Commission de la
Fonction publique [1975] C.F. 345.
EXAMEN judiciaire.
AVOCATS:
Y. A. G. Hynna pour le requérant.
P. B. Annis pour l'intimé.
PROCUREURS:
Gowling & Henderson, Ottawa, pour le
requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE LE DAIN: On demande l'annulation en
vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale,
d'une décision d'un comité d'appel établi confor-
mément à l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans
la Fonction publique. Lé comité d'appel a rejeté le
pourvoi du requérant à l'encontre de la sélection
par la Commission de la Fonction publique d'un
certain J. André Vézina pour le poste de chef de la
division de l'ingénierie, au ministère de
l'Environnement.
Le ministère a demandé à la Commission de la
Fonction publique de procéder à la nomination en
question, en lui indiquant, de la manière suivante,
les qualités requises pour le poste:
[TRADUCTION]
Aptitudes (Chimie ou Génie/Techno-Chimique ou
démontrées: Métallurgie ou Génie/Techno-Métall ou
Gén./Tech-Géonomique) avec Pollution de
l'air et (Pyrométallurgie ou Combustibles ou
Environnement ou Métallurgie-Extractive ou
Génie-Chimique ou Hydrométallurgie) avec
(Faire Recherche-Appliquée ou Faire Recher-
che-Pure) ou (Diriger des Travaux ou Gérer).
Instruction: Baccalauréat
Traitement: Employés occupant des postes dont le maxi
mum de l'échelle de traitement est supérieur
à $17,000 ou le minimum est inférieur à
$25,000.
En l'espèce, la nomination ne devait pas se faire
par concours public ou restreint mais, conformé-
ment aux dispositions de l'article 7(1)b) du Règle-
ment sur l'emploi dans la Fonction publique', par
«une autre méthode de sélection de personnel»
parmi les employés qualifiés au sujet desquels il
existait un recueil ou un «répertoire» des données
pertinentes. Par l'intermédiaire de O. L'Espérance,
l'agent de dotation en personnel responsable, la
Commission de la Fonction publique, consulta le
Permatri, répertoire électronique des données con-
cernant les employés, en utilisant l'énoncé susmen-
tionné des qualités requises comme critère de
recherche. Ces recherches s'achevèrent le 10 sep-
tembre 1974. Un jury de présélection formé de
L'Espérance, à titre de président, et de T. R.
Ingraham, directeur intérimaire de la Direction du
développement technologique, au ministère de
l'Environnement, présenta un rapport indiquant
qu'à la suite de ces recherches, quarante-huit
employés, dont le requérant, se qualifiaient pour le
poste. Le jury de présélection tint une réunion le
13 septembre 1974, dans le but d'étudier les dos
siers Permatri des candidats. Ce jour-là, L'Espé-
rance et Ingraham formulèrent des qualités essen-
tielles supplémentaires pour le poste. Ces nouvelles
exigences et les motifs qui ont justifié leur formu
lation sont exposés comme suit dans le rapport du
jury de présélection.
L'article 7 du Règlement sur l'emploi dans la Fonction
publique se lit comme suit:
7. (1) Toute nomination doit être conforme aux normes de
sélection et doit être faite
a) par voie de concours public ou restreint; ou
b) par une autre méthode de sélection de personnel
(i) choisi parmi les employés au sujet desquels des données
ont été répertoriées et qui réunissent les titres de compé-
tence pour être nommés, ou
(ii) si aucun des employés dont il est question au sous-ali-
néa (i) n'est ni qualifié ni apte à être nommé, choisi parmi
les postulants qui ne font pas partie de la Fonction publi-
que, au sujet desquels des données ont été répertoriées et
qui réunissent les titres de compétence pour être nommés.
(2) Nonobstant le paragraphe (1), si l'agent du personnel
responsable est d'avis que la tenue d'un concours ou une autre
méthode de sélection de personnel mentionnée à l'alinéa (1)b)
ne permettrait pas de trouver un candidat mieux qualifié que la
personne disposée et apte à accepter la nomination, l'agent du
personnel responsable peut nommer cette personne à un poste.
(Suite à la page suivante)
[TRADUCTION] Afin d'effectuer une évaluation approfondie de
chaque candidat, le jury a utilisé les critères additionnels
exposés ci-dessous, pour les raisons suivantes:
1. Publications. Un candidat au poste de directeur de la recher-
che doit avoir effectué des recherches et publié leurs résultats
dans des revues scientifiques de haute qualité, et avoir déve-
loppé ainsi les connaissances nécessaires à la compréhension et
à l'évaluation du travail et des méthodes de travail des scientifi-
ques et être en mesure de travailler avec eux en qualité de chef.
2. Doctorat ou recherches suffisantes démontrant qu'un niveau
intellectuel ou scientifique équivalent a été atteint.
3. Une expérience dans la recherche pure ou appliquée sur la
pollution de l'air (chimie, génie chimique, métallurgie ou génie
métallurgique) est essentielle pour un directeur de la recherche
d'une division dont la première responsabilité est de développer
et d'expérimenter de nouvelles techniques en matière de con-
trôle de l'environnement.
4. Aptitude à gérer et/ou capacité de planifier dans le domaine
de l'administration.
Le jury de présélection étudia les imprimés d'or-
dinateur Permatri à la lumière de ces qualités
(Suite de la page précédente)
(3) Aux fins de l'alinéa b) du paragraphe (1)
a) les employés qui réunissent les conditions de nomination
seront reconnus candidats après examen des données men-
tionnées au paragraphe (6) et confiées à un répertoire de tous
les employés qui auraient été admissibles au concours si un
concours avait eu lieu; et
b) les postulants qui ne font pas partie de la Fonction
publique seront reconnus candidats après examen des don-
nées répertoriées relatives aux postulants qui réunissent les
conditions minimales de nomination mais qui n'ont pas été
nommés.
(4) Le mérite relatif des employés ou des postulants recon-
nus candidats après examen d'un répertoire sera établi
a) en appréciant les candidats conformément aux normes de
sélection appropriées prescrites par la Commission; et
b) sous réserve des dispositions du paragraphe (5), si les
candidats sont des employés, en tenant compte des résultats
de l'appréciation de l'employé décrite à l'article 13.
(5) L'alinéa b) du paragraphe (4) ne s'applique pas aux
employés d'un groupe jusqu'à ce que la Commission prescrive,
par ordonnance, que cet alinéa s'applique aux employés de ce
groupe.
(6) Les données répertoriées utilisées pour la sélection doi-
vent comprendre les renseignements ayant trait aux domaines
suivants:
a) instruction et autre formation;
b) compétence linguistique;
c) compétence et antécédents professionnels;
d) appréciation du rendement mentionné à l'article 13; et
e) priorités statutaires de nomination.
(7) Tout employé a le droit d'examiner les données réperto-
riées qui le concernent et, dans ce but, on fournira à chacun un
relevé de ces données au moins une fois tous les douze mois.
supplémentaires, élimina quarante et un candidats,
dont le requérant, et conserva sept candidatures
pour plus ample considération. A ce stade du
processus de sélection, le jury n'avait pas considéré
les dossiers personnels pour procéder à l'élimina-
tion de candidats. Le requérant a été éliminé au
motif qu'il avait une [TRADUCTION] «expérience
insuffisante en matière de recherche pure ou appli-
quée sur la pollution». Cette conclusion n'était pas
uniquement fondée sur une étude des imprimés
d'ordinateur concernant le requérant mais aussi,
dans une certaine mesure, sur la connaissance
personnelle qu'avait Ingraham des antécédents
professionnels et de l'expérience du requérant. Plu-
sieurs mois auparavant, Ingraham avait pris con-
naissance du dossier personnel du requérant et il
était au courant de son travail au poste qu'il
occupait alors.
Le président du jury de présélection, L'Espé-
rance, mourut quelques jours après la fin du pro-
cessus d'élimination. Quelques semaines plus tard,
Y. Lemieux, un autre agent du personnel de la
Commission de la Fonction publique, le remplaça
à son poste d'agent de dotation en personnel res-
ponsable et de président du jury de présélection.
Afin de se familiariser avec leurs compétences, Y.
Lemieux étudia les imprimés Permatri des qua-
rante-huit candidats. Le jury de présélection exa-
mina ensuite les dossiers personnels de sept person-
nes dont la candidature avait été retenue pour plus
ample considération, en élimina cinq, puis décida
de convoquer Vézina et un autre candidat à une
entrevue. L'entrevue eut lieu devant un jury com-
posé de Lemieux, à titre de président, Ingraham et
deux autres membres. Ce jury que nous appelle-
rons jury de sélection plutôt que jury de présélec-
tion 2 , choisit Vézina.
Le requérant a soutenu devant le comité d'appel
que le jury de sélection n'avait pas le pouvoir
d'établir des qualités additionnelles pour le poste;
que le jury de sélection ne l'avait pas traité d'une
manière juste et équitable par rapport aux autres
candidats, puisqu'il l'avait éliminé en se fondant
2 Nous retiendrons l'expression «jury de sélection» pour dési-
gner l'organisme qui a procédé à la sélection, en plusieurs
étapes, car c'est l'expression utilisée par le comité d'appel dans
sa décision et par les parties dans la plupart de leurs
allégations.
non seulement sur les imprimés Permatri mais
aussi sur les connaissances personnelles d'Ingra-
ham; qu'en outre la procédure suivie par le jury
était irrégulière car Lemieux, qui remplaçait L'Es-
pérance à titre de président, n'avait pas reconsi-
déré les motifs de l'élimination du requérant mais
s'était appuyé sur la décision de L'Espérance et
d'Ingraham; que le jury de sélection avait commis
une erreur en n'examinant pas les dossiers person-
nels des candidats avant de décider de ne pas
retenir leur candidature pour plus ample considé-
ration et que, s'il l'avait fait, le jury aurait pris
connaissance de renseignements sur l'expérience
du requérant dans le domaine de la recherche, qui
auraient complété à son avantage le dossier
Permatri.
Le comité d'appel a rejeté ces allégations. Il a
jugé que rien, en droit, n'interdisait de fixer des
qualités requises pour un poste, au cours du pro-
cessus de sélection; qu'en l'espèce les qualités
requises étaient raisonnables; qu'en droit, rien n'in-
terdisait aux membres d'un jury de sélection de
tenir compte, aux fins de l'évaluation, de leur
connaissance personnelle des candidats; qu'il n'est
pas nécessaire que le jury de sélection soit composé
des mêmes membres pendant tout le processus de
sélection; que Lemieux était fondé à s'appuyer sur
la décision de L'Espérance et d'Ingraham relative
à l'élimination du requérant et qu'à ce stade du
processus de sélection, le jury de sélection n'était
pas tenu de consulter les dossiers personnels des
candidats.
Le requérant soutient devant cette cour que le
comité d'appel a commis une erreur de droit en ne
concluant pas
1. que le jury de sélection n'avait pas le pouvoir
de formuler les qualités essentielles pour un
poste;
2. que si des qualités essentielles sont établies
ou modifiées après le début du processus de
sélection, ce processus doit être suspendu et
recommencé sur la base du nouvel énoncé des
qualités requises;
3. que le jury de sélection n'a pas évalué le
mérite du requérant ou, tout au moins qu'il ne
l'a pas fait d'une manière juste et équitable en
comparaison avec les autres candidats et parti-
culièrement avec le candidat reçu;
4. que le jury de sélection n'était pas valable-
ment constitué car ce n'est pas le même jury qui
a étudié le mérite relatif du requérant et celui
du candidat reçu.
En l'espèce, on procéda à la sélection des candi-
dats au poste en deux temps. La candidature du
requérant ne fut pas retenue parce qu'il ne possé-
dait pas une des qualités essentielles, savoir, l'expé-
rience nécessaire dans le domaine de la recherche
pure ou appliquée sur la pollution. Il semble que
ses qualités n'aient pas été évaluées pour détermi-
ner son mérite, du moins qu'elles n'ont pas été
évaluées de la même manière que celles des candi-
dats dont on a retenu la candidature pour plus
ample considération. Il s'agit donc de déterminer si
le requérant pouvait validement être éliminé de la
sorte après avoir été reconnu comme candidat, à la
suite d'une consultation des données répertoriées.
La Loi confère à la Commission de la Fonction
publique le pouvoir et le devoir de nommer à des
postes de la Fonction publique les personnes possé-
dant les qualités requises, conformément au prin-
cipe du mérite. La sélection selon le principe du
mérite constitue l'objectif principal de la Loi sur
l'emploi dans la Fonction publique et le critère
essentiel d'appréciation de l'exercice des pouvoirs
conférés par la Loi. On peut considérer que la Loi
exige implicitement que la sélection se fasse de
manière équitable dans la mesure où cette exi-
gence est nécessairement liée à la sélection établie
au mérite, mais les nominations ne devraient pas
être annulées pour de prétendues irrégularités de
procédure lorsqu'il n'y a aucune raison de croire
que le processus de sélection n'était pas fondé sur
le mérite. Cette cour a jugé qu'un comité d'appel
ne peut considérer l'inobservation d'une disposition
de la Loi ou d'un règlement comme un motif
d'annulation d'une nomination que s'il en vient à la
conclusion que le résultat aurait probablement été
différent, si l'on s'y était conformé. Griffon c. Le
procureur général du Canada [1973] C.F. 670;
Cleary c. Un comité d'appel de la Fonction publi-
que [1973] C.F. 688; Barnes c. Le procureur
général du Canada, n° du greffe: A-197-73, juge-
ment rendu le 5 mars 1974, non encore publié.
La Loi ne mentionne pas expressément le pou-
voir d'établir les qualités requises pour un poste
auquel la Commission peut pourvoir. Toutefois, on
peut raisonnablement inférer des termes de la Loi
et du Règlement et de leurs définitions du pouvoir
de gestion du ministre responsable, que ce pouvoir
est essentiellement conféré au Ministre, qui
l'exerce par l'intermédiaire du ministère concerné.
On peut normalement s'attendre à ce que le minis-
tère ou la division de la Fonction publique con
cerné définisse les qualités requises pour un poste
dans la Fonction publique avant de demander à la
Commission de la Fonction publique de procéder à
la nomination. Dans l'arrêt Brown c. La Direction
des appels de la Commission de la Fonction
publique [1975] C.F. 345, le juge en chef Jackett a
décrit comme suit, dans les motifs de son juge-
ment, [aux pages 357-358] les «étapes précédant
en droit une promotion (nomination au sein de la
Fonction publique), de la manière prévue par l'ar-
ticle 7(1)b)(i), à un poste vacant»:
(1) autorisation de pourvoir au poste,
(2) classification du poste selon les directives du conseil du
Trésor (si ce dernier a prévu une telle exigence),
(3) demande de nomination à un poste adressée par le sous-
chef à la Commission de la Fonction publique, en conformité de
l'article 10 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique,
cette demande devant énoncer, expressément ou implicitement,
(a) les qualités requises par la classification pertinente, le
cas échéant, pour les postes de cette catégorie, et
(b) en outre, les qualités requises par le sous-chef pour ce
poste particulier,
(4) communication à la Commission, aux candidats éventuels
et à d'autres, d'un énoncé des «qualités requises pour le poste»,
comme l'exige l'article 6 du règlement,
(5) une décision aux termes de l'article 12 du règlement, sur le
secteur de la Fonction publique, le groupe et le niveau d'occu-
pations où le candidat éventuel devrait être employé «pour être
admissible au concours si l'on tenait un concours restreint»,
(6) détermination, parmi les employés admissibles en vertu de
l'article 12, des «candidats», c'est-à-dire des personnes réunis-
sant les conditions de nomination aux termes de l'article 7(3)a)
du règlement,
(7) détermination du «mérite» relatif des personnes reconnues
comme candidats en vertu de l'article 7(3)a) «conformément
aux normes de sélection appropriées prescrites par la Commis
sion», comme l'exige l'article 7(4)a) du règlement.
L'avocat du requérant a plaidé que l'on devait
déduire de cette citation, de même que des disposi
tions de la Loi et du Règlement y mentionnés,
qu'une fois commencé le processus de sélection, les
qualités requises pour un poste ne peuvent être
validement établies ou modifiées et, en outre, que
la Commission de la Fonction publique n'est pas
habilitée à le faire. Pour formuler cette dernière
allégation, il présume qu'en élaborant de nouvelles
qualités essentielles pour le poste, L'Espérance et
Ingraham agissaient en qualité de jury de présélec-
tion, un organe de la Commission. Il est cependant
possible de considérer, d'après l'exposé conjoint
des faits et le rapport du jury de présélection,
qu'Ingraham a établi les qualités essentielles addi-
tionnelles au nom du ministère, à titre de représen-
tant du ministère et de directeur concerné, de
concert avec L'Espérance, en sa qualité d'agent de
dotation en personnel responsable, et que c'est en
siégeant comme jury de présélection, qu'ils ont
tous deux appliqué ces nouvelles qualités requises
au processus de sélection. Toutefois, même s'il faut
attribuer la formulation de ces qualités addition-
nelles à la Commission, je ne pense pas qu'en
participant de la sorte à la définition des exigences
d'un poste, la Commission excède ses pouvoirs
implicites particulièrement lorsque, comme en l'es-
pèce, elle le fait non seulement avec l'approbation,
mais avec la participation active d'un agent du
ministère concerné. En l'espèce, la Commission n'a
pas tenté d'usurper ou d'empiéter sur le pouvoir du
ministère de définir les qualités requises pour un
poste.
Le devoir statutaire de la Commission de
nommer à des postes de la Fonction publique des
personnes possédant les qualités requises, confor-
mément au principe du mérite, doit au moins
comporter le pouvoir implicite de participer, avec
le ministère ou la direction concerné, à la formula
tion des qualités requises pour un poste. La Com
mission doit avoir le pouvoir de s'assurer que les
qualités spécifiées correspondent à celles exigées
par le poste et que l'énoncé de ces qualités donne
une assise solide à un processus de sélection selon
le mérite. J'estime que ce pouvoir découle des
responsabilités de la Commission en matière de
nominations, en vertu des articles 5, 8 et 10 de la
Loi', plutôt que de son pouvoir, en vertu de l'arti-
3 Les articles 5a), 8 et 10 de la Loi se lisent comme suit:
5. La Commission doit
a) nommer ou faire nommer à un poste de la Fonction
publique des personnes possédant les qualités requises, con-
formément aux dispositions et aux principes de la présente
loi, que ces personnes soient déjà membres de la Fonction
publique ou n'en fassent pas partie;
(Suite à la page suivante)
cle 12 4 , de prescrire les normes de sélection.
Comme l'a souligné le juge en chef Jackett dans
l'arrêt Brown (précité), il semble exister une dis
tinction entre les qualités requises pour un poste et
les normes de sélection qui, aux termes de l'article
12, servent à évaluer le mérite en fonction des
qualités requises. Je n'ai rien trouvé dans les dispo
sitions de la Loi, du Règlement ni dans l'extrait
précité des motifs du juge en chef Jackett dans
l'arrêt Brown, qui exclurait nécessairement ce pou-
voir implicite de la Commission.
Cependant, le requérant soutient de plus que cet
extrait et les règlements mentionnés étayent la
conclusion selon laquelle si les qualités requises
pour un poste sont modifiées pendant le processus
(Suite de la page précédente)
8. Sous réserve de la présente loi, la Commission possède de
façon exclusive le droit et l'autorité de nommer à des postes de
la Fonction publique des personnes qui sont déjà membres de la
Fonction publique ou qui n'en font pas partie, dont aucune
autre loi du Parlement n'autorise ou ne prévoit la nomination.
10. Les nominations à des postes de la Fonction publique,
faites parmi des personnes qui en sont déjà membres ou des
personnes qui n'en font pas partie, doivent être faites selon une
sélection établie au mérite, ainsi que le détermine la Commis
sion. La Commission les fait à la demande du sous-chef en
cause, à la suite d'un concours, ou selon telle autre méthode de
sélection du personnel établie afin de déterminer le mérite des
candidats que la Commission estime la mieux adaptée aux
intérêts de la Fonction publique.
L'article 12 de la Loi se lit comme suit:
12. (1) La Commission peut, en déterminant conformément
à l'article 10 le principe de l'évaluation du mérite, en ce qui
concerne tout poste ou classe de postes, prescrire des normes de
sélection visant l'instruction, les connaissances, l'expérience, la
langue, l'âge, la résidence ou toute autre question que la
Commission juge nécessaire ou souhaitable, compte tenu de la
nature des fonctions à accomplir. Cependant, ces normes de
sélection ne doivent pas être incompatibles avec les normes de
classification établies en vertu de la Loi sur l'administration
financière pour ce poste ou tout poste de cette classe.
(2) En prescrivant aux termes du paragraphe (1) des normes
de sélection, la Commission ne doit établir à l'encontre de qui
que ce soit aucune distinction injuste fondée sur le sexe, la race,
l'origine ethnique, la couleur ou la religion.
(3) La Commission doit, à l'occasion, consulter les représen-
tants de toute association d'employés accréditée comme agent
négociateur en vertu de la Loi sur les relations de travail dans
la Fonction publique ou l'employeur au sens de cette loi, en ce
qui concerne les normes de sélection qui peuvent être prescrites
en vertu du paragraphe (1) ou les principes qui gouvernent
l'appréciation professionnelle, l'avancement, la rétrogradation,
le transfert, la mise en disponibilité ou le renvoi d'employés, à
la demande de ces représentants ou de l'employeur ou lorsque
la Commission juge cette consultation nécessaire ou
souhaitable.
de sélection, ce processus de sélection doit être
suspendu et recommencé sur la base du nouvel
énoncé des qualités requises. En outre, il se fonde
sur l'extrait suivant du «Manuel de dotation en
personnel> de la Commission:
Une fois déterminées, les qualités essentielles et avantageuses
ne peuvent être modifiées pendant le processus de sélection.
Sinon, le concours doit être annulé ou les recherches effectuées
dans un répertoire, recommencées.
Le Manuel de dotation en personnel contient des
directives administratives, des lignes directrices et
des interprétations. Il sert de guide au personnel de
la Commission. Il n'a pas force de loi et ne peut
fonder l'annulation d'un acte fait par ou au nom de
la Commission. Les dispositions du Manuel de
dotation en personnel n'ont pas été adoptées
comme règlement. Le requérant soutient qu'elles
ont force de loi en tant qu'exercice du pouvoir
discrétionnaire de la Commission d'établir une
méthode de sélection, en vertu de l'article 10 de la
Loi. Le pouvoir d'établir une méthode de sélection
que la Commission estime la mieuxadaptée aux
intérêts de la Fonction publique ne constitue pas
un pouvoir d'établir des règles à caractère juridi-
que obligatoire. Les dispositions du Manuel de
dotation en personnel précitées peuvent refléter un
principe de pratique administrative bien établi
mais le défaut de s'y conformer n'équivaut pas à
l'inobservation d'une exigence légale.
Je ne pense pas non plus que le principe de
sélection établie au mérite est soumis à une exi-
gence aussi large et catégorique que celle de l'ex-
trait précité du Manuel de dotation en personnel.
De toute évidence, si la modification des qualités
requises devait augmenter le nombre de candidats
éventuels à un poste, le processus de sélection
serait recommencé afin de permettre l'identifica-
tion d'autres candidats. Si, toutefois la modifica
tion des qualités requises a pour effet de réduire le
nombre de candidats éventuels, comme en l'espèce,
elle n'est pas contraire au principe du mérite et ne
cause aucun préjudice à celui dont la candidature
n'est pas retenue pour plus ample considération
parce qu'il ne possède pas une des nouvelles quali-
tés requises. Le simple fait d'avoir été reconnu
candidat, sur la base des qualités requises initiale-
ment, ne confère pas au requérant un droit à
l'évaluation de son mérite à l'égard de ces qualités.
Si la nouvelle qualité requise, exigeant des candi-
dats qu'ils aient effectué de la recherche dans le
domaine de la pollution de l'air, avait constitué un
critère de recherche lors de la consultation du
Permatri, le requérant n'aurait peut-être même pas
été identifié comme candidat éventuel au poste.
Même reconnu candidat, il aurait quand même pu
être éliminé par le jury de présélection, au motif
qu'il ne possédait pas une des qualités essentielles
pour le poste. A mon avis, aucune disposition de la
Loi ou du Règlement n'interdit l'identification en
deux étapes des candidats à un poste. Le requérant
soutient que si les qualités requises pour un poste
peuvent être modifiées au cours du processus de
sélection, cette modification peut en outre consti-
tuer un moyen d'avantager injustement un candi-
dat par rapport aux autres, sans prétendre cepen-
dant que ce soit le cas en l'espèce. Le comité
d'appel a conclu que, compte tenu du poste à
pourvoir, les qualités additionnelles étaient raison-
nables et nous n'avons aucune raison de contester
cette opinion. En fait, il semble que l'exigence
additionnelle d'une expérience en recherche sur la
pollution de l'air soit au plus une précision appor-
tée aux exigences indiquées dans l'énoncé initial
des qualités requises quant à la recherche.
Le requérant prétend, qu'en éliminant ainsi sa
candidature, le jury de présélection ne l'a pas
traité d'une manière juste et équitable par rapport
aux autres candidats. Il allègue que la seule étude
des imprimés Permatri ne justifie pas son élimina-
tion pour défaut d'expérience dans le domaine de
la recherche sur la pollution ni le maintien de la
candidature de personnes dont les dossiers Perma-
tri ne révélaient pas plus d'expérience que la sienne
dans ce domaine. Il affirme que le motif de son
élimination est la connaissance personnelle qu'a-
vait Ingraham, de ses antécédents professionnels et
que cette connaissance était insuffisante et péri-
mée. Il soutient que lorsque le jury de présélection
a considéré l'élimination de candidats à cette
étape, il aurait dû consulter leurs dossiers person-
nels lorsque, comme dans le cas du requérant, les
imprimés Permatri révélaient l'existence «de ren-
seignements complémentaires au dossier>. Le
requérant allègue que si le jury de présélection
avait consulté son dossier personnel il aurait cons-
taté son expérience dans le domaine de la recher-
che sur la pollution de l'air.
Le comité d'appel a conclu qu' [TRADUCTION]
«aucune preuve devant le comité d'appel n'étayait
l'allégation du requérant selon laquelle les rensei-
gnements que possédait Ingraham à son égard
étaient inexacts ou périmés», et que [TRADUC-
TION] «d'après la preuve soumise sur le dossier
personnel de l'appelant, le comité d'appel n'est pas
convaincu qu'il contenait des renseignements perti-
nents dont le jury de sélection ignorait l'existence
et qui auraient pu modifier la décision du jury de
sélection quant aux qualités de l'appelant.» Nous
n'avons aucune raison de contester ces conclusions.
L'article 7(3) du Règlement prévoit que dans le
cas d'une sélection effectuée conformément à l'ar-
ticle 7(1)b), «les employés qui réunissent les condi
tions de nomination seront reconnus candidats
après examen des données mentionnées au para-
graphe (6) et confiées à un répertoire de tous les
employés qui auraient été admissibles au concours
si un concours avait eu lieu». Le dossier ne permet
pas de conclure que le jury de présélection ne
connaissait pas suffisamment les renseignements
pertinents contenus aux données répertoriées sur le
requérant pour justifier sa décision d'éliminer sa
candidature au motif qu'il ne possédait pas une
expérience suffisante dans le domaine de la recher-
che sur la pollution. Il n'y a non plus aucune raison
de conclure qu'en l'éliminant, dans une certaine
mesure, sur la base de connaissances personnelles
d'Ingraham, le jury de présélection l'a traité injus-
tement par rapport aux autres candidats, dont en
particulier Vézina. Ingraham avait aussi person-
nellement connaissance de certaines qualités de
Vézina qui, de l'avis du jury de présélection, justi-
fiaient un plus ample examen de sa candidature.
Les candidats dont la candidature a été retenue
pour plus ample considération auraient pu être
éliminés à la même étape que le requérant, (si le
jury de présélection avait pris connaissance de
leurs dossiers personnels) mais la sélection finale
n'en est pas moins fondée sur le mérite.
Puisque la candidature du requérant a été vali-
dement éliminée par le jury de présélection, les
événements qui suivent son élimination n'ont
aucun effet en ce qui le concerne. Cela s'applique à
ses allégations relatives au changement des mem-
bres du jury de sélection après son élimination.
Je conclus donc que l'élimination du requérant
comme candidat au poste, n'est pas contraire à la
Loi et au Règlement. Même si elle l'avait été, on
n'a pas démontré que le résultat aurait vraisembla-
blement été différent si le processus de sélection
avait été recommencé sur la base du nouvel énoncé
des qualités requises. Pour ce motif, le comité
d'appel n'était pas fondé à juger la sélection inva-
lide et je conclus qu'il n'a pas commis une erreur
de droit en rejetant l'appel et en autorisant la
nomination. En conséquence, je rejetterais la
demande.
* * *
LE JUGE PRATTE a souscrit à l'avis.
* * *
LE JUGE RYAN a souscrit à l'avis.
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