T-3727-77
Fred Ager (Demandeur)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Cattanach—
Ottawa, les 12 et 23 juin 1978.
Fonction publique — Traitement maximum — Temps sup-
plémentaire — Demandeur muté à un poste comportant le
même taux de rémunération annuel mais une possibilité moin-
dre de faire des heures supplémentaires, à un taux de rémuné-
ration moindre — Mutation sans que soit suivie la procédure
prévue par l'art. 31(1) de la Loi sur l'emploi dans la Fonction
publique, obligatoire si assujetti à cet article — La mutation
a-t-elle pour résultat un traitement maximum inférieur pour
l'employé rendant l'art. 31(1) applicable — Loi sur l'emploi
dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32, art. 31(1).
Le demandeur, contrôleur de la circulation aérienne, avait
été nommé à un poste offrant de meilleures possibilités de faire
des heures supplémentaires, à des taux de rémunération supé-
rieurs, que celui auquel il fut par la suite muté. Il s'agit de
savoir si le traitement maximum du poste occupé auparavant
est supérieur à celui du poste actuel, ce qui aurait pour effet
d'assujettir la mutation de l'article 31(1) de la Loi sur l'emploi
dans la Fonction publique. Le demandeur fait valoir que la
mutation est nulle parce que la procédure prévue par l'article
31(1) n'a pas été suivie.
Arrêt: l'action est rejetée. Le critère servant à déterminer si
le poste auquel le demandeur a été muté comportait «un
traitement maximum inférieur» à celui de son poste antérieur
au sens de l'article 31(1)a) de la Loi sur l'emploi dans la
Fonction publique, c'est le taux annuel de rémunération prévu
à l'annexe I de la Loi sur le maintien des services du contrôle
de la circulation aérienne. Cette annexe ne prévoit qu'un seul
taux annuel de rémunération pour cette catégorie de poste et ne
fait aucune distinction entre les deux et, en conséquence, les
taux annuels de rémunération sont les mêmes. La rémunération
du temps supplémentaire s'additionne au taux de rémunération
établi. La seule obligation contractuelle dont l'employé soit
créancier en matière de temps supplémentaire c'est l'indemnisa-
tion que l'employeur doit lui verser si et quand il lui en fait
faire.
ACTION.
AVOCATS:
J. P. Nelligan, c.r. et C. MacLean pour le
demandeur.
David T. Sgayias pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Nelligan/Power, Ottawa, pour le demandeur.
Le sous-procureur général du Canada pour la
défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE CATTANAcx: Le demandeur, dans sa
déclaration, cherche à obtenir:
(1) une déclaration reconnaissant son droit d'être réintégré au
poste TACQ 3263 AI-6 d'agent de développement du rende-
ment, et ce à compter du 26 août 1977, à plein traitement et
avec tous les avantages attachés audit poste;
(2) une déclaration reconnaissant son droit d'être remboursé
au taux des heures supplémentaires pour tout le temps où il a
travaillé en sus de 34 heures par semaine en qualité de spécia-
liste en équipement, affecté au poste TACQ 3388 AI-6.
Au début du procès, les avocats m'ont annoncé
que, par suite d'une modification apportée à la
défense le vendredi 9 juin 1978 et agréée au
préalable par le demandeur le jour précédent, les
faits n'étaient plus contestés mais que l'instruction
ayant commencé le lundi 12 juin, le temps avait
manqué pour préparer un exposé conjoint des faits,
ce qui était d'ailleurs allégué par écrit.
A ma demande les avocats ont donc rédigé le
document suivant:
[TRADUCTION] EXPOSE CONJOINT DES FAITS
Les parties aux présentes reconnaissent les faits suivants
comme avérés pour les besoins de la cause:
1. Le demandeur est contrôleur de la circulation aérienne et
réside en la ville de Bainsville dans la province d'Ontario.
2. Il est, et a toujours été aux époques en cause, un salarié au
service de Sa Majesté du chef du Canada représentée par le
Conseil du Trésor.
3. Le 31 juillet 1975 il a été nommé au poste TACQ 3263 AI-6
du ministère des Transports par suite d'un concours interne de
la Fonction publique.
4. Il a exercé alors les fonctions d'agent de développement du
rendement au centre de contrôle régional de Montréal.
5. En tant que contrôleur de la circulation aérienne de la
région de Québec, de la Division du contrôle de la circulation
aérienne du ministère des Transports, il se trouvait placé sous la
direction de M. J. C. M. Pitre, fonctionnaire de Sa Majesté du
chef du Canada et, à l'époque considérée, directeur régional des
services de la circulation aérienne.
6. Par lettre du 26 août 1977, M. Pitre a notifié au demandeur
qu'il était réaffecté sur-le-champ au bureau régional des servi
ces de la circulation aérienne et muté au poste TACQ 3388
AI-6 de spécialiste en équipement, vu que sa compétence, en
tant qu'agent de développement du rendement, avait été trop
sérieusement mise en doute pour lui permettre de continuer à
exercer cette fonction. Copie conforme de cette lettre est
annexée aux présentes comme pièce numéro «1».
7. Le demandeur ne désirait pas cette mutation et ne l'a
acceptée qu'en protestant.
8. Les conditions d'emploi du demandeur sont régies par une
convention collective (codée 402/76) conclue le 29 juillet 1976
par l'Association canadienne du contrôle de la circulation
aérienne d'une part et, d'autre part, le Conseil du Trésor; cette
convention a été prolongée et modifiée par la Loi sur le
maintien des services du contrôle de la circulation aérienne,
S.C. 1976-77, c. 57. Copie conforme de cette convention collec
tive, avec les modifications apportées par la Loi, est annexée
aux présentes comme pièce numéro «2».
9. En vertu de la définition le) de la convention, et pour les
fins de celle-ci, le demandeur était un employé d'exploitation
lorsqu'il exerçait la fonction d'agent de développement du
rendement dans le poste TACQ 3263 AI-6.
10. En vertu de la définition 1, lorsqu'il a été muté au poste
TACQ 3388 AI-6 de spécialiste en équipement, il a cessé d'être
un employé d'exploitation.
11. La semaine de travail des employés autres que les employés
d'exploitation est, en vertu de l'article 13.01 de la convention
collective, de 37 1 / 2 heures, le temps des repas exclu.
12. La semaine de travail des employés d'exploitation, confor-
mément à l'article 13.02 de la convention collective, est de 34
heures, y compris le temps des repas, et des pauses que permet-
tent les nécessités du service.
13. Les possibilités pour le demandeur de faire des heures
supplémentaires en tant qu'employé d'exploitation à Montréal
étaient de beaucoup supérieures aux possibilités offertes aux
autres employés.
14. A titre d'employé d'exploitation, le demandeur recevait,
par heure supplémentaire de travail, une rémunération supé-
rieure à celle des autres employés parce que le taux des heures
normales d'un employé d'exploitation est supérieur.
15. A titre d'employé d'exploitation, le demandeur avait droit à
des primes de poste en vertu de l'article 27.01. En tant qu'autre
employé, vu qu'il n'est pas instructeur, il n'y a pas droit.
16. Le demandeur a été muté au poste TACQ 3388 AI-6 parce
que, de l'avis de son employeur, il n'avait pas la compétence
voulue pour exercer les fonctions du poste TACQ 3263 AI-6.
17. A toutes les époques en cause, le demandeur était classé
dans le groupe et au niveau AI-6.
18. A toutes les époques en cause, les postes TACQ 3263 AI-6
et TACQ 3388 AI-6 étaient classés dans ledit groupe et audit
niveau.
Ottawa, le 12 juin 1978.
Je n'ai pas reproduit la pièce numéro «1» men-
tionnée au paragraphe 6 de l'exposé, parce que ce
paragraphe rend bien compte de l'objet de cette
lettre.
Je n'ai pas reproduit non plus la copie de la
convention collective mentionnée au paragraphe 8
et annexée comme pièce numéro «2», mais j'en
citerai les articles pertinents lorsque les circons-
tances l'exigeront.
Le paragraphe 16 de l'exposé conjoint des faits
rend bien compte de la modification à la réplique
de la défense produite le 9 juin 1978, savoir que
le demandeur aurait été muté, le 26 août 1977, au
poste TACQ 3388 AI-6 de spécialiste en équipe-
ment, au motif qu'il n'avait pas la compétence
voulue pour exercer les fonctions de son poste
antérieur, TACQ 3263 (agent de développement
du rendement).
L'avocat du demandeur a fait valoir que la
mutation en cause était conforme aux conditions
visées à l'article 31(1) de la Loi sur l'emploi dans
la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32, car:
[TRADUCTION] (1) de l'avis de son employeur, le demandeur
n'avait pas la compétence voulue pour exercer les fonctions
dont il avait été chargé, fait reconnu au paragraphe 8 de la
défense modifiée produite le 9 juin 1978, lequel paragraphe
énonce formellement que le demandeur a été muté parce que
son employeur considérait cette mutation comme du meilleur
intérêt du service;
(2) le demandeur a été muté à un poste de traitement inférieur.
L'article 31 est intitulé «Incompétence et inca-
pacité» et son paragraphe (1) se lit comme suit:
31. (1) Lorsque, de l'avis du sous-chef, un employé est
incompétent dans l'exercice des fonctions de son poste, ou qu'il
est incapable de remplir ces fonctions, et qu'il devrait
a) être nommé à un poste avec un traitement maximum
inférieur, ou
b) être renvoyé,
le sous-chef peut recommander à la Commission que l'employé
soit ainsi nommé ou renvoyé, selon le cas.
Si donc les deux conditions nécessaires à l'appli-
cation de l'article 31(1) étaient réunies, la muta
tion du demandeur, ordonnée par le directeur
régional des Services de la circulation aérienne,
serait nulle dès l'origine.
La mutation serait nulle parce que, si ces condi
tions étaient réunies, le sous-chef, au sens de l'arti-
cle 2 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction
publique, serait alors tenu de recommander à la
Commission de la Fonction publique que le
demandeur soit nommé -à un poste auquel est
attaché un traitement maximum inférieur et, en
vertu du paragraphe (2) de l'article 31, le sous-
chef devrait notifier cette modification à l'em-
ployé. Le paragraphe (3) confère le droit d'en
appeler, à un comité établi par la Commission, de
la recommandation du sous-chef; le comité doit
ouvrir une enquête à laquelle le sous-chef et l'em-
ployé ou leurs représentants, doivent avoir la possi-
bilité de se faire entendre; le comité notifie sa
décision à la Commission et cette dernière, selon
ce que requiert la décision du comité, ou bien ne
donne aucune suite à la recommandation du sous-
chef, ou au contraire nomme l'employé à un poste
de traitement maximum inférieur.
Il est admis que les dispositions de l'article 31
n'ont pas été invoquées. S'il y avait obligation de
suivre la procédure prévue par l'article, c'est-à-dire
si: (1) le demandeur a été muté parce que son
employeur le considérait comme incompétent pour
le poste qu'il occupait, ce qui est le cas a-t-on
admis et (2) si le demandeur a été muté à un poste
de traitement inférieur, alors la mutation serait
nulle car la procédure légale régissant la mutation
du demandeur n'aurait pas été suivie.
Le procureur du demandeur fait valoir que le
demandeur a été muté à un poste de traitement
maximum inférieur.
Au contraire le procureur de Sa Majesté fait
valoir que le demandeur n'a pas été muté à un tel
poste, mais à un poste rémunéré au même taux.
Ainsi la solution du présent litige dépend de la
réponse donnée à une question fort restreinte: le
traitement maximum du poste TACQ 3263 AI-6
d'agent de développement du rendement, celui
qu'occupait le demandeur avant sa mutation, est-il
supérieur au traitement maximum du poste TACQ
3388 AI-6 de spécialiste en équipement?
Si l'on répond oui à cette question, alors l'action
du demandeur doit être accueillie et il a droit à la
déclaration recherchée.
Si l'on répond par la négative, alors l'action du
demandeur doit être rejetée et il n'a pas droit à ce
qu'il demande dans sa déclaration.
Pour découvrir la réponse à cette question cru-
ciale, j'accepte comme prémisse irréfutable que
tout ministère fédéral est créé par une loi qui
définit sa fonction et présidé par un ministre de la
Couronne qui en «a la gestion et la direction».
L'article 3 de la Loi sur le ministère des Trans
ports, S.R.C. 1970, c. T-15, dispose que:
3. (1) Est établi un ministère du gouvernement du Canada,
appelé ministère des Transports, auquel préside le ministre des
Transports nommé par commission sous le grand sceau.
(2) Le Ministre a la gestion et la direction du Ministère et
occupe sa charge à titre amovible.
En l'absence de limitation légale, réglementaire
ou conventionnelle, les mots «gestion et direction»
sont suffisamment larges pour conférer au Minis-
tre les pouvoirs nécessaires à une gestion efficiente
du ministère placé sous son contrôle. Il peut entre
autres muter des employés à des postes du minis-
tère où leurs aptitudes concourront à une meilleure
gestion.
J'accepte aussi comme prémisse corollaire qu'il
n'existe aucun droit acquis à un poste particulier
au sein de la Fonction publique, le droit à la
stabilité d'emploi étant attaché à la Fonction
publique elle-même, non à un poste particulier en
son sein.
Cette limitation au droit, par ailleurs illimité, de
l'employeur de muter un employé est formulée à
l'article 31.
L'intention du législateur, en édictant cet arti
cle, est claire. Lorsque, de l'avis du sous-chef, un
employé n'a pas la compétence voulue pour exécu-
ter les fonctions du poste qu'il occupe et qu'il
devrait être nommé à un poste de traitement maxi
mum inférieur, le sous-chef ne peut agir de sa
propre initiative. Il doit justifier son opinion
devant un comité d'enquête établi par la Commis
sion, l'employé peut contester, notamment en ce
qui concerne son incompétence, l'opinion de son
sous-chef. De toute évidence un employé ne peut
être rétrogradé sans avoir eu l'occasion de se faire
entendre par un tribunal indépendant.
Toutefois rien n'empêche le sous-chef de muter
un employé qui, à son avis, n'est pas compétent
pour le poste qu'il occupe, à un poste de même
traitement maximum; c'est ce que, dans le jargon
du service, on nomme une mutation latérale.
Donc, comme je l'ai dit antérieurement, le seul
point en litige est celui de savoir si le traitement
maximum du poste TACQ 3263 AI-6 est égal ou
supérieur à celui du poste TACQ 3388 AI-6 ou au
contraire s'il lui est inférieur.
En vertu de l'article 14.02 de la convention
collective conclue par l'Association canadienne du
contrôle de la circulation aérienne, et par Sa
Majesté la Reine à titre d'employeur, convention
qui a pris effet le l ei juin 1976, un employé a droit
à la rémunération de ses services, spécifiée dans
l'appendice «A» de la convention, selon la catégorie
du poste auquel il a été nommé.
En vertu de l'article 5(1) de la Loi sur le
maintien des services du contrôle de la circulation
aérienne, S.C. 1976-77, c. 57, le terme de la
convention a été reporté du ler janvier 1977 au 31
décembre de la même année. La mutation du
demandeur a eu lieu au cours de cette prorogation.
En vertu de l'article 5(3) de la Loi, les taux de
rémunération spécifiés à l'appendice «A» de la
convention collective étaient remplacés par ceux
spécifiés à son annexe I.
L'annexe I de la Loi dispose que le taux maxi
mum annuel de rémunération des postes classés
AI-6 est de $29,234.
Vu que le poste occupé par le demandeur avant
sa mutation et celui auquel il a été muté sont tous
deux ainsi classés, le taux maximum annuel de
rémunération demeure le même.
Toutefois l'avocat du demandeur fait valoir que
le «taux maximum annuel de rémunération» ne
constitue pas le véritable critère permettant de
déterminer si le «traitement maximum», expression
employée dans l'article 31 de la Loi sur l'emploi
dans la Fonction publique, est inférieur dans le
nouveau poste du demandeur à celui de son ancien
poste.
En vertu de la convention collective, il y a les
employés d'exploitation et les autres employés.
Lorsqu'il occupait le poste TACQ 3263 AI-6
d'agent de développement du rendement, le
demandeur était classé comme employé d'exploita-
tion.
Au poste TACQ 3388 AI-6 de spécialiste en
équipement auquel il a été muté, il n'est plus
employé d'exploitation.
En vertu de l'article 13.01 de la convention, la
durée hebdomadaire normale de travail des
employés autres que d'exploitation est de 37 1 / 2
heures.
En vertu de l'article 13.02, la durée hebdoma-
daire normale de travail des employés d'exploita-
tion est de 34 heures.
Un autre employé doit donc travailler 3' heures
de plus qu'un employé d'exploitation.
C'est là le motif pour lequel le demandeur cher-
che à faire déclarer qu'il a droit d'être payé au
taux du temps supplémentaire pour toutes les
heures en sus des 34 heures où il a travaillé à titre
d'employé autre que d'exploitation.
Dans la convention collective on définit le «taux
de rémunération hebdomadaire» comme le «taux
annuel divisé par 52.176».
Le taux des heures normales est défini comme le
taux de rémunération hebdomadaire divisé par
37 1 / 2 heures dans le cas d'un employé autre que
d'exploitation et par 34 dans le cas d'un employé
d'exploitation.
Si l'on applique cette formule au taux horaire,
que je considère équivalent au taux des heures
normales, cela donne $15.36 pour un employé
d'exploitation et $13.92 l'heure au maximum pour
un autre employé. Il est clair que le taux de
rémunération horaire maximum est supérieur dans
le cas des employés d'exploitation que dans le cas
des autres employés.
D'après la convention collective, les employés
ont droit de recevoir la rémunération suivante:
(1) le taux annuel de rémunération, plus
(2) la rémunération des heures supplémentaires
effectuée comme prévu à l'article 15.02, une
fois et demie le taux des heures normales et à
deux fois ce taux dans les circonstances prévues
audit article, plus
(3) conformément à l'article 27.01, une prime
de poste de $1.25 dans le cas des employés
d'exploitation, pour les postes de 16 24 h, et de
$1.75 pour ceux de 00h 01à 18 h.
La possibilité pour le demandeur, à titre d'em-
ployé d'exploitation, de bénéficier d'heures supplé-
mentaires est de beaucoup supérieure à celle d'un
autre employé, et cela n'est pas contesté, pas plus
que le fait que la rémunération du temps supplé-
mentaire d'un employé d'exploitation soit supé-
rieure à celle des autres employés.
Il n'est pas non plus contesté que le demandeur,
à titre d'employé d'exploitation, aurait eu droit à
des primes de poste auxquelles il n'a pas droit en
temps qu'autre employé.
En conséquence, le demandeur fait valoir que le
taux de rémunération du poste auquel il a été muté
est inférieur à celui de son poste antérieur, le taux
de rémunération horaire étant lui-même inférieur;
que la rémunération maximale du nouveau poste
est elle aussi inférieure, les possibilités de faire du
temps supplémentaire étant moindres; que ce
temps supplémentaire est plus mal rémunéré et
qu'il n'a plus droit aux primes de poste.
Tout ceci est exact.
Toutefois l'article 14.02 de la convention collec
tive donne droit à l'employé d'être rémunéré pour
les services qu'il rend conformément à ce que
prévoit l'appendice «A» de la convention pour la
catégorie à laquelle appartient son poste. En vertu
de la Loi sur le maintien des services du contrôle
de la circulation aérienne, l'appendice «A» de la
convention a été remplacé par l'annexe I de cette
loi.
En vertu de l'article 63(2) du Règlement sur les
conditions d'emploi dans la Fonction publique,
DORS/67-118, le taux de rémunération applicable
un poste est celui établi pour le groupe et pour le
niveau dont relève le poste, en l'espèce la catégorie
AI-6.
Il n'a pas été prévu de variations au sein du
même groupe et du même niveau.
A mon sens, selon la convention collective, le
droit à la rémunération, c'est le droit à celle
figurant à l'appendice «A» et c'est là le taux annuel
de rémunération.
La rémunération à laquelle un employé a droit
est celle spécifiée à l'appendice «A» pour la catégo-
rie du poste en cause (voir l'article 14.01). Cette
rémunération, ainsi spécifiée, constitue le taux
annuel de rémunération, Le poste qu'occupait le
demandeur et celui auquel il a été muté sont tous
deux classés AI-6; il n'y a donc pas de différence
dans le taux annuel de rémunération.
L'appendice «A» ne fait aucune distinction entre
les employés d'exploitation et les autres employés.
Encore une fois, le taux annuel de rémunération
demeure le même.
Le calcul du taux de rémunération hebdoma-
daire, à mon sens, permet simplement d'obtenir le
taux de rémunération horaire normal. Ce taux de
rémunération horaire détermine la rémunération
du temps supplémentaire.
A cause de la différence entre la semaine de
travail des employés d'exploitation et celle des
autres employés, il résulte une différence dans la
rémunération du temps supplémentaire de ces
deux catégories.
Mais la possibilité pour un employé de faire du
temps supplémentaire n'est pas un droit. La con
vention collective oblige l'employeur à réduire au
minimum le temps supplémentaire et, lorsqu'il est
nécessaire d'en faire faire, l'employeur a l'obliga-
tion de le répartir équitablement entre les
employés.
Ainsi l'employeur décide si les nécessités du
service exigent que l'on fasse du temps supplémen-
taire. C'est là une décision de la direction. De
même il appartient à la direction de décider quels
employés devront faire du temps supplémentaire.
Un employé ne peut recevoir l'assurance qu'il
sera choisi pour cela et il est fort possible que
l'employeur décide d'engager un nombre suffisant
d'employés pour éviter le temps supplémentaire.
En conséquence la rémunération du temps sup-
plémentaire s'additionne au taux de rémunération
établi, en tant qu'indemnisation de ce que l'on
pourrait considérer subjectivement comme un
avantage dont bénéficie l'employé, ou comme un
inconvénient qu'il subit.
A mon avis, il s'agit d'une récompense pour le
travail supplémentaire fourni. Celui-ci est imprévi-
sible. A mes yeux, lorsqu'on parle du taux maxi
mum de rémunération dans la convention collec-
tive, on envisage un élément statique et non pas
quelque chose d'incertain et de variable.
C'est ce qui ressort de l'article 63(2) du Règle-
ment sur les conditions d'emploi dans la Fonction
publique. Cette disposition n'envisage qu'un seul
taux de rémunération pour un même groupe et
niveau. Elle n'envisage nullement des taux diffé-
rents au sein du même groupe ou du même niveau.
Il en est de même des primes de poste, qui ne
vont qu'aux employés d'exploitation selon l'article
27 de la convention. C'est la rémunération de
l'obligation de travailler de nuit.
En conséquence ni le temps supplémentaire ni le
travail par équipe n'est un droit de l'employé.
Celui-ci ne peut exiger de faire du temps supplé-
mentaire ni de travailler à des heures indues. Cette
décision appartient à la direction. Le temps supplé-
mentaire n'est pas une obligation contractuelle
dont l'employé serait créancier. Sa seule créance
c'est l'indemnisation que l'employeur doit lui
verser si et quand il le fait travailler en sus de la
semaine normale de travail.
Quoique le demandeur ait eu la possibilité, lors-
qu'il occupait un poste d'employé d'exploitation,
de recevoir une rémunération globale supérieure à
celle du poste d'autres catégories auquel il a été
muté, son droit à la rémunération prévu par l'arti-
cle 14.02 de la convention collective n'est que le
droit à ce que spécifie l'appendice «A», modifié par
l'annexe I de la Loi sur le maintien des services du
contrôle de la circulation aérienne. Cette annexe
ne prévoit qu'un seul taux annuel de rémunération
pour la catégorie AI -6 et ne fait aucune distinction
entre les employés d'exploitation et les autres et,
en conséquence, les taux annuels de rémunération
sont les mêmes pour le poste que le demandeur a
occupé en premier lieu et pour celui auquel il a été
muté.
En conséquence le critère servant à déterminer
si le poste auquel le demandeur a été muté com-
portait «un traitement maximum inférieur» à celui
de son poste antérieur au sens de l'article 31(1)a)
de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique,
c'est le taux annuel de rémunération prévu à l'an-
nexe I de la Loi sur le maintien des services du
contrôle de la circulation aérienne et ce pour les
raisons que je viens de donner.
Comme le taux annuel de rémunération est le
même pour les deux postes, il s'ensuit que le
demandeur n'a pas été «nommé à un poste avec un
traitement ... inférieur»; il était de la compétence
de Sa Majesté, à titre d'employeur, de muter le
demandeur comme elle l'a fait sans avoir recours à
l'article 31 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction
publique.
Il s'ensuit que le demandeur n'a pas droit au
jugement déclaratoire demandé. L'action est reje-
tée avec dépens au profit de Sa Majesté.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.