T-3781-77
Alicia Catherine Jackman (Demanderesse)
c.
La Reine (Défenderesse)
T-3782-77
Jeffrey Bernard Fonceca (Demandeur)
c.
La Reine (Défenderesse)
T-3783-77
Sin Lan Gabriella Cheong (Demanderesse)
c.
La Reine (Défenderesse)
T-3784-77
Dianne Marie Campbell (Demanderesse)
c.
La Reine (Défenderesse)
T-3785-77
Surendra Narayan Rao (Demanderesse)
c.
La Reine (Défenderesse)
T-4499-77
Linda Dimitroff (Demanderesse)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Dubé—
Toronto, le 5 juin; Ottawa, le 7 juin 1979.
Fonction publique — Brefs de prérogative — Déclaration —
Les demandeurs étaient au service du ministère des Transports
pour une période devant prendre fin le 31 décembre 1978 —
L'employeur les a licenciés avant cette date — Les demandeurs
concluent à un jugement déclarant que l'employeur n'avait pas
le droit de mettre fin à leur emploi et que les licenciements
étaient nuls et non avenus, et demandent un dédommagement
— Il échet d'examiner si selon l'art. 25 de la Loi sur l'emploi
dans la Fonction publique, un employé qui est nommé pour
une période spécifiée ne peut être mis en disponibilité avant
l'expiration de cette période, peu importe que ses services
soient requis ou non — Loi sur l'emploi dans la Fonction
publique, S.R.C. 1970, c. P-32, art. 24, 25, 29(1),(2).
ACTION.
AVOCATS:
M. W Wright, c.r. pour les demandeurs.
Duff Friesen pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Soloway, Wright, Houston, Greenberg,
O'Grady, Morin, Ottawa, pour les deman-
deurs.
Le sous-procureur général du Canada pour la
défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE DUBÉ: Les six actions jointes en l'es-
pèce ont été entendues sur preuve commune. Les
motifs qui suivent ainsi que le jugement rendus
s'appliquent mutatis mutandis à chacune d'elles.
A la suite d'une conférence préparatoire, les
avocats ont convenu de ne pas citer au procès des
témoins et de se contenter des faits reconnus dans
leurs conclusions, des exposés conjoints des faits et
des pièces déposées d'un commun accord à l'ouver-
ture de l'audition.
Les demandeurs étaient au service de la défen-
deresse au titre du programme de construction
d'aéroports dans la région de Toronto, du minis-
tère des Transports et ce, pour une période déter-
minée devant prendre fin le 31 décembre 1978.
Avant la date d'expiration, le directeur régional de
l'Administration canadienne des transports aériens
les a informés par écrit que leurs services n'étaient
plus requis. L'explication de ce licenciement avant
terme se trouve dans le premier paragraphe d'une
des lettres versées au dossier, comme suit:
[TRADUCTION] Ainsi que vous devez savoir, le Cabinet a décidé
jeudi dernier, le 25 septembre, que le gouvernement fédéral ne
donnera pas suite à la construction de la phase A des travaux
de Pickering. Cette décision fait suite à la décision récemment
prise par le gouvernement de l'Ontario de s'opposer à la
construction de l'aéroport et de ne pas assurer les commodités
nécessaires, comme les routes, l'eau et les égouts.
Aux fins des actions en instance, les parties sont
convenues des faits suivants:
I. Le demandeur (la demanderesse) a été mis(e) en disponibi-
lité parce que ses services n'étaient plus requis par la défende-
resse, soit faute de travail, soit par suite de la suppression d'une
fonction;
2. Par suite de la mise en disponibilité avant terme, il (elle) a
perdu un revenu de $ (le montant varie d'un cas à
l'autre) et cette somme suffirait à dédommager le demandeur
(la demanderesse) des salaires ou de tout autre avantage qu'il
(elle) aurait reçus s'il (elle) n'avait pas été mis(e) en
disponibilité.
En conséquence, les demandeurs concluent à un
jugement déclarant que l'employeur n'avait pas
droit de mettre fin à leur emploi avant le 31
décembre 1978; un jugement déclarant que les
licenciements étaient nuls et non avenus; et à un
jugement leur accordant les dédommagements
susmentionnés.
Il est évident qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'une
action en rupture de contrat de travail entre parti-
culiers. En common law, l'emploi des fonctionnai-
res étaient éminemment révocables au bon plaisir
du Souverain. Leur emploi est maintenant régi par
des lois et, en l'espèce, par la Loi sur l'emploi dans
la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32. Le
litige porte essentiellement sur l'interprétation des
trois articles suivants de cette Loi.
24. Un employé occupe sa charge durant le bon plaisir de Sa
Majesté sous réserve de la présente loi et de toute autre loi ainsi
que des règlements établis sous leur régime et, à moins qu'une
autre période ne soit spécifiée, pendant une période
indéterminée.
25. Un employé nommé pour une période spécifiée cesse
d'être un employé à l'expiration de ladite période.
29. (1) Lorsque les - services d'un employé ne sont plus
requis, soit faute de travail, soit par suite de la suppression
d'une fonction, le sous-chef peut, en conformité des règlements
de la Commission, mettre l'employé en disponibilité.
(2) Un employé cesse d'être un employé lorsqu'il est mis en
disponibilité en vertu du paragraphe (1).
Le savant avocat des demandeurs soutient que
selon l'article 25, un employé qui est nommé pour
une période spécifiée ne peut être mis en disponibi-
lité avant l'expiration de cette période, peu importe
que ses services soient requis ou non.
A mon avis, il faut interpréter tout autrement
les dispositions susmentionnées, qui doivent être
envisagées dans le contexte des autres dispositions
de la Loi. Il est constant que les six demandeurs
étaient des «employés» au sens du paragraphe 2(1),
c'est-à-dire «[des] personne[s] employée[s] dans
une partie de la Fonction publique relativement à
laquelle la Commission possède de façon exclusive
le droit et l'autorité de faire des nominations». Il
ressort de l'article 24 qu'ils occupaient leur charge
«durant le bon plaisir de Sa Majesté», c'est-à-dire
qu'ils étaient éminemment révocables par le Sou-
verain tout comme en common law. A l'heure
actuelle, cependant, le bon vouloir du Souverain
est tempéré par le texte de loi qui porte: «sous
réserve de la présente loi et de toute autre loi ainsi
que des règlements établis sous leur régime».
Aux termes de l'article 24, les fonctionnaires
occupent leur charge pendant une «période indéter-
minée», à moins «qu'une autre période» ne soit
spécifiée. En l'espèce, les demandeurs ont été
engagés pour une période déterminée devant pren-
dre fin le 31 décembre 1978. Selon l'article 25, ils
cesseraient d'être des employés après cette date; ce
qui ne signifie nullement qu'on ne pouvait mettre
fin à leurs services avant cette date.
Ainsi que l'a montré le juge en chef Jackett dans
Wright c. La Commission des relations de travail
dans la Fonction publique [1973] C.F. 765, la
législation régissant actuellement la Fonction
publique prévoit plusieurs formes de cessation
d'emploi. Aux pages 775 et suivantes, il a énuméré
les diverses formes, savoir:
1. La démission (article 26 de la Loi, supra).
2. Le renvoi (article 28).
3. L'expiration de la période d'emploi (article
25).
4. L'abandon (article 27).
5. La mise en disponibilité (article 29).
6. Le congédiement ou renvoi (articles 24 et 31
ainsi que l'alinéa 7(1)f) de la Loi sur l'admi-
nistration financière).
L'employé engagé pour une période spécifiée
occupe sa charge «sous réserve de la présente loi et
de toute autre loi» tout comme l'employé engagé
pour une période indéterminée: l'un et l'autre peu-
vent être mis en disponibilité en application de
l'article 29 si leurs services ne sont plus requis, soit
faute de travail, soit par suite de la suppression
d'une fonction. Attendu que c'était ce dernier cas
qui s'est produit pour ce qui est des travaux où les
demandeurs étaient employés, je conclus que leur
employeur était pleinement habilité par la Loi à les
mettre en disponibilité.
Les actions sont rejetées avec dépens.
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