A-129-79
Michael Collins (Requérant)
c.
La Reine (Intimée)
Cour d'appel, les juges Pratte et Ryan et le juge
suppléant Lalande—Montréal, les 20 et 22 novem-
bre 1979.
Examen judiciaire — Requête en examen et en annulation
de la décision d'un juge de la Cour des Sessions de la paix du
Québec qui a rejeté la demande de restitution présentée par le
requérant en vertu de l'art. 10(5) et (6) de la Loi sur les
stupéfiants — Il échet d'examiner si cette décision a été
prononcée par un «office, commission ou autre tribunal fédé-
ral» — Loi sur les stupéfiants, S.R.C. 1970, c. N-1, art.
10(5),(6) — Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2 e Supp.), c.
10, art. 2, 28.
Arrêt appliqué: Herman c. Le sous-procureur général du
Canada [1979] 1 R.C.S. 729.
DEMANDE d'examen judiciaire.
AVOCATS:
Jean-Pierre Belhumeur pour le requérant.
Gaspard Côté, c.r., pour l'intimée.
PROCUREURS:
Stikeman, Elliott, Tamaki, Mercier & Robb,
Montréal, pour le requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimée.
Voici les motifs du jugement de la Cour pro-
noncés en français à l'audience par
LE JUGE PRATTE: Cette demande faite en vertu
de l'article 28 est dirigée contre une décision du
juge Paul A. Bélanger de la Cour des Sessions de
la paix de la province de Québec qui a rejeté la
demande de restitution que le requérant avait pré-
sentée en vertu des paragraphes 10(5) et (6) de la
Loi sur les stupéfiants, S.R.C. 1970, c. N-1.'
Nous sommes tous d'avis que cette demande
doit être rejetée. Nous croyons, en effet, que la
décision attaquée n'a pas été prononcée par un
«office, commission ou autre tribunal fédéral» au
sens de la définition de l'article 2 de la Loi sur la
Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2' Supp.), c. 10, 2 et
ne peut, pour cette raison, être révisée en vertu de
l'article 28 de cette même Loi.
Le juge Bélanger est juge à la Cour des Sessions
de la paix et il a été nommé à ses fonctions «en
vertu ou en conformité du droit d'une province», la
province de Québec. Les décisions qu'il prononce
en cette qualité de juge ne sont donc pas des
décisions d'un «office, commission ou autre tribu
nal fédéral» au sens de la définition de l'article 2.
Le requérant prétend, cependant, qu'en pronon-
çant la décision attaquée, le juge Bélanger n'agis-
sait pas en sa qualité de juge mais comme persona
' Le texte de ces dispositions est le suivant:
10....
(5) Lorsqu'un stupéfiant ou une autre chose a été saisi en
vertu du paragraphe (1), toute personne peut, dans un délai
de deux mois à compter de la date d'une telle saisie, moyen-
nant avis préalable donné à la Couronne de la manière
prescrite par les règlements, demander à un magistrat ayant
juridiction dans le territoire où la saisie a été faite de rendre
une ordonnance de restitution prévue au paragraphe (6).
(6) Sous réserve des paragraphes (8) et (9), lorsque, après
audition de la demande faite selon le paragraphe (5), le
magistrat est convaincu
a) que le requérant a droit à la possession du stupéfiant ou
autre chose saisie, et
b) que la chose ainsi saisie n'est pas, ou ne sera pas,
requise à titre de preuve dans des poursuites relatives à une
infraction à la présente loi,
il doit ordonner que la chose ainsi saisie soit restituée immé-
diatement au requérant, et lorsque le magistratest convaincu
que le requérant a droit à la possession de la chose ainsi
saisie, mais ne l'est pas quant à la question mentionnée à
l'alinéa b), il doit ordonner que la chose ainsi saisie soit
restituée au requérant
e) à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la
date de cette saisie, si aucune poursuite relative à une
infraction à la présente loi n'a été entamée avant l'expira-
tion dudit délai, ou
d) dans tout autre cas, lorsqu'il a été définitivement statué
sur ces poursuites.
2 Pour les fins de cette décision, il suffit de reproduire la
partie suivante de la définition de l'article 2.
«office, commission ou autre tribunal fédéral» désigne ... une
ou plusieurs personnes . .. exerçant ... une compétence ou
des pouvoirs conférés par une loi du Parlement du Canada
... à l'exclusion ... des personnes nommées en vertu ou en
conformité du droit d'une province ....
designata. Cette prétention doit être rejetée.
Comme l'a affirmé la Cour suprême dans l'affaire
Herman c. Le sous-procureur général du
Canada,' à moins d'indication manifeste au con-
traire, le Parlement, lorsqu'il confie des pouvoirs à
un juge, est censé vouloir qu'il les exerce en sa
qualité de juge. Ici, nous ne trouvons pas d'indica-
tion d'une intention contraire à cette intention
présumée. Appliquant le test suggéré par la Cour
suprême dans l'arrêt Herman, à la page 749, on ne
peut dire que le juge Bélanger, en exerçant les
pouvoirs que lui conférait les paragraphes 10(5) et
(6) de la Loi sur les stupéfiants, ait exercé «une
compétence particulière, distincte, exceptionnelle
et indépendante de ses tâches quotidiennes de juge,
et qui n'a aucun rapport avec la cour dont il est
membre».
' [1979] 1 R.C.S. 729.
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