T-2097-78
La Reine (Demanderesse)
c.
B. & J. Music Ltd. (autrefois Buegeleisen and
Jacobson Limited) (Défenderesse)
Division de première instance, le juge suppléant
Grant—Toronto, 22 et 30 avril 1980.
Impôt sur le revenu — Calcul du revenu — Déductions —
Compte des déductions cumulatives accordées aux petites
entreprises — Appel d'une décision de la Commission de
révision de l'impôt enjoignant au Ministre de radier le calcul
du compte des déductions cumulatives de l'avis de cotisation
du contribuable pour 1974 — La défenderesse ne devint une
corporation privée dont le contrôle est canadien qu'en 1974 et
donc ne remplissait pas la condition donnant droit à la déduc-
tion accordée aux petites entreprises et, par conséquent, n'avait
pas calculé son compte de déductions cumulatives — Le
Ministre confirma le montant d'impôt à payer pour la cotisa-
tion de 1974 mais y ajouta un calcul du compte des déductions
cumulatives de la défenderesse — La Commission de révision
de l'impôt a accueilli l'appel de la défenderesse — Il échet
d'examiner la compétence de la Commission pour connaître de
l'appel — Appel accordé — Loi de l'impôt sur le revenu,
S.R.C. 1952, c. 148, modifiée.
Appel d'une décision de la Commission de révision de l'im-
pôt, relative à l'année d'imposition 1974 de la défenderesse,
enjoignant au Ministre de radier le calcul du compte des
déductions cumulatives de l'avis de cotisation ou, si après
examen il considérait qu'était requis quelque calcul depuis le 24
juin 1974, d'effectuer ce calcul et de modifier la cotisation en
conséquence. Le 24 juin 1974, la compagnie défenderesse a
rempli pour la première fois les conditions pour être considérée
comme une corporation privée dont le contrôle est canadien.
Elle ne remplissait donc pas la condition donnant droit à la
déduction accordée aux petites entreprises auparavant et
n'avait donc pas à effectuer le calcul relatif au compte des
déductions cumulatives. La cotisation de 1974 ne modifiait pas
l'impôt payable mais incluait un calcul relatif au compte des
déductions cumulatives. La défenderesse a formé appel de la
cotisation à la Commission de révision de l'impôt, concluant à
la radiation du calcul relatif au compte des déductions cumula-
tives. La Commission a accueilli l'appel. Il échet d'examiner si
la Commission de révision de l'impôt était compétente pour
connaître de l'appel et prononcer la décision qu'elle a rendue.
Arrêt: l'appel est accueilli. La Commission est sortie de sa
compétence en prononçant la décision rendue; en effet le mon-
tant d'impôt à payer pour l'année 1974 par la compagnie n'était
pas en cause devant la Commission. La Loi n'oblige pas de
calculer le compte des déductions cumulatives dans la déclara-
tion du contribuable sauf dans le cas où une corporation privée
dont le contrôle est canadien veut se prévaloir pour cette
année-là de l'article 125(1). La défenderesse ne prétendait, ni
ne pouvait, exercer aucun recours au sujet de l'année d'imposi-
tion 1974 car elle ne pouvait être considérée comme une
corporation privée dont le contrôle est canadien pour l'ensemble
de l'année. Ce calcul du Ministre ne modifiait aucunement
l'impôt que la compagnie avait à payer pour l'année. Si éven-
tuellement au cours d'une année ultérieure, la défenderesse
étant devenue une corporation privée dont le contrôle est
canadien, le montant du compte des déductions cumulatives
devient un facteur à prendre en compte dans le calcul de
l'impôt qu'elle a à payer, elle pourra toujours à ce moment-là
contester la chose; les calculs du Ministre relatifs à son impôt
de 1974 ne pourront en aucune façon constituer une fin de
non-recevoir ni être opposés à la compagnie, ni au Ministre
d'ailleurs. La Cour dans le présent appel détient la compétence
lui permettant de réformer la Commission même si cette der-
nière ne possédait pas le pouvoir, la compétence, ni l'autorité lui
permettant de rendre l'ordonnance en cause.
Arrêts appliqués: Vineland Quarries and Crushed Stone
Ltd. c. Le ministre du Revenu national 70 DTC 6043; R.
c. Gary Bowl Ltd. [1974] 2 C.F. 146; Le ministre du
Revenu national c. Gunnar Mining Ltd. [1970] R.C.E.
329. Distinction faite avec les arrêts: Gardner c. Le minis-
tre du Revenu national 65 DTC 591; Hullmann c. Le
ministre du Revenu national 73 DTC 94. Arrêt mentionné:
Gardner c. Le ministre du Revenu national 67 DTC 246.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
M. Lefebvre et C. G. Pearson pour la
demanderesse.
S. D. Paton pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour la
demanderesse.
Rosenberg, Smith, Paton, Hyman & Matlow,
Toronto, pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE SUPPLÉANT GRANT: (1) Cette espèce
est un appel formé par le sous-procureur général
du Canada, au nom de Sa Majesté la Reine, de la
décision de la Commission de révision de l'impôt,
relative à l'année d'imposition 1974 de la défende-
resse, en date du 19 janvier 1978, par laquelle elle
accueillait l'appel de la défenderesse et enjoignait
au Ministre de radier le calcul du compte des
déductions cumulatives de l'avis de cotisation éma-
nant de lui pour cette année ou, si après examen il
considérait qu'était requis quelque calcul depuis le
24 juin 1974, d'effectuer ce calcul et de modifier la
cotisation en conséquence.
(2) Les parties sont convenues d'un exposé con
joint des faits que leurs avocats respectifs ont signé
et qui a été produit comme preuve de tous les faits
y contenus. Comme il rapporte tout ce qui est
pertinent en l'espèce, aucune preuve ne fut enten-
due viva voce. Voici cet énoncé:
[TRADUCTION] EXPOSE DES FAITS
1. La défenderesse est une compagnie constituée selon la loi
ontarienne.
2. Antérieurement au 24 juin 1974, la défenderesse était con-
trôlée par des individus ne résidant pas au Canada.
3. Le 24 juin 1974 furent transportées toutes les actions de la
défenderesse, de sorte qu'à compter de ce moment-là elle
remplissait les conditions pour être considérée comme une
corporation privée dont le contrôle est canadien, aux termes de
l'art. 125(6)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952
c. 148, modifiée par l'art. 1 du c. 63 des S.C. 1970-71-72 (la
«Loi de l'impôt sur le revenu»).
4. La défenderesse n'était pas une corporation privée dont le
contrôle est canadien au cours des années d'imposition 1972,
1973 et 1974 et en conséquence ne remplissait pas la condition
donnant droit à la déduction accordée aux petites entreprises
pour ces années-là, aux termes de l'art. 125(1) de la Loi de
l'impôt sur le revenu.
5. La défenderesse a été imposée pour l'année d'imposition
1974 par avis de cotisation, daté du 27 août 1975, portant le
numéro 0469724 (la «cotisation»).
6. La cotisation ne modifiait pas l'impôt fédéral payable, soit
un montant total de $71,066.12, préalablement déclaré par la
défenderesse.
7. La formule annexée à l'avis de cotisation, appelée T7W,
disait que le ministre du Revenu national («le Ministre») avait
effectué un calcul relatif au compte des déductions cumulatives
de la défenderesse.
8. La défenderesse s'est opposée à la cotisation, laquelle fut
confirmée par avis du Ministre.
9. La défenderesse a formé appel de la cotisation à la Commis
sion de révision de l'impôt.
10. Dans son inscription en appel à la Commission de révision
de l'impôt, la défenderesse conclut à:
Radiation du calcul relatif au compte des déductions cumula-
tives de l'avis de cotisation lancé pour l'année d'imposition
1974, lequel calcule le compte des déductions cumulatives
pour chacune des années d'imposition 1972, 1973 et 1974.
I I. La Commission de révision de l'impôt a accueilli l'appel de
la défenderesse et, dans sa décision, a enjoint au Ministre de
supprimer le calcul du compte des déductions cumulatives de
l'avis de cotisation de l'année d'imposition 1974, ou de faire un
nouveau calcul et de modifier la cotisation en conséquence au
cas où il estimerait celui-ci nécessaire, en vertu de la Loi de
l'impôt sur le revenu, à compter du 24 juin 1974.
12. Les revenus imposables de la défenderesse pour les années
d'imposition 1972, 1973 et 1974 étaient de $148,864.07, de
$255,675.84 et de $175,252.58 respectivement.
13. La défenderesse n'a pas déclaré de dividende au cours des
années d'imposition 1972, 1973 et 1974.
14. La défenderesse, dans ses déclarations d'impôt pour les
années 1972, 1973 et 1974, n'a pas effectué le calcul de son
compte des déductions cumulatives, aux termes de l'art.
I25(6)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu.
15. Le Ministre, en calculant la différence du compte des
déductions cumulatives de la défenderesse, à jour au 31 décem-
bre 1974, y a inclut, conformément à son interprétation de l'art.
125(6)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu, les sommes de
$148,864.07, $255,675.84 et $175,252.58.
16. Est annexée aux présentes, comme pièce 0A», une copie
conforme de la déclaration d'impôt sur le revenu de la défende-
resse pour l'année 1974, avec ses pièces justificatives.
17. Est annexée aux présentes, comme pièce «B», une copie
conforme de l'avis de cotisation, en date du 27 août 1975,
relatif à l'année d'imposition 1974 de la défenderesse, avec la
formule T7W.
Le premier moyen d'appel qu'invoque la deman-
deresse est que la Commission de révision de l'im-
pôt n'était pas compétente pour connaître de l'ap-
pel ni pour donner la directive qu'elle a donnée.
Les articles suivants de la Loi de l'impôt sur le
revenu, S.R.C. 1952, c. 148, modifiée par l'article
1 des S.C. 1970-71-72 du c. 63, sont en cause:
152. (I) Le Ministre doit, avec toute la diligence possible,
examiner chaque déclaration de revenu et fixer l'impôt pour
l'année d'imposition et l'intérêt et les pénalités payables, s'il y a
lieu.
(2) Après examen d'une déclaration, le Ministre envoie un
avis de cotisation à la personne qui a produit la déclaration.
165. (1) Un contribuable qui s'oppose à une cotisation
prévue par la présente Partie peut, dans les 90 jours de la date
d'expédition par la poste de l'avis de cotisation, signifier au
Ministre un avis d'opposition, en double exemplaire, dans la
forme prescrite, exposant les motifs de son opposition et tous les
faits pertinents.
(2) Un avis d'opposition prévu au présent article doit être
signifié par la poste, sous pli recommandé, adressé au sous-
ministre du Revenu national pour l'impôt, à Ottawa.
(3) Dès réception de l'avis d'opposition, formulé en vertu du
présent article, le Ministre doit,
a) avec toute la diligence possible, examiner de nouveau la
cotisation et annuler, ratifier ou modifier cette dernière ou
établir une nouvelle cotisation, ou
et en aviser le contribuable par lettre recommandée.
169. Lorsqu'un contribuable a signifié un avis d'opposition à
une cotisation, prévu à l'article 165, il peut interjeter appel
auprès de la Commission de révision de l'impôt, pour faire
annuler ou modifier la cotisation
a) après que le Ministre a ratifié la cotisation ou procédé à
une nouvelle cotisation, ou
mais nul appel prévu au présent article ne peut être interjeté
après l'expiration des 90 jours qui suivent la date où avis a été
expédié par la poste au contribuable, en vertu de l'article 165,
portant que le Ministre a ratifié la cotisation ou procédé à une
nouvelle cotisation.
171. (1) La Commission peut statuer sur un appel
a) en le rejetant, ou
b) en l'admettant et
(i) annulant la cotisation,
(ii) modifiant la cotisation, ou
(iii) déférant la cotisation au Ministre pour nouvel examen
et nouvelle cotisation.
172. (1) Le Ministre ou le contribuable peut, dans les 120
jours de la date où le régistraire de la Commission de révision
de l'impôt transmet par la poste, au Ministre et au contribua-
ble, la décision concernant un appel basé sur l'article 169,
interjeter appel auprès de la Cour fédérale du Canada.
La déclaration que le contribuable a produite
pour l'année 1974 donne un impôt fédéral à payer
pour cette année-là de $71,000.12. Le Ministre,
dans son avis de cotisation n'a pas modifié ce
montant mais a au contraire entériné les calculs du
contribuable. On comprend mieux le grief du con-
tribuable si on examine les articles de la Loi qui
prévoient la réduction de l'impôt des corporations
privées dont le contrôle est canadien.
125. (1) Une corporation, qui a été pendant toute l'année
une corporation privée dont le contrôle est canadien, peut
déduire de l'impôt payable par ailleurs pour une année d'impo-
sition, en vertu de la présente Partie, une somme égale à 25%
du moins élevé des montants suivants:
a) la fraction, si fraction il y a,
(i) de la totalité des sommes qui constituent chacune le
revenu de la corporation pour l'année, tiré d'une entreprise
exploitée activement au Canada,
qui est en sus de
(ii) la totalité des sommes qui constituent chacune une
perte de la corporation pour l'année, provenant de l'exploi-
tation d'une entreprise exploitée activement au Canada,
c) le plafond des affaires de la corporation pour l'année, ou
d) la fraction, si fraction il y a, du plafond global des affaires
de la corporation pour l'année qui est en sus du compte des
déductions cumulatives à la fin de l'année d'imposition
précédente,
sauf que, aux fins de l'application du présent article à une
année d'imposition postérieure à l'année d'imposition 1972, le
pourcentage de «25%» figurant dans le présent paragraphe doit
être remplacé par le pourcentage de «24%» pour l'année d'impo-
sition 1973, de «23%» pour l'année d'imposition 1974, de «22%»
pour l'année d'imposition 1975 et de «21%» pour les années
d'imposition 1976 et suivantes.
(2) Aux fins du présent article,
a) le plafond des affaires d'une corporation pour une année
d'imposition est de $100,000, et
b) son plafond global des affaires pour une année d'imposi-
tion est de $500,000,
à moins que la corporation ne soit associée, pendant l'année, à
une ou plusieurs autres corporations privées dont le contrôle est
canadien, auquel cas, sauf dispositions contraires dans le pré-
sent article, son plafond des affaires pour l'année est nul et son
plafond global des affaires pour l'année est nul.
(6) Dans le présent article,
a) «corporation privée dont le contrôle est canadien» signifie
une corporation privée qui est une corporation canadienne
autre qu'une corporation contrôlée directement ou indirecte-
ment, de quelque manière que ce soit, par une ou plusieurs
personnes non résidantes, ou à la fois par une ou plusieurs
personnes non résidantes, par une ou plusieurs corporations
publiques ou par une combinaison de celles-ci; et
b) «compte des déductions cumulatives» d'une corporation à
la fin d'une année d'imposition donnée, signifie la fraction, si
fraction il y a, du total
(i) des revenus imposables de la corporation pour des
années d'imposition commençant après 1971 et se termi-
nant au plus tard à la fin de l'année donnée, et
(ii) des 4/3 des montants déductibles, en vertu de l'article
112 ou du paragraphe 113(1), des revenus de la corpora
tion pour ces années
qui est en sus du total obtenu en additionnant
(iii) les 4/3 des dividendes imposables payés par la corpo
ration dans ces années, et
(iv) un montant égal à 4 fois la fraction, si fraction il y a,
de l'impôt en main remboursable au titre de dividendes de
la corporation, (au sens que donne à cette expression le
paragraphe 129(3)), la fin de l'année donnée, qui est en
sus de son remboursement de dividendes (au sens que
donne à cette expression le paragraphe 129(1)) pour l'an-
née donnée.
La défenderesse en l'espèce se plaint de ce que le
Ministre a ajouté dans l'espace que la formule de
déclaration réserve au calcul du compte des déduc-
tions cumulatives du contribuable, lorsqu'il y a lieu
à ce calcul, le chiffre de $404,539.91 comme
revenu imposable total de la compagnie pour les
deux précédentes années: 1972 et 1973. La défen-
deresse, elle, avait reporté à cet endroit la somme
de $175,252.82. Le Ministre a aussi, au bas de la
formule, ajouté $579,792.47, le revenu imposable
total pour ces trois années, en indiquant qu'il
s'agissait là du montant du compte des déductions
cumulatives du contribuable à la fin de l'année
d'imposition 1974.
Dans une note supplémentaire attachée à l'avis
de cotisation, le Ministre a fourni comme suit le
détail de ce compte:
[TRADUCTION] Le $579,792.47 du compte des déductions
cumulatives se décompose comme suit:
REVENU IMPOSABLE
1972 $148,864.07
1973 $255,675.84
1974 $175,252.58
$579,792.49
Ces montants constituent le revenu imposable de
la compagnie pour les années d'imposition posté-
rieures à 1971. Si ces chiffres lient le contribuable
pour les années suivantes cela diminuera, et proba-
blement supprimera la déduction dont aurait pu
bénéficier ultérieurement la compagnie, selon l'ar-
ticle 125(1)d), si elle est alors devenue une corpo
ration privée dont le contrôle est canadien. Le
«plafond des affaires» de la compagnie aux termes
de l'article 125(2) précité était de $100,000 et son
«plafond global» de $500,000. Ce dernier chiffre
atteint au poste de son compte des déductions
cumulatives, une compagnie ne peut plus bénéfi-
cier de la déduction aux petites entreprises à
laquelle elle aurait droit autrement.
La Loi n'oblige pas de calculer le «compte des
déductions cumulatives» dans la déclaration du
contribuable sauf dans le cas où une corporation
privée dont le contrôle est canadien veut se préva-
loir pour cette année-là de l'article 125(1). La
défenderesse ne prétendait, ni ne pouvait, exercer
aucun recours au sujet de l'année d'imposition
1974 car elle ne pouvait être considérée comme
une corporation privée dont le contrôle est cana-
dien pour l'ensemble de l'année. Ce calcul du
Ministre ne modifiait aucunement l'impôt que la
compagnie avait à payer pour l'année. Si éventuel-
lement au cours d'une année ultérieure, la défende-
resse étant devenue une corporation privée dont le
contrôle est canadien, le montant du compte des
déductions cumulatives devient un facteur à pren-
dre en compte dans le calcul de l'impôt qu'elle a à
payer, elle pourra toujours à ce moment-là contes-
ter la chose; les calculs du Ministre relatifs à son
impôt de 1974 ne pourront en aucune façon consti-
tuer une fin de non-recevoir ni être opposés à la
compagnie, ni au Ministre d'ailleurs.
En l'espèce le Ministre n'a pas modifié le mon-
tant d'impôt qu'avait calculé le contribuable mais
l'a au contraire entériné. Dans l'affaire Vineland
Quarries and Crushed Stone Limited c. M.R.N.
70 DTC 6043, le juge Cattanach, à la page 6045,
écrit:
[TRADUCTION] Si je comprends bien le fondement de l'appel
d'une cotisation du Ministre, c'est qu'il s'agit d'un appel du
montant cotisé.
Dans Harris c. M.R.N. [1965] 2 R.C.É. 653 [64 DTC 5332]
mon collègue Thurlow a dit, à la page 662:
... Lors de l'appel que forme le contribuable, la Cour doit
d'abord et avant tout juger si la cotisation est trop élevée.
Cela peut être fonction des déductions que l'on peut ou non
faire lors du calcul du revenu mais à mes yeux on ne décide
de ces questions que dans le but de répondre à la question
première. ...
Dans l'affaire La Reine c. Gary Bowl Limited
[1974] 2 C.F. 146, le juge Thurlow (ayant alors
cette qualité) écrit, à la page 149:
En l'espèce, comme il fut admis que l'appel interjeté par
l'intimée à la Commission de révision de l'impôt visait des
cotisations portant la mention «nul» pour les années 1967, 1968
et 1969, il s'agit de déterminer si, compte tenu de la décision de
la Cour suprême du Canada dans l'affaire Okalta Oils Ltd. c.
M.R.N. ([1955] R.C.S. 824) il subsiste des points de droit
importants ou assez défendables à débattre quant au droit de
l'intimée d'en appeler sur une telle question. A mon avis, ce
n'est pas le cas.
La Cour dans le présent appel détient la compé-
tence lui permettant de réformer la Commission
même si cette dernière ne possédait pas le pouvoir,
la compétence, ni l'autorité lui permettant de
rendre l'ordonnance en cause. Voir l'arrêt M.R.N.
c. Gunnar Mining Ltd. [1970] R.C.É. 329 où le
président Jackett dit, à la page 333:
A mon avis, ce droit d'appel vise le cas où la contestation est
fondée sur l'absence de juridiction de la Commission d'appel de
l'impôt pour rendre le jugement attaqué (Voir l'arrêt Provincial
Secretary of Prince Edward Island v. Egan [1941] S.C.R. 396,
où le juge en chef Duff déclare, à la page 399); par conséquent
ce droit peut également s'étendre à un cas où, comme celui que
me paraît poser cette affaire, la contestation porte sur le fait
que, bien que la matière relève de la compétence de la Commis
sion, celle-ci n'avait pas le pouvoir et la faculté de rendre le
jugement attaqué.
La défenderesse invoque les affaires Gardner c.
M.R.N. 65 DTC 591, où il a été dit, aux pages 591
et 592:
[TRADUCTION] L'acte sur lequel l'avocat du Ministre fondait
sa requête était un affidavit qu'avait écrit un des avocats du
ministère du Revenu national qui avait pris connaissance de
tous les documents dont le Ministre a, ou avait eu, la possession
ou la garde, relatifs à l'appel en cause. Après avoir fait remar-
quer que la seconde cotisation de l'appelant était pour le
montant d'impôt qu'il avait déclaré pour les années d'imposi-
tion 1959 et 1961, il note que ce dernier ne demandait pas dans
son avis d'appel «que le montant d'impôt à payer déclaré par
l'intimé soit haussé ou autrement modifié». En d'autres mots,
comme dit précédemment, la position du Ministre était que,
comme il n'y avait pas litige au sujet du montant d'impôt à
payer pour les années faisant l'objet de l'appel, la Commission
ne pouvait, faute de compétence en la matière, être saisie de
l'appel. Le Ministre avait bien fait entrer en ligne de compte
dans le calcul de l'impôt de l'appelant, pour chacune des années
d'imposition 1959 et 1961, des considérations qui, sans modifier
le montant de l'impôt à payer, étaient manifestement incluses
dans l'espoir de lui permettre de se conformer, en temps
opportun, aux dispositions de l'article 85B de la Loi sur les
réserves spéciales.
et Hullmann c. M.R.N. 73 DTC 94, où il est dit, à
la page 95:
[TRADUCTION] Toutefois si, en dépit d'une cotisation zéro,
des droits que la Loi de l'impôt sur le revenu confère au
contribuable demeurent, pour l'année d'imposition à laquelle la
cotisation zéro se rapporte, et si les dispositions de la Loi
confèrent des droits au contribuable indépendamment de la
cotisation zéro, comme, par exemple, celui de reporter les
pertes de son entreprise de l'année précédente ou celui de
contester la réserve qu'aurait établie le Ministre pour en arriver
à la cotisation zéro, malgré que le contribuable ne s'en soit pas
prévalu, je suis d'avis qu'on ne saurait lui interdire de former
appel de la cotisation zéro afin d'établir et d'exercer un droit
actuel que lui confère la Loi; il peut importer pour lui à ce
moment-là de connaître l'ordre de grandeur de la perte qu'il
peut appliquer aux années antérieures ou futures ou celui de la
réserve dont il devra rendre compte dans les années à venir.
comme fondement de la proposition voulant que le
contribuable dont la cotisation par le Ministre est
égale à zéro, ou n'indique aucun impôt à payer,
peut quand même former un appel. Ces deux
espèces étaient des décisions de la Commission de
révision de l'impôt et dans chacune la cotisation du
Ministre portait atteinte à certains droits actuels
du contribuable, reconnus juridiquement, perti-
nents aux déclarations pour l'année en cause.
En l'espèce aucun droit du contribuable au sens
juridique n'est touché par les calculs du Ministre
ni par son énoncé de l'état du compte des déduc-
tions cumulatives du contribuable envoyé avec la
confirmation que l'impôt que devait la compagnie
était bien celui qui apparaissait dans sa déclaration
de cette année-là.
L'espèce Gardner précitée n'était qu'un juge-
ment d'avant dire droit d'ailleurs différent du juge-
ment définitif publié au 67 DTC 246; la page
248 le vice-président de la Commission, qui pro-
nonce le jugement, dit:
[TRADUCTION] Il y aurait beaucoup à dire en ce sens mais il
suffit de juger, comme je le fais, qu'en dépit de la procédure,
quelque peu irrégulière, suivie pour cotiser dans le cas de la
période en cause, on n'a nullement porté atteinte ni modifié par
là la véritable situation fiscale de l'appelant et il n'est prévu
aucun recours auquel on pourrait espérer voir la Commission
faire droit.
Je dis donc pour droit que la Commission est
sortie de sa compétence en prononçant la décision
rendue; en effet le montant d'impôt à payer pour
l'année 1974 par la compagnie n'était pas en cause
devant la Commission. L'appel devrait donc être
accordé et l'appel de la cotisation du Ministre
rejeté sans frais.
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