T-3669-77
Canadian Clyde Tube Forgings Limited (Deman-
deresse)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Mahoney—
Toronto, 7 décembre; Ottawa, 18 décembre 1979.
Impôt sur le revenu — Calcul du revenu — Déduction
d'impôt pour fabrication ou transformation — Appel contre le
rejet de la déduction des sommes payées à un entrepreneur
indépendant — Pièces semi-ouvrées confiées à un entrepreneur
pour usinage — L'entrepreneur fournissait son propre outil-
lage et la main-d'œuvre — Tous les travaux de l'entrepreneur
sont accomplis dans l'usine de la demanderesse où aucune
barrière artificielle ne sépare les zones occupées par celle-ci et
les zones occupées par l'entrepreneur — Il échet d'examiner si
les sommes payées à l'entrepreneur sont des montants «payés
ou payables [relativement] . à un service ... que rendrait ou
accomplirait normalement un employé de la [demanderesse]»
— Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, c. 63, art.
125.1 — Règlements de l'impôt sur le revenu, DORS/73-495,
art. 5202.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
P. F. Vineberg, c.r. pour la demanderesse.
I. S. MacGregor pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Phillips & Vineberg, Montréal, pour la
demanderesse.
Le sous-procureur général du Canada pour la
défenderesse.
Ce qui. suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY: La question à trancher est
de savoir si des paiements effectués par la deman-
deresse à un entrepreneur indépendant tombent
sous la définition de l'expression «coût en main-
d'oeuvre» énoncée à l'article 5202 des Règlements
de l'impôt sur le revenu, DORS/73-495. La
demanderesse a inclus les paiements dans le calcul
du montant de sa demande de déduction d'impôt
pour fabrication ou transformation en vertu de
l'article 125.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu,
S.C. 1970-71-72, c. 63, pour son année d'imposi-
tion 1973. Le ministre du Revenu national a rejeté
l'inclusion de ces paiements et réduit ainsi la
déduction de $34,940 à $5,497. Le calcul lui-
même n'est pas en cause et il n'est pas contesté que
si le montant payé à l'entrepreneur peut être à bon
droit inclus dans le «coût en main-d'oeuvre», la
déduction réclamée par la demanderesse devrait
alors être admise.
La demanderesse fabrique et transforme de la
tuyauterie et des pièces spéciales utilisées dans
l'industrie du raffinage. L'ensemble des opérations
s'effectue dans l'usine de la demanderesse où elle
reçoit des raccords et des brides semi-ouvrés
qu'elle confie à un entrepreneur pour usinage.
Celui-ci les retourne ensuite à la demanderesse
pour le finissage (p. ex. la peinture). Ces articles
sont ensuite stockés sur place d'où ils seront expé-
diés aux clients. L'entrepreneur fournit les machi
nes et l'outillage nécessaires, emploie les opéra-
teurs et touche un salaire aux pièces selon le taux
convenu. L'outillage est entièrement situé dans
l'usine de la demanderesse et les ouvriers de l'en-
trepreneur y accomplissent tous leurs travaux. A
tout observateur, le processus dans son ensemble,
de la réception à l'expédition, apparaîtrait comme
unique et intégré. Il n'y a pas de barrière physique
artificielle entre les zones de l'usine occupées par
la demanderesse et celles occupées par l'entrepre-
neur, ni de ségrégation superflue entre les
employés de l'un ou de l'autre. Ce modus operandi
a été adopté lorsque l'usine a été établie en 1960 et
se poursuit à ce jour.
L'article 5202 définit ainsi le «coût en
main-d'oeuvre»:
... un montant égal au total
a) des traitements et salaires payés ou payables pendant
l'année à tous les employés de la corporation pour des
services rendus pendant l'année, et
b) de toutes les autres sommes dont chacune constitue une
somme payée ou payable pendant l'année pour l'exécution
pendant l'année, par toute personne autre qu'un employé de
la corporation, de fonctions relatives
(i) à la gestion ou à l'administration de la corporation;
(ii) à la recherche scientifique suivant la définition qu'en
donne l'article 2900, ou
(iii) à un service ou à une fonction que rendrait ou
accomplirait normalement un employé de la corporation,
Viennent ensuite certaines exclusions non pertinen-
tes en l'espèce.
La question est de savoir si les paiements à
l'entrepreneur sont des montants «payés ou paya-
bles [relativement] ... à un service ... que ren-
drait ou accomplirait normalement un employé de
la [demanderesse]». Le litige est donc axé sur
l'interprétation à donner au sous-alinéa b)(iii) de
la définition et notamment sur le sens du mot
«normalement».
Le service ou la fonction qu'exécute l'entrepre-
neur en l'espèce est nettement un service ou une
fonction nécessaire au processus de fabrication et
de transformation effectué par la demanderesse.
Le fait de confier, par contrat, l'exécution de ce
service ou de cette fonction à un entrepreneur
indépendant est, d'après la preuve, de caractère
unique. Il est normal pour une corporation de
mener elle-même à terme toutes ses opérations, de
sorte que le service ou la fonction exécutée par
l'entrepreneur pour le compte de la demanderesse
est un service ou une fonction qui serait normale-
ment exécutée par les employés de cette dernière.
Toutefois, il ne s'agit en l'espèce ni d'un service ni
d'une fonction normalement exécutée par les
employés de la demanderesse. Cette dernière
engage normalement l'entrepreneur, plutôt que ses
propres employés, pour rendre ce service ou
accomplir cette fonction. En fait, ses propres
employés n'ont jamais, avant, pendant ou depuis
son année d'imposition 1973, rendu ce service ou
accompli cette fonction.
Rien dans les dispositions connexes de la Loi ou
des Règlements ne m'amène à conclure que les
mots pertinents de la définition de l'expression
«coût en main-d'oeuvre» puissent être interprétés
autrement que dans leur sens courant. L'adverbe
«normalement» paraît clairement se rapporter au
modus operandi du fabricant et transformateur
qui réclame l'inclusion d'une dépense spécifique
dans son coût en main-d'oeuvre. En bref, c'est une
vue subjective et non objective de la normalité qui
détermine si le montant payé ou payable peut
effectivement être inclus dans le «coût en
main-d'oeuvre».
L'action est rejetée avec dépens.
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