A-249-80
P. J. Wallbank Manufacturing Co. Limited
(Appelante)
c.
Kuhlman Corporation (Intimée)
Cour d'appel, le juge en chef Thurlow, les juges
Urie et Ryan—Ottawa, 20 juin 1980.
Pratique — Appel de l'ordonnance de la Division de pre-
mière instance autorisant l'intimée à examiner les locaux, les
méthodes, les machines et les dossiers de l'appelante afin de
lui permettre de se procurer des détails aux fins de l'action —
il s'agissait de déterminer si la preuve permettait de conclure
qu'une telle inspection était le seul moyen pour l'intimée
d'établir s'il y avait eu effectivement contrefaçon de ses bre-
vets, et si cette inspection était nécessaire en cet état de la
cause — Appel accueilli.
Distinction faite avec l'arrêt: Edler c. Victoria Press Mfg.
Co. (1910) 27 R.P.C. 114. Arrêt examiné: Dow Chemical
Co. c. Kayson Plastics and Chemicals Ltd. [1967] 1
R.C.E. 71.
APPEL.
AVOCATS:
J. Kokonis, c.r. et W. C. Kent pour
l'appelante.
G. A. Macklin et B. E. Morgan pour
l'intimée.
PROCUREURS:
Burke-Robertson, Chadwick & Ritchie,
Ottawa, pour l'appelante.
Gowling & Henderson, Ottawa, pour l'inti-
mée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement de la Cour prononcés à l'audience
par
LA COUR: Il s'agit de l'appel d'une ordonnance
de la Division de première instance':
(1) autorisant l'intimée, par l'entremise de ses
agents et de ses conseillers juridiques, à pénétrer
dans les locaux de l'appelante à Plattsville (Onta-
rio) afin d'examiner les méthodes et les machines
que celle-ci utilise dans la fabrication de jeux de
ressorts pour transmissions automatiques en cause
et à procéder aux essais et à prendre les photogra-
phies qui pourraient être raisonnablement néces-
' Page 639 supra.
saires pour se procurer, aux fins de l'action, les
détails relatifs auxdites machines et méthodes de
l'appelante, et
(2) autorisant l'intimée à examiner les dossiers
et documents que l'appelante a en sa possession,
sous sa garde ou son contrôle et qui ont trait aux
machines et méthodes utilisées par celle-ci dans la
fabrication de jeux de ressorts pour transmissions
automatiques en cause, dans la mesure où ces
dossiers et documents sont raisonnablement néces-
saires pour lui permettre de s'assurer, aux fins de
l'action, les détails relatifs auxdites machines et
méthodes de l'appelante.
La requête en ordonnance a été présentée dès le
dépôt de la déclaration. Elle était appuyée d'un
affidavit qui énonçait ce que le juge de première
instance a considéré comme une preuve prima
facie de la contrefaçon des trois brevets de l'appe-
lante. Les paragraphes 12 et 13 de l'affidavit
portent:
[TRADUCTION] 12. Les avocats de la demanderesse m'ont
demandé de fournir tous les détails relatifs aux méthodes et aux
machines utilisées par la défenderesse depuis 1974 son usine
de Plattsville (Ontario) dans la fabrication desdits jeux de
ressorts. Toutefois, ni mes associés ni moi-même n'avons pu le
faire faute de connaissance approfondie desdites machines et
méthodes utilisées par la défenderesse dans la fabrication des-
dits jeux de ressorts.
13. Notre avocat affirme, et j'en conviens, qu'une inspection de
l'usine de la défenderesse à Plattsville (Ontario), près de
Chatham, est indispensable pour permettre à la demanderesse
d'articuler adéquatement les détails relatifs à la contrefaçon de
brevets dans l'action qu'elle intente à la défenderesse, devant la
Cour.
Le savant juge de première instance a instruit
l'affaire avec soin avant d'accorder l'ordonnance
conformément à ses pouvoirs discrétionnaires,
mais, sauf le respect que nous lui devons, nous
estimons que la preuve à lui soumise ne permet pas
de conclure que, dans les circonstances rapportées,
l'inspection des locaux de l'appelante, de ses
méthodes et de ses machines soit le seul moyen
pour l'intimée d'établir s'il y a eu effectivement
contrefaçon. Cette preuve ne permet pas non plus
de conclure qu'une telle inspection, qui comporte
une véritable intrusion dans les locaux de l'appe-
lante et risque de lui causer un tort irréparable par
la révélation de ses secrets de fabrication à un
concurrent, soit nécessaire en cet état de la cause,
que ce soit aux fins des plaidoiries ou autres.
A notre avis, les décisions, telle Edler c. Victoria
Press Manufacturing Company 2 , qui ont été déci-
dées sous le régime des assignations en matière
civile et avant l'instauration de l'actuelle procédure
de communication des preuves, telle qu'elle s'appli-
que en cette Cour, ne conviennent guère pour la
solution d'un litige tel celui qui se pose en l'espèce.
De plus, il n'y a rien, à notre avis, dans la décision
du président de la Cour dans l'affaire Dow Chemi
cal Co. c. Kayson Plastics and Chemicals Ltd. 3
qui indique qu'en l'espèce, une ordonnance d'ins-
pection soit indiquée en cet état de la cause.
Il y a lieu d'ajouter que le deuxième paragraphe
de l'ordonnance, qui fait songer à un mandat de
perquisition, nous paraît une méthode inédite de
communication de documents. Voilà, à notre avis,
une méthode de communication de documents qui
n'est pas prévue aux Règles et qui ne saurait être
approuvée.
L'appel est accueilli, l'ordonnance annulée et la
requête de l'intimée rejetée avec dépens en pre-
mière instance et en appel.
z (1910) 27 R.P.C. 114.
3 [1967] 1 R.C.É. 71.
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