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A-512-79
Association for Public Broadcasting in British Columbia (Appelante)
c.
Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommu- nications canadiennes, Comox Reception Limited, Courtenay-Comox Television Limited, CableNet Limited, Comox Valley Cablevision Limited (Intimés)
Cour d'appel, les juges Urie et Ryan, le juge suppléant MacKay—Toronto, 2 juin; Ottawa, 16 juillet 1980.
Radiodiffusion Appel formé contre la décision du CRTC qui a rejeté la demande faite par l'appelante d'ajourner l'ins- truction de la demande de nouvelle licence et de transfert de l'actif entre C.-C.T.V. et CVC pour donner à l'appelante le temps de déposer la même demande L'appelante soutient que le Conseil a indûment limité l'exercice de ses pouvoirs discrétionnaires en refusant de lui donner la possibilité de déposer une demande concurrente Il échet d'examiner si l'art. 19 de la Loi sur la radiodiffusion fait au Conseil l'obligation d'entendre les demandes soumises par toutes les parties souhaitant d'obtenir une nouvelle licence Loi sur la radiodiffusion, S.R.C. 1970, c. B-11, art. 3, 15, 17(1), 19(1),(2),(3) et (7), 24(1).
Appel formé contre la décision du Conseil de la radiodiffu- sion et des télécommunications canadiennes qui a approuvé le transfert de l'actif de C.-C.T.V. à Comox Valley Cablevision Limited (CVC) ainsi que la demande faite par cette dernière d'une nouvelle licence, mais a rejeté la requête faite par l'appe- lante qui lui a demandé de surseoir à la décision, en attendant le dépôt et l'instruction d'une demande de licence qu'elle pré- senterait à une date ultérieure. L'appelante, admise à participer à titre d'intervenante à l'audition du Conseil, soutient que celui-ci a limité l'exercice de ses pouvoirs discrétionnaires en matière d'attribution ou de refus des licences, en refusant d'accorder à l'appelante la possibilité de présenter une demande concurrente. Il échet d'examiner si l'audition publique prévue à l'article 19 de la Loi sur la radiodiffusion s'entend également de l'audition des demandes soumises par toutes les parties souhaitant obtenir une licence pour la région en cause, et non seulement de la demande de l'acheteur éventuel de l'actif d'un titulaire existant.
Arrêt: l'appel est rejeté. Le Conseil n'a pour obligation, en matière de délivrance ou d'annulation de licence, que de tenir l'audition publique prévue à l'article 19 afin de s'assurer de l'observation de la politique de radiodiffusion énoncée par la Loi, politique qui consiste entre autres à assurer la continuité et la qualité du service. En l'espèce, le Conseil a donné avis public d'audition de la demande dont il était saisi, a accordé le statut d'intervenante à l'appelante, lui a reconnu le droit de présenter des observations sur cette demande et, dans sa décision, s'est prononcé tant sur cette demande que sur la requête prélimi- naire de l'appelante. Le Conseil n'a pas systématiquement observé de façon rigide ou servile sa politique qui consistait à ne
pas faire un appel de demandes concurrentes, à preuve qu'il a instruit la requête préliminaire de l'appelante, a sursis à se prononcer à cet égard et que si, en fin de compte, il l'a rejetée, c'était après l'avoir instruite au fond.
APPEL. AVOCATS:
A. Roman pour l'appelante.
Mlle A. Wylie et A. Cohen pour le Conseil de
la radiodiffusion et des télécommunications
canadiennes, intimé.
T. Heintzman pour les compagnies intimées.
PROCUREURS:
The Public Interest Advocacy Centre, Toronto, pour l'appelante.
Le chef du contentieux, Conseil de la radio- diffusion et des télécommunications cana- diennes, pour le CRTC, intimé.
McCarthy & McCarthy, Toronto, pour les compagnies intimées.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE URIE: Il s'agit en l'espèce d'un appel formé, avec l'autorisation de la Cour, contre la décision rendue le ler décembre 1978, sous le numéro 78-724 [4 R.T.C. 507], par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications cana- diennes (ci-après désigné «le Conseil»).
Voici en résumé les faits de la cause. Les inti- mées Comox Reception Limited et Courtenay- Comox Television Limited (ci-après désignées ales vendeurs») exploitaient, au moyen d'une société à participation égale sous la dénomination sociale de C.-C.T.V., une entreprise de réception de télévi- sion. La société qui avait quelque 300 abonnés à ses débuts en 1957, en comptait 7,159 en 1978. A l'époque en cause, les vendeurs étaient titulaires d'une licence décernée par le Conseil, aux termes de laquelle ils étaient autorisés à exploiter un système de télédistribution dans la région de Comox-Cumberland, en Colombie-Britannique, pendant la période allant du l ei avril 1978 au 31 mars 1981.
En été 1978, les vendeurs ont conclu avec l'inti- mée CableNet Limited, une filiale d'Agra Indus tries Limited, un accord aux termes duquel ils transféreraient leur actif à une compagnie à cons-
tituer, dont les actions seraient cédées par les vendeurs à CableNet Limited. Étant donné que selon l'usage établi par le Conseil, le titulaire d'une licence ne pouvait la transférer à une autre per- sonne, les parties sont convenues qu'un nommé Ronald Douglas Ellis (un actionnaire et dirigeant des vendeurs) ferait une demande au Conseil pour le compte de la compagnie à constituer, en vue de l'approbation de ce qui suit:
a) acquisition par la compagnie à constituer, à savoir Comox Valley Cablevision Limited (une intimée en l'espèce, ci-après désignée «CVC») de l'entreprise de télédistribution des vendeurs;
b) demande présentée par CVC en vue d'une licence de réception des signaux de télévision aux fins de l'entreprise de télédistribution, dès l'abandon de la licence détenue par les vendeurs; et
c) demande présentée par CVC conformément aux conditions qui figureraient sur sa licence, en vue de l'autorisation de transférer à CableNet Limited le contrôle effectif de CVC, au moyen du transfert, à la suite de sa constitution, de l'intégralité des actions émises et en circulation de cette dernière.
Tout au long de l'affaire, les démarches ci-des- sus ont été désignées sous le nom de demande Ellis. Le Zef septembre 1978, le Conseil a publié un avis d'audition publique, en vue de l'instruction de cette triple demande, prévue pour le 24 octobre 1978 à Vancouver.
Le 3 octobre 1978, l'appelante a envoyé au Conseil un message télex pour l'informer qu'elle tenait à avoir [TRADUCTION] «la possibilité de présenter une demande en vue de l'obtention de la licence» que [TRADUCTION] «l'actuel titulaire est en train d'abandonner», et pour lui demander d'ajourner de 12 mois l'audition publique afin qu'elle fût en mesure de formuler et de présenter une demande de licence. Par message télex en date du 6 octobre 1978, le Conseil a répondu à l'appe- lante qu'il ne pouvait se rendre à sa requête mais qu'il lui accordait le statut d'intervenante vis-à-vis de la demande Ellis.
Par lettre en date du 13 octobre 1978, l'avocat de l'appelante a demandé au Conseil de clarifier le sens de son message télex et de préciser notam- ment s'il refusait d'instruire la demande de l'appe- lante ou s'il ne refusait que l'ajournement. Ce à quoi l'avocat du Conseil a répondu, le 16 octobre 1978, que [TRADUCTION] «l'engagement d'ins- truire une demande concurrente de APBBC [l'ap- pelante], tel que vous l'avez demandé, échappe à la compétence du personnel du Conseil.» Il a suggéré à l'avocat de l'appelante de faire valoir ses doléan- ces par voie de requête préliminaire, lors de l'audi- tion prévue pour la demande Ellis à Vancouver.
A l'audience publique du 25 octobre 1978, l'avo- cat de l'appelante s'est désisté de la demande d'ajournement et a demandé au Conseil de pour- suivre l'instruction du dossier Ellis, mais de sur- seoir à sa décision en attendant le dépôt et l'ins- truction d'une demande que l'appelante présenterait à une date ultérieure. Le Conseil a pris cette requête en délibéré et a poursuivi l'ins- truction du dossier Ellis. L'avocat de l'appelante n'est plus intervenu dans les débats bien que, l'appelante s'étant vu accorder le statut d'interve- nante, il eût pu, conformément aux règles de pro- cédure du Conseil, faire des observations tendant à appuyer, à contester ou à modifier la demande dont s'agit.
Par décision CRTC 78-724 en date du ler décembre 1978, le Conseil a approuvé la demande Ellis et rejeté la requête de l'appelante. C'est cette décision qui est portée en appel devant la Cour.
Réduit à sa plus simple expression, le seul point litigieux de quelque importance que soulève cet appel porte sur le point de savoir si, en cas de demande de nouvelle licence présentée au Conseil, l'audition publique prévue à l'article 19 de la Loi sur la radiodiffusion, S.R.C. 1970, c. B-11, s'en- tend également de l'audition des demandes soumi- ses par toutes les parties souhaitant obtenir une licence pour la région en cause, et non seulement de la demande d'un acheteur éventuel de l'actif d'un titulaire existant. Selon l'appelante, le Conseil a indûment limité l'exercice de ses pouvoirs discré- tionnaires en matière d'attribution ou de refus des licences, en refusant d'accorder à l'appelante un
délai suffisant pour présenter sa demande de licence, ce qui ne laissait en lice que celle d'Ellis.
Pour se prononcer sur la validité des arguments de l'appelante, il échet d'examiner l'esprit de la Loi sur la radiodiffusion. L'article 3 de cette Loi énonce la politique de la radiodiffusion pour le Canada. Voici les dispositions applicables en l'espèce:
3. Il est, par les présentes, déclaré
a) que les entreprises de radiodiffusion au Canada font usage de fréquences qui sont du domaine public et que de telles entreprises constituent un système unique, ci-après appelé le système de la radiodiffusion canadienne, compre- nant des secteurs public et privé;
b) que le système de la radiodiffusion canadienne devrait être possédé et contrôlé effectivement par des Canadiens de façon à sauvegarder, enrichir et raffermir la structure cultu- relle, politique, sociale et économique du Canada;
c) que toutes les personnes autorisées à faire exploiter des entreprises de radiodiffusion sont responsables des émissions qu'elles diffusent, mais que le droit à la liberté d'expression et le droit des personnes de capter les émissions, sous la seule réserve des lois et règlements généralement applicables, est incontesté;
h) que, lorsqu'un conflit survient entre les objectifs du ser vice national de radiodiffusion et les intérêts du secteur privé du système de la radiodiffusion canadienne, il soit résolu dans l'intérêt public mais qu'une importance primordiale soit accordée aux objectifs du service national de radiodiffusion;
et que la meilleure façon d'atteindre les objectifs de la politique de la radiodiffusion pour le Canada énoncée au présent article consiste à confier la réglementation et la surveillance du sys- tème de la radiodiffusion canadienne à un seul organisme public autonome. [C'est moi qui souligne.]
Le seul organisme public autonome choisi pour la réalisation de ces objectifs est le Conseil. L'arti- cle 15 de la Loi prévoit notamment que
... le Conseil doit réglementer et surveiller tous les aspects du système de la radiodiffusion canadienne en vue de mettre en oeuvre la politique de radiodiffusion énoncée dans l'article 3 de la présente loi. [C'est moi qui souligne.]
L'article 16 énumère les pouvoirs confiés au Conseil. Le paragraphe (1) prévoit que dans la poursuite de ses objets, le Conseil peut, sur la recommandation du comité de direction, prescrire les classes de licences de radiodiffusion, établir des règlements applicables à toutes les personnes qui détiennent des licences d'une ou de plusieurs clas ses et annuler toute licence de radiodiffusion autre qu'une licence attribuée à la Société Radio- Canada.
Les passages qui suivent de l'article 17 sont particulièrement importants:
17. (1) Dans la poursuite des objets du Conseil, le comité de direction, après avoir consulté les membres à temps partiel qui assistent à une réunion du Conseil, peut
a) attribuer des licences de radiodiffusion pour les périodes d'au plus cinq ans et sous réserve des conditions propres à la situation du titulaire
(i) que le comité de direction estime appropriées pour la mise en oeuvre de la politique de radiodiffusion énoncée dans l'article 3, et
b) à la demande d'un titulaire de licence, modifier toutes conditions d'une licence de radiodiffusion à lui attribuée;
c) renouveler des licences de radiodiffusion pour les périodes d'au plus cinq ans que le comité de direction estime raisonna- bles et sous réserve des conditions auxquelles les licences renouvelées étaient antérieurement assujetties ou de toutes autres conditions conformes à l'alinéa a);
d) sous réserve de la présente Partie, suspendre toute licence de radiodiffusion autre qu'une licence de radiodiffusion attri- buée à la Société;
Les paragraphes 19(1), (2), (3) et (7) prévoient les auditions publiques et la procédure applicable en la matière, comme suit:
19. (1) Le Conseil doit tenir une audition publique
a) à propos de l'attribution d'une licence de radiodiffusion autre qu'une licence d'exploitation temporaire d'un réseau; ou
b) lorsque le Conseil ou le comité de direction sont saisis de l'examen de l'annulation ou de la suspension d'une licence de radiodiffusion.
(2) Le Conseil doit tenir une audition publique si le comité de direction est convaincu qu'il serait dans l'intérêt public de tenir une telle audition, au sujet
a) de la modification d'une licence de radiodiffusion;
b) de l'attribution d'une licence d'exploitation temporaire d'un réseau; ou
c) de la plainte d'une personne relativement à toute question relevant des pouvoirs du Conseil.
(3) Le Conseil doit tenir une audition publique au sujet du renouvellement d'une licence de radiodiffusion à moins qu'il ne soit convaincu qu'une telle audition n'est pas nécessaire et, nonobstant le paragraphe (2), le Conseil peut tenir une audition publique au sujet de toute autre question pour laquelle le Conseil estime qu'une telle audition est souhaitable.
(7) Le Conseil possède, quant à toute audition publique en vertu du présent article, en ce qui a trait à la comparution, la prestation de serment et l'interrogatoire des témoins à cette audition, la production et l'examen de documents, l'exécution de ses ordonnances, l'accès aux biens et leur inspection et à toute autre chose nécessaire ou opportune en ce qui concerne une telle audition, tous les pouvoirs, droits et privilèges qui sont reconnus à une cour supérieure d'archives.
L'article 24 est le seul qui requiert une exégèse aux fins de cet appel. Voici ce qu'il prévoit:
24. (1) Aucune licence de radiodiffusion ne doit être annulée ou suspendue en conformité de la présente Partie
a) si ce n'est à la demande ou du consentement de son détenteur; ou
b) dans tout autre cas, à moins que, après une audition publique, en conformité de l'article 19, le Conseil, s'il s'agit de l'annulation d'une licence, ou le comité de direction, s'il s'agit de la suspension d'une licence, ne soient convaincus
(i) que la personne à laquelle la licence de radiodiffusion avait été attribuée a enfreint ou omis d'observer une condition à laquelle sa licence est assujettie, ou
(ii) que la licence était, à toute époque comprise dans les deux ans précédant immédiatement la date de publication de l'avis de cette audition publique dans la Gazette du Canada, détenue par une personne à laquelle la licence n'aurait pas pu être attribuée à cette époque en vertu d'instructions données au Conseil par le gouverneur en conseil sous l'autorité de la présente loi.
Il ressort de ce qui précède que le Conseil a été investi de pouvoirs définis en termes très larges pour assurer «la réglementation et la surveillance du système de la radiodiffusion canadienne» qui comprend, il va sans dire, les systèmes de télédis- tribution, et en vue de mettre en œuvre la politique de radiodiffusion énoncée dans l'article 3 de la Loi. Ce pouvoir de réglementation comprend celui de prescrire des classes de licences ainsi que celui d'établir la procédure à suivre pour la délivrance, l'annulation, la suspension ou le renouvellement des licences.
Il y a lieu de noter que par le paragraphe 24(1) de la Loi, le législateur prévoit expressément qu'aucune licence ne doit être annulée ou suspen- due «si ce n'est à la demande ou du consentement de son détenteur ...u. Il est indéniable que la demande Ellis visait l'annulation de la licence en vigueur des vendeurs, à laquelle ceux-ci ne consen- tiraient que si le Conseil approuvait le transfert de leur actif à CableNet Limited. Il était prévu que la demande d'annulation de la licence serait retirée si ce transfert n'était pas approuvé. Tel était le sens de cette demande, et je ne saurais accueillir l'argu- ment de l'avocat de l'appelante voulant que cette demande constituait un abandon de licence, aban don qui ne saurait poser pour condition le retrait de la demande en cas de non-approbation du trans- fert envisagé de l'actif. A mon avis, celui qui, comme les vendeurs en l'espèce, demande l'annula- tion a le droit de demander au Conseil de considé- rer que le consentement du requérant a pour con-
dition préalable l'approbation par le Conseil du transfert de l'actif du requérant à une autre per- sonne. Le Conseil fait valoir qu'il admet des demandes conditionnelles de ce genre conformé- ment à sa politique qui consiste à ne pas priver de service de télédistribution une région qui fait déjà l'objet d'une licence en ce domaine. Cette privation pourrait avoir lieu si le Conseil devait accueillir tout d'abord une demande d'annulation pour refu- ser ensuite, pour une raison quelconque, d'approu- ver le transfert envisagé. Un élément de cette politique de radiodiffusion est le droit du public de recevoir des émissions. Ce droit a pour corollaire l'obligation du titulaire de licence d'assurer le service nécessaire à la réception de ces émissions, responsabilité dont ce titulaire ne saurait s'acquit- ter s'il pouvait abandonner sa licence sans qu'une autre soit prévue en remplacement.
L'appelante fait valoir encore qu'une nouvelle licence s'imposant du fait de la demande Ellis, quiconque voulait l'obtenir avait le droit d'en faire la demande au cours d'une audition publique. Par ailleurs, elle estime que le Conseil ne pouvait délivrer une nouvelle licence sans avoir publique- ment informé tous les intéressés qu'ils pouvaient en faire la demande ni avant d'avoir instruit toutes les demandes reçues à cet effet. Je ne saurais en convenir. A part le fait que l'appelante s'est con- tentée de faire part au Conseil de son désir de présenter une demande mais n'en a jamais pré- senté une, le Conseil n'a pour obligation, en matière de délivrance ou d'annulation de licence, que de tenir l'audition publique prévue à l'article 19 afin de s'assurer de l'observation de la politique de radiodiffusion énoncée par la Loi, politique qui consiste entre autres à assurer la continuité et la qualité du service.
En l'espèce, le Conseil a donné avis public d'au- dition de la demande Ellis, a accordé le statut d'intervenante à l'appelante, lui a reconnu le droit de présenter des observations à cet effet, a tenu l'audition publique au cours de laquelle il a entendu l'argument de l'appelante voulant que le Conseil devait surseoir à décider jusqu'à ce qu'il eût instruit la demande de l'appelante. Enfin, dans sa décision, le Conseil s'est prononcé tant sur la demande Ellis que sur la requête préliminaire de l'appelante. Voici, à ce dernier propos, la conclu sion du Conseil [aux pages 508 et 509]:
Lors de l'audience, l'avocat de l'intervenant, l'Association of Public Broadcasting in British Columbia (APBBC), a déposé une motion préliminaire demandant au Conseil de donner à l'APBBC le temps de préparer et de présenter une demande concurrentielle en vue d'obtenir cette licence, en alléguant que le Conseil n'a le pouvoir ni de limiter, ni de restreindre la catégorie de ceux qui peuvent présenter une demande en vue d'obtenir une nouvelle licence, à la partie qui a été proposée par le titulaire renonçant à sa licence. Le Conseil a entendu le plaidoyer sur la motion et a différé sa décision.
Dans sa décision CRTC 77-275 du 15 avril 1977, le Conseil refusait une motion semblable présentée par la Canadian Broadcasting League dans le cas d'une demande en vue d'obte- nir l'approbation pour le transfert du contrôle d'une compagnie titulaire. Le Conseil déclarait qu'en vertu des articles 17, 15 et 3 de la Loi sur la radiodiffusion, il avait le pouvoir à la fois de réglementer et d'approuver le transfert du contrôle effectif des sociétés titulaires. Pour soutenir ce point de vue, le Conseil s'est aussi appuyé sur la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans la cause John Graham & Co. Ltd. v. CRTC (1976) 68 D.L.R. (3d) 110 [[1976] 2 C.F. 82].
L'avocat de I'APBBC a soutenu que la présente demande se distinguait par le fait qu'elle porte sur un transfert d'actif et la rétrocession projetée d'une licence, alors que le cas antérieur portait sur un transfert de contrôle par l'acquisition d'actions dans la compagnie titulaire.
Le Conseil a décidé que la distinction mentionnée plus haut n'est pas pertinente à l'exercice de ses pouvoirs, dans le cas présent. La motion est donc refusée.
A mon avis, il est indéniable qu'à l'égard de la demande Ellis, le Conseil a fait exactement ce que la Loi lui fait obligation de faire.
Il est hors de doute qu'en cas de demandes semblables à la demande Ellis, le Conseil a eu pour politique de ne pas faire un appel de demandes concurrentes. Mais cette politique n'est pas systé- matiquement observée de façon rigide ou servile, à preuve qu'en l'espèce, le Conseil a instruit la requête préliminaire de l'appelante, a sursis à se prononcer à cet égard et que si, en fin de compte, il l'a rejetée, c'était après l'avoir instruite au fond ainsi qu'en témoignent les motifs de sa décision. Il appert donc que le Conseil n'a pas indûment limité l'exercice de ses pouvoirs discrétionnaires en ren- dant une décision par application rigide d'une politique immuable.
Voici ce qu'a écrit de Smith dans son ouvrage Judicial Review of Administrative Action', à
3e éd., pp. 275 et 276. Une autre analyse des principes applicables se trouve dans Canadian National Railways Com pany c. The Bell Telephone Company of Canada [1939] R.C.S. 308.
propos des règles de conduite établies de son propre chef par un tribunal administratif:
[TRADUCTION] Les principes fondamentaux ont été parfaite- ment énoncés par le lord juge Bankes à l'occasion du refus opposé par l'Administration du port de Londres à une demande de permis de construction de certains ouvrages, au motif qu'elle était elle-même chargée des travaux de ce genre:
Il est d'une part des cas dans l'exercice légitime de ses pouvoirs discrétionnaires, un tribunal administratif saisi d'une demande rentrant dans le cadre d'une politique qu'il avait adoptée, ne refuse pas d'instruire la demande mais informe le requérant de sa politique et, après l'avoir entendu conformément à cette politique, rend une décision contre le requérant, k moins que des circonstances exceptionnelles ne jouent en faveur de ce dernier ... si cette politique avait été motivée par des considérations légitimes, il ne saurait y avoir lieu à objection. D'autre part, il est des cas un tribunal pose pour règle ou décide de n'instruire aucune demande particulière, d'où qu'elle émane. Il y a une grosse différence entre les deux situations.
Il est indéniablement souhaitable qu'un tribunal administratif rende publics les principes généraux sur lesquels il entend se guider dans l'exercice de ses pouvoirs discrétionnaires.
A mon avis, le Conseil avait le droit de conclure que, dans les circonstances de la cause, il ne devait pas accéder à la requête de l'appelante pour déro- ger à sa politique établie en matière d'approbation ou de rejet de la vente de l'actif d'un titulaire de licence à un autre, et ce pour les motifs qu'il a prononcés. En rejetant la requête, il n'a pas violé la Loi. Il avait l'obligation de tenir une audition, ce qu'il a fait. Il lui appartenait de décider de la nature de cette audition, en sa qualité d'organisme public autonome chargé de la réglementation et de la surveillance du système de la radiodiffusion canadienne.
L'avocat de l'appelante a encore soumis d'autres arguments, sur lesquels je ne juge pas utile de me prononcer car, à mon avis, ils sont dénués de tout mérite.
Les faits de la cause n'établissant aucune erreur dans l'application des dispositions de la Loi ou des Règlements, je rejetterais l'appel.
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LE JUGE RYAN: Je souscris aux motifs ci-dessus.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT MACKAY: Je souscris aux motifs ci-dessus.
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