T-3387-81
Phillip Morris Incorporated (Requérante)
c.
Imperial Tobacco Limited (Intimée)
Division de première instance, le juge Mahoney—
Ottawa, 3 et 6 novembre 1981.
Marques de commerce — L'intimée introduit diverses
requêtes par lesquelles elle conclut à ce qui suit: communica
tion de pièces par la requérante, contre-interrogatoire sur les
affidavits déposés par celle-ci et émission d'une ordonnance
portant audition sur preuve commune de l'action en radiation
de la marque de commerce MARLBORO intentée par la requé-
rante, et de l'action en contrefaçon intentée par l'intimée contre
la requérante relativement à la même marque de commerce —
La requérante demande de son côté de surseoir à l'action en
contrefaçon en attendant qu'il soit statué sur l'action en radia
tion — La requérante vend aux États-Unis les cigarettes
Marlboro — L'intimée est la propriétaire de la marque de
commerce MARLBORO au Canada — Suspension de l'action en
contrefaçon — Rejet des requêtes en communication de pièces,
en contre-interrogatoire et en audition commune des deux
actions — Loi sur les marques de commerce, S.R.C. 1970, c.
T-10, art. 57 — Règles 448, 453, 465, 704, 705 de la Cour
fédérale.
REQUÊTES.
AVOCATS:
J. Osborne, c.r., et R. Perry pour la
requérante.
N. Fyfe pour l'intimée.
PROCUREURS:
Gowling & Henderson, Ottawa, pour la
requérante.
Smart & Biggar, Ottawa, pour l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
de l'ordonnance rendus par
LE JUGE MAHONEY: La Cour est saisie de
diverses requêtes par lesquelles l'intimée conclut à
ce qui suit: communication de pièces par la requé-
rante, contre-interrogatoire sur les affidavits dépo-
sés par celle-ci, et audition sur preuve commune de
l'action principale en l'espèce et de l'action en
contrefaçon de marque de commerce, intentée par
l'intimée contre la requérante sous le numéro du
greffe T-4425-81. La requérante demande de son
côté à la Cour de surseoir à l'action en contrefaçon
en attendant qu'il soit statué sur sa propre action
qui a été intentée le 26 juin 1981, l'action en
contrefaçon ayant été introduite le 14 septembre.
L'action principale, fondée sur l'article 57 de la
Loi sur les marques de commerce', tend à la
radiation de la marque de commerce MARLBORO,
enregistrée le l er septembre 1932, pour la vente du
tabac et de certains produits, dont les cigarettes.
Cette action est régie par la Règle 704 qui prévoit,
sauf ordonnance contraire de la Cour, une procé-
dure sommaire où les dépositions se font par affi
davit déposé et signifié dans les délais prévus et où
il n'y a ni communication de pièces ni contre-inter-
rogatoire sur les affidavits. Par ordonnance de la
Cour, les pièces à l'appui de l'affidavit de la
requérante, savoir le contenu de 17 coffrets ban-
caires, ont été déposées le 11 août. L'intimée, qui
n'a pas encore déposé une réponse, sollicite main-
tenant, en application des Règles 705 et 448, une
ordonnance obligeant la requérante à établir et à
déposer un affidavit relativement aux documents;
en application des Règles 705 et 453, une ordon-
nance autorisant la consultation de ces documents;
en application des Règles 705 et 465, une ordon-
nance d'interrogatoire préalable et, en application
de la Règle 704(7), une ordonnance autorisant le
contre-interrogatoire des auteurs de tous les affi
davits déposés en l'espèce par la requérante.
L'action en contrefaçon porte sur la même
marque de commerce. Le mémoire de défense n'a
pas encore été déposé. Il serait difficile, sinon
impossible, de statuer sur la requête en sursis de la
requérante séparément de la requête de l'intimée
en audition simultanée des deux actions sur preuve
commune.
Peut-être les faits que je vais invoquer dans ce
paragraphe ne sont-ils pas rapportés dans les
témoignages. Pour ceux qui ne le sont pas, je peux
et je dois, à cet état de la cause, les tenir pour faits
notoires. La requérante vend les cigarettes Marl-
boro en grandes quantités aux États-Unis. L'inti-
mée est la propriétaire de cette marque au
Canada. L'une d'entre elles s'est rendu compte de
l'impossibilité de la situation et a décidé d'y remé-
dier, mais les deux parties n'ont pas pu parvenir à
un règlement à l'amiable. La requérante a pris
l'intimée de vitesse en intentant cette action,
laquelle était, à ma connaissance, le seul moyen
par lequel elle pouvait saisir la Cour de l'affaire.
Les enjeux financiers peuvent être très élevés. Il
existe une certaine preuve quant à la quantité des
cigarettes Marlboro que la requérante a vendues
par le passé au Canada. Cette preuve sera certai-
' S.R.C. 1970, c. T-10.
nement contestée; je ne vais donc pas en tenir
compte dans un sens ou dans l'autre. Il est toute-
fois indéniable que la requérante entretient aux
États-Unis une vaste campagne de publicité pour
ces cigarettes, qui déborde sur le Canada. Rien
d'étonnant à ce que la requérante entende en
profiter.
Je suis persuadé que la requérante a davantage
intérêt à parvenir à une solution rapide de la
question de la validité de l'enregistrement de la
marque de commerce. Elle a été d'ailleurs la pre-
mière à engager les procédures à ce sujet. Il ne
s'agit pas là d'un facteur déterminant, mais ce n'en
est pas moins un facteur à prendre en considé-
ration. Si la priorité était déterminée par l'action,
je ne pense pas que la Cour permettrait au défen-
deur à une action en contrefaçon de faire échec au
demandeur en intentant la procédure qui nous
intéresse en l'espèce. Puisque le mémoire de
défense n'a pas été déposé dans cette action, tous
les points litigieux ne sont pas encore définis; il est
cependant indéniable que si cette procédure se
solde par la radiation du registre, l'action en con-
trefaçon doit succomber; dans le cas contraire, il se
peut encore qu'aux yeux de l'intimée, les redresse-
ments qu'elle pourrait obtenir en réparation des
actes passés de contrefaçon ne vaillent pas la
peine. La question de la validité de l'enregistre-
ment peut être tranchée de façon plus expéditive
dans cette procédure sommaire que dans l'action
en contrefaçon, et à moindres frais pour les parties
comme pour le contribuable. Il est tout aussi facile
de produire tous les éléments de preuve pertinents
dans cette procédure que dans l'action en contrefa-
çon. Je me propose donc de surseoir à l'action en
contrefaçon et de rejeter la requête en audition
simultanée, et ce dans l'intérêt de la justice.
Quant à la requête en communication de pièces
et en contre-interrogatoire, elle sera rejetée avec
dépens en raison de son caractère prématuré. Ni
l'une ni l'autre mesure n'est nécessaire pour per-
mettre à l'intimée de répondre à l'avis introductif
de requête. Bien entendu, l'intimée conserve son
droit de demander la communication de pièces ou
l'autorisation de contre-interroger, ou les deux à la
fois, au sujet de toute question légitime que susci-
tent les plaidoiries à leur clôture, ou qui se fait au
sujet de tel ou tel affidavit. Le délai de dépôt de la
réponse sera prorogé jusqu'au 20 novembre 1981.
La requérante a droit aux dépens de la procédure.
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