A-486-80
Le sous-ministre du Revenu national pour les
douanes et l'accise (Appelant)
c.
Kipp Kelly Limited (Intimée)
Cour d'appel, les juges Urie et Le Dain et le juge
suppléant Kerr—Ottawa, 1 er et 8 juin 1981.
Douanes et accise — Appel de la décision par laquelle la
Commission du tarif a jugé que les moteurs diesel importés
par l'intimée servaient à la fabrication de groupes électrogènes,
et qu'ils pouvaient donc être importés en franchise — L'in-
timée est un détaillant et distributeur de générateurs améri-
cains — L'intimée importait les principaux éléments, ajoutait
les assises, les commutateurs et les contrôles achetés au pays
et installait les ensembles complets — La Commission a
décidé que ces fonctions constituaient de la fabrication au sens
du numéro tarifaire — Il échet d'examiner si l'intimée ne fait
qu'assembler des groupes électrogènes — Appel rejeté — Tarif
des douanes, S.R.C. 1970, c. C-41, liste A, numéro 42865-1,
modifié.
Appel formé contre une déclaration de la Commission du
tarif portant que les moteurs diesel importés par l'intimée
servaient à la fabrication de groupes électrogènes, et qu'ils
pouvaient donc être importés en franchise. L'intimée a importé
les principaux éléments, a ajouté les assises, les commutateurs
et les contrôles achetés au pays, et a installé les ensembles
complets dans les locaux des acheteurs. La Commission a
décidé que ces fonctions constituaient de la fabrication. L'appe-
lant soutient que l'intimée ne faisait qu'assembler des groupes
électrogènes. Il échet d'examiner si la Commission a commis
une erreur en décidant que les opérations de l'intimée consti-
tuaient de la fabrication.
Arrêt: l'appel est rejeté. Quoique la Commission doive déci-
der si les marchandises en cause sont des groupes électrogènes,
elle doit également décider si les moteurs diesel doivent servir à
la fabrication de groupes électrogènes, peu importe leur nature.
Bien que la Commission n'ait pas cité le passage mis en
italiques et que, par conséquent, elle ait, dans cette mesure,
incorrectement expliqué ce qu'elle devait déterminer d'après la
preuve, il ressort clairement de la totalité des motifs que la
Commission était pleinement consciente de ce qu'elle avait à
faire. En outre, la Commission avait manifestement raison dans
son appréciation de l'effet de la modification du libellé du
numéro tarifaire. La modification n'a eu aucune incidence sur
la signification de «fabrication». Elle a simplement élargi l'éven-
tail des groupes électrogènes auquel le numéro tarifaire s'appli-
querait. La question que la Commission doit trancher relative-
ment à la question de savoir si l'utilisation de moteurs entre
dans la fabrication de groupes électrogènes est une question
mixte de droit et de fait. Pour ce qui concerne la question de
droit, la Commission a manifestement pris en considération
deux jugements de la Cour suprême du Canada qui lui avaient
été cités. Donc, elle s'est bien renseignée quant au droit. Pour
ce qui concerne la conclusion sur les faits que l'on trouve dans
la décision de la Commission, la présente Cour n'a pas la
compétence voulue pour la modifier, s'il y avait devant elle des
éléments de preuve sur lesquels elle pouvait raisonnablement
fonder sa conclusion. La Commission pouvait, d'après les faits
soumis en preuve, conclure que les opérations exécutées par
l'intimée étaient de la fabrication de groupes électrogènes et
non seulement l'assemblage de ces appareils à partir de parties.
Cela étant, la présente Cour ne devrait pas modifier cette
conclusion.
Arrêts mentionnés: Le sous-ministre du Revenu national
pour les douanes et l'accise c. Research -Cottrell (Canada)
Ltd. [1968] R.C.S. 684; Canadian Lift Truck Co. Ltd. c.
Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et
l'accise (1956)1 D.L.R. (2e) 497; R. c. York Marble, Tile
and Terrazzo Ltd. [1968] R.C.S. 140. Arrêt appliqué: The
Dentists' Supply Co. of New York c. Le sous-ministre du
Revenu national (Douanes et Accise) [1956-1960] R.C.É.
450.
APPEL.
AVOCATS:
W. I. C. Binnie, c.r., pour l'appelant.
M. E. Corlett, c.r., pour l'intimée.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour
l'appelant.
Maclaren, Corlett, Tanner & Greenwood,
Ottawa, pour l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE URIE: Il s'agit d'un appel formé contre
une déclaration de la Commission du tarif à l'issue
de l'appel n° 1479 portant que trois moteurs diesel
Allis-Chalmers importés par l'intimée devaient
être classés sous le numéro tarifaire 42865-1, tel
que modifié le 22 décembre 1977 par le décret
C.P. 1977-3599 [DORS/78-19], au motif que l'in-
timée a utilisé les moteurs importés pour fabriquer
des groupes électrogènes.
La Commission du tarif avait décidé, le 20
juillet 1977, dans sa déclaration à l'issue de l'appel
n° 1182 que des moteurs diesel semblables ser-
vaient à la fabrication de groupes électrogènes et
qu'ils devaient donc être classés sous le numéro
tarifaire 42865-1 en vigueur à l'époque et qu'ils
pouvaient donc être importés au Canada en fran
chise. Avant la modification du 22 décembre 1977,
le numéro tarifaire 42865-1 se lisait comme suit:
Moteurs diesel et semi-diesel;
Moteurs diesel à deux combustibles;
Moteurs au gaz de pétrole liquéfié;
Moteurs à combustion interne fonctionnant à l'essence, à
quatre temps, développant au moins quatre chevaux-vapeur
mais pas plus de quarante;
Moteurs alternatifs fonctionnant au gaz naturel;
D'une classe ou d'une espèce non faite au Canada et devant
servir à la fabrication de groupes électrogènes consistant essen-
tiellement en un moteur à combustion interne et en un ou
plusieurs générateurs montés sur une assise commune [c'est
moi qui souligne].
Dans le décret C.P. 1977-3599, les mots souli-
gnés ont été retranchés et le numéro tarifaire est
maintenant libellé comme suit:
Moteurs diesel et semi-diesel;
Moteurs diesel à deux combustibles;
Moteurs au gaz de pétrole liquéfié;
Moteurs à combustion interne fonctionnant à l'essence;
Moteurs alternatifs fonctionnant au gaz naturel;
D'une classe ou espèce non faite au Canada; leurs pièces; tout
ce qui précède devant servir à la fabrication de groupes
électrogènes pouvant être classifiés dans le numéro tarifaire
42701-1 [c'est moi qui souligne].
L'appelant prétend que les moteurs diesel en
cause ne sont pas employés par l'intimée dans la
fabrication de groupes électrogènes et que, par
conséquent, ils ne sont pas exempts de droits aux
termes du numéro tarifaire 42865-1. Il prétend
que l'intimée est plutôt un distributeur de groupes
électrogènes qu'elle ne fabrique pas mais qu'elle ne
fait qu'assembler dans son usine à Winnipeg. Par
conséquent, selon lui, le numéro tarifaire applica
ble à l'importation de moteurs diesel est le numéro
tarifaire 42815-1 aux termes duquel des droits de
15% sont applicables et dont le libellé se lit comme
suit:
Moteurs diesel et semi-diesel, et leurs pièces achevées, n.d.
Avant d'examiner l'appel au fond, il convient de
statuer sur la prétention de l'avocat de l'intimée
selon laquelle la question est, pour les parties,
chose jugée. Dans l'appel n° 1182, la Commission
du tarif a conclu que l'intimée fabriquait des grou-
pes électrogènes. Dans l'appel n° 1479, le litige
était entre les mêmes parties, l'intimée exerçait les
mêmes fonctions de production et, de l'avis de
l'avocat, le même numéro tarifaire était applicable
parce que tant dans la version originale que dans la
version modifiée du numéro tarifaire 42865-1, il
était nécessaire de déterminer si les moteurs diesel
étaient importés pour «servir à la fabrication de
groupes électrogènes.»
Indépendamment du fait qu'il existe un doute
réel quant à l'application, en droit administratif',
du principe de la chose jugée aux ordonnances ou
aux décisions d'organismes même quasi judiciaires,
la doctrine n'est pas applicable en l'espèce. La
chose jugée, pour ce qui a trait à l'une de ses
multiples facettes, peut être invoquée en défense
lorsqu'un jugement a été prononcé entre les parties
et que des conclusions sur les faits ont servi de
fondement à ce jugement. Aucune des parties tou
chées par ce jugement ne peut ensuite contester ces
faits, en tant que faits, dans aucun litige ultérieur
entre elles. Si j'ai bien compris, c'est là l'aspect
invoqué par l'avocat de l'intimée pour soulever
l'exception de la chose jugée. Toutefois, bien qu'il
ne fasse aucun doute que, dans l'appel n° 1182, la
Commission a conclu que les moteurs diesel en
cause devaient servir à la fabrication de groupes
électrogènes, elle est arrivée à cette conclusion, tel
qu'il ressort des motifs de cette décision, à la
lumière du numéro tarifaire en vigueur à l'époque.
Sa conclusion portait donc sur une question mixte
de droit et de fait. Ce qu'on a demandé à la
Commission de trancher dans l'appel n° 1479 est
essentiellement de savoir si la modification du
libellé du numéro tarifaire avait une influence sur
cette conclusion mixte de droit et de fait. La
question n'était donc pas, d'après moi, chose jugée
entre les parties.
J'aborde maintenant le fond de l'appel interjeté
par l'appelant. Voici un bref résumé des faits
pertinents, qui ne sont pas contestés. Depuis long-
temps, l'intimée est, pour le Manitoba, le détail-
lant et le distributeur pour ONAN, un fabricant
américain de groupes électrogènes. ONAN fabri-
que le générateur, le moteur et le panneau de
contrôle. Elle exporte annuellement 2,000 groupes
électrogènes à l'intimée. Un groupe électrogène est
composé d'un générateur (souvent appelé alterna-
teur) actionné par un moteur installé sur une assise
et muni d'un dispositif de contrôle. Selon l'exposé
des faits et du droit de l'appelant, un distributeur,
détaillant et installateur de groupes électrogènes
remplit les fonctions suivantes, dont la description
n'est pas contestée par l'intimée:
[TRADUCTION] a) déballe les groupes électrogènes et attache
les dispositifs de contrôle et le panneau de contrôle qui ne
peuvent être expédiés après avoir été fixés au groupe
électrogène;
' Voir: de Smith, Judicial Review of Administrative Action,
4e éd., aux pp. 107 et 108.
b) vérifie le groupe électrogène sur banc d'essai pour s'assu-
rer qu'il fonctionne conformément à ses spécifications;
c) ajuste et répare le groupe électrogène importé selon les
besoins. Les employés de l'intimée sont formés en milieu de
travail par ONAN à son principal établissement aux
États-Unis;
d) installe le groupe électrogène, selon les directives du client,
sur un support, sur un plancher ou sur une remorque;
e) si le groupe électrogène doit être installé dans un édifice,
(i) il met le groupe électrogène en communication avec le
réseau principal;
(ii) fixe le commutateur converteur au mur ou à l'assise du
groupe électrogène (le commutateur converteur met le
groupe électrogène en marche lorsqu'il y a panne d'électri-
cité); et
(iii) installe le système de refroidissement et un collecteur
d'échappement au groupe électrogène conformément aux
directives du client.
ONAN ne fabrique pas des moteurs capables de
faire fonctionner les plus gros générateurs qu'elle
fabrique et doit donc acheter des moteurs suffi-
samment puissants pour faire fonctionner ces
générateurs à des fabricants de moteurs comme
Allis-Chalmers Ltd. Parfois, l'intimée achète les
moteurs, avec les générateurs, à ONAN. A d'au-
tres occasions, comme dans le cas des trois unités
en cause, elle achète les moteurs directement à
Allis-Chalmers Ltd. Dans tous les cas, les pan-
neaux de contrôle ont été importés avec le généra-
teur. Les commutateurs converteurs, les dispositifs
de contrôle et les commutateurs d'arrêt sont ache-
tés à un fournisseur de Winnipeg et, dans certains
cas du moins, sont conçus par l'intimée. Les opéra-
tions additionnelles suivantes, entre autres, sont
exécutées par l'intimée dans son usine de Winni-
peg et constitueraient de la fabrication:
a) relier le générateur et le moteur et, lorsque
c'est nécessaire, installer le panneau de contrôle
et les commutateurs converteurs, les dispositifs
de contrôle et les commutateurs d'arrêt;
b) fabriquer l'assise constituée de profilés
d'acier en U avec une plate-forme à laquelle le
groupe électrogène est soudé;
c) fabriquer le support de la batterie;
d) peindre l'appareil produit;
e) vérifier l'appareil produit sur banc d'essai;
f) installer le groupe électrogène dans l'édifice
du client avec système de refroidissement et
collecteur d'échappement conformément aux
directives du client.
Le nombre d'heures de travail effectuées par l'inti-
mée pour accomplir ces opérations pour les trois
groupes électrogènes varie entre 58.15 heures et
75.85 heures.
D'après ces faits, la Commission est arrivée à la
conclusion suivante:
La Commission souligne qu'une des conditions pour qu'un
moteur diesel importé soit classé dans le numéro tarifaire
42865-1 est qu'il doit servir à fabriquer un groupe électrogène.
Anciennement, ce numéro tarifaire définissait un groupe élec-
trogène comme un ensemble constitué de trois éléments: un
moteur à combustion interne, un ou plusieurs générateurs et
une assise commune. Aux termes du numéro tarifaire modifié,
ces exigences ont été retirées et la nature d'un groupe électro-
gène doit être déterminée à l'aide de preuves.
Tel que dans l'appel 1182, la preuve a démontré que l'appe-
lante a importé les principaux éléments, a ajouté les assises, les
contrôles et les commutateurs achetés au pays, et a installé les
ensembles complets, dans les locaux des acheteurs. On ne
conteste pas le fait que les produits finis étaient des groupes
électrogènes au sens de cette expression pour les fournisseurs et
les usagers.
La Commission estime que ces fonctions ne constituent pas
moins de la fabrication que dans l'appel no 1182. Aucune
disposition du Tarif des douanes ne stipule qu'un fabricant de
groupes électrogènes doit aussi être un fabricant de généra-
teurs. La disposition relative à l'usage du numéro tarifaire
42865-1 stipule seulement que le moteur diesel importé doit
servir à fabriquer un groupe électrogène.
L'appelant a attaqué la décision de la Commis
sion au motif qu'elle a commis une erreur en
concluant que les opérations mentionnées ci-dessus_
constituaient de la fabrication. Il prétend que les
opérations de l'intimée constituent plutôt un
assemblage de parties, seule la fabrication de l'as-
sise et du support de la batterie étant des opéra-
tions de fabrication. L'avocat prétend en outre que
bien que l'appel n° 1182 portait sur le même genre
de moteurs diesel, la décision a été rendue en se
fondant sur le numéro tarifaire 42865-1 en vigueur
en 1977. D'après lui, les mots supprimés de ce
numéro tarifaire par la modification précitée adop-
tée en décembre 1977 la suite de la décision
rendue par la Commission en juillet a eu pour effet
de restreindre la signification du mot «fabrication»
employé dans ce numéro tarifaire. La suppression
des mots comportant restriction a donc redonné au
mot «fabrication» son sens ordinaire. Dans la déci-
sion dont appel, la Commission a donc commis une
erreur en concluant que l'appelante était encore un
fabricant de groupes électrogènes.
Il ne fait aucun doute que l'expression «nature
d'un groupe électrogène» dans la dernière phrase
du premier paragraphe cité ci-dessus ne décrit pas
pleinement la fonction que la Commission est
tenue d'exercer. S'il est vrai qu'elle doit décider si
les marchandises en cause sont des groupes élec-
trogènes, elle doit également décider si les moteurs
diesel doivent servir à la fabrication de groupes
électrogènes, peu importe leur nature. Bien que la
Commission n'ait pas cité le passage mis en itali-
ques et que, par conséquent, elle ait, dans cette
mesure, incorrectement expliqué ce qu'elle devait
déterminer d'après la preuve, d'après la totalité des
motifs, y compris les passages cités, il est clair 'que
la Commission était pleinement consciente de ce
qu'elle avait à faire. J'estime en outre que si on
accepte cette prémisse, la Commission avait mani-
festement raison dans son appréciation de l'effet de
la modification du libellé du numéro tarifaire
42865-1. La modification n'a eu aucune incidence
sur la signification de «fabrication». Elle a simple-
ment élargi l'éventail des groupes électrogènes
auquel le numéro tarifaire s'appliquerait, n'étant
plus limité par exemple à des groupes électrogènes
montés sur une assise commune.
Quant à savoir si les moteurs diesel servaient à
la fabrication de groupes électrogènes plutôt qu'à
l'assemblage de ceux-ci à partir de parties, la Cour
suprême du Canada a décidé que l'assemblage de
parties peut dans certains cas constituer de la
fabrication, mais pas nécessairement 2 .
Comme je l'ai déjà mentionné, la question que la
Commission doit trancher relativement à la ques
tion de savoir si l'utilisation de moteurs entre dans
la fabrication de groupes électrogènes est une
question mixte de droit et de fait. Le juge Kellock
a exposé le problème dans les termes suivants dans
Canadian Lift Truck Co. Ltd. c. Le sous-ministre
du Revenu national pour les douanes et l'accise 3 :
[TRADUCTION] La question de droit susmentionnée soulève
au moins deux questions, savoir, si la Commission du tarif a
tenu compte des principes juridiques applicables à l'interpréta-
tion des textes législatifs et si, par ailleurs, compte tenu desdits
principes, la preuve était de nature à lui permettre d'arriver à
une telle conclusion.
2 Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et
l'accise c. Research -Cottrell (Canada) Limited [1968] R.C.S.
684, le juge Martland à la p. 693.
3 (1956) 1 D.L.R. (2e) 497à la p. 498.
Alors que l'interprétation d'un texte législatif est une ques
tion de droit et que la question de savoir si une chose précise est
d'une nature telle qu'elle se situe dans le cadre législatif ainsi
défini est une question de fait, néanmoins, s'il apparaît à la
Cour d'appel que le tribunal, juge des faits, a statué sans preuve
ou que personne au fait du droit et exerçant des fonctions
judiciaires n'aurait pu arriver à une telle décision, la Cour peut
statuer en présumant que ladite décision est imputable à une
conception erronée du droit .... [C'est moi qui souligne.]
Pour ce qui concerne la question de droit, la
Commission a examiné, tel qu'il ressort de ses
motifs, les jugements de la Cour suprême du
Canada dans les affaires Research -Cottrell préci-
tée et dans La Reine c. York Marble, Tile and
Terrazzo Limited 4 . Dans cette dernière décision,
la Cour a adopté, aux fins de ce pourvoi, la
définition suivante de «fabrication» [à la page
145]: [TRADUCTION] «... la production d'articles
utilisables à partir de matériau brut ou préparé
auquel on donne, à la main ou à la machine, de
nouvelles formes, qualités et propriétés ou combi-
naisons d'icelles.» Elle les a manifestement pris en
considération pour arriver à sa conclusion relative-
ment aux opérations de l'appelante en l'espèce et
avait plus particulièrement à l'esprit l'affaire York
Marble parce qu'elle a mentionné l'argument de
l'appelant en l'espèce (l'intimé devant la Commis
sion) selon lequel Kipp Kelly Limited n'avait
donné aucune nouvelle forme ou qualité. Il me
semble donc qu'elle s'est bien renseignée quant au
droit.
Pour ce qui concerne la conclusion sur les faits
que l'on retrouve dans la décision de la Commis
sion, le rôle de la Cour d'appel à cet égard est
énoncé de la façon suivante par le président Thor-
son dans The Dentists' Supply Company of New
York c. Le sous-ministre du Revenu national
(Douanes et Accise) 5 :
[TRADUCTION] Si la décision de la Commission du tarif était
une conclusion de fait et qu'il y avait devant elle des éléments
de preuve sur lesquels elle pouvait raisonnablement fonder sa
conclusion, la présente Cour n'a pas la compétence voulue pour
la modifier, peu importe quelle aurait été sa conclusion si la Loi
sur les douanes avait prévu que la décision était susceptible
d'appel de pleno. Il n'existe aucun droit d'appel contre une
décision de la Commission du tarif sur des conclusions de fait et
il me semble qu'il en va de même pour les conclusions mixtes de
droit et de fait. Le seul droit d'appel prévu par l'article 45 de la
Loi sur les douanes est un appel contre une question qui, de
l'avis de la présente Cour ou d'un de ses juges, est une question
4 [1968] R.C.S. 140.
5 [1956-1960] R.C.É. 450à la p. 455.
de droit et, même alors, il faut obtenir la permission d'en
appeler. Donc, dans la mesure où la déclaration de la Commis
sion du tarif en l'espèce était une conclusion de fait, la présente
Cour n'a pas le droit de la modifier à moins qu'elle n'ait été
déraisonnable au point de constituer une erreur de droit. Mais
on n'insistera jamais trop sur le fait que cela ne signifie pas
qu'il y avait une erreur dans la conclusion de fait uniquement
parce que la Cour aurait pu arriver à une conclusion différente
si un plein droit d'appel avait été prévu. Par conséquent, la
présente Cour n'a pas le droit de substituer sa propre conclu
sion à celle de la Commission du tarif s'il existait devant
celle-ci des éléments de preuve à partir desquels elle pouvait
raisonnablement conclure comme elle l'a fait. -
Si on applique ce critère aux faits de l'espèce, on
doit conclure que la Commission pouvait, d'après
les faits soumis en preuve, tels que décrits de façon
générale ci-dessus, conclure, comme elle l'a fait,
que les opérations exécutées par l'intimée étaient
de la fabrication de groupes électrogènes et non
seulement l'assemblage de ces appareils à partir de
parties. Cela étant, la présente Cour ne devrait pas
modifier cette conclusion.
Puisque la Commission n'a pas commis d'erreur
de droit dans sa déclaration, je rejetterais l'appel
avec dépens.
* *
LE JUGE LE DAIN: Je souscris à ces motifs.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT KERR: Je souscris à ces
motifs.
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