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T-5483-81
Le ministre des Transports du Québec, le procu- reur général du Québec, la ville de Mont-Laurier, le Conseil régional de développement des Lauren- tides, la corporation municipale du village de Parent, la corporation municipale de la ville de Senneterre, l'Association touristique régionale des Laurentides (Demandeurs)
c.
Le procureur général du Canada, le ministre des Transports du Canada, Via Rail Canada Inc., Canadien Pacifique Limitée, les Chemins de fer nationaux du Canada (Défendeurs)
Division de première instance, le juge Walsh— Montréal, 23 novembre; Ottawa, 18 décembre 1981.
Pratique Requêtes en radiation des plaidoiries Les demandeurs demandent que la Cour déclare invalide et nul un décret supprimant certains services de trains de voyageurs, qu'elle prononce une injonction ordonnant aux défendeurs de ne pas donner suite au décret et de continuer l'exploitation des services existants Les demandeurs prétendent qu'en confor- mité de l'obligation d'agir équitablement en matière adminis trative, le gouverneur général en conseil devait, avant de rendre ce décret, entendre toutes les parties intéressées Les deman- deurs prétendent aussi que le décret ne peut prévaloir sur un contrat en vertu duquel le Canadien Pacifique Limitée s'enga- geait â fournir des services de trains de voyageurs et de trains de marchandises I1 échet d'examiner si les déclarations devraient être radiées parce qu'elles ne révèlent aucune cause raisonnable d'action Déclarations radiées Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, c. N-17, art. 45, 47, 48, 64(1) Loi sur les chemins de fer, S.R.C. 1970, c. R-2, art. 3(1), 6(1)c), 7, 260(2),(8) Règle 419 de la Cour fédérale Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, art. 23.
Les demandeurs demandent que soit déclaré nul et invalide un décret supprimant certains services de trains de voyageurs et que soit prononcée une injonction ordonnant aux défendeurs de ne pas donner suite à ce décret. Ils demandent aussi que la Cour rende une injonction enjoignant aux défendeurs de conti- nuer l'exploitation des services de trains de voyageurs existants et des dommages-intérêts. Les demandeurs prétendent que le décret est une ordonnance administrative et qu'il s'ensuit qu'a- vant de prendre ce décret, le gouverneur général en conseil devait, en application de l'obligation d'agir équitablement, entendre les parties qui s'opposaient au décret proposé. Les demandeurs prétendent aussi que le décret ne peut l'emporter sur un contrat conclu en 1881 et en vertu duquel la compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique s'engageait à maintenir un nombre suffisant de trains chaque jour pour transporter marchandises et voyageurs à la fréquence et à la vitesse néces- saires «entretenant au moins un train de voyageurs par jour dans chaque direction». Il échet d'examiner si les déclarations devraient être radiées parce qu'elles ne révèlent aucune cause raisonnable d'action.
Arrêt: les déclarations seront radiées. L'article 64(1) de la Loi nationale sur les transports prévoit que le gouverneur général en conseil peut, à la requête de toute personne ou de son propre mouvement, soit modifier, soit rescinder toute ordonnance. Les termes de l'article 64(1) établissent clairement le droit du gouverneur général d'agir de son propre mouvement relativement à l'abolition ou à la réduction de la fréquence de services de trains de voyageurs sur les lignes en question sans recommandation antérieure à cet effet de la part de la Commis sion. Même si le décret peut être considéré comme de nature administrative, cela ne donnerait pas à la Cour le droit de conclure que l'obligation générale d'agir équitablement impo- sait au gouverneur général en conseil l'obligation d'entendre les arguments des parties intéressées avant de prendre le présent décret, ni qu'en agissant comme il l'a fait, le gouverneur général en conseil n'a pas respecté une condition préalable à l'exercice de ce pouvoir. Les déclarations ne révèlent aucune cause raisonnable d'action d'après les attaques, sur le plan de la compétence, contre la validité du décret en cause. En ce qui concerne la deuxième question, la loi fédérale doit l'emporter. Le Canadien Pacifique Limitée est une compagnie de chemin de fer constituée sous le régime d'une loi spéciale, selon la définition de la Loi sur les chemins de fer. L'article 3(1) de la Loi sur les chemins de fer prévoit que cette dernière Loi doit s'interpréter comme étant incorporée à la loi spéciale. L'article 6(1)c) prévoit que la Loi s'applique à tout chemin de fer, que le droit de propriété soit acquis ou exercé en vertu de l'autorité du Parlement du Canada, ou de la législature de toute province. L'article 7 prévoit que lorsqu'un chemin de fer dont la cons truction ou l'exploitation est autorisée par une loi spéciale d'une province est déclaré constituer un ouvrage à l'avantage général du Canada, la Loi sur les chemins de fer s'applique à ce chemin de fer, à l'exclusion des dispositions de ladite loi spéciale qui sont incompatibles avec la Loi sur les chemins de fer. Les articles 45, 47 et 48 de la Loi nationale sur les transports autorisent la Commission à faire enquête sur toute plainte portée par une partie intéressée alléguant qu'une compagnie de chemin de fer a violé ou rompu un contrat. Il est clair que nonobstant la loi du Québec, le pouvoir de surveillance et de contrôle appartient à la Commission et au gouverneur général en conseil et que Canadien Pacifique Limitée doit se conformer au décret attaqué.
Arrêt suivi: City of Melville c. Le procureur général du Canada [1982] 2 C.F. 3. Arrêt analysé: Le procureur général du Canada c. Inuit Tapirisat of Canada [1980] 2 R.C.S. 735. Arrêt appliqué: Quebec Railway, Light & Power Co. c. Montcalm Land Co. [1927] R.C.S. 545. Arrêts mentionnés: Quebec North Shore Paper Co. c. Canadien Pacifique Ltée [1977] 2 R.C.S. 1054; R. c. Thomas Fuller Construction Co. (1958) Ltd. [1980] 1 R.C.S. 695.
REQUÊTES. AVOCATS:
William J. Atkinson et Jean-Yves Bernard pour les demandeurs.
Jacques Ouellet, c.r., et James Mabbutt pour les défendeurs le procureur général du Canada et le ministre des Transports du Canada.
Michel Huart pour la défenderesse Via Rail Canada Inc.
Christian Wendlandt pour la défenderesse Canadien Pacifique Limitée.
Raynald Lecavalier pour la défenderesse les Chemins de fer nationaux du Canada. Armand Poupart, c.r., et Charles Ouellet pour la ville de Lachute.
PROCUREURS:
Boissonneault, Roy & Poulin, Montréal, pour les demandeurs.
Le sous-procureur général du Canada pour les défendeurs le procureur général du Canada et le ministre des Transports du Canada.
Michel Huart, Montréal, pour la défenderesse Via Rail Canada Inc.
Godbois, Wendlandt, Bennett & Bryer, Mont- réal, pour la défenderesse Canadien Pacifique Limitée.
Giard, Gagnon, Montréal, pour la défende- resse les Chemins de fer nationaux du Canada.
Poupart, Thomas, Montréal, pour la ville de Lachute.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: Les demandeurs ont introduit la présente procédure le 10 novembre 1981 en déposant une déclaration dans laquelle ils deman- daient que le décret C.P. 1981-2171 [DORS/81- 892] pris le 6 août 1981 par le gouverneur général en conseil en vertu de l'article 64(1) de la Loi nationale sur les transports' sur avis conforme du ministre des Transports soit déclaré invalide et nul; que soit prononcée une injonction ordonnant à Via Rail, au C.N., au C.P. et au ministre des Trans ports du Canada de ne pas donner suite à ce décret et leur interdisant de supprimer ou de modifier les services de trains de voyageurs mentionnés dans la déclaration; et que soit prononcée une injonction ordonnant à Via Rail, au C.N. et au C.P. de continuer l'exploitation des services de trains de voyageurs existants, conformément aux ordonnan- ces de la Commission canadienne des transports en vigueur au 14 novembre 1981; et des dommages- intérêts.
' S.R.C. 1970, c. N-17.
A cela fut jointe, le même jour, une demande d'injonction interlocutoire, à présenter le 16 novembre 1981, sollicitant le maintien des services de trains énumérés dans la demande et qui, aux termes du décret en cause, devaient cesser ou diminuer de fréquence à compter du 15 novembre 1981. Les services de trains en question sont les suivants:
a) Montréal—Hervey Junction; Hervey Junc- tion—Senneterre; Senneterre (La Sarre)—Coch- rane, services exploités conformément à l'ordon- nance R-31300 rendue par la Commission canadienne des transports le 14 août 1980 qui reprenait les ordonnances n°' R-28795 et R-28149.
b) Sainte-Foy—Hervey Junction, conformément aux ordonnances nos R-28149 et R-28795.
c) Montréal—Labelle—Mont-Laurier, conformé- ment aux ordonnances R-29129 et R-29407.
d) Montréal—Lachute—Montebello—Ottawa, con- formément à l'ordonnance R-25782.
e) Sainte-Foy—Chambord, conformément aux ordonnances R-25988 et R-28150.
f) Montréal—Hervey Junction—Rivière-à-Pier- re—Chambord--Chicoutimi, conformément aux ordonnances R-31300 et R-25988.
Subséquemment, le 13 novembre 1981, dans une action intentée sous le numéro T-5526-81 par la ville de Lachute contre les mêmes défendeurs et portant plus spécifiquement sur le service Mont- réal—Lachute—Montebello—Ottawa, on a de mandé un jugement déclaratoire tendant à faire déclarer nul, invalide et illégal ledit décret C.P. 1981-2171 et une injonction ordonnant aux défen- deurs de rétablir l'ordonnance de la Commission canadienne des transports R-25782 en fournissant un service de trains de voyageurs sur ladite ligne tel qu'il était exploité le 14 novembre 1981. Cette procédure était également à présenter le 16 novem- bre. Du consentement de toutes les parties, les auditions des requêtes furent reportées au 23 novembre 1981 étant donné qu'une affaire sembla- ble était en instance devant le juge Collier de la présente Cour à Regina (Saskatchewan) sous le numéro du greffe T-5238-81, City of Melville, Town of Watrous, Transport 2000 Saskatchewan et le procureur général de la Saskatchewan,
demandeurs, et le procureur général du Canada, le ministre des Transports du Canada, Via Rail Canada Inc., Canadien Pacifique Limitée et les Chemins de fer nationaux du Canada, défendeurs, et qu'il était souhaitable d'attendre sa décision dans cette affaire. Son jugement fut rendu et ses motifs prononcés le 11 novembre 1981, l'issue d'une requête en radiation des plaidoiries présentée sous le régime de la Règle 419(1)a) de la Cour fédérale, la requête étant accueillie [précité, page 3].
D'autres requêtes en radiation semblables ont été présentées en l'espèce par le procureur général du Canada et le ministre des Transports du Canada, par Canadien Pacifique Limitée, par Via Rail Canada Inc., et des requêtes en radiation ont également été présentées par le procureur général du Canada et le ministre des Transports du Canada ainsi que par Canadien Pacifique Limitée dans l'affaire Ville de Lachute.
A l'ouverture des auditions le 23 novembre, permission fut donnée à la défenderesse les Che- mins de fer nationaux du Canada de présenter des requêtes semblables. Une demande a également été faite par la corporation municipale de la ville de Senneterre et par l'Association touristique régionale des Laurentides, représentées par les mêmes avocats que les demandeurs, pour obtenir la permission d'être jointes en tant que codeman- deresses et de participer à la demande d'injonction. Pour que le dossier soit complet, cette demande est accueillie, mais sans dépens, et l'intitulé de la cause sera donc modifié en conséquence.
A la conclusion des auditions, permission a éga- lement été donnée de produire, en faveur des demandeurs, d'autres affidavits de diverses parties à l'appui de la demande d'injonction, en écartant le délai de production. Les parties étant d'accord, les deux actions ont été jointes pour être entendues en même temps.
Le principe du respect des décisions judiciaires constituerait en soi un argument persuasif pour suivre le jugement du juge Collier dans l'affaire instruite en Saskatchewan étant donné que, même s'il est permis aux juges d'un même niveau de ne pas être d'accord sur une même question, ce désac- cord n'est pas souhaitable puisque cela ne fait que créer de la confusion et de l'incertitude, situation
qui déteint de façon défavorable sur l'administra- tion de la justice. Toutefois, la question ne se pose pas en l'espèce étant donné que j'ai lu les motifs du jugement de mon collègue le juge Collier et que je suis entièrement d'accord avec ses conclusions sur les faits et le droit dans cette affaire. Le seul motif qui pourrait justifier une conclusion différente dans les présentes actions serait que les faits soient suffisamment différents pour permettre d'établir une distinction avec son jugement, ou que se posent de nouvelles questions de droit sur lesquel- les il n'a pas statué et qui pourraient mener à un résultat différent. Les arguments ont donc été limités à ceci.
On pourrait également dire qu'il n'est pas néces- saire d'examiner la preuve appuyée par les affida vits des demandeurs que les voyageurs actuels et éventuels et les entreprises et commerces de ces régions subissent un préjudice grave du fait de l'annulation ou de la diminution des services de trains de voyageurs en question, ou que les deman- deurs peuvent avoir des difficultés à trouver d'au- tres moyens de transport à bref délai, en supposant que cela soit possible. Plusieurs décrets pris à tous les paliers de gouvernement, des règlements et des ordonnances de diverses commissions, des règle- ments municipaux et même des lois causent néces- sairement des préjudices à certaines personnes ou groupes de personnes alors qu'ils sont un bienfait pour d'autres et ce n'est pas pour cette seule raison qu'ils peuvent être déclarés injustes. Les autorités qui prennent ces mesures doivent peser les avanta- ges et les inconvénients avant de prendre ces déci- sions et prendre en considération les facteurs sociaux, économiques et politiques. Les tribunaux, eux, ne doivent pas se mêler de ces considérations et ne doivent pas faire prévaloir leur opinion sur celles de ces organes de décision ni exprimer d'avis quant à savoir si les décisions elles-mêmes sont justes ou non, pourvu qu'elles soient prises confor- mément aux lois et aux procédures applicables. C'est en s'en tenant au strict point de vue légal que le juge Collier a rendu sa décision, avec laquelle je suis d'accord, étant donné que les arguments qui m'ont été soumis ne m'ont pas convaincu que je dois arriver à une conclusion différente.
Pour ce qui concerne les demandes d'injonctions interlocutoires, je peux dire tout de suite qu'elles doivent être rejetées étant donné que les mesures
qu'elles cherchaient à empêcher, c'est-à-dire l'an- nulation de certains services et l'exploitation d'au- tres services à des intervalles moins fréquents, avaient déjà été prises lorsque les demandes ont été entendues et qu'une injonction ne peut être pro- noncée pour empêcher quelque chose qui a déjà été fait. Cela ne signifie pas que les injonctions demandées par les demandeurs dans leur déclara- tion en l'espèce et par la ville de Lachute dans son action tendant à obtenir un jugement déclaratoire ne constituaient pas toujours des questions dont la Cour devait connaître à l'audition le 23 novembre 1981. En outre, la demande d'injonction interlocu- toire des demandeurs sera rejetée sans qu'ils soient condamnés aux dépens étant donné que le retard ne leur est pas imputable. La demande a été présentée le 10 novembre mais il n'a pas été possible de l'entendre avant le 16 novembre, ni cela était-il désirable compte tenu des procédures en instance sur la même question devant le juge Collier en Saskatchewan. Et puisque le 16 novem- bre il était déjà trop tard pour empêcher le décret attaqué de prendre effet, la remise au 23 novembre n'a causé aucun préjudice. Soit dit en passant, l'avocat représentant le procureur général du Canada a soumis dans l'affaire entendue en Sas- katchewan un exposé des points de droit et de fait dans lequel il prétend qu'aucun acte ou geste actuel ou futur du procureur général du Canada ou du ministre des Transports du Canada ne peut faire l'objet d'une injonction, le procureur général étant poursuivi à titre de représentant de la Cou- ronne et le ministre des Transports étant un membre du Conseil privé sur l'avis duquel le gou- verneur général en conseil a pris le décret C.P. 1981-2171 et n'ayant plus aucun rôle à jouer dans la suppression des services de chemins de fer dont on se plaint, et que de toute façon, le pouvoir de rendre des ordonnances relativement à l'exploita- tion de chemins de fer, contrairement aux déclara- tions de droits, a été attribué par le Parlement à la Commission canadienne des transports et n'appar- tient pas aux tribunaux (Partie IV de la Loi nationale sur les transports et article 23 de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2 e Supp.), c. 10). Il n'est pas nécessaire toutefois d'examiner les autres arguments de fond soulevés dans ledit exposé quant à savoir pourquoi ni une injonction interlocutoire ni une ordonnance de faire ne peu- vent être décernées contre les défendeurs, le procu- reur général du Canada ou le ministre des Trans-
ports du Canada, ni de statuer sur le bien-fondé de tels arguments ou des arguments que j'ai mention- nés, compte tenu de la conclusion à laquelle je suis arrivé que de toute façon, les déclarations doivent être radiées contre tous les demandeurs.
J'aborde maintenant la question principale, soit de savoir si les déclarations devraient être radiées en application de la Règle 419 parce qu'elles ne révèlent aucune cause raisonnable d'action. A cet égard, les demandeurs ont invoqué deux argu ments. Le premier est de nature générale et porte que, dans l'affaire instruite en Saskatchewan, le juge Collier, en appliquant l'arrêt de la Cour suprême Le procureur général du Canada c. Inuit Tapirisat of Canada 2 , a omis de faire la distinc tion qu'il s'agissait dans cet arrêt d'une ordon- nance de nature législative alors que l'ordonnance en cause est de nature administrative. Il est vrai que dans l'arrêt Inuit, qui portait sur le prétendu déni de justice naturelle commis par le gouverneur général en conseil dans le cadre d'un appel formé contre une ordonnance du Conseil de la radiodiffu- sion et des télécommunications canadiennes fixant les tarifs de téléphone de Bell Canada en prenant un décret après avoir reçu la réponse de Bell Canada mais avant d'avoir reçu la réplique de l'appelante à la réponse de Bell Canada, il est dit à la page 754:
C'est un acte législatif sous la forme la plus pure qui a pour objet de fixer les tarifs d'un service public tel un réseau téléphonique.
Ce passage suit cependant la remarque que l'arti- cle 64(1) de la Loi nationale sur les transports «autorise en outre le gouverneur en conseil à modi fier ou rescinder `de son propre mouvement' une règle ou ordonnance du Conseil». Il est dit plus loin à la même page:
Bell Canada a de nombreux abonnés qui sont et seront tous certainement touchés jusqu'à un certain point par le tarif de taxes et de frais autorisé par le Conseil et révisé par le gouverneur en conseil. On pourrait soutenir que tous les abon- nés devraient être avisés avant que le gouverneur en conseil n'aille de l'avant avec sa révision. On pourrait soutenir que cette interprétation est justifiée par les derniers mots du par. (1) qui disposent:
... tout décret que le gouverneur en conseil prend à cet égard lie la Commission et toutes les parties.
A mon avis, ces mots veulent simplement dire ceci: si la question soumise au gouverneur en conseil en vertu de l'art. 64
2 [1980] 2 R.C.S. 735.
est d'une nature telle qu'elle concerne des parties qui ont participé aux procédures devant le tribunal administratif dont la décision est soumise au gouverneur en conseil par une requête, toutes ces personnes, de même que le tribunal ou l'organisme lui-même, seront tenues de donner effet au décret du gouverneur en conseil sur révision de la requête.
Et plus loin, aux pages 754 et 755, on trouve le passage suivant:
On a fait remarquer qu'il est arrivé que le gouverneur en conseil procède par audition orale à laquelle le requérant et les parties intéressées ont participé. (C.P. 2166 en date du 2 4 / 1 0/23 et C.P. 1170 en date du 17/06/27). Ce ne sont que des cas qui illustrent la modification de notre processus politique et, d'ailleurs, la croissance de la société canadienne. L'Exécutif national était apparemment en mesure à cette époque de mener ses affaires en vertu de la Loi sur les chemins de fer, précitée, par réunions ou auditions au cours desquelles les parties comparaissaient devant le Cabinet siégeant au com- plet ou en partie. La population du pays n'était qu'une fraction de ce qu'elle est aujourd'hui. L'étendue des activités gouverne- mentales de l'époque n'a aucune commune mesure avec celle d'aujourd'hui. Il ne fait aucun doute que le gouverneur en conseil pourrait encore tenir des auditions orales s'il le désirait. Même si un tribunal avait le pouvoir et l'autorité de l'ordonner (et je conclus que ce n'est pas le cas), ce serait un principe judiciaire très peu sage et peu commode qui transformerait une pratique ancienne en des procédures administratives rigides et inflexibles. Même dans les cas précités, bien que le décret mentionne avoir été pris sur la recommandation du ministre responsable, rien n'indique que les parties ont été informées de cette recommandation avant la tenue de l'audience. [C'est moi qui souligne.]
Le juge Estey, qui a prononcé les motifs du juge- ment, dit plus loin aux pages 755 et 756:
Je suis d'avis que le pouvoir de surveillance de l'art. 64, comme celui en cause dans l'arrêt Davisville, précité, est conféré aux membres du Cabinet pour leur permettre de répondre aux préoccupations politiques, économiques et sociales du moment. En vertu de l'art. 64, le Cabinet exerce, à titre d'Exécutif du gouvernement, le pouvoir que lui a délégué le législateur de fixer les tarifs appropriés pour le service téléphonique de Bell. Cependant, à moins que la loi habilitante n'en dispose autre- ment, le Cabinet doit être libre de consulter toutes les sources auxquelles le législateur lui-même aurait pu faire appel s'il s'était réservé cette fonction. C'est manifestement le cas lorsque le conseil agit de son propre mouvement comme cette disposi tion l'autorise à le faire et le lui impose. Rien au par. (1) n'indique qu'il faille adopter une interprétation différente lors- qu'une partie exerce son droit de demander au gouverneur en conseil par requête qu'il exerce cette fonction ou ce pouvoir qui lui est délégué. Cette interprétation ressort clairement des termes employés par le législateur. Le gouverneur en conseil peut agir «à toute époque». Il peut modifier ou rescinder toute ordonnance, décision, règle ou règlement «à sa discrétion». Les règles auxquelles le législateur a astreint le CRTC ne sont pas répétées ni expressément ni implicitement à l'art. 64. Cette fonction s'applique aux ordonnances générales, quasi législati- ves du Conseil, de même qu'aux décisions inter partes. Bref, le gouverneur en conseil a entière discrétion dans la mesure il respecte les limites fixées à sa compétence par le par. 64(1).
Et on trouve la remarque suivante également à la page 756:
Certains peuvent considérer inhabituel et même inefficace que, dans une société organisée, le gouverneur en conseil puisse infirmer la décision soigneusement pesée d'un organisme admi- nistratif, rendue au terme d'une audition publique complète au cours de laquelle on a fait valoir plusieurs points de vue. D'autre part, le législateur est apparemment d'avis qu'il s'agit d'un domaine particulièrement vulnérable aux changements des politiques d'intérêt public et il l'a par conséquent réservé à l'Exécutif qui doit en dernier ressort les appliquer. Vu l'inter- prétation du par. 64(1) que j'adopte, le gouverneur en conseil n'a pas à motiver sa décision, à tenir quelque audience que ce soit ni même à accuser réception d'une requête. Il n'appartient pas à cette Cour, cependant, de décider si les appels interjetés au Cabinet sont souhaitables ou non. Je n'ai qu'à décider si les exigences du par. 64(1) ont été respectées.
Le juge Estey poursuit en disant à la page 758 que la solution ne réside pas dans la recherche cons- tante de mots qui établiront clairement et dans tous les cas une distinction entre ce qui est judi- ciaire et administratif d'une part, et administratif et législatif de l'autre. Il conclut enfin que lorsque le législatif a attribué une de ses fonctions à un ou deux paliers la Commission canadienne des transports en premier lieu et au gouverneur en conseil en second lieu)
... la Cour doit revenir à son rôle fondamental de surveillance de la compétence et, ce faisant, interpréter la Loi pour établir si le gouverneur en conseil a rempli ses fonctions dans les limites du pouvoir et du mandat que lui a confiés le législateur.
Les termes précis qu'emploie le législateur à l'art. 64 ne justifient pas à mon sens l'introduction, par implication, des exigences de procédure propres aux organismes administratifs dans d'autres domaines que vise le principe énoncé dans l'arrêt Nicholson, précité. Les racines de cet arrêt n'atteignent pas le domaine juridique en cause dans l'étude du par. 64(1).
Ledit article 64(1) est ainsi rédigé:
64. (1) Le gouverneur en conseil peut à toute époque, à sa discrétion, soit à la requête d'une partie, personne ou compa- gnie intéressée, soit de son propre mouvement et sans aucune requête ni demande à cet égard, modifier ou rescinder toute ordonnance, décision, règle ou règlement de la Commission, que cette ordonnance ou décision ait été rendue inter partes ou autrement, et que ce règlement ait une portée et une applica tion générales ou restreintes; et tout décret que le gouverneur en conseil prend à cet égard lie la Commission et toutes les parties.
et, comme on l'a fait remarquer, ces dispositions sont d'une portée extrêmement vaste.
S'il existe une différence importante entre les faits de la présente espèce et ceux de l'arrêt Inuit en ce sens que ce dernier arrêt portait sur une requête qui avait été présentée au gouverneur général en conseil en vue de faire annuler une décision de la Commission fixant des tarifs de téléphone alors qu'en l'espèce, le gouverneur géné- ral en conseil a agi de son propre mouvement relativement à l'abolition ou à la réduction de la fréquence de services de trains de voyageurs sur les lignes en question sans recommandation antérieure à cet effet de la part de la Commission, les termes de l'article 64(1) établissent clairement ce droit. L'omission de renvoyer la question à la Commis sion pour qu'elle l'examine et qu'elle entende les observations des parties intéressées, quoique plutôt inhabituelle, était une décision que le gouverneur général en conseil avait le droit de prendre. Il se peut que les longs délais et la controverse politique qui résulteraient d'un tel renvoi alors que les che- mins de fer en question continueraient de perdre des sommes importantes en continuant d'exploiter ces services aient été des facteurs qui ont contribué à la décision de procéder ainsi. Qui plus est, le résultat final aurait presque certainement été le même. Si la Commission canadienne des trans ports avait refusé, après de telles audiences, de recommander l'abolition ou la réduction des servi ces en question, cette décision aurait pu être annu- lée par le gouverneur général en conseil de son propre mouvement en application de l'article 64, alors que dans le cas contraire, si la Commission avait recommandé que ces services soient abolis ou réduits, cette décision n'aurait pas été modifiée sur appel par une partie intéressée. (Mais il ne s'agit que de pures spéculations et quel qu'ait pu être le motif, il n'appartient pas à la Cour de le commenter.)
L'arrêt Inuit examine l'obligation d'agir équi- tablement telle qu'elle est énoncée dans l'arrêt Nicholson (Nicholson c. Haldimand-Norfolk Regional Board of Commissioners of Police)' et Martineau c. Le Comité de discipline de l'Institu- tion de Matsqui (N° 2) 4 et dit ensuite à la page 750:
' [1979] 1 R.C.S. 311. 4 [1980] 1 R.C.S. 602.
... l'existence de cette obligation ne soit plus tributaire de la classification du pouvoir en question comme «administratif» ou «quasi judiciaire», il demeure nécessaire d'examiner attentive- ment la disposition de la Loi pour décider si elle assujettit le décideur à des règles d'équité en matière de procédure.
A vrai dire, je ne vois pas la distinction que l'avocat des demandeurs tente d'établir entre une ordonnance fixant un tarif, qu'il reconnaît être une ordonnance législative, et ordonnance annulant ou réduisant un service de trains, qu'il prétend de nature administrative, mais de toute façon il sem- blerait que même si le décret attaqué pouvait être considéré comme de nature administrative, cela ne donnerait pas à la Cour le droit de conclure que l'obligation générale d'agir équitablement (qui peut s'appliquer même à un décret—voir l'arrêt Inuit, à la page 748, il est dit:
Il faut dire tout de suite que la simple attribution par la loi d'un pouvoir au gouverneur en conseil ne signifie pas que son exercice échappe à toute révision. Si ce corps constitué n'a pas respecté une condition préalable à l'exercice de ce pouvoir, la cour peut déclarer ce prétendu exercice nul.)
obligeait le gouverneur général en conseil, avant de prendre le présent décret, d'entendre les arguments des parties intéressées contre le décret proposé ni qu'en agissant comme il l'a fait, le gouverneur général en conseil n'a pas respecté une condition préalable à l'exercice de ce pouvoir.
Dans l'affaire entendue en Saskatchewan, on a invoqué devant le juge Collier l'argument que les diverses ordonnances antérieures de la Commission canadienne des transports qui ont été modifiées et, de fait, annulées par le décret C.P. 1981-2171 du 6 août 1981, que l'on voulait faire annuler, étaient périmées, ayant été rendues longtemps auparavant, de telle sorte que la Commission devrait exiger d'autres audiences avant que le gouverneur général en conseil ne les modifie. Le juge Collier rejeta ces arguments en disant que l'ordonnance R-26520 du C.C.T. adoptait et donnait effet à ce qu'on appelle le Plan définitif et modifiait par la même occasion divers horaires de trains de voyageurs et prévoyait que Via pourrait exploiter ses services sur les voies du C.P. et du C.N., et l'ordonnance R-30914 a plus tard modifié ces dispositions, mais l'ordonnance R-31300 constituait d'après lui le rassemblement dans une seule ordonnance de tous les services de trains de voyageurs qui existaient au moment de l'ordonnance. Il a rejeté l'argument
selon lequel cette ordonnance n'avait pas été rendue à la suite d'une demande présentée par les compagnies de chemins de fer en conformité avec l'article 260(2) de la Loi sur les chemins de fers, faisant remarquer que l'article 48 de la Loi natio- nale sur les transports donnait à la Commission canadienne des transports des pouvoirs suffisam- ment vastes pour qu'elle puisse rendre cette ordon- nance de son propre mouvement.
Il a également rejeté l'argument selon lequel les ordonnances n°s R-22125 et R-22346 rendues en janvier et février 1976 étaient expirées parce que l'article 260(8) de la Loi sur les chemins de fer exige que la Commission canadienne des trans ports revoie à intervalles n'excédant pas cinq ans des demandes de suppression lorsqu'elle rend une ordonnance décrétant qu'un service de trains de voyageurs non rentable ne soit pas supprimé. Il déclare ne rien voir dans la loi qui prévoie que des ordonnances ne puissent être modifiées par la C.C.T. ou par le cabinet après cinq ans et que ceci est d'autant plus vrai pour le gouverneur général en conseil, qui peut modifier ou annuler de telles ordonnances «à toute époque».
Bien que les ordonnances initiales de la Com mission canadienne des transports relativement aux services de trains dont il est question en l'es- pèce portent des numéros différents de ceux qu'a examinés le juge Collier dans l'affaire entendue en Saskatchewan, l'ordonnance R-31300 ainsi que le Plan définitif sont mentionnés dans le décret C.P. 1981-2171.
Je conclus donc que je ne peux rendre un juge- ment différent du sien sur la base des arguments invoqués devant moi et que les déclarations ne révèlent aucune cause raisonnable d'action d'après les attaques, sur le plan de la compétence, contre la validité du décret en cause. Par conséquent, sur la base de ces moyens, il ne peut être fait droit à ces actions.
Les demandeurs ont soulevé dans le cadre de la présente requête une deuxième question qui, du fait de sa nature, n'a pas été soulevée devant le juge Collier en Saskatchewan. Elle ne se rapporte qu'à une seule des lignes de chemin de fer en question, le service Ottawa—Montebello—Lachu- te—Montréal. Non seulement la question est-elle soulevée dans l'action des demandeurs mais encore
5 S.R.C. 1970, c. R-2.
elle constitue la seule question soulevée dans l'ac- tion intentée par la ville de Lachute. Aux termes d'un contrat conclu le 4 mars 1881 entre la Cou- ronne du chef de la province de Québec et la compagnie du chemin de fer canadien du Pacifi- que, cette dernière acquérait de la province de Québec une partie de la ligne de chemin de fer appelée le chemin de fer de Québec, Montréal, Ottawa et Occidental exploitant un service entre Montréal et Aylmer (Québec), avec un embran- chement se rendant à la ville d'Ottawa et un embranchement se rendant à la ville de Saint- Jérôme (Québec), ainsi que du matériel roulant. Il n'est pas nécessaire d'examiner les nombreuses dispositions du contrat mais, aux termes de la clause 16, la compagnie de chemin de fer s'enga- geait à maintenir un nombre suffisant de trains chaque jour pour transporter marchandises et voyageurs à la fréquence et à la vitesse nécessaires «entretenant au moins un train de voyageurs par jour dans chaque direction». Il fut spécifié que le contrat serait sujet à confirmation par la législa- ture du Québec, ce qui fut fait par la Loi de 45 Vict., c. 19.
La question qui se pose en l'espèce n'est pas de savoir si le contrat lie toujours la défenderesse Canadien Pacifique Limitée ou si elle pourrait faire l'objet d'une demande en dommages-intérêts pour violation de ce contrat, mais plutôt si, en droit, le décret C.P. 1981-2171 peut l'emporter sur ce contrat ratifié par une loi du Québec et avoir pour effet de l'annuler. Il n'est pas contesté que la défenderesse Canadien Pacifique Limitée est une compagnie de chemin de fer constituée sous le régime d'une loi spéciale au sens de l'article 2 de la Loi sur les chemins de fer modifiée. L'article 3(1) de la Loi sur les chemins de fer est ainsi rédigé:
3. (1) Sauf dispositions contraires de la présente loi,
a) cette dernière doit s'interpréter comme étant incorporée à la loi spéciale, et
b) lorsque les dispositions de la présente loi et celles de quelque loi spéciale du Parlement du Canada se rapportent aux mêmes matières, les dispositions de la loi spéciale doivent être considérées comme l'emportant sur les dispositions de la présente loi, dans la mesure nécessaire pour donner effet à cette loi spéciale.
Il ne fait aucun doute que les dispositions de la Loi sur les chemins de fer s'appliquent à ladite défen- deresse. L'article 6(1)c) de cette Loi est ainsi rédigé:
6. (1) Sans restreindre l'effet de l'article 5, les dispositions de la présente loi s'étendent et s'appliquent:
c) à tout chemin de fer, ou partie de chemin de fer, construit ou non en vertu de l'autorité du Parlement du Canada, actuellement ou dans la suite possédé, contrôlé, loué ou exploité par une compagnie relevant entièrement ou en partie de l'autorité législative du Parlement du Canada, ou par une compagnie exploitant un chemin de fer relevant entièrement ou en partie de l'autorité législative du Parlement du Canada, que ce droit de propriété, de contrôle ou d'exploita- tion en premier lieu mentionné soit acquis ou exercé par achat, bail, contrat ou autre moyen quelconque, et soit acquis ou exercé en vertu de l'autorité du Parlement du Canada, ou de la législature de toute province, ou de toute autre manière; et tout chemin de fer, ou partie de chemin de fer, actuelle- ment ou dorénavant ainsi possédé, contrôlé, loué ou exploité, est réputé et est par la présente loi déclaré un ouvrage à l'avantage général du Canada. [C'est moi qui souligne.]
L'article 7 est ainsi conçu:
7. Lorsque le Parlement du Canada déclare, par une loi, qu'un chemin de fer, dont la construction ou l'exploitation est autorisée par une loi spéciale de la législature d'une province, constitue un ouvrage à l'avantage général du Canada, la pré- sente loi doit s'appliquer à ce chemin de fer et à la compagnie qui le construit ou qui l'exploite, à l'exclusion des dispositions de ladite loi spéciale qui sont incompatibles avec la présente loi, et aux lieu et place de toute loi générale de la province concernant les chemins de fer.
Il est clair que la loi fédérale doit l'emporter.
On a cité l'arrêt de la Cour suprême Quebec Railway, Light & Power Company c. Montcalm Land Company 6 dont le résumé se lit en partie comme suit:
[TRADUCTION] Une compagnie de tramway exerçant ses opé- rations à l'intérieur d'une province, constituée à l'origine par une législature provinciale mais dont l'entreprise a subsé- quemment été déclarée par une loi du Dominion être à l'avantage général du Canada, n'est pas soumise à la compé- tence d'une commission des services publics créée par la province, mais l'exercice de ses pouvoirs est, en vertu des dispositions de la Loi des chemins de fer, soumis à la compétence de la Commission des chemins de fer du Canada.
La Loi des chemins de fer du Canada s'applique en l'espèce nonobstant un contrat conclu entre la compagnie de chemin de fer appelante et la ville de Québec prévoyant le règlement des différends qui pourraient survenir entre eux par voie d'appel à la Commission des services publics de Québec; une telle clause ne peut être interprétée de façon à conférer à la Commission le pouvoir de réglementer et de régir des ouvrages et des entrepri- ses qui relèvent des pouvoirs exclusifs du Parlement du Dominion.
Bien qu'elle ne porte pas directement sur cette question, il est intéressant de noter la décision sur
6 [1927] R.C.S. 545.
le référendum 500-02-022805-803 rendue le 16 mai 1980 par le juge en chef Alan B. Gold, le juge en chef associé Georges Chassé et le juge en chef adjoint Gaston Rondeau dans l'affaire Boucher c. Mediacom il était question des dépenses faites par le gouvernement fédéral dans le cadre dudit référendum. Il est dit à la page 4 du jugement:
Nulle loi n'a d'effet sur les droits de la Couronne, à moins qu'ils n'y soient expressément compris (art. 42, Loi d'interprétation, I-16, L.Q. 1978) ou encore à moins de l'avoir accepté, ce qui n'est pas le cas ici, en sorte que même le gouvernement du Québec n'est pas lié par la Loi sur la consultation populaire, L.Q. 1978, C. 6.
A fortiori, le Gouvernement du Canada n'est pas lié par la législation du Québec à moins de l'avoir acceptée, ce qui pour lui aussi n'est pas le cas.
Partant de ce principe, les dépenses encourues par le Gouverne- ment du Canada, même si elles favorisent ou défavorisent «directement ou indirectement, une option soumise à la consul tation populaire» (art. 27 du c. 6) ne peuvent être des dépenses réglementées.
Or, il est admis que toutes les dépenses concernées ont été défrayées par le Gouvernement du Canada.
En concluant ainsi, nous ne déclarons pas les dispositions de la section 3 du chapitre 6 ultra vires mais nous affirmons seule- ment qu'elles sont inopérantes vis-à-vis le Gouvernement du Canada.
Les articles 45, 47 et 48 de la Loi nationale sur les transports autorisent la Commission à faire enquête sur toute plainte portée par une partie intéressée alléguant qu'une compagnie de chemin de fer a violé ou rompu un contrat et la Commis sion peut même de son propre mouvement prendre l'initiative d'une telle enquête. Je ne me prononce pas sur la question de savoir si cela est toujours possible compte tenu des dispositions du décret. Il est clair que nonobstant la loi du Québec, le pouvoir de surveillance et de contrôle appartient à la Commission et au gouverneur général en conseil et que la défenderesse Canadien Pacifique Limitée doit se conformer au décret C.P. 1981-2171.
Une question subsidiaire a été soulevée quant à savoir si la présente Cour a compétence pour connaître de telles questions ou si, puisque le litige découle d'un contrat, il ne s'agirait pas d'une affaire relevant de la Cour supérieure de la pro vince de Québec si la procédure était intentée par la ville de Lachute ou par le procureur général ou le ministre des Transports du Québec. On a cité les arrêts Quebec North Shore Paper Company c. Canadien Pacifique Limitée [1977] 2 R.C.S. 1054,
McNamara Construction (Western) Limited c. La Reine [1977] 2 R.C.S. 654 et La Reine c. Thomas Fuller Construction Co. (1958) Limited [1980] 1 R.C.S. 695, mais il est inutile de pousser plus loin l'examen de ces questions de compétence étant donné que j'ai conclu que la Loi sur les chemins de fer et la Loi nationale sur les transports s'appli- quent à la défenderesse Canadien Pacifique Limi- tée. A noter toutefois que la ligne de chemin de fer en question est un ouvrage et une entreprise reliant une province à une autre ou s'étendant au-delà des limites d'une province au sens de l'article 23 de la Loi sur la Cour fédérale.
Cet argument, qui se rapporte uniquement à cette ligne, ne justifie donc pas une conclusion différente de celle à laquelle est arrivé le juge Collier dans l'affaire entendue en Saskatchewan.
Les déclarations dans les deux actions seront donc radiées avec dépens et mention des ordonnan- ces sera faite sur les différentes requêtes au dossier.
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