T-5536-78
Hugh Waddell Limited (demanderesse)
c.
La Reine (défenderesse)
Division de première instance, juge Gibson—
Toronto, 1 e décembre; Ottawa, 10 décembre 1981.
Impôt sur le revenu — Calcul du revenu — Gain en capital
— Valeur au jour de l'évaluation des actions de la C.T.C.
Dealer Holdings Limited — Les vérificateurs de la Canadian
Tire Dealers Association ont établi à $40.50 la valeur, au jour
de l'évaluation, de chaque action représentée par le certificat
de convention de vote fiduciaire — Il échet de déterminer si on
doit établir la valeur au jour de l'évaluation en considérant la
seule vente directe, ou la formule de détermination du prix
établie pour les cas de retraite ou de décès, ou des éléments
extérieurs à ceux qui constituent les formules d'évaluation
prévues dans la déclaration de fiducie — La juste valeur
marchande, au jour de l'évaluation, a été établie à $40.50
l'action Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, c.
63, art. 39(1)a) — Règles de 1971 concernant l'application de
l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, c. 63, Partie III, art.
26(3).
Au jour de l'évaluation, la demanderesse était propriétaire
d'un certificat de convention de vote fiduciaire représentant
3,345 actions de la C.T.C. Dealer Holdings Limited
(«D.H.L.»). Elle a vendu ce certificat le le' juillet 1975 pour le
montant de $39.75 l'action. Le Ministre a fixé à $33.35 la
valeur de chaque action au jour de l'évaluation. La demande-
resse soutient que la valeur de chacune des actions, au jour de
l'évaluation, était supérieure à $40.50 qui est la valeur qu'a-
vaient les actions à la Bourse de Toronto au jour de l'évaluation
et la valeur, au jour de l'évaluation, établie par les vérificateurs
de la Canadian Tire Dealers Association. Elle déclare par
conséquent qu'elle n'a tiré aucun gain en capital de la vente des
actions. Seuls les membres de l'Association avaient le droit de
posséder les actions de la D.H.L., et l'achat et la vente de ces
actions étaient réglementés par une déclaration de fiducie
signée par la demanderesse en 1971. Le Ministre a considéré la
seule vente directe pour déterminer la juste valeur marchande
parce que cette méthode tient compte de la conclusion de
l'opération au 31 décembre 1971. La demanderesse a rejeté la
deuxième méthode proposée qui considère la formule de déter-
mination du prix établie pour les cas de retraite ou de décès
parce que cette formule se restreint aux ventes volontaires de
certificats à des propriétaires associés Canadian Tire et aux
ventes conclues par suite de la retraite ou du décès du proprié-
taire associé Canadian Tire vendeur. Par conséquent, le mon-
tant auquel on arrive ne représente pas le prix qu'un proprié-
taire associé paierait pour le certificat pour pouvoir «succéder»
à la demanderesse au jour de l'évaluation. Celle-ci soutient
plutôt que ce propriétaire associé désireux d'acheter le certificat
paierait une prime basée sur une «valeur de rétention» parce
que le propriétaire associé qui achèterait ces actions pourrait les
conserver jusqu'à ce qu'il se défasse de son magasin Canadian
Tire ou jusqu'à sa mort. Il s'agit de savoir laquelle des trois
méthodes doit servir à déterminer la valeur, au jour de l'évalua-
tion, des actions en question.
Arrêt: compte tenu des procédures en l'instance, il n'est pas
nécessaire de procéder à l'évaluation précise du montant de
cette prime, du moment que le prix au jour de l'évaluation est
d'au moins $40.50. Le certificat représentant 3,345 actions au
jour de l'évaluation a une juste valeur marchande de $40.50
multipliée par 3,345. Il y avait une valeur de rétention afférente
au présent certificat et en conséquence, il y aurait une prime
payable, laquelle serait équivalente au montant en sus du cours
des actions au jour de l'évaluation.
Jurisprudence: arrêt examiné: Commissioners of Inland
Revenue c. Crossman [1937] A.C. 26 [C.L.]. Distinction
faite avec les arrêts: Beament c. Ministre du Revenu
national [1970j—R.C.S. 680; West Estate c. Minister of
Finance for the Province of British Columbia [1976]
C.T.C. 313 (C.S.C.-B.). Arrêt mentionné: Re Mann Estate
[1972] 5 W.W.R. 23 (C.S.C.-B.), confirmé par [1974]
C.T.C. 222 (C.S.C.).
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
W. Goodman, c.r. et J. Swystun pour la
demanderesse.
P. Barnard pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Goodman and Carr, Toronto, pour la
demanderesse.
Lapointe Rosenstein, Montréal, pour la
défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE GIBSON: Le 31 décembre 1971 (jour
de l'évaluation), la Hugh Waddell Limited était
propriétaire d'un certificat de convention de vote
fiduciaire représentant 3,345 actions de la C.T.C.
Dealer Holdings Limited (ci-après appelée
«D.H.L.»). Elle a vendu ce certificat le ler juillet
1975 pour un montant équivalant à $39.75 l'ac-
tion, montant correspondant ad prix courant des
actions de la Canadian Tire Corporation Limited.
Dans sa cotisation, le ministre du Revenu national
a fixé à $33.35 la valeur de chaque action de la
D.H.L. représentée par le certificat au jour de
l'évaluation. La Hugh Waddell Limited soutient
que la valeur de chacune des actions de la D.H.L.
était supérieure à $40.50 au jour de l'évaluation et
que, puisqu'elle les avait vendues pour $39.75 cha-
cune, elle n'avait réalisé aucun gain en capital aux
fins de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C.
1952, c. 148, modifiée par S.C. 1970-71-72, c. 63,
art. 1.
La valeur qu'avaient les actions de la Canadian
Tire Corporation Limited à la Bourse de Toronto
le 31 décembre 1971 (jour de l'évaluation) était de
$40.50 l'action. La portée de cette évaluation
apparaît plus clairement dans l'exposé des faits
(pièce 55), mais l'extrait suivant de la déclaration
l'illustre assez bien:
[TRADUCTION] Pendant toute la période visée, la demande-
resse a exploité un magasin associé Canadian Tire à Peter-
borough, Ontario.
La Canadian Tire Dealers Association (ci-après appelée
«l'Association») est une association qui regroupe les propriétai-
res associés des magasins Canadian Tire.
La C.T.C. Dealer Holdings Limited (ci-après appelée la
«DHL») est une société dont le siège social est situé à St.
Catharines en Ontario, et qui a été constituée en corporation en
1963, en vertu des lois ontariennes. Elle a été l'instrument par
l'intermédiaire duquel les propriétaires associés ont investi dans
la Canadian Tire Corporation Limited (CTCL), une société
publique dont les actions ordinaires étaient cotées à la Bourse
de Toronto.
Les propriétaires associés pouvaient, à l'occasion, souscrire
des actions de la DHL. Le prix de ces actions correspondait
toujours à la valeur qu'avaient les actions ordinaires de la
CTCL sur le marché boursier.
Entre 1963 et 1971, la demanderesse a souscrit un total de
3,345 actions de la DHL.
En 1971, l'Association a décidé qu'il serait dans l'intérêt de
tous ses membres de se réserver, par convention, le droit
exclusif de posséder les actions de la DHL, et de réglementer,
en même temps, l'achat et la vente de celles-ci.
A cette fin, l'Association a rédigé une convention intitulée
«Déclaration de fiducie» (voir la pièce 2 produite à l'audition),
laquelle prévoyait entre autres
a) que la propriété de toutes les actions de la DHL serait
dorénavant transférée à l'Association en sa qualité de
fiduciaire;
b) que les propriétaires d'actions de la DHL obtiendraient un
certificat de convention de vote fiduciaire représentant le
nombre d'actions détenues en fiducie pour leur compte;
c) qu'on verserait aux détenteurs de certificats de convention
de vote fiduciaire un montant égal au montant des dividendes
reçus par le fiduciaire au titre de chaque action de la DHL;
et
d) que les certificats de convention de vote fiduciaire ne
pourraient être vendus que suivant les modalités prévues par
la Déclaration de fiducie.
Le 29 octobre 1971, la demanderesse a signé la Déclaration
de fiducie et a reçu un certificat de convention de vote fidu-
ciaire représentant les 3,345 actions de la DHL dont elle était
l'ancienne propriétaire.
Le 1»' juillet 1975, la demanderesse a vendu ses certificats, y
compris celui qui lui avait été délivré le 29 octobre 1971.
Afin de calculer le gain en capital réalisé par suite de cette
disposition en conformité de la Loi de l'impôt sur le revenu et
des Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu,
entre autres l'alinéa 39(1)a) de la Loi et le paragraphe 26(3)
des Règles, la demanderesse devait connaître la juste valeur
marchande du certificat de convention de vote fiduciaire qu'elle
détenait le 31 décembre 1971 (jour de l'évaluation).
Sachant que les propriétaires associés qui avaient acquis des
certificats de convention de vote fiduciaire avant 1972 seraient
tenus d'en établir la valeur au jour de l'évaluation lorsqu'ils en
disposeraient, l'Association avait demandé à ses vérificateurs,
Partridge, Skene & Company, de déterminer la valeur de ces
certificats.
D'après les vérificateurs, c'est la somme de $40.50 qui cor-
respondait, au jour de l'évaluation, à la valeur de chaque action
de la DHL représentée par un certificat et qui devait servir à
calculer la valeur qu'avaient, au jour de l'évaluation, les certifi-
cats de convention de vote fiduciaire de chaque propriétaire
associé.
La demanderesse soutient que chaque action de la DHL
représentée par un certificat valait $40.50 au jour de
l'évaluation.
Dans un nouvel avis de cotisation en date du 28 juillet 1977,
la défenderesse a fixé de nouveau l'impôt que la demanderesse
devait acquitter pour l'année d'imposition 1975. C'est en utili-
sant la somme de $33.35 comme valeur de chaque action de la
DHL au jour de l'évaluation que la défenderesse a déterminé de
nouveau le montant du gain en capital imposable résultant de la
disposition de 1975.
Le nouvel avis de cotisation modifiait aussi le compte des
déductions cumulatives de la demanderesse. Cette dernière
modification découlait de la rectification ... précitée du calcul
du gain en capital imposable.
Les tribunaux canadiens ont élaboré une défini-
tion jurisprudentielle de la «juste valeur mar-
chande». Voir, par exemple, Re Mann Estate'.
La demanderesse a présenté une preuve et a
produit plusieurs témoins: Lawrence Allan War
ren, le propriétaire d'un magasin associé Canadian
Tire à North Bay, Ontario et un membre actif de
la Canadian Tire Dealers Association qui a joué
un rôle important dans la constitution en corpora
tion de la C.T.C. Dealer Holdings Limited et dans
la signature de la Déclaration de fiducie (pièce 2);
M. Wallace C. Partridge, comptable agréé, qui a
tenu la comptabilité de la C.T.C. Dealer Holdings
Limited et de l'Association depuis 1963, qui con-
naît bien toutes les opérations relatives à l'acquisi-
tion et à la disposition de ces certificats et qui a
personnellement établi à $40.50 la valeur au jour
de l'évaluation de chaque action de la D.H.L.
représentée par un certificat; M. Hugh F. Wad-
dell, l'actionnaire majoritaire de la demanderesse;
et M. Ian Ronald Campbell, l'expert qui a préparé
' [1972] 5 W.W.R. 23 (C.S.C.-B.), le juge McIntyre; con
firmé par [1974] C.T.C. 222 (C.S.C.).
le rapport déposé comme pièce 56. Le ministre du
Revenu national n'a présenté aucune preuve.
M. Campbell a proposé trois méthodes pour
établir la valeur au jour de l'évaluation. Dans son
rapport, ces méthodes sont appelées les méthodes
A, B et C. Voici ce qu'il a conclu à leur sujet:
C'est la méthode A qui doit s'appliquer s'il faut
considérer la seule vente directe pour déterminer
la juste valeur marchande (voir le paragraphe
23 de la pièce 56) ce qui donne à chaque action
une valeur qui se situe entre $33.34 et $35.89;
C'est la méthode B qui doit s'appliquer s'il faut
utiliser la formule de détermination du prix des
actions établie pour les cas de retraite ou de
décès d'un détenteur pour déterminer la juste
valeur marchande (voir les paragraphes 26 et 27
de la pièce 56) ce qui donne à chaque action une
valeur qui se situe entre $36.50 et $37.59;
C'est la méthode C qui doit s'appliquer s'il faut
considérer des éléments extérieurs à ceux qui
constituent les formules d'évaluation prévues
dans la déclaration de fiducie pour déterminer la
juste valeur marchande (voir le paragraphe 34
de la pièce 56) ce qui donne à chaque action une
valeur qui se situe entre $40.50 et $46.62.
Le ministre du Revenu national affirme que
seule la méthode A du rapport de M. Campbell
permet d'établir la juste valeur marchande au 31
décembre 1971 parce qu'elle tient compte de la
conclusion de l'opération concernant les certificats
au 31 décembre 1971, comme si toutes les condi
tions relatives au nombre d'actions de la D.H.L.
détenues et toutes les exigences de la convention de
fiducie avaient été remplies, et qu'en se fondant
sur cette méthode et sur de telles données, on
obtient pour cette opération effectuée le 31 décem-
bre 1971 une juste valeur marchande de $33.34
par action au jour de l'évaluation.
La demanderesse soutient que la formule de
détermination du prix que prévoit le paragraphe 9
de la convention de fiducie, pièce 2, ne permet pas
d'obtenir la juste valeur marchande au jour de
l'évaluation que la Cour doit déterminer.
Elle prétend que le domaine d'application de la
formule se restreint aux ventes volontaires de certi-
ficats à des propriétaires associés Canadian Tire
(d'après la preuve soumise, il n'y a eu aucune de
ces ventes depuis la signature de la convention de
fiducie, pièce 2) et aux ventes conclues par suite de
la retraite ou du décès du propriétaire associé
Canadian Tire vendeur, et que le montant auquel
on arrive en appliquant cette formule ne représente
pas le prix qu'un propriétaire associé paierait pour
le certificat représentant les actions en cause pour
[TRADUCTION] «succéder», si je puis m'exprimer
ainsi, à la Hugh Waddell Limited par l'achat de ce
certificat le 31 décembre 1971. Elle soutient plutôt
que ce propriétaire associé désireux d'acheter le
certificat paierait une prime qu'on dit dans cer-
tains cas basée sur une [TRADUCTION] «valeur de
rétention» parce que le propriétaire associé qui
achèterait ces actions pourrait les conserver jus-
qu'à ce qu'il se défasse de son magasin Canadian
Tire ou jusqu'à sa mort, et que la valeur de cette
prime serait égale au montant qui est en sus du
prix calculé mathématiquement en se servant de la
formule prévue au paragraphe 9 de la convention
de fiducie, pièce 2.
Comme élément de preuve au soutien de sa
prétention, la demanderesse renvoie la Cour à
l'annexe 5 du rapport de M. Campbell, pièce 56,
afin d'établir que pendant cinq (5) ans au cours de
la période allant de 1963 à 1972, les propriétaires
associés qui ont acquis ces certificats ont de fait
payé une prime pour leur acquisition, prime équi-
valant au montant qui est en sus du prix de clôture
des actions de la Canadian Tire Corporation Lim
ited à la Bourse de Toronto à la date d'achat et de
vente applicable.
A mon avis, les témoignages de Warren, Par
tridge et Campbell appuient aussi la thèse voulant
que les propriétaires associés Canadian Tire aient
toujours été prêts à payer une telle prime pour
acquérir ces certificats quand la possibilité s'en
présentait en application de la convention de fidu-
cie, pièce 2.
D'après M. Campbell, l'expert, le montant de
cette prime peut varier pour chaque action de
$0.00 à $6.62 au-dessus de $40.50 ($40.50 à
$46.62). Il en donne entre autres les raisons
suivantes:
[TRADUCTION] En me fondant sur les circonstances entourant
l'acquisition et la cession des certificats de convention de vote
fiduciaire, de l'opération initiale jusqu'au 31 décembre 1971, et
en me fondant surtout sur les questions traitées au paragraphe
31d) (de son rapport, pièce 56), je crois que la juste valeur
marchande au 31 décembre 1971 des actions de la Dealer
Holdings représentées par les certificats de convention de vote
fiduciaire, déterminée en tenant compte de la valeur qui excède
la valeur obtenue en employant la formule d'évaluation de la
Déclaration de fiducie, peut être adéquatement située entre
$40.50 et $46.62 par action de la Dealer Holdings représentée
par un certificat de convention de vote fiduciaire.
Cette thèse voulant que la valeur de rétention
puisse donner lieu au paiement d'une prime est
énoncée dans l'arrêt Commissioners of Inland
Revenue c. Crossman 2 . Le sommaire de cette
cause se lit en partie comme suit:
[TRADUCTION] Un testateur avait droit au moment de sa
mort à un certain nombre d'actions ordinaires valant 100 livres
sterling chacune, actions d'une compagnie dont les statuts
imposaient de sévères restrictions en ce qui concerne le trans-
fert et la disposition de ces actions:
Arrêt: le vicomte Hailsham L.C., lord Blanesburgh et lord
Roche (lord Russell of Killowen et lord Macmillan dissidents):
la valeur des actions, aux fins du calcul des droits successoraux,
devait être établie au prix qu'elles atteindraient si elles étaient
vendues sur le marché libre, à la condition que l'acquéreur ait
le droit de faire inscrire son nom dans les registres de la
compagnie et soit considéré comme le détenteur des actions et
qu'il puisse les détenir conformément aux dispositions des
statuts, y compris les dispositions traitant de la disposition et du
transfert de ces actions.
C'est ainsi que Green's Death Dulies, 7e éd.
1971, traite de cette thèse [à la page 421]:
[TRADUCTION] En conséquence, le droit de transférer des
actions d'une société publique peut souvent, et de fait est
souvent restreint. En ce qui concerne l'évaluation aux fins du
calcul des droits successoraux, la plus importante de ces condi
tions est celle qui a trait aux restrictions touchant le transfert
d'actions.
Le principe applicable lorsque les statuts d'une société pré-
voient des restrictions au droit de transférer des actions (soit
que les actions doivent d'abord être offertes aux autres action-
naires à un prix fixé d'avance ou devant être fixé d'une manière
prescrite avant de pouvoir être vendues sur le marché libre, ou
soit simplement que les administrateurs puissent opposer leur
veto à un transfert) a finalement été énoncé par la Chambre
des lords dans les arrêts Inland Revenue Commissioners c.
Crossman, Inland Revenue Commissioners c. Mann ([1937]
A.C. 26; [1936] 1 All E.R. 762, approuvant Le procureur
général c. Jameson [1905] 2 I.R. 218, et Salvesen's Trustees c.
Inland Revenue Commissioners, 1930 S.L.T. 387. Cf. Holt c.
Inland Revenue Commissioners, [1953] 2 All E.R. 1499,
1508). La loi prescrit une vente sur le marché libre et vente
signifie délivrance avec un titre valide. Cependant, on doit tenir
compte des restrictions touchant le transfert d'actions parce
qu'elles constituent un élément inhérent du bien qui doit être
évalué. La valeur principale est donc le prix qu'atteindraient les
actions si elles étaient vendues sur le marché libre à la condition
que l'acquéreur en soit le détenteur enregistré, mais qu'il ne les
détienne que sous réserve des dispositions des statuts, y compris
2 [1937] A.C. 26 (C.L.).
la disposition restreignant l'aliénation (subséquente). En d'au-
tres mots, c'est le prix qu'un acquéreur paierait pour succéder à
un actionnaire décédé et devenir, en vertu d'un titre valide, le
détenteur des actions de ce dernier pour en tirer le même profit
sous réserve des mêmes obligations (Le procureur général c.
Jameson, précité, à la p. 230). Même à ces conditions, les
restrictions au transfert d'actions ne constituent pas nécessaire-
ment un facteur absolu de dépréciation de celles-ci. Elles
comportent des avantages possibles, dont la faculté d'acquérir,
aux termes des statuts de la société, les actions d'autres action-
naires à des conditions avantageuses, par exemple, à un prix
fixe.
L'arrêt Beament c. M.R.N. 3 ne va pas à l'encon-
tre de cette thèse. Dans cette affaire, les exécu-
teurs testamentaires ont dû, à la mort de Beament,
respecter l'entente que ce dernier avait conclue de
son vivant avec ses enfants. «Par [cette] conven
tion, le défunt s'est obligé envers ses enfants à
prévoir dans son testament la dissolution de la
compagnie et le partage de son actif en conformité
des dispositions des lettres patentes. La succession
a reçu la somme de $10,725.98.» Aussi, comme l'a
affirmé le juge en chef Cartwright [à la page 687]:
« ... il est clair qu'aucune personne raisonnable
n'aurait déboursé plus de $10,725.98 pour s'en
porter acquéreur et qu'à la liquidation les exécu-
teurs ne pouvaient recevoir plus que ce montant.»
Autrement dit, il n'y avait dans cette affaire
aucune valeur de rétention attachée aux actions
qui puisse entraîner le paiement d'une prime.
Ce n'est pas le cas en l'espèce, où l'acquéreur
éventuel du certificat en question l'achèterait
plutôt pour le conserver pour aussi longtemps qu'il
serait propriétaire associé Canadian Tire, ou jus-
qu'à sa mort, et où, en considération de la valeur
de rétention afférente au certificat, selon les
termes de ce concept, il serait prêt à verser une
prime.
L'arrêt West Estate c. Minister of Finance for
the Province of British Columbia° ne va pas non
plus à l'encontre de cette thèse. Cette décision
n'avait rien à voir avec l'application de cette thèse
de la valeur de rétention mais ne touchait que
l'application de l'article pertinent de la Succession
Duty Act de la Colombie-Britannique, S.R.C.-B.
1960, c. 372. Avec déférence, il semblerait que
Michael B. Jameson, dans son livre intitulé Cana-
i [1970] R.C.S. 680.
4 [1976] C.T.C. 313 (C.S.C.-B.).
dian Estate Tax, expose la méthode à utiliser pour
résoudre la question principale, laquelle devait être
tranchée dans l'affaire West (précitée). Aux pages
110 et 111 de son traité, il affirme ce qui suit:
[TRADUCTION] ... Biens transférables au décès ou après le
décès
C'est l'art. 3(1)i) qui traite des opérations dont l'effet est de
permettre à une personne d'avoir l'usage de biens pendant sa
vie et de les vendre à son décès. Cet article se lit comme suit:
Art. 3 (1). Dans le calcul de la valeur globale nette on doit
inclure ...
i) les biens transférés à un acheteur ou à un cessionnaire,
ou acquis par l'un ou l'autre, aux termes d'une conven
tion conclue par le de cujus à une époque quelconque,
prévoyant le transfert ou l'acquisition de ces biens à
compter de son décès, dans la mesure où la valeur de ces
biens dépasse celle de la cause ou considération, s'il en
est, en argent ou valeur en argent, payée au de cujus en
vertu de ladite convention à toute époque antérieure à
son décès;
Ce genre d'opérations ou de conventions équivalent à des
dispositions testamentaires. En conséquence, le montant que la
succession du de cujus reçoit en application de cette convention
est inclus dans la masse successorale.
Toutefois, cet article va plus loin et énonce que le montant
qui est inclus est celui qui équivaut à l'excédent de la valeur des
biens, établie conformément à la loi en argent ou valeur en
argent, payée au de cujus du vivant de ce dernier. Ainsi, si A
s'entend avec B pour vendre sa ferme à celui-ci en considération
d'une somme de $50,000 dont $5,000 payables immédiatement
et $45,000 payables à son décès, et si au décès de A la ferme est
évaluée à $75,000, alors, le montant imposable en vertu de l'art.
3(1)i) est de $75,000 moins les $5,000 déjà versés, c'est-à-dire
$70,000. Cependant, B n'a que $45,000 à verser à l'exécuteur
testamentaire de A pour acquérir la ferme et c'est pourquoi
l'art. 13(3) prévoit que l'exécuteur n'est responsable que jus-
qu'à concurrence du prix stipulé au contrat, ou $45,000. La
différence entre la somme de $45,000 et la somme de $70,000
est considérée comme un avantage dont bénéficie l'acquéreur,
et celui-ci doit acquitter des droits en vertu de l'art. 14 comme
s'il était un héritier. La totalité des $70,000 sera incluse dans la
succession pour le calcul de la valeur globale, mais l'exécuteur
acquittera les droits exigibles sur les $45,000, et l'acquéreur,
ceux qui sont exigibles sur le solde de $25,000. Il en serait
autrement seulement dans le cas où l'acquéreur est aussi un
héritier et où l'exécuteur peut avoir en sa possession des biens
qui reviennent à l'héritier.
A mon avis, il y avait une valeur de rétention
afférente au présent certificat représentant 3,345
actions de la D.H.L. En conséquence, il y aurait
une prime payable, laquelle serait équivalente au
montant en sus du cours des actions Canadian Tire
Corporation Limited au jour de l'évaluation, cours
établi, comme nous l'avons dit plus haut, à $40.50
l'action.
Comme les procédures en l'instance n'obligent
pas à procéder à l'évaluation précise du montant
de cette prime, du moment que le prix au jour de
l'évaluation est d'au moins $40.50, je conclus, eu
égard à la preuve soumise, qu'au 31 décembre
1971 (jour de l'évaluation), le certificat représen-
tant 3,345 actions de la D.H.L. que détenait la
demanderesse avait, au sens et en conformité de
l'alinéa 39(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu
et du paragraphe 26(3) des Règles de 1971 con-
cernant l'application de l'impôt sur le revenu une
juste valeur marchande de $40.50 multipliée par
3,345.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.