A-599-81
La Reine (appelante)
c.
Henry Cival (intimé)
Cour d'appel, juges Heald et Ryan et juge sup
pléant Kerr—Ottawa, 7 décembre 1982 et 29 mars
1983.
Impôt sur le revenu — Calcul du revenu — Déductions —
Appel d'un jugement de la Division de première instance qui a
accueilli la demande de frais de déplacement d'un fonction-
naire ayant utilisé son automobile dans l'exercice de ses
fonctions — Entente prévoyant un taux de millage uniforme
mais ne couvrant pas tous les frais — La déductibilité du
déficit en vertu de l'art. 8(1)h) de la Loi repose sur la question
de savoir si le contrat d'emploi obligeait l'employé à payer ses
dépenses — Contrat unilatéral ne créant pas d'obligation
contractuelle d'utiliser sa voiture et de payer ses dépenses —
Aucune obligation de la sorte dans la convention collective, le
Règlement ou la législation — Appel accueilli — Loi de
l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, chap. 63, art. 5, 6(1)b),
8 ( 1 )h),j)•
En 1977, l'intimé, un fonctionnaire, a utilisé son automobile
dans l'exercice de ses fonctions, à la demande de son
employeur. En vertu d'une entente conclue avec son Ministère,
celui-ci lui remboursait les frais d'utilisation de son automobile
suivant un taux de millage fixe. Cependant, ce taux de millage
ne couvrait pas entièrement ses dépenses. L'intimé a voulu
déduire le déficit découlant des frais de déplacement. Le Minis-
tre a refusé d'accorder cette déduction, la Commission de
révision de l'impôt a confirmé la cotisation du Ministre et la
Division de première instance a accueilli l'appel de la décision
de la Commission. Il s'agit d'un appel du jugement de la
Division de première instance.
Arrêt: l'appel doit être accueilli. Il s'agit de savoir si l'intimé
a droit à cette déduction en vertu de l'alinéa 8(1)h) de la Loi de
l'impôt sur le revenu. Pour répondre à cette question, il faut
déterminer s'il était tenu, en vertu de son contrat d'emploi, de
payer les dépenses qu'il a engagées pour l'utilisation de son
automobile. Ni la convention collective, ni le Règlement appli
cable, ni les dispositions législatives ne l'obligeaient à utiliser
son automobile ou à payer lesdites dépenses. En ce qui concerne
l'entente conclue entre l'intimé et son employeur, il s'agissait
tout au plus d'un contrat unilatéral ne créant aucune obligation
contractuelle, pour l'intimé, d'utiliser son automobile ou de
payer les dépenses nécessaires à cette fin. Bien que la question
de savoir si le remboursement des frais de millage constitue une
«allocation» ne soit pas en cause, on fait remarquer que la
réponse à cette question pourrait bien se trouver dans l'arrêt
Ransom v. The Minister of National Revenue, [1968] 1 R.C.E.
293.
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS CITÉES:
Re Nova Scotia Civil Service Commission and Nova
Scotia Government Employees Association (1980), 24
L.A.C. (2d) 319; Ransom v. The Minister of National
Revenue, [1968] 1 R.C.E. 293.
AVOCATS:
W. Lefebvre pour l'appelante.
D. G. Hill et J. Weinstein pour l'intimé.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour
l'appelante.
Aikins, MacAulay & Thorvaldson, Winni-
peg, pour l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE RYAN: Appel est interjeté d'un juge-
ment de la Division de première instance' accueil-
lant l'appel de l'intimé d'une décision de la Com
mission de révision de l'impôt. Cette dernière a
rejeté l'appel de M. Cival d'une cotisation établie
pour l'année 1977 qui n'a pas autorisé la déduction
de frais de déplacement demandée en vertu de
l'alinéa 8(1)h) de la Loi de l'impôt sur le revenu
[S.C. 1970-71-72, chap. 63].
M. Cival est un employé de la Reine du chef du
Canada. Pendant l'année d'imposition 1977, ii tra-
vaillait à la Section de vérification de la paie du
ministère du Revenu national à Winnipeg. Il utili-
sait son automobile dans l'exercice de ses fonc-
tions, en vertu de ce qu'il affirme être une entente
conclue avec son Ministère qui lui remboursait ses
frais de déplacement suivant un taux de millage. Il
ne fait aucun doute qu'il a utilisé son automobile à
la demande de son Ministère. En 1977, les dépen-
ses engagées par M. Cival pour l'utilisation de son
automobile dans l'exercice de ses fonctions ont
dépassé de 512,03 $ les frais de millage versés. Il a
demandé que cette somme soit déduite de son
revenu. Le Ministre a rejeté sa demande.
Il faut déterminer, dans le présent appel, si M.
Cival a droit à cette déduction en vertu de l'alinéa
8(1)h). Pour répondre à cette question, il faut se
demander si, en vertu de son contrat d'emploi, les
frais qu'il a engagés pour l'utilisation de son auto
mobile étaient à sa charge.
' Le jugement de la Division de première instance est publié
dans les Recueils de la Cour fédérale sous le titre Cival c. La
Reine, [1982] 2 C.F. 210.
L'alinéa 8(1)h) de la Loi prévoit ce qui suit:
8. (1) Lors du calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour
une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi, peuvent
être déduits ceux des éléments suivants qui se rapportent
entièrement à cette source de revenus, ou la partie des éléments
suivants qui peut raisonnablement être considérée comme s'y
rapportant:
h) lorsque le contribuable, dans l'année,
(i) a été, d'une manière habituelle, tenu d'exercer les
fonctions de son emploi ailleurs qu'au lieu même de l'en-
treprise de son employeur ou à différents endroits,
(ii) a été tenu, en vertu de son contrat d'emploi, d'acquitter
les frais de déplacement engagés par lui pour l'accomplis-
sement des fonctions de sa charge ou de son emploi, et
(iii) n'a pas reçu d'allocation pour frais de déplacement,
qui, en vertu du sous-alinéa 6(1)b)(v), (vi) ou (vii), n'était
pas incluse dans le calcul de son revenu, et n'a pas réclamé
de déduction pour l'année en vertu de l'alinéa e), j) ou g),
les sommes qu'il a dépensées pendant l'année aux fins de
déplacement pour exercer les fonctions de son emploi;
de cite également l'alinéa 8(1)j):
8. (1) ...
j) lorsqu'une déduction peut s'opérer en vertu de l'alinéa j)
ou h) lors du calcul du revenu tiré par un contribuable d'une
charge ou d'un emploi pour une année d'imposition,
(i) tous intérêts payés par le contribuable dans l'année sur
un emprunt effectué pour l'achat d'une automobile utilisée
dans l'exercice des fonctions de sa charge ou de son
emploi, et
(ii) toute partie du coût en capital qui aurait été supporté
par le contribuable, relativement à une automobile utilisée
dans l'exercice des fonctions de sa charge ou de son
emploi, qui est allouée par règlement;
L'appelante admet que M. Cival répondait aux
exigences prévues aux sous-alinéas 8(1)h) (i) et
8(1)h)(iii) mais elle soutient qu'il ne satisfaisait
pas aux conditions du sous-alinéa 8(1)h)(ii).
M. Cival affirme qu'au cours de l'année d'impo-
sition 1977, il a engagé les dépenses suivantes en
utilisant son automobile dans l'exercice de ses
fonctions:
Assurance 235,50 $
Essence, huile et réparations 561,47 $
Allocation du coût en capital
(Catégorie 10) 985,95 $
1 782,92 $
Son employeur lui a versé 1 270,89 $ au titre du
millage.
En ce qui concerne la conclusion de l'entente en
vertu de laquelle M. Cival a utilisé son automobile,
il peut être utile de citer une partie de son témoi-
gnage devant la Commission de révision de l'im-
pôt. D'un commun accord, la transcription sui-
vante de ce témoignage entendu par la
Commission a été soumise au juge de première
instance:
[TRADUCTION] Q. Je vous montre un autre document, en
blanc, portant l'en-tête «Région de l'Administration cen-
trale, 1e" avril 1979 au 31 mars 1980». Pouvez-vous nous
dire en quoi consiste ce document?
R. Chaque année, nous devons remplir une formule d'autori-
sation de déplacement dans les limites de la ville de
Winnipeg, pour la région métropolitaine de Winnipeg;
quand ce document est rempli, nous sommes autorisés à
demander le remboursement des frais de déplacement à
l'intérieur de la région de l'Administration centrale de
Winnipeg, c'est-à-dire à Winnipeg.
Q. Vous dites qu'au début de chaque exercice financier, vous
devez signer cette formule à l'intention de votre
employeur?
R. Oui.
Q. Et à quelle fin, une fois de plus?
R. Elle nous permet d'utiliser notre automobile.
Q. C'est ce que vous croyez?
R. C'est ce que je crois, oui.
Q. Viennent-ils—je veux dire votre employeur—vous voir et
vous présenter ce document?
R. Oui.
Q. Savez-vous ce qu'on fait ensuite de ce document?
R. L'employeur le garde dans ses dossiers.
Q. Est-il signé en blanc? Il y a l'en-tête de ce document,
Région de l'Administration centrale, Pr avril 1979 au 31
mars 1980. Y a-t-il autre chose sur le document que vous
signez?
R. Oui, il y a la signature des autres vérificateurs. Chacun
signe et la signature est jointe à ce document.
Q. Je vois. Ce document est joint à une liste de noms de
personnes qui doivent—ou plutôt à qui on demande de
signer?
R. Oui.
Q. Et cette signature est jointe à cette liste?
R. Oui.
Q. Vous n'avez pas cette liste en votre possession?
R. Non.
M. IRVING: Je me demande si ce document peut être produit
à titre de pièce, M. le président.
LE PRÉSIDENT: Ce document existait en 1977?
R. Oui.
Je ferai remarquer que la directive du Conseil
du Trésor concernant les voyages (édition révisée
d'avril 1977) prévoit ce qui suit aux articles 1.17 et
1.18:
1.17 Ii faut rédiger, si possible, une autorisation préalable de
voyage en ce qui concerne chacun des voyages en service
commandé et verser cette autorisation au dossier du voyageur.
À cette fin, il est recommandé d'utiliser la formule normalisée
72B de l'ONGC du gouvernement du Canada intitulée «Autori-
sation et avance de voyage» (voir l'appendice C). Lorsque la
personne voyage d'une façon continue, on fournira une telle
autorisation tous les ans au commencement de l'année
financière.
1.18 L'autorisation préalable doit porter la signature de la
personne qui autorise le voyage ainsi que celle du voyageur, qui
indique aussi son acceptation des conditions du voyage. La
formule devrait indiquer:
—le tarif autorisé au mille ou au kilomètre lorsqu'on a recours
à un véhicule privé
Un certain D. R. MacDonald, agent de relations
de travail au ministère du Revenu national, a
également témoigné devant la Commission de révi-
sion de l'impôt à la demande de la Couronne. Voici
un extrait de sa déposition:
[TRADUCTION] Q. A votre connaissance, le gouvernement
rembourse-t-il à ses employés, tels que M. Cival, leurs
frais de déplacement?
R. Oui.
Q. Ces employés peuvent-ils obtenir une avance sur leurs
frais de déplacement?
R. Oui, ils le peuvent.
Q. Puis-je vous demander maintenant quelle est la politique
de votre Ministère en ce qui concerne l'utilisation des
voitures privées?
R. Le Ministère a pour politique d'autoriser l'utilisation
d'une voiture privée lorsqu'il s'agit du moyen de transport
le plus économique et le plus pratique.
Q. À votre connaissance et selon votre expérience, un
employé peut-il être contraint d'utiliser une voiture pri-
vée—si je peux m'exprimer ainsi?
R. Non.
Q. L'employeur peut-il obliger un employé à utiliser sa
voiture privée?
R. Non, il ne le peut.
Q. Si l'employeur demande à son employé d'utiliser sa voi-
ture et si ce dernier refuse, l'employeur peut-il, en vertu
de la convention collective, avoir recours à des mesures
disciplinaires?
R. Non, il ne le peut pas.
Q. Est-il juste de dire que l'employé a le droit de refuser
d'utiliser sa voiture?
R. Oui. Il en a le droit.
Un peu plus loin, la transcription indique ce qui
suit:
[TRADUCTION] Q. Croyez-vous par conséquent que, dans ce
cas, quelqu'un a demandé à M. Cival d'utiliser sa voi-
ture? Admettez-vous cela?
R. Oui.
Q. Est-ce la raison pour laquelle on lui a versé ces taux en
vertu de l'alinéa a)?
R. C'est exact.
Le juge de première instance a, bien sûr, exa-
miné la nature et l'effet de cette entente entre M.
Cival et le Ministère. Voici ce qu'il déclare aux
pages 212 et 213:
Le demandeur n'a signé aucun contrat formel au sujet de ses
frais de déplacement en service commandé, mais une directive
du Conseil du Trésor du gouvernement fédéral, en matière de
voyages, prévoit en détail les dispositions relatives au rembour-
sement des frais de ce genre. Ce document n'est pas un texte de
loi, mais il expose la politique gouvernementale à suivre par les
fonctionnaires. L'édition révisée de cette directive, en date
d'avril 1977, était en vigueur pendant presque toute cette
année-là. La troisième partie de cette directive porte sur les
procédures relatives au transport et les taux d'indemnisation de
l'usage des voitures privées. Le paragraphe 3.03 prescrit les
taux de millage; en voici le passage applicable en l'espèce:
3.03 Les taux de millage pour l'utilisation officielle autorisée
d'un véhicule privé à l'intérieur ou à l'extérieur de la zone
d'affectation sont les suivants:
(a) Lorsque l'employeur le demande et que l'employé accepte
d'utiliser l'automobile:
Toutes les
provinces sauf
T.-N., les
T.N.-O.
et le Yukon
cents par mille,
(i) pour chacun des premiers 4,000
milles par année financière 19.5
(ii) pour chaque mille compris
entre 4,001 et 8,000 milles par
année financière 17.5
(iii) pour chaque mille excédant
8,000 milles par année financière 16.5
(b) Lorsque l'employé demande la permis
sion d'utiliser une automobile et que l'em-
ployeur y consent 9.0
Et le paragraphe 3.061 prévoit:
3.061 Les taux ... prescrits ci-haut sont payés suivant un
système de taux variables:
a) Lorsque l'employeur le demande et que l'employé accepte
d'utiliser un véhicule privé, les taux payés sont conçus pour
compenser les frais de «propriété» ét les frais de «fonctionne-
ment» d'un véhicule privé, c'est-à-dire:
(i) «les frais de propriété» qui consistent dans l'amortisse-
ment, la taxe provinciale, les frais financiers, l'assurance et
les droits de permis; et
(ii) «les frais de fonctionnement», qui consistent dans l'es-
sence, l'huile, le lubrifiant, les pneus, l'entretien et les
réparations.
b) Lorsque l'employé demande la permission d'utiliser un
véhicule privé et que l'employeur y consent, les taux qui sont
payés ne couvrent que les «frais de fonctionnement».
Le juge de première instance poursuit [à la page
213]:
L'alinéa 3.03(a) vise indéniablement le cas du demandeur.
On le remboursait selon le taux de millage prescrit par cet
alinéa. Il est aussi indéniable que son cas est également visé par
l'alinéa 3.061a) qui précise que les taux prévus à l'alinéa
3.03(a) sont conçus pour compenser à la fois les «frais de
propriété» et les «frais de fonctionnement», et que les frais de
propriété embrassent l'amortissement. A ce que je vois, l'alinéa
3.061a) signifie que les taux visés à l'alinéa 3.03(a) sont conçus
pour compenser tous les frais de propriété et de fonctionnement
qui sont décrits à l'alinéa 3.061a) ou, plus précisément, tous
ceux que le gouvernement consent à payer.
Il ajoute ce qui suit à la page 219:
L'avocat du demandeur soutient que celui-ci doit acquitter le
déficit de $512.03 parce que le gouvernement n'a pas l'obliga-
tion de rembourser plus que le montant payable conformément
à sa politique. Je pense bien que le demandeur doit acquitter ce
déficit. Les conventions qui président à l'utilisation de la voiture
en service commandé ne prévoient certes pas pareille obligation,
mais selon l'une de ces conventions, le remboursement se limite
à l'allocation prévue pour le millage. Puisque cette allocation
est insuffisante pour rembourser tous les frais d'automobile
auxquels elle est destinée à pourvoir, il est évident que le déficit
tient à l'insuffisance du taux de millage qui, en l'espèce, ne
couvre pas tous les frais. En conséquence, on peut conclure que
le demandeur doit, au sens large de ce mot, acquitter en vertu
de son contrat le déficit de $512.03 puisque ce déficit qu'il doit
assumer tient à l'insuffisance de l'allocation prévue dans la
convention. Qu'il ne soit pas tenu d'acquitter tous les frais de
l'automobile ne doit pas porter atteinte aux droits du deman-
deur en ce qui concerne la fraction des frais qu'il doit acquitter.
Je pense donc que le demandeur a fait la preuve qu'il remplit la
condition énoncée au sous-alinéa (ii).
Le juge de première instance était manifeste-
ment d'avis que l'entente concernant l'utilisation
de l'automobile de M. Cival était un contrat
conclu entre ce dernier et son employeur et que ce
contrat était un contrat d'emploi. En vertu de ce
contrat, M. Cival était, de l'avis de sa Seigneurie,
implicitement tenu de payer les dépenses qu'il
engageait pour utiliser son automobile, du moins
dans la mesure où ces dépenses dépassaient le taux
de millage remboursé. En toute déférence, je ne
crois pas que cette entente comportait l'obligation
contractuelle pour M. Cival de payer ces dépenses.
Les conditions d'emploi de M. Cival étaient
prévues dans une convention collective, signée par
le Conseil du Trésor et l'Alliance de la Fonction
publique, qui était en vigueur au cours de l'année
d'imposition 1977. M. Cival faisait partie de
l'unité de négociation visée par la convention. Ses
conditions d'emploi pouvaient en outre inclure les
dispositions du Règlement sur les conditions
d'emploi dans la Fonction publique [DORS/67-
118], dans la mesure où ces dispositions n'étaient
pas incompatibles avec celles de la convention
collective, ni avec la législation concernant l'em-
Aloi dans la Fonction publique qui lui était applica
ble. Nul n'a prétendu que les conditions d'emploi
prévues dans la convention collective, dans le
Règlement ou dans la législation l'obligeaient à
utiliser sa voiture personnelle dans l'exercice de ses
fonctions ou à payer les dépenses engagées à cette
fin. Pour répondre aux exigences du sous-alinéa
8(1)h)(ii), M. Cival doit par conséquent établir
que l'entente concernant l'utilisation de sa voiture
était un contrat d'emploi en vertu duquel il devait
payer les dépenses faites à cette fin 2 .
Je suis disposé à admettre, pour les fins du
présent appel, que M. Cival pouvait conclure avec
son employeur un contrat, à titre individuel, por-
tant sur un aspect de son emploi, bien qu'il fût régi
par la convention collective, dans la mesure où le
contrat n'était pas incompatible avec les disposi
tions de la convention'. A mon avis, l'entente
conclue entre M. Cival et son employeur, si
entente il y avait, était tout au plus ce qu'on
appelle parfois un contrat unilatéral 4 . Cette
entente prévoyait que son employeur s'engageait à
lui rembourser, suivant un taux de millage donné,,
les dépenses faites pour utiliser son automobile
dans l'exercice de ses fonctions. Je n'interprète pas
cette entente comme la promesse faite par M.
Cival d'utiliser son automobile dans l'exercice de
ses fonctions et de payer lui-même les dépenses,
contre l'engagement de son employeur de les lui
rembourser. En d'autres termes, je décrirais l'en-
tente de la manière suivante: aucun contrat n'obli-
geait M. Cival à utiliser sa voiture pour son tra
vail, ni à payer les frais en découlant; si au cours
de l'année 1977, il avait refusé d'utiliser son auto
mobile à cette fin, il n'aurait pu être poursuivi par
son employeur pour inexécution de contrat. En
conséquence, pour reprendre les termes du sous-
alinéa 8(1)h)(ii), il n'était pas tenu, en vertu de
son contrat d'emploi, d'acquitter les frais de dépla-
cement engagés par lui pour l'accomplissement des
fonctions de son emploi. Cela suffit pour trancher
l'appel.
2 L'expression «son contrat d'emploi» au sous-alinéa
8(1)h)(ii) peut s'entendre au pluriel en vertu du paragraphe
26(7) de la Loi d'interprétation [S.R.C. 1970, chap. I-23].
3 Voir Re Nova Scotia Civil Service Commission and Nova
Scotia Government Employees Association (1980), 24 L.A.C.
(2d) 319.
4 Voir S. M. Waddams, The Law of Contracts, chap. 4,
«Unilateral Contracts».
J'ajouterai cependant que les avocats de M.
Cival ont fait valoir que les frais de millage versés
à ce dernier pour l'utilisation de sa voiture s'ajou-
teraient à son revenu à titre d'«allocation» en vertu
de l'article 5 et de l'alinéa 6(1)b) de la Loi de
l'impôt sur le revenu. M. Cival subirait évidem-
ment un grave préjudice si, en se conformant aux
conditions de l'allocation, il ne pouvait déduire les
dépenses qu'il a effectivement engagées. Bien sûr,
la question de savoir si le remboursement des frais
de millage constitue une «allocation» ne nous est
pas soumise. Il me semble cependant que les motifs
de jugement du juge Noël dans l'arrêt Ransom v.
The Minister of National Revenues pourraient
apporter une réponse à l'argument selon lequel le
remboursement des frais de millage constitue une
«allocation».
Par ces motifs, j'accueillerais l'appel, j'annule-
rais le jugement de la Division de première ins
tance et je maintiendrais la décision de la Commis
sion de révision de l'impôt confirmant la nouvelle
cotisation du Ministre à l'égard de l'année d'impo-
sition 1977 de l'intimé.
L'avocat de l'appelante a déclaré qu'il ne récla-
merait pas de dépens s'il obtenait gain de cause. Je
n'adjugerais donc pas de dépens, ni en appel ni en
première instance.
LE JUGE HEALD: Je souscris à ces motifs.
LE JUGE SUPPLÉANT KERR: Je souscris à ces
motifs.
5 [1968] 1 R.C.É. 293.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.