T-1386-83
James Joliffe, Colin Montgomery, Arthur Hansen,
Wallace Gray, Christopher France, William Grif-
fis et Byron Wright (demandeurs)
c.
La Reine du chef du Canada (défenderesse)
Division de première instance, juge Strayer—Van-
couver, 27 et 29 mars; Ottawa, 18 avril 1985.
Pêches — Lettre datée de novembre 1979 approuvant le
transfert d'un permis de pêche à la senne à poche à un nouveau
navire — L'art. 15(2) du Règlement, modifié en janvier 1980,
restreint la pêche au saumon à la senne à poche — Les permis
de pêche au saumon à la senne à poche délivrés au nouveau
navire en 1980 et en 1981 ne comportaient pas de restrictions,
mais le permis délivré en 1982 interdisait la pêche au saumon
à la senne — L'art. 15(2) du Règlement constitue une restric
tion à la pêche qui s'applique à quiconque se livre à la pêche
commerciale du saumon — Aucun permis n'est valide au-delà
de l'année pour laquelle il est délivré — Le droit d'un titulaire
de permis est susceptible d'être modifié par des lois validement
adoptées — Règlement sur l'immatriculation et la délivrance
de permis pour la pêche dans le Pacifique, C.R.C., chap. 824,
art. 4(1), 9(1),(2), 10(1)a),(2), 15(2) (mod. par DORS/80-85,
art. 4), 34(1),(2), 36(2), 37 — Loi sur les pêcheries, S.R.C.
1970, chap. F-14, art. 7, 9, 34d),e),g) (mod. par S.R.C. 1970
(1 e' Supp.), chap. 17, art. 4) — Loi sur les textes réglementai-
res, S.C. 1970-71-72, chap. 38, art. 11.
Interprétation des lois — Les demandeurs détenaient des
permis de pêche au saumon de catégorie «A» ne comportant
pas de restrictions relativement à la pêche à la senne à poche
— Une lettre datée de novembre 1979 approuvait le transfert
des permis à un nouveau navire — Une modification apportée
à l'art. 15(2) en janvier 1980 restreint la pêche au saumon à la
senne à poche — Pour appliquer l'art. 35c) de la Loi d'inter-
prétation, il est nécessaire d'examiner chaque situation afin de
déterminer si un «droit» est acquis — Aucun droit acquis au
permis au-delà de l'année pour laquelle il est délivré — L'art.
35c) ne protège le droit à un permis que jusqu'à la fin de
l'année pour laquelle le permis est délivré — Loi d'interpréta-
tion, S.R.C. 1970, chap. I-23, art. 35c) — Règlement sur
l'immatriculation et la délivrance de permis pour la pêche
dans le Pacifique, C.R.C., chap. 824, art. 15(2) (mod. par
DORS/80-85, art. 4).
Fin de non-recevoir — Les fonctionnaires du Ministère
étaient au courant des intentions des demandeurs de construire
un bateau destiné principalement à la pêche à la senne à poche
et de l'adoption prochaine d'un règlement visant à interdire ce
type de pêche — Le Ministère a approuvé le transfert des
permis — La Couronne ne peut être liée par le principe de
l'estoppel qui l'obligerait à ne pas tenir compte des disposi
tions expresses de la loi.
Les demandeurs sollicitent un jugement déclaratoire relative-
ment à leur droit à un permis de pêche au saumon à la senne à
poche. Les demandeurs détenaient trois permis, dont l'un les
autorisait à pêcher à la senne à poche, et dont ils ont demandé
le transfert à un nouveau bateau en construction destiné princi-
paiement à la pêche au saumon à la senne à poche. Par lettre
datée de novembre 1979, le ministère des Pêches a approuvé le
transfert des permis. Bien que les fonctionnaires du Ministère
aient été au courant que l'on se proposait de modifier le
Règlement sur l'immatriculation et la délivrance de permis
pour la pêche dans le Pacifique, modification susceptible d'em-
pêcher les demandeurs de pêcher le saumon à la senne à poche,
ceux-ci n'en ont pas été informés. En janvier 1980, le paragra-
phe 15(2) du Règlement a été modifié et des restrictions ont été
apportées à la pêche au saumon à la senne à poche. En 1980 et
en 1981, les trois permis ont été délivrés pour le nouveau
bateau. Cependant, le permis délivré en 1982 interdisait expres-
sément la pêche au saumon à la senne à poche. Les questions en
litige sont: (1) Le paragraphe 15(2) du Règlement apporte-t-il
une restriction au permis qui ne peut avoir pour effet de
modifier des permis existants ou constitue-t-il une restriction à
la pêche susceptible de s'appliquer à quiconque pêche le
saumon peu importe la date à laquelle le permis a été délivré?
(2) L'alinéa 35c) de la Loi d'interprétation empêche-t-il toute
application du paragraphe 15(2) du Règlement qui aurait pour
effet de modifier les permis existants? (3) La Couronne est-elle
tenue de reconnaître le droit des demandeurs de pêcher le
saumon à la senne à poche?
Jugement: l'action doit être rejetée.
Le paragraphe 15(2), tel qu'il a été adopté, constitue une
restriction à la pêche qui s'applique également à quiconque se
livre à la pêche commerciale du saumon. Les articles 34 et 37
du Règlement prévoient que les permis ne sont valides que pour
un an et expirent le 31 mars de chaque année. Aux termes de
l'article 7, le Ministre exerce une «discrétion absolue» en ce qui
concerne la délivrance de nouveaux permis. Il est donc impossi
ble de trouver un fondement juridique à l'«octroi» d'un permis
au-delà des droits qui ont été accordés pour l'année pour
laquelle il est délivré. Le droit accordé à un détenteur de permis
est susceptible d'être modifié par des lois validement adoptées.
Un problème similaire se pose lorsque des règlements munici-
paux de construction sont appliqués d'une manière qui porte
atteinte aux droits dont jouissent les propriétaires de terrains:
Canadian Petrofina Ltd. v. Martin and Ville de St. Lambert,
[1959] R.C.S. 453.
En appliquant un principe d'interprétation comme celui que
l'on trouve à l'alinéa 35c), il faut examiner quel «droit» a été
accordé. Il est nécessaire d'examiner chaque situation afin de
déterminer si l'approbation a conféré un droit qui, en vertu des
principes de l'interprétation des lois, est censé ne pas avoir été
supprimé par l'adoption de nouveaux critères relatifs à ces
approbations. Le permis de catégorie «A» demeurait assujetti
aux dispositions législatives validement adoptées prévoyant la
manière de pratiquer ce type de pêche, peu importe qu'elles
aient été adoptées avant ou après la délivrance du permis. Le
fait que l'article 10 du Règlement exige que les bateaux soient
classés d'une certaine manière en raison de la prise qu'ils ont
rapportée ne signifie pas que le droit de pêcher leur est garanti
indéfiniment. Les activités auxquelles pourra se livrer un
bateau appartenant à une certaine catégorie dépendent des
dispositions législatives qui régissent la pêche commerciale à
une époque donnée. Enfin, le paragraphe 15(2) n'est pas rédigé
comme le serait une disposition ayant pour but de restreindre
des permis. De toute manière, l'alinéa 35c) ne pouvait mettre le
droit de pêcher des demandeurs à l'aide d'une senne à poche à
l'abri du paragraphe 15(2) du Règlement que jusqu'à la fin de
l'année pour laquelle le permis a été délivré.
Les fonctionnaires de la Couronne ne peuvent être liés par le
principe de l'estoppel qui les obligerait à ne pas tenir compte
des dispositions expresses de la loi.
JURISPRUDENCE
DÉCISION APPLIQUÉE:
Canadian Petrofina Ltd. v. Martin and Ville de St.
Lambert, [1959] R.C.S. 453.
DISTINCTION FAITE AVEC:
Laurie's Caterers Ltd. v. North Vancouver (1984), 53
B.C.L.R. 381 (C.S.).
DÉCISIONS EXAMINÉES:
Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada
c. Dallialian, [1980] 2 R.C.S. 582; 33 N.R. 118;
McDoom c. Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Im-
migration, [1978] 1 C.F. 323; (1977), 77 D.L.R. (3d)
559 (P' inst.); Central Mortgage and Housing Corp. v.
Co-operative College Residences, Inc. et al. (1975), 71
D.L.R. (3d) 183 (C.A. Ont.).
DÉCISIONS CITÉES:
Lapointe c. Min. des Pêches et Océans (1984), 9 Admin.
L.R. 1 (C.F. 1" inst.); St. Ann's Fishing Club v. The
King, [1950] R.C.S. 211.
AVOCATS:
J. Raymond Pollard pour les demandeurs.
Alan D. Louie pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Buell Ellis, Vancouver, pour les demandeurs.
Le sous-procureur général du Canada pour la
défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE STRAYER:
Les faits
Les demandeurs en l'espèce sollicitent certains
jugements déclaratoires reconnaissant qu'ils sont
ou ont le droit d'être titulaires d'un permis de
pêche au saumon à la senne à poche aux fins de
l'utilisation de leur bateau, le Proud Venture.
En 1979, les demandeurs étaient propriétaires
d'un chalutier de pêche appelé le Chasam à l'égard
duquel ils détenaient les permis de pêche suivants:
un permis de pêche au saumon de catégorie «A»,
un permis de pêche au poisson de fond au chalut et
un permis de pêche de la crevette sur la côte ouest.
A l'automne 1979, ils ont passé une commande
pour la construction d'un nouveau bateau destiné
principalement à la pêche au saumon à la «senne à
poche». Comme la saison de pêche au saumon à la
senne à poche est très courte, le bateau a été conçu
afin de permettre, dans une certaine mesure, d'au-
tres types de pêche, bien qu'il faille reconnaître
qu'il ne saurait être aussi efficace en servant à ces
autres fins. Le permis de pêche au saumon de
catégorie «A» qu'ils détenaient à l'égard du
Chasam leur permettait de pêcher à la senne à
poche.
Le 14 novembre 1979, l'un des demandeurs a
écrit au ministère des Pêches pour le compte des
autres demandeurs afin de demander que les
permis susmentionnés utilisés pour le Chasam
soient transférés au navire en construction. Voici le
texte du paragraphe final de cette lettre:
[TRADUCTION] Nous aimerions que vous approuviez sans délai
notre demande puisque nous avons versé une avance de
124 000 $ pour la construction du nouveau bateau et que notre
banque refusera de nous prêter davantage tant que le permis de
pêche n'aura pas été approuvé. Je vous signale que dans cette
affaire, le facteur temps est capital puisque la construction de
notre nouveau bateau est déjà avancée.
Après avoir accusé réception de la lettre envoyée
pour le compte des demandeurs, le Ministère les a
informés, dans une lettre datée du 29 novembre
1979, que leur demande avait été examinée par le
comité d'appel des permis. de bateaux. Cette lettre
déclarait: [TRADUCTION] «Le comité approuve
donc votre demande» mais ajoutait toutefois qu'un
numéro de bateau de pêche commerciale ne serait
assigné au nouveau bateau que lorsque les ancien-
nes plaques d'immatriculation et les plaquettes de
validation annuelle seraient retournées et annulées.
Les demandeurs furent en outre informés que les
nouvelles plaques et plaquettes ne seraient pas
délivrées tant que le Ministère n'aurait pas reçu
d'autres documents, y compris une [TRADUCTION]
«demande dûment remplie et des droits initiaux
d'immatriculation de 10 $». Il ressort de la preuve
que l'un ou plusieurs des fonctionnaires du minis-
tère des Pêches qui ont traité cette demande
étaient alors au courant que l'on se proposait de
modifier le Règlement sur l'immatriculation et la
délivrance de permis pour la pêche dans le Pacifi-
que, C.R.C., chap. 824, modification qui pourrait
empêcher les demandeurs de pêcher le saumon à la
senne à poche. Il est également clair que les fonc-
tionnaires du Ministère, à qui l'on avait fourni un
plan du bateau, devaient savoir que ledit bateau
était spécialement conçu pour ce type de pêche.
Néanmoins, nulle mention n'en a été faite aux
demandeurs avant qu'ils ne poursuivent la cons
truction sur la foi de la lettre du 29 novembre qui
indiquait que le comité compétent avait approuvé
le transfert des permis. Le nouveau paragraphe
15(2) [mod. par DORS/80-85, art. 4] du Règle-
ment a été adopté par décret le 18 janvier 1980.
Cette modification qui a été enregistrée le 21
janvier 1980 et publiée dans la Gazette du Canada
le 13 février 1980 prévoit:
15....
(2) Il est interdit d'utiliser un bateau pour pêcher le saumon
au moyen d'une seine à poche à moins que ce bateau ou que le
ou les bateaux dont le privilège de pêche du saumon a été cédé,
n'aient débarqué du saumon pris à l'aide d'une seine à poche au
cours de 1975 et 1976 et avant le 28 juillet 1977.
Dans un exposé conjoint des faits déposé au
procès, les parties ont fait valoir que le Chasam
n'avait pas débarqué de saumon pris à l'aide d'une
senne à poche aux époques précisées dans la modi
fication, de sorte que le nouveau bateau des
demandeurs n'était pas autorisé à pêcher au
moyen d'une senne à poche conformément à cette
«clause des droits acquis».
Les demandeurs n'étaient pas au courant, sem-
ble-t-il, de l'adoption de ce règlement bien qu'il ait
été publié dans la Gazette du Canada. Dans une
lettre datée du 3 avril 1980, le ministère des
Pêches les a avisés que leur nouveau bateau serait
immatriculé notamment [TRADUCTION] «pour la
pêche au saumon autrement qu'à la senne». Le 9
avril 1980, une demande a été présentée pour le
compte des demandeurs afin que des permis de
pêche soient délivrés pour leur nouveau bateau, qui
s'appelait maintenant le Proud Venture. La
demande portait sur les trois même permis de
pêche que les demandeurs avaient détenus pour
utiliser le Chasam. Cette demande a, semble-t-il,
été présentée en conformité avec le Règlement qui
prévoit qu'une demande de permis doit être sou-
mise à chaque année et avec la condition énoncée
dans la lettre d'«approbation» du transfert des
permis du Chasam au nouveau bateau, datée du
29 novembre 1979. Comme je l'ai indiqué, l'une de
ces conditions était la réception d'une «demande
dûment remplie» et le paiement de «droits initiaux
d'immatriculation de 10 $». Ces permis de pêche
ont par la suite été délivrés à l'égard du Proud
Venture dont la construction a pris fin vers la
mi-avril 1980 et qui a été lancé à la même époque.
Le permis de pêche de catégorie «A» pour la pêche
au saumon, à l'instar du permis délivré en 1981, ne
contenait aucune restriction expresse en ce qui
concerne la pêche à la senne à poche. Le permis de
pêche délivré pour l'année 1982 contenait toutefois
la restriction expresse suivante: [TRADUCTION]
«interdiction de pêcher le saumon à la senne». On
n'a pas présenté d'éléments de preuve indiquant de
façon précise quels ont été les effets de cette
restriction sur les activités de pêche du Proud
Venture, mais l'avocat des demandeurs a fait
observer qu'en 1984, le bateau a été effectivement
empêché de faire usage du permis de catégorie «A»
pour la pêche au saumon qui avait été transféré du
Chasam pour les fins de la pêche à la senne à
poche, et qu'il a fallu se procurer un autre permis.
Ces événements, s'ils ont quelque pertinence, se
rapportent à une poursuite éventuelle en domma-
ges-intérêts dont il sera question plus loin.
Points en litige
Les demandeurs soutiennent essentiellement que
le nouveau paragraphe 15(2) du Règlement adopté
en janvier 1980 apporte une restriction au permis.
Selon eux un permis de pêche est un bien incorpo-
rel qui a une valeur commerciale et qui ne peut
être modifié ou révoqué si ce n'est pour des motifs
prévus dans la Loi sur l'es pêcheries, S.R.C. 1970,
chap. F-14, ou dans le Règlement sur l'immatri-
culation et la délivrance de permis pour la pêche
dans le Pacifique. Ils affirment que ces conditions
et procédures n'ont aucune application en l'espèce.
Ils soutiennent en outre que le nouveau paragraphe
15(2) du Règlement adopté en janvier 1980 ne
peut avoir pour effet de modifier des permis exis-
tants, en raison des dispositions de l'alinéa 35c) de
la Loi d'interprétation, S.R.C. 1970, chap. I-23
qui énonce:
35. Lorsqu'un texte législatif est abrogé en tout ou en partie,
l'abrogation
c) n'a pas d'effet sur quelque droit, privilège, obligation ou
responsabilité acquis, né, naissant ou encouru sous le régime
du texte législatif ainsi abrogé;
Les demandeurs soutiennent que l'objet du nou-
veau paragraphe est d'abroger les dispositions
antérieures concernant l'octroi de licences et que,
de ce fait, il ne pouvait avoir pour effet de suppri-
mer les droits acquis en vertu d'un permis déjà
délivré. Ils font valoir qu'en vertu de la lettre datée
du 29 novembre 1979 qui a approuvé leur
demande de transfert de permis du Chasam au
Proud Venture, un permis de pêche au saumon de
catégorie «A» a été effectivement délivré à l'égard
du Proud Venture, leur accordant du même coup
le droit de pêcher le saumon, sous réserve unique-
ment des conditions applicables à cette époque à ce
type de pêche.
La défenderesse prétend en fait que le paragra-
phe 15(2) du Règlement constitue une restriction à
la pêche et une mesure législative susceptible de
s'appliquer à quiconque pêche le saumon, peu
importe la date à laquelle son permis a été délivré.
Elle ajoute que comme la lettre datée du 29
novembre 1979 ne comportait pas l'octroi d'un
permis, les demandeurs n'étaient de toute façon
investis d'aucun droit avant l'adoption du Règle-
ment. Le permis ne pouvait être délivré qu'après la
réception d'une demande à cette fin et le paiement
des droits requis, et cette demande n'a été présen-
tée que le 9 avril 1980, près de trois mois après la
modification du Règlement.
Je dois aussi signaler qu'au moment où ils ont
intenté la présente action, en juin 1983, les deman-
deurs ont uniquement sollicité des jugements
déclaratoires concernant leur droit à un permis de
pêche au saumon de catégorie «A» sans restriction
quant aux engins utilisés, mais qu'ils ont modifié
leur déclaration en février 1985, après que la Cour
eut fixé la date du procès, afin de réclamer égale-
ment des dommages-intérêts. Je crois comprendre
que la défenderesse a consenti à cette modification
mais à la seule condition qu'elle soit autorisée à
modifier la partie de sa défense concernant les
dommages-intérêts avant que cette question ne soit
jugée. Comme cela n'a pas été fait et qu'il n'y a
pas eu non plus, avant le procès, d'interrogatoire
préalable concernant la question des dommages-
intérêts, les deux avocats ont demandé à la Cour
de trancher les questions concernant le droit au
permis et l'étendue de celui-ci, se réservant la
possibilité d'engager des procédures ultérieures
concernant la question des dommages-intérêts, ce
qui dépendra en partie de ma décision sur la
question du permis. Je reviendrai à cette question
à la fin de mes motifs de jugement.
Conclusions
Je suis venu à la conclusion que le paragraphe
15(2) du Règlement sur l'immatriculation et la
délivrance de permis pour la pêche dans le Pacifi-
que, tel qu'il a été adopté par le gouverneur en
conseil le 18 janvier 1980, constitue une restriction
à la pêche qui s'applique également à quiconque se
livre à la pêche commerciale du type de celle visée
par ce Règlement, y compris aux demandeurs. Ce
paragraphe est entré en vigueur à cette fin à la
date où il a été enregistré, c'est-à-dire le 21 janvier
1980 et, en vertu de la Loi sur les textes régle-
mentaires, S.C. 1970-71-72, chap. 38, art. 11, il
aurait pu servir de fondement à une poursuite à
partir de la date de sa publication dans la Gazette
du Canada, soit le 13 février 1980.
Il importe de relever quelques-unes des disposi
tions importantes de la Loi sur les pêcheries et du
Règlement sur l'immatriculation et la délivrance
de permis pour la pêche dans le Pacifique. Les
dispositions essentielles de la Loi sont les suivantes
[mod. par S.R.C. 1970 (ler Supp.), chap. 17, art.
4]:
7. Le Ministre peut, à sa discrétion absolue, lorsque le droit
exclusif de pêche n'existe pas déjà en vertu de la loi, émettre
des baux de pêche, des permis pour l'exploitation de pêcheries
ou des permis de pêche, ou il peut en autoriser l'émission en
quelque endroit que ces pêcheries soient situées ou que la pêche
doive se pratiquer; mais, sauf les dispositions qui suivent, les
baux ou les permis pour un terme excédant neuf années ne
doivent être émis que par autorisation du gouverneur général en
conseil.
9. Le Ministre peut révoquer tout bail ou permis délivré sous
l'autorité de la présente loi, s'il a constaté que les opérations
visées par ce permis n'ont pas été dirigées conformément à ses
dispositions.
34. Le gouverneur en conseil peut édicter des règlements
concernant la réalisation des objets de la présente loi et l'appli-
cation de ses dispositions et, en particulier, peut, sans restrein-
dre la généralité de ce qui précède, édicter des règlements
d) concernant l'exploitation des bateaux de pêche;
e) concernant l'utilisation des appareils et accessoires de
pêche;
g) concernant les modalités selon lesquelles un bail ou un
permis peut être délivré;
Le Règlement contient les dispositions suivantes:
4. (1) Il est interdit d'utiliser un bateau pour la pêche
commerciale, à moins
a) qu'un permis de pêche commerciale n'ai été délivré à
l'égard du bateau;
b) que des plaques d'immatriculation, sous réserve du para-
graphe (2) ne soient lisiblement fixées sur les deux côtés de la
proue ou du kiosque de la barre;
c) que des plaquettes de validation pour la pêche commer-
ciale n'aient été délivrées à l'égard du bateau et ne soient
fixées aux plaques d'immatriculation; et
d) que le bateau ne satisfasse aux exigences de l'article 13.
9. (1) Toute demande d'immatriculation d'un bateau de
pêche en vertu du présent règlement doit être faite au directeur
régional au moyen de la formule approuvée par le Ministre.
(2) À la suite d'une demande, mentionnée au paragraphe (1),
faite à l'égard d'un bateau qui a été classé conformément à
l'article 10, le bateau sera immatriculé auprès du ministère à
titre de bateau de pêche commerciale et des plaques d'immatri-
culation en métal portant un numéro de série seront délivrées à
l'égard du bateau.
10. (1) Tout bateau immatriculé à titre de bateau de pêche
commerciale doit être classé dans l'une des catégories suivantes:
a) bateau de la catégorie A:
(i) bateau qui a rapporté en 1967 ou avant le 6 septembre,
en 1968, la prise commerciale et la vente de 10,000 livres
ou plus de saumon rose ou de saumon kéta, ou l'équivalent,
(ii) bateau qui remplace un bateau de la catégorie A,
conformément à l'article 18, ou
(iii) bateau qui, n'eût été de circonstances hors du contrôle
du propriétaire, aurait pu satisfaire aux exigences du
sous-alinéa (i) et à l'égard duquel la délivrance d'un
permis de pêche commerciale du saumon est autorisée par
le Ministre vu les circonstances;
(2) Tout bateau classé conformément au paragraphe (1) sera
désigné ci-après comme bateau de la catégorie A, bateau de la
catégorie B, bateau de la catégorie C ou bateau de la catégorie
D, selon le cas, et il lui sera délivré un permis approprié.
(L'alinéa 10(1)a) a été modifié en 1981
[DORS/81-161, art. 1], mais c'est le texte précité
qui était en vigueur au cours de la période en
cause.)
34. (1) Sous réserve du paragraphe (2), aucun permis ni
aucune plaque d'immatriculation ou plaquette de permis, déli-
vré conformément au présent règlement, n'est valide après le 31
mars suivant la date de délivrance.
(2) Aucune plaquette de permis de pêche du hareng plein
délivrée conformément au présent règlement n'est valide après
le 31 décembre suivant la date de délivrance.
36....
(2) Lorsqu'un bateau, à l'égard duquel ont été délivrées,
conformément au présent règlement, des plaques d'immatricu-
lation ou des plaquettes de permis, est vendu ou qu'il en est
disposé autrement, les plaques et les plaquettes restent valides à
l'égard de ce bateau pour la période durant laquelle elles
auraient été valides si le bateau n'avait pas été vendu.
37. Un permis de pêche commerciale délivré à l'égard d'un
bateau n'est valide que pour un an et ne peut être renouvelé que
dans l'année qui suit le moment où il cesse d'être valide. [C'est
moi qui souligne.]
Bien qu'il faille accorder beaucoup de poids à
l'argument des demandeurs selon lequel les permis,
parce qu'ils ont une valeur commerciale reconnue
et sont souvent achetés et vendus, confèrent à leurs
détenteurs un droit irrévocable sauf (comme le
prévoit l'article 9 de la Loi) lorsqu'il y a eu
manquement à l'une des conditions du permis, je
ne peux trouver dans la Loi ou dans le Règlement
de fondement à une telle interprétation. Il faut
d'abord souligner que quelle que soit la croyance
populaire à ce sujet, les articles 34 et 37 du
Règlement prévoient qu'aucun permis n'est valide
pour plus d'un an et tous expirent le 31 mars de
chaque année. Il est vrai qu'aux termes de l'article
9 de la Loi, le Ministre ne peut exercer son pouvoir
de révoquer les permis que dans les seuls cas où il y
a eu manquement à une condition du permis, et il
ne fait pas de doute que dans l'exercice de ce
pouvoir de révocation, le Ministre ou ses représen-
tants doivent agir équitablement: voir Lapointe c.
Min. des Pêches et Océans (1984), 9 Admin. L.R.
1 (C.F. ire inst.). Mais les permis prennent fin
chaque année et aux termes de l'article 7, le
Ministre exerce une «discrétion absolue» en ce qui
concerne la délivrance de nouveaux permis. Il
m'est donc impossible de trouver un fondement
juridique à l'«octroi» d'un permis au-delà des droits
qui sont accordés pour l'année pour laquelle il est
délivré.
Toutefois, peu importe qu'un droit soit accordé
au détenteur d'un permis pour un an ou pour une
période indéterminée, ce droit est susceptible
d'être modifié par des lois validement adoptées. Un
problème semblable s'est souvent posé lorsque des
règlements municipaux de construction ont été
appliqués d'une manière qui a porté atteinte aux
droits dont jouissaient les propriétaires de terrain.
La Cour suprême du Canada s'est penchée sur
cette question dans l'arrêt Canadian Petrofina
Ltd. v. Martin and Ville de St. Lambert, [1959]
R.C.S. 453, aux pages 458 et 459, où elle a
déclaré:
[TRADUCTION] La seule raison pour laquelle un pouvoir
reconnu par la loi en matière de zonage est conféré à une
autorité municipale est de lui permettre de restreindre, dans
l'intérêt public général, le droit que posséderait autrement le
propriétaire d'un terrain, à partir du moment où ce pouvoir est
mis en application, de construire sur son terrain les bâtiments
qu'il juge appropriés. Par conséquent, le statut d'un proprié-
taire de terrain ne peut en soi influer sur l'application d'un
règlement mettant en œuvre le pouvoir reconnu par la loi sans
porter atteinte à ce même pouvoir. Avant l'adoption de ce
règlement, les droits d'un propriétaire de terrain sont donc
incertains dans la mesure où ils sont soumis aux restrictions que
la ville, agissant dans les limites du pouvoir qui lui est reconnu
par la loi, peut imposer.
De même, dans la présente affaire, le détenteur
d'un permis de pêche demeure soumis à l'exercice
possible par le Parlement de la compétence législa-
tive qui lui est conférée par la Constitution en
matière de pêcheries, ou par le gouverneur en
conseil dans l'exercice de son pouvoir législatif
délégué comme le prescrit la Loi. Les demandeurs
n'ont pas laissé entendre qu'en adoptant le para-
graphe 15(2) du Règlement, le gouverneur en
conseil a outrepassé, de quelque manière que ce
soit, la compétence qui lui a été déléguée ou que le
Parlement n'avait pas la compétence nécessaire
pour déléguer ce pouvoir.
En appliquant un principe d'interprétation
comme celui que l'on trouve à l'alinéa 35c) de la
Loi d'interprétation, il faut examiner avec soin
quel «droit», s'il en est, a été accordé. Il est vrai
que dans l'arrêt Canadian Petrofina, la Cour a
déclaré, incidemment, à la page 459, qu'à partir du
moment où un permis de construction a été délivré,
le droit de construire en conformité avec les condi
tions dudit permis a pris naissance. Dans l'arrêt
Commission de l'emploi et de l'immigration du
Canada c. Dallialian, [1980] 2 R.C.S. 582; 33
N.R. 118, la Cour suprême du Canada a statué
que lorsqu'une personne a établi son admissibilité
à la période de prestation de 51 semaines prévue
par la Loi de 1971 sur l'assurance-chômage [S.C.
1970-71-72, chap. 48], elle avait droit à ces presta-
tions même si des modifications concernant les
critères d'admissibilité ont été subséquemment
apportées à la loi. En d'autres termes, ses droits
ont été déterminés conformément au texte législa-
tif en vigueur au moment où sa demande a été
présentée et approuvée. Dans l'affaire McDoom c.
Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigra-
tion, [1978] 1 C.F. 323; (1977), 77 D.L.R. (3d)
559 (i re inst.), le juge Walsh a statué que la
désignation par un immigrant reçu de ses fils en
vue de leur admission au Canada a pris effet au
moment où elle a été soumise et acceptée à
Toronto même si elle a dû être envoyée à New
York pour «appréciation». Par conséquent, des exi-
gences additionnelles imposées ultérieurement par
voie de règlement concernant la date d'entrée en
vigueur des désignations ne peuvent à bon droit
s'appliquer à cette situation. Dans le même ordre
d'idées, on a jugé, dans l'arrêt Central Mortgage
and Housing Corp. v. Co-operative College Resi
dences, Inc. et al. (1975), 71 D.L.R. (3d) 183
(C.A. Ont.), que la notification par la S.C.H.L. de
son approbation d'un prêt avait effectivement lié
cette société, bien qu'une modification ultérieure à
sa Loi ait nécessité l'approbation d'un gouverne-
ment provincial pour un prêt comme celui qui était
en cause. Ces causes démontrent qu'il est néces-
saire d'examiner chaque situation afin de détermi-
ner si l'approbation a conféré un droit qui, en vertu
des principes de l'interprétation des lois, est censé
ne pas avoir été supprimé par l'adoption de nou-
veaux critères relatifs à ces approbations. Mais les
règles d'interprétation des lois comme l'alinéa 35c)
de la Loi d'interprétation n'ont pas pour effet de
mettre les titulaires de droits «acquis» à l'abri des
lois futures qui sont suceptibles de porter atteinte à
la jouissance de ces droits.
Je conclus donc que le permis de catégorie «A»
pour la pêche au saumon que les demandeurs
détenaient à l'égard du Chasam, et qu'ils ont
transféré au Proud Venture, demeurait assujetti
aux dispositions législatives régulièrement adop-
tées prévoyant la manière de pratiquer ce type de
pêche, même si ces dispositions ont été adoptées
avant ou après la délivrance du permis. Je ne peux
souscrire à l'interprétation que donnent les deman-
deurs de l'article 10 du Règlement, selon laquelle
le fait qu'un bateau ou ceux qui le remplacent
doivent être classés pour fins d'immatriculation
comme des bateaux de la catégorie A en raison de
la prise commerciale qu'ils ont rapportée signifie
que le droit de pêcher au moyen d'une senne à
poche leur est garanti indéfiniment. Les activités
auxquelles pourra se livrer un bateau de la catégo-
rie A dépendent des dispositions législatives qui
régiront la pêche commerciale à une époque
donnée. Je ne suis pas d'accord non plus avec l'idée
que le nouveau paragraphe 15(2) du Règlement a
pour but de restreindre les permis mais non les
activités de pêche. Il n'est pas rédigé comme le
serait une disposition ayant pour but de restreindre
des permis. Le fait que le Ministère fasse spécifi-
quement mention de l'interdiction de pêcher à la
senne à poche dans les lettres qu'il a adressées aux
demandeurs les 3 et 14 avril 1980 et dans le permis
qui leur a été délivré pour 1982 s'explique autre-
ment. Comme le nouveau paragraphe 15(2) ne
s'appliquait qu'aux bateaux qui avaient débarqué
du saumon pris à l'aide d'une senne à poche pen
dant une période donnée, il était normal que soient
identifiés les bateaux qui, de l'avis du Ministère,
étaient visés par l'interdiction.
Même si je devais accepter que les demandeurs
avaient, en 1979, un droit acquis à l'égard d'un
permis de pêche de catégorie «A» pour la pêche au
saumon, y compris le droit de pêcher au moyen
d'une senne à poche, l'alinéa 35c) de la Loi d'in-
terprétation prévoit que ce droit ne serait à l'abri
du nouveau paragraphe 15(2) du Règlement que
jusqu'à la fin de l'année pour laquelle le permis a
été délivré. Comme je l'ai souligné plus haut, ces
permis ne sont légalement valides que pour un an
et ils doivent être renouvelés à chaque année. En
renouvelant un permis après le 21 janvier 1980, le
Ministre ou ses représentants n'étaient pas habili-
tés à accorder, expressément ou implicitement, un
permis dont les conditions allaient à l'encontre du
paragraphe 15(2) tel qu'il a été adopté par le
gouverneur en conseil. Même si l'on avait reconnu
aux demandeurs le droit de continuer de pêcher au
moyen d'une senne à poche jusqu'à l'expiration de
leur permis 1979-1980, le 31 mars 1980, ce fait
n'a, quant à moi, aucune conséquence pratique
puisque ni l'un ni l'autre de leurs bateaux n'ont été
utilisés pour la pêche entre le moment où la
demande de transfert a été présentée, c'est-à-dire
le 14 novembre 1979, et le moment où le nouveau
bateau a été lancé, en avril.
L'avocat des demandeurs a soutenu que de toute
façon la Couronne ne pouvait nier leur droit de
pêcher le saumon au moyen d'une senne à poche
parce que le Ministère, en approuvant le transfert
des permis, le 29 novembre 1979, et malgré le fait
qu'il était au courant de l'intention des deman-
deurs de construire un bateau à cette fin et de
l'adoption prochaine d'un règlement visant à inter-
dire la pêche à la senne à poche, a incité ces
derniers à faire construire un navire conçu pour
des fins qui seraient bientôt illégales. Les deman-
deurs ont cité des décisions qui affirment que la
Couronne peut être liée par le principe de l'estop-
pel. Sans examiner en détail la question du préju-
dice, puisque je ne suis pas tenu de le faire en
l'espèce et que cette question pourrait être prise en
considération dans des litiges à venir, je suis con-
vaincu que dans les circonstances de l'espèce, les
fonctionnaires de la Couronne ne peuvent être liés
par le principe de l'estoppel qui les obligerait à ne
pas tenir compte des dispositions expresses de la
loi: voir, par. ex., St. Ann's Fishing Club v. The
King, [1950] R.C.S. 211. Cela ne veut pas dire que
la conduite du ministère des Pêches est excusable
ou explicable dans les circonstances. Il est évident
que certains des fonctionnaires du Ministère
savaient, ou auraient dû savoir, que celui-ci encou-
rageait en fait les demandeurs à faire un investis-
sement coûteux concernant principalement une
activité que le gouverneur en conseil pourrait bien-
tôt interdire sur recommandation du Ministère. Le
procès n'a révélé aucun fait qui permette d'expli-
quer leur conduite.
Depuis le procès, l'avocat des demandeurs a
aussi attiré mon attention sur la décision de la
Cour suprême de la Colombie-Britannique Lau-
rie's Caterers Ltd. v. North Vancouver (1984), 53
B.C.L.R. 381 (C.S.). Cette décision traite de la
responsabilité imputable à un gouvernement muni
cipal qui n'a pas averti une personne ayant réussi à
obtenir un permis de construction qu'on pourrait
refuser de lui délivrer un permis pour l'exploitation
du type de commerce projeté. Outre la question de
savoir si les principes applicables à un organisme
municipal s'appliquent aussi à la Couronne et à ses
fonctionnaires, la cause ne porte pas sur la validité
de la restriction apportée au permis commercial
qui a empêché le demandeur d'exploiter l'entre-
prise qu'il projetait. La décision concerne unique-
ment la question de la responsabilité découlant de
cette restriction. Il est possible, comme je l'ai déjà
fait remarquer, qu'elle soit pertinente à un stade
ultérieur de cette instance, mais elle ne s'applique
pas à la question qui m'est présentement soumise.
L'action est donc rejetée pour ce qui est des
jugements déclaratoires sollicités par les deman-
deurs à l'égard du permis. Les frais de l'action à ce
jour seront à la charge de ces derniers.
L'avocat des demandeurs m'a informé que
même si j'arrivais à une telle conclusion, cela
n'empêcherait pas nécessairement ses clients de
poursuivre leur demande en dommages-intérêts. Je
crois comprendre que les demandeurs pourraient
fonder leur demande sur le fait que la défenderesse
aurait engagé sa responsabilité délictuelle en
représentant les faits de façon inexacte. Cette
question ne m'a pas été soumise et elle ne pourra
être instruite que si la défenderesse a l'occasion de
modifier sa défense afin de répondre à cette
demande. D'autres communications de documents
et interrogatoires préalables pourraient aussi s'avé-
rer nécessaires. Pour le moment, il ne m'appartient
pas de faire des commentaires sur le succès éven-
tuel d'une telle demande. Je dirai simplement que
si les demandeurs décident de poursuivre leur
demande en dommages-intérêts, la question devra
être examinée ultérieurement dans le cadre de la
présente action de la manière et à la date que
fixera le juge en chef adjoint.
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