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T-1622-86
Bande indienne de Montana (requérante) c.
Ministre des Affaires indiennes et du Nord cana- dien (intimé)
et
Wendy Smith (partie intervenante)
RÉPERTORIÉ: BANDE INDIENNE DE MONTANA C. CANADA (MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANA- DIEN)
Division de première instance, juge en chef adjoint Jerome—Edmonton, 4 et 5 janvier; Ottawa, 15 avril 1988.
Accès à l'information Des bandes indiennes tentent d'em- pêcher la divulgation, en vertu de la Loi, d'états financiers fournis au gouvernement conformément à la Loi sur les Indiens Décision du Ministère de divulguer les renseigne- ments demandés, sauf les renseignements personnels Demande accueillie Les documents ministériels portant sur les fonds de la bande sont confidentiels et ont été traités de façon confidentielle au sens de l'art. 20(1)b) Les renseigne- ments concernant les fonds publics sont consignés dans d'au- tres documents du Ministère en vertu desquels les transferts ont été effectués Il n'y a aucune raison de prélever une quantité minime de renseignements concernant des fonds publics dans des documents confidentiels du ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada, lorsqu'on peut les obtenir d'autres ministères.
Peuples autochtones Accès à l'information Les états financiers confidentiels soumis au ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada en vertu de la Loi sur les Indiens ne devraient pas être divulgués Pour ce qui est des rensei- gnements concernant les fonds publics reçus sous forme d'oc- trois et d'accords de contribution, on devrait s'adresser aux ministères responsables des transferts pour les obtenir.
Il s'agit de l'une des sept demandes déposées en vertu de l'article 44 de la Loi sur l'accès à l'information dans lesquelles des bandes indiennes sollicitent l'examen de la décision du ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada de divul- guer leurs états financiers vérifiés fournis à l'intimé en vertu de la Loi sur les Indiens. La bande prétend que, puisque les documents ont été obtenus dans le cadre d'une relation de fiduciaire avec la Couronne, ils ne sont pas des documents d'une institution du gouvernement et que, s'ils sont couverts par la Loi, ils sont exemptés de communication par l'action des articles 19 et 20.
Jugement: la demande devrait être accueillie.
En raison des exigences de communication, les états finan ciers sont des documents d'institutions fédérales. Limiter la définition de l'expression «control» afin de les exclure conduirait à un dangereux précédent. Le Parlement a tenu compte des préoccupations des requérantes en édictant des dispositions d'exceptions dans la Loi.
L'exception des renseignements personnels prévue au para- graphe 19(1) s'applique lorsque des individus sont nommés ou identifiés dans les états financiers. L'exception ne s'applique toutefois pas à l'ensemble des états financiers, puisque les dossiers n'indiquent pas comment la valeur nette de chaque membre individuel peut être calculée à partir des chiffres globaux de la bande, Même si de tels renseignements pouvaient être extraits des états financiers, empêcher la divulgation pour ce motif équivaudrait à un élargissement injustifié de l'article 19.
En vertu de l'alinéa 20(1)b), les renseignements demandés ne devraient toutefois pas être divulgués, puisqu'il s'agit de rensei- gnements confidentiels fournis à une institution fédérale par un tiers qui les a traités comme tels de façon constante. Les seules personnes qui pourraient avoir accès à ces renseignements sont celles que lesdits renseignements concernent, c'est-à-dire les membres de la bande. Le nombre de personnes ayant accès à ces renseignements n'est pas un facteur déterminant de leur nature confidentielle si uniquement ceux qui ont un intérêt dans ces derniers y ont accès. L'affichage fait sur les réserves n'affecte pas la nature confidentielle des renseignements, puis- que les réserves sont la propriété privée des membres de la bande. La bande a traité ces renseignements de façon constante d'une manière confidentielle. Les membres pouvaient examiner les états financiers au bureau de la bande, mais sur place seulement. Il n'existait aucune preuve que ces renseignements étaient disponibles à quiconque à part la bande et ses conseillers professionnels. En conséquence, les comptes de capital et de revenu ayant trait aux fonds de la bande sont exemptés de divulgation sous le régime de l'alinéa 20(1)b).
Les requérants ont admis que les octrois et les deniers de contribution ne sont pas de nature confidentielle. Ils sont inscrits dans d'autres documents ministériels, et une demande d'accès devrait être présentée pour ces documents plus complets détaillant les projets en vertu desquels les fonds ont été transfé- rés. Il n'y a aucune raison de prélever une quantité minime de renseignements concernant ces fonds dans les états financiers confidentiels. Les renseignements ne peuvent raisonnablement être prélevés sous le régime de l'article 25.
LOIS ET RÈGLEMENTS•
Freedom of Information Act, 5 U.S.C. § 552 (1970).
Loi sur l'accès à l'information, S.C. 1980-81-82-83,
chap. 111, annexe I, art. 2, 4(1), 19(1), 20(1)b),c), 28,
44.
Loi sur la protection des renseignements personnels, S.C.
1980-81-82-83, chap. 111, annexe II, art. 3.
Loi sur les Indiens, S.R.C. 1970, chap. I-6.
JURISPRUDENCE
DÉCISION APPLIQUÉE:
Piller Sausages & Delicatessens Ltd. c. Canada (ministre de l'Agriculture), [1988] 1 C.F. 446 (1" inst.).
DISTINCTION FAITE AVEC:
DMR & Associates c. Ministre des Approvisionnements
et Services (1984), 11 C.P.R. (3d) 87 (C.F. 1" inst.).
DÉCISIONS EXAMINÉES
Kruger c. La Reine, [1986] 1 C.F. 3; (1985), 17 D.L.R. (4th) 591 (C.A.); Sharyland Water Supply Corp. v. Block, 755 F.2d 397 (5th Cir., 1985); National Parks and Conservation Ass'n v. Morton, 498 F.2d 765 (D.C. Cir. 1974).
DÉCISION CITÉE:
Maislin Industries Limited c. Ministre de l'Industrie et du Commerce, [1984] 1 C.F. 939; 10 D.L.R. (4th) 417 (1" inst.).
DOCTRINE
Finn, Paul D. Fiduciary Obligations, Sydney: The Law Book Company Limited, 1977.
AVOCATS:
James B. Chadwick, c.r. pour la requérante. Ingrid C. Hutton, c.r. pour l'intimé.
Everett L. Bunnell, c.r. pour l'intervenant.
PROCUREURS:
Burke-Robertson, Chadwick & Ritchie,
Ottawa, pour la requérante.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé.
Parlee, McLaws, Calgary, pour l'intervenant.
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
LE JUGE EN CHEF ADJOINT JEROME: Il s'agit de l'une des sept demandes déposées en vertu de l'article 44 de la Loi sur l'accès à l'information, [S.C. 1980-81-82-83, chap. 111, annexe I], et que j'ai entendues à Edmonton (Alberta) les 4 et 5 janvier 1988. Les faits et l'argumentation contenus dans chacune des demandes diffèrent quelque peu mais les principes applicables sont les mêmes. Pour cette raison, les motifs en l'espèce s'appliqueront également, avec les modifications qui s'imposent, aux affaires T-1623-86, T-1636-86, T-1658-86, T-1637-86, T-1649-86 et T-1650-86 de la Cour fédérale.
Dans ces demandes, sept bandes indiennes ten- tent d'empêcher la divulgation, en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, de leurs états finan ciers vérifiés fournis à l'intimé conformément à la Loi sur les Indiens [S.R.C. 1970, chap. I-6] et à ses règlements d'application. L'intimé a reçu une demande, en date du 15 avril 1986, de Wendy
Smith, une journaliste du Calgary Herald et la partie intervenante en l'espèce, visant à obtenir la communication de tous les états financiers vérifiés «depuis 1975», des bandes indiennes requérantes. Par la suite, la demande a été limitée aux états
financiers pour les exercices 1979-1980 1984- 1985 inclusivement.
Les requérantes ont été avisées, par une lettre en date du 28 mai 1986 d'André Faulkner, chef de l'accès à l'information et du Secrétariat à la pro tection des renseignements personnels du Minis- tère intimé, qu'une demande avait été reçue. La lettre, qui constitue l'avis écrit aux tiers exigé par l'article 28 de la Loi sur l'accès à l'information, énumère la liste des états financiers relatifs à chacune des bandes qui seront divulgués, si la demande est accueillie. La lettre dit de plus:
[TRADUCTION] Le ministère a des raisons de croire que ces documents peuvent contenir des informations financières, visées par l'alinéa 20(1)b) de la Loi (copie jointe); toutefois, nous n'avons pas suffisamment d'information pour soutenir ceci. Par conséquent, comme l'exige la Loi sur l'accès à l'information, nous entendons divulguer ces documents le 27 juin 1986.
Vous avez 20 jours à compter de la date d'envoi du présent avis pour présenter des observations écrites au soussigné exposant pourquoi la partie des informations financières qui ne sont pas reliées aux fonds du gouvernement ne devrait pas être divul- guée. Si vous ne répondez pas avant l'expiration du délai de 20 jours, les dossiers seront communiqués à la date ci-dessus mentionnée. Toute observation que vous présenterez servira à réviser notre décision de communiquer les dossiers.
Une copie de l'article 20 (exceptions de renseignements de tiers) et de l'article 28 (avis aux tiers) de la Loi sur l'accès à l'information sont jointes à la présente pour votre commodité.
Si vous avez des questions, n'hésitez pas à contacter Ghislain St-Jacques ou moi-même au (819) 997-0307.
La Bande indienne Montana a répondu le 9 juin 1986 et elle s'est objectée à la communication de tous les états financiers. Elle a donné trois motifs: l'information est confidentielle, la divulgation nui- rait à leur compétitivité et résulterait en une perte financière et le gouvernement fédéral, à cause de ses obligations de fiduciaire envers les bandes indiennes, doit protéger leur situation unique et distincte dans la société canadienne. Elle allègue que la divulgation des renseignements constituerait de la prévarication.
Par une lettre en date du 27 juin 1986, la requérante a été avisée de la décision du Ministère de divulguer les informations financières deman- dées, sauf les informations personnelles contenues
dans ces documents, lesquelles seraient prélevées et cachées. Par la suite, des demandes ont été dépo- sées par les bandes conformément à l'article 44 de la Loi, aux fins de faire réviser la décision de communiquer les informations.
Il est important de comprendre comment les états financiers en cause sont arrivés entre les mains de l'intimé. La preuve révèle que les états financiers rapportent les deniers de trois fonds différents: les deniers au compte de capital de la bande, lequel est composé largement des redevan- ces versées pour le pétrole et le gaz qui est extrait de leurs terres; les deniers de revenu de la bande, dans lesquels sont inclus les intérêts des comptes de capital; et les octrois accordés et les cotisations versées aux bandes à même les fonds publics par le Ministère. Ces trois sources de revenus doivent être rapportées conformément aux exigences de la Loi sur les Indiens et les autres lois et règlements connexes. Les plaidoiries exposent un résumé de ces exigences:
[TRADUCTION] Allégations écrites de l'intimé:
17. Par définition, «deniers des Indiens» signifie «toutes les sommes d'argent perçues, reçues ou détenues par Sa Majesté à l'usage et au profit des Indiens ou des bandes» (article 2, Loi sur les Indiens).
18. Le paragraphe 61(1) de la Loi sur les Indiens prévoit que «les deniers des Indiens ne doivent être dépensés qu'au bénéfice des Indiens ou des bandes à l'usage et au profit communs desquels ils sont reçus ou détenus ... et ... le gouverneur en conseil peut décider si les fins auxquelles les deniers des Indiens se trouvent employés, ou doivent l'être, sont à l'usage et au profit de la bande».
19. L'article 62 prévoit que «tous les deniers des Indiens tirés de la vente de terres cédées ou de biens de capital d'une bande sont censés être des deniers au compte de capital de la bande et tous les deniers des Indiens autres que les deniers au compte de capital sont tenus pour des deniers de revenu de la bande».
Mémoire de la requérante:
5. Conformément à la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes, les redevances perçues pour l'exploitation du pétrole et du gaz sur les terres indiennes sont versées à Sa Majesté du chef du Canada, en fiducie pour les bandes indiennes concernées.
Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes,
S.C. 1974-75, chap. 15, art. 5
(en vigueur le 22 avril 1977)
6. Les redevances• ainsi perçues sont tenues par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour des biens en capital (par opposition aux revenus générés par l'usage de la terre) et à ce titre, les fonds provenant de ces redevances sont versés au fonds en capital de chacune des bandes. La classifica tion des redevances de pétrole et de gaz comme biens en capital est une décision discrétionnaire du ministère.
Contre-interrogatoire de Gerald Throndson,
page 5, ligne 1 à page 6, ligne 7,
page 10, lignes 12à 18
Affidavit de John Vleeming, par. 3 à 5 Allégations écrites de l'intimé:
20. L'article 64 de la Loi [sur les Indiens] prévoit les objets précis pour lesquels le ministre, avec le consentement du conseil de la bande, peut autoriser et prescrire la dépense de deniers au compte de capital de la bande.
21. Quant aux deniers de revenu de la bande requérante, l'article 69 de la Loi sur les Indiens est la disposition clé: le gouverneur en conseil a, par décret, permis à la bande de «contrôler, administrer et dépenser la totalité ou une partie de ses deniers de revenu». Le Règlement sur les revenus des bandes d'Indiens prévoit cette autorisation.
23. Le Règlement sur les revenus des bandes d'Indiens prévoit, entre autres, que la bande doit engager un vérificateur qui sera chargé d'examiner le compte autogéré des deniers de revenu et d'établir un rapport qui doit être «placé en des endroits bien en vue de la réserve pour que les membres de la bande puissent l'examiner; et remis au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien». Les états financiers de la bande en cause en l'espèce ont été fournis conformément aux exigences de l'alinéa 8(2)b).
24. Les intérêts rapportés sur les deniers au compte de capital sont tenus, en vertu de l'article 62 de la Loi, pour des deniers de revenu. Les deniers au compte de capital et les deniers de revenu sont détenus au Fonds du revenu consolidé jusqu'à ce qu'ils soient dépensés.
25. L'affidavit de Gerald Throndson, en date du 22 décembre 1986, établit que les deniers du compte en capital, tel que défini à l'article 62 de la Loi sur les Indiens sont détenus au Fonds du revenu consolidé du Canada au crédit d'une bande spécifique (par. 3), que le ministre, par l'intermédiaire de ses représen- tants, exige une résolution du conseil de la bande demandant et consentant à libérer des deniers du compte de capital et un engagement qu'un état financier vérifié de l'utilisation des deniers sera fourni (par. 5 à 9**) et que la bande prépare une telle résolution du conseil de la bande pour chacune des années 1979-85 inclusivement.
29. Quant aux «contributions», c'est-à-dire les deniers reçus en vertu d'un crédit du Parlement, lesquelles sont également inclu- ses dans les états financiers de la bande, l'article 31 de la Loi sur l'administration financière et le procès-verbal du Conseil du Trésor 763729, modifié par le procès-verbal du Conseil du Trésor 793872 (pièces «A» et «B» de l'affidavit de Heather Peden), fixent les exigences de comptabilisation.
Argumentation écrite de la partie intervenante:
Les termes des accords de financement conclus avec la bande requérante édictent que des registres comptables appropriés doivent être tenus, que les fonctionnaires du ministère ont un droit d'accès à ces registres en tout temps raisonnable et que la bande doit fournir des états financiers vérifiés (Transcription de Peden, page 5, lignes 7 à 23).
Les informations servent à assurer au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et au Parlement en général que les fonds publics sont dépensés conformément au plan de contrôle (Tanscription de Peden, page 11, lignes 21 23, page 16, lignes 10à 24).
D'importances concessions ont été faites de part et d'autre eu égard à ces demandes. L'intimé admet, comme on en fait état ci-dessus, que les informations personnelles contenues aux dossiers ne doivent pas être divulguées. Les fonctionnaires du ministère ont noté sur les copies des dossiers classés quelles étaient les inscriptions qui, à leur avis, tombaient dans cette catégorie. Pour leur part les requérantes, sauf quelques arguments procédu- raux soulevés concernant la décision de divulguer, sont prêtes à admettre que les informations relati ves aux contributions, lesquelles proviennent des fonds publics, ne sont pas sujettes aux exceptions de communication plaidées en l'espèce et que, par conséquent, elles peuvent être divulguées. Quoique je sois reconnaissant aux procureurs de restreindre le débat grâce à ces concessions, j'aurai plus loin des commentaires à faire quant à leur effet sur la divulgation des dossiers et sur l'étendue de ladite divulgation.
Les arguments avancés au nom de la Bande Montana se regroupent en deux principales catégo- ries: premièrement, comme ces documents ont été obtenus dans le cadre d'une relation de fiduciaire, ce ne sont pas des documents d'une institution du gouvernement et ils ne sont aucunement couverts par les dispositions de la Loi sur l'accès à l'infor- mation. Deuxièmement, si les états financiers sont couverts par la Loi, ils sont exemptés de la com munication par l'action des articles 19 et 20. La requérante en l'espèce soumet de plus que la classi fication du Ministère que les redevances sur le pétrole et le gaz sont des deniers du compte de capital, par opposition à des deniers de revenu, constitue de la prévarication. Je ne vois aucune- ment la pertinence de cette argument en l'espèce, puisqu'il s'agit de déterminer si les états financiers de la bande, quelle que soit leur classification, doivent être divulgués en vertu de la Loi. Les motifs en l'espèce se limiteront donc aux deux arguments principaux de la requérante.
Les dispositions légales qui déterminent le champ d'application de la Loi sur l'accès à l'infor- mation sont l'article 2 et le paragraphe 4(1):
2. (1) La présente loi a pour objet d'élargir l'accès aux documents de l'administration fédérale en consacrant le prin- cipe du droit du public à leur communication, les exceptions indispensables à ce droit étant précises et limitées et les déci-
sions quant à la communication étant susceptibles de recours indépendants du pouvoir exécutif.
(2) La présente loi a pour objet de compléter les modalités d'accès aux documents de l'administration fédérale; elle ne vise pas à restreindre l'accès aux renseignements que les institutions fédérales mettent normalement à la disposition du grand public.
4. (1) Sous réserve de la présente loi mais nonobstant toute autre loi du Parlement, ont droit à l'accès aux documents des institutions fédérales et peuvent se les faire communiquer sur demande:
a) les citoyens canadiens; ou
b) les résidents permanents au sens de la Loi sur l'immigra- tion de 1976.
Les requérantes prétendent, et ce fait n'est pas contesté par l'intimé, que lorsque l'État s'occupe de la propriété des Indiens au nom de la bande, il agit à titre de mandataire légal dans le cadre d'une relation de fiduciaire. Par conséquent, les informa- tions financières communiquées par les bandes en vue d'obtenir les «deniers des Indiens» provenant de leur propriété sont fournies à l'État en sa capacité de mandataire/fiduciaire. La bande Mon- tana prétend de plus que la divulgation par l'État des informations financières causerait un préjudice aux affaires de la bande et serait contraire à ses désirs. On affirme, par conséquent, que la divulga- tion des informations constituerait une violation par l'État de son devoir de loyauté et de secret envers la bande. On cite la décision rendue dans l'affaire Kruger c. La Reine, [1986] 1 C.F. 3, à la page 17; (1985), 17 D.L.R. (4th) 591, aux pages 607 et 608 (C.A.) portant que «on ne saurait reprocher à la Couronne fédérale d'avoir manqué à son obligation de fiduciaire envers les Indiens en invoquant l'existence de considérations incompati bles ...»
Lors de sa plaidoirie, le procureur de la bande développa cette position pour prétendre que puis- que les informations sont régies par la relation de fiduciaire, elles ne sont pas vraiment «des docu ments des institutions fédérales» [«under the con trol» of a government institution]. Les documents peuvent être en la possession d'un ministère, mais ils ne sont pas des documents d'une institution, à moins qu'il soit possible au gouvernement d'exer- cer un contrôle sur ceux-ci. On prétend qu'un tel contrôle n'est pas possible vu l'objet limité de leur
production et la nature fiduciaire de la relation entre les parties.
D'autres requérants sont plus catégoriques. Ils plaident que les états financiers ne peuvent aucu- nement être tenus pour de «l'information gouverne- mentale» puisqu'ils contiennent les revenus et le capital propres à la bande. Ils affirment que l'ex- pression «documents des institutions fédérales», comporte une idée de propriété. Il s'ensuit que le gouvernement ne peut donner accès qu'aux docu ments dont il peut légalement s'occuper à sa seule discrétion. En l'espèce, on allègue que l'informa- tion, tout comme les fonds qui sont décrits, appar- tient à la bande et non au gouvernement. On ne peut donc pas les qualifier de «documents des institutions fédérales».
L'intimé répond que tout dossier en la possession d'une institution fédérale constitue des «documents d'une institution fédérale» selon le sens du para- graphe 4(1) parce que l'institution peut le pro- duire. Une interprétation étroite de l'expression, prétend-on, serait contraire à l'esprit et à l'inten- tion de la Loi, qui est de favoriser la divulgation et l'accès à l'information. Que le Parlement envisa- geait une définition large de l'expression ressort du soin qu'il a mis à exempter de la divulgation les dossiers des institutions fédérales dans lesquels un fort intérêt particulier prêche contre la communi cation. Selon les termes des arguments écrits de l'intimé:
[TRADUCTION] L'exception des renseignements de tiers, telle que prévue à l'article 20, aborde le problème de l'information fournie au gouvernement dans le cadre d'une relation de fidu- ciaire, trouve un équilibre entre les avantages de divulguer et de protéger les renseignements personnels au sens large et prévoit le critère précis à appliquer dans le mécanisme décisionnel.
On allègue de plus que comme le Ministère exi- geait la production des dossiers en cause et que la bande les fournissait pour se conformer aux diver- ses dispositions réglementaires et légales de «l'insti- tution», lesdits dossiers devraient être tenus pour des «documents des institutions fédérales».
Je suis d'accord avec l'intimé sur cette question. Alors que l'on peut comprendre que la bande trouve répugnant que leurs dossiers personnels fas- sent l'objet d'une demande d'accès à l'information, le fait demeure qu'étant donné les exigences de communication, une copie de leurs états financiers constitue des documents des institutions fédérales.
Limiter la définition de l'expression afin de les exclure conduirait à un dangereux précédent quant à l'interprétation de cette Loi relativement nou- velle. Heureusement, comme le fait remarquer l'intimé, le Parlement a tenu compte des préoccu- pations des requérantes en édictant des dispositions d'exceptions dans la Loi.
Tournons-nous maintenant vers le deuxième argument majeur de la requérante, c'est-à-dire que les dossiers sont exemptés de la divulgation en vertu des paragraphes 19(1) et 20(1) de la Loi. Le libellé desdits paragraphes est le suivant:
19. (1) Sous réserve du paragraphe (2), le responsable d'une institution fédérale est tenu de refuser la communication de documents contenant les renseignements personnels visés à l'article 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels.
20. (1) Le responsable d'une institution fédérale est tenu, sous réserve des autres dispositions du présent article, de refu- ser la communication de documents contenant:
a) des secrets industriels de tiers;
b) des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques fournis à une institution fédérale par un tiers, qui sont de nature confidentielle et qui sont traités comme tels de façon constante par ce tiers;
c) des renseignements dont la divulgation risquerait vraisem- blablement de causer des pertes ou profits financiers appré- ciables à un tiers ou de nuire à sa compétitivité;
d) des renseignements dont la divulgation risquerait vrai- semblablement d'entraver des négociations menées par un tiers en vue de contrats ou à d'autres fins.
Spécifiquement, la requérante allègue que ses états financiers constituent des renseignements person- nels selon le sens du paragraphe 19(1), des rensei- gnements de nature confidentielle selon le sens de l'alinéa 20(1)b) et des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de causer des pertes financières ou de nuire à sa compétiti- vité selon le sens de l'alinéa 20(1)c).
Un renseignement personnel signifie, selon l'ar- ticle 3 de la Loi sur la protection des renseigne- ments personnels [S.C. 1980-81-82-83, chap. 111, annexe II], «les renseignements ... concernant un individu identifiable». La requérante allègue que même si aucun individu n'est nommé ou autrement identifié dans la plupart des états financiers (lors- qu'une telle information apparaît, l'intimé a accepté de la cacher), comme le nombre de mem- bres de chaque bande est connu, une simple opéra- tion de division per capita des renseignements
concernant les actifs dans les états financiers révè- lerait l'avoir de chaque membre individuel. Pour cette raison, on affirme que les états financiers doivent être tenus pour des renseignements personnels.
Je rejette cet argument. Premièrement, quant aux faits de la cause, je ne suis pas convaincu que des renseignements concernant certains individus identifiables puissent être obtenus à partir des données générales des états financiers. Ces états financiers ne permettent pas le calcul proposé par les requérants. Rien dans ces dossiers n'indique comment la valeur nette de chaque membre indivi- duel est reliée aux chiffres globaux de la bande. Deuxièmement, même si de tels renseignements pouvaient être extraits des états financiers, empê- cher la divulgation pour ce motif équivaudrait à un élargissement injustifié de l'article 19. Tout en n'écartant pas la possibilité que les renseignements sur des petits groupes peuvent, dans certains cas, constituer des renseignements personnels, le seul fait que l'on puisse diviser les actifs du groupe par le nombre de membres n'appuie pas cette conclu sion. Penser autrement serait une distortion de l'intention derrière l'exception des renseignements personnels.
Je ne crois pas non plus que l'argument fondé sur l'alinéa 20(1)c) soit très fort. En effet, le procureur des requérants a admis à l'audience que la preuve du préjudice financier ou concurrentiel en l'espèce ne répond pas au critère que j'ai appli- qué dans l'arrêt Piller Sausages & Delicatessens Ltd. c. Canada (Ministre de l'agriculture), [1988] 1 C.F. 446 (1fe inst.). Par conséquent, les rensei- gnements ne peuvent être soustraits à la divulga- tion pour ce motif.
Le noeud de la cause des requérants et leur meilleur argument consiste en ce que ce sont des renseignements «financiers ... qui sont de nature confidentielle et qui sont traités comme tels de façon constante par ce tiers». On verra que le test établit à l'alinéa 20(1)b) comporte quatre critères:
1) Les dossiers doivent être (en l'espèce) des renseignements financiers, ce que l'intimé admet avec raison, à mon avis.
2) Les renseignements doivent être de «nature confidentielle» suivant un critère objectif. (voir l'arrêt Maislin Industries Limited c. Ministre de l'Industrie et du Commerce, [1984] 1 C.F. 939; 10 D.L.R. (4th) 417 (ire inst.)). Cet élément est très contesté.
3) Les renseignements doivent être fournis à une institution fédérale par un tiers. L'intimé plaide que, puisque le solde des fonds des requérants détenus en fiducie a été fourni aux bandes par le Ministère, ces renseigne- ments ne peuvent être tenus pour avoir été «communiqués» par les bandes. Il va sans dire, toutefois, que les états financiers, dans leur forme actuelle, ont été préparés par les comptables des bandes pour leur propre usage et fournis au gouvernement conformé- ment aux exigences légales de communica tion. Je ne doute pas, par conséquent, que les renseignements ont été «fournis» par des tiers.
4) Les renseignements doivent avoir toujours été traités d'une manière confidentielle par les tiers. Ce fait, de même que la nature confidentielle des renseignements eux- mêmes, constituent le fondement du litige en l'espèce.
Les requérants allègue que, quel que soit le critère objectif appliqué, les renseignements sont de nature confidentielle. Leurs motifs peuvent se résumer ainsi:
1) Les bandes n'ont pas publié les renseigne- ments au public et le public n'a aucun intérêt particulier dans ceux-ci.
2) Les dossiers ont été préparés par la bande, pour la bande, aux frais de la bande et ils ne concernent [quant au litige] que les propres fonds de la bande.
3) Les renseignements ont été fournis au gou- vernement dans le cadre d'une relation de fiduciaire existant entre l'État et les Indiens et ils ont été, comme tel, «communiqués dans des circonstances créant une obligation de secret».
4) Les états financiers ont été fournis au Minis- tère dans le seul but de permettre au MAI de s'acquitter de ses devoirs de fiduciaire de surveillance et de contrôle des dépenses de la bande. Dans ces circonstances, il existe une
obligation de droit privé de secret, soit en vertu de la relation de fiduciaire ou implicite à la nature des renseignements et des cir- constances de leur communication au MAI: Finn, Paul D. Fiduciary Obligations, Sydney: The Law Book Company Limited, 1977, chap. 19.
L'intimé ne conteste pas directement chacune de ces allégations mais il présente les arguments suivants:
1) Les états financiers constituent non seule- ment un relevé comptable de la bande au ministre mais également un relevé comptable par le conseil de la bande aux membres de la bande pour les deniers que le conseil détient et administre en fiducie pour tous les mem- bres de la bande en commun. Puisqu'il s'agit d'un relevé comptable destiné à un large groupe, les renseignements sont, par consé- quent, de nature publique.
2) Chaque membre de la bande a le droit de consulter les dossiers. La question difficile à trancher en l'espèce est de décider si le fait que les états financiers doivent être et sont, en vertu de la loi, ouverts à l'inspection des [en l'espèce 471 ] membres de la bande, pri- vent ces dossiers de leur nature «confiden- tielle». On prétend que c'est le cas.
3) En vertu de l'article 69 de la Loi sur les Indiens, et les dispositions de l'article 8 du Règlement sur les revenus des bandes d'In- diens [C.R.C., chap. 953], les bandes doivent engager un vérificateur qui sera chargé d'examiner le compte et d'établir un rapport annuel, de placer ledit rapport annuel «dans des endroits bien en vue de la réserve pour que les membres de la bande puissent l'exa- miner» et d'en remettre une copie au minis- tre des Affaires indiennes et du Nord cana- dien. On allègue que ce règlement oblige de rendre public les renseignements. Par consé- quent, même si aucune bande n'a, dans les faits, affiché son rapport annuel, les rensei- gnements que le rapport renferment et qui devraient être rendus public par l'affichage, ne sont pas de nature «confidentielle».
4) Certaines dépenses rapportées dans les états financiers concernent des ouvrages munici- paux. Comme les dépenses de la commu-
nauté concernent l'intérêt public, ces rensei- gnements ne peuvent être de nature confidentielle.
La plupart de ces arguments se résument à l'affirmation que, puisque les états financiers sont à la disposition de tous les membres de la bande, ils ne peuvent être tenus pour confidentiels. À l'appui de cette prétention, l'intimé cite deux déci- sions, savoir: DMR & Associates c. Ministre des Approvisionnements et Services (1984), 11 C.P.R. (3d) 87 (C.F. 1 « inst.) et Sharyland Water Supply Corp. c. Block, 755 F.2d 397 (5th Cir., 1985). Toutefois, je ne crois pas que l'on puisse, avec succès, se fonder sur l'une ou l'autre de ces déci- sions. Dans l'arrêt DMR, la demande d'accès con- cernait la soumission gagnante par suite d'un appel d'offres de l'intimé. La compagnie qui a présenté cette soumission s'est objectée à sa divulgation pour plusieurs motifs, dont celui de la nature confidentielle des renseignements. J'ai conclu que l'on ne pouvait exempter de la divulgation ces renseignements parce qu'ils seraient disponibles aux concurrents de la requérante lors de l'enchère à l'étape suivante du projet. Telle n'est pas la situation en l'espèce. Les seules personnes qui pourraient avoir accès à ces renseignements sont celles que lesdits renseignements concernent, c'est-à-dire les membres de la bande requérante, et ceux qui ont envers ces derniers une obligation de secret, par exemple, leurs comptables. L'intimé n'a pas prouvé qu'il y aurait même une chance raison- nable que des personnes dont les intérêts sont divergents de ceux de la bande puissent consulter ces informations.
La deuxième affaire, Sharyland Water Supply, est probablement basée sur une situation de fait similaire à la situation en l'espèce, mais elle a l'inconvénient d'avoir été tranchée conformément à la Freedom of Information Act américaine, [5 U.S.C. § 552 (1970)] dans laquelle le critère du caractère confidentiel est différent de celui de la loi canadienne. Dans cette affaire, une compagnie à but non lucratif d'alimentation en eau tentait d'empêcher la Farmers Home Administration de divulguer les états financiers vérifiés fournis à la FHA par suite d'une demande de prêt. La requé- rante prétendait que les dossiers étaient couverts par la quatrième exception de la Freedom of Information Act, protégeant les [TRADUCTION]
«secrets industriels et les renseignements d'ordre commercial ou financier obtenus d'un individu et qui sont privilégiés ou confidentiels». Le tribunal a suivi la définition de ce qui constitue un renseigne- ment confidentiel établie dans National Parks and Conservation Ass'n v. Morton, 498 F.2d 765 (D.C. Cir. 1974), la page 770, qui prévoit qu'un rensei- gnement est confidentiel uniquement si la commu nication [TRADUCTION] «aura vraisemblablement pour effet de (1) compromettre la capacité du gouvernement d'obtenir à l'avenir des renseigne- ments nécessaires; ou (2) de nuire sérieusement à la compétitivité de la personne qui a fourni le renseignement». Partant de cette définition, le tri bunal a conclu que l'information en cause n'était pas confidentielle. Parmi les motifs, on pouvait retrouver le peu de concurrence à laquelle la com- pagnie devait faire face et la nature spéculative de la preuve du préjudice potentiel suite à la divulga- tion. De plus, il conclut, à la page 399:
[TRADUCTION] En vertu des lois du Texas, Sharyland doit rendre disponibles les états financiers vérifiés à ses 5 200 membres. Les lois du Texas n'empêchent pas la divulgation par ces membres. Nous n'avons aucun motif de croire que nous fassions erreur en concluant que ce que cinq mille personnes peuvent obtenir sans engagement de ne pas divulguer n'est pas de nature confidentielle.
Dans l'arrêt Piller Sausages, j'ai traité de la question de s'appuyer sur de la jurisprudence amé- ricaine pour interpréter une loi canadienne, parti- culièrement quant aux exceptions en litige en l'es- pèce. Comme je l'ai fait remarquer dans l'arrêt Piller, l'interprétation de la cause National Parks réunit les critères exposés aux alinéas 20(1)b) et e) de la Loi canadienne en combinant en une seule exception le critère visant une «catégorie» particu- lière de renseignements et le critère relatif au «préjudice» causé. J'ai conclu, par conséquent, que bien que la jurisprudence américaine nous aide à comprendre la terminologie semblable à la nôtre, le critère applicable à la non-divulgation doit être établi eu égard au contexte particulier de la Loi canadienne (Piller, ci dessus, aux pages 467 et 468).
En l'espèce, j'hésiterais à appliquer la jurispru dence de la Cour d'appel des Etats-Unis citée ci-dessus. La définition de la Loi canadienne du terme «confidentiel» ne comprend pas le critère du préjudice et, en vertu de l'alinéa 20(1)b), il n'est pas nécessaire de démontrer qu'il y a une nuisance réelle à la compétitivité. Par conséquent, la défini-
tion de ce qui est «confidentiel» doit être moins pragmatique et toucher davantage à la nature même des renseignements. Comme je l'ai souligné lors de l'audience, je ne crois pas que le nombre de personnes ayant accès aux renseignements soit un facteur déterminant de la nature confidentielle desdits renseignements. La nature confidentielle des renseignements n'est pas modifiée si unique- ment ceux qui ont un intérêt dans ces renseigne- ments et les fonds qui y sont décrits y ont accès, et ce, peu importe leur nombre. De tels éléments peuvent indiquer si les renseignements ont été traités de façon confidentielle, mais le critère objectif déterminant la nature confidentielle doit porter davantage sur le contenu, l'objet et les circonstances entourant la préparation et la com munication, des renseignements.
En appliquant ces critères, je n'hésite pas à conclure que les données sont objectivement de nature confidentielle. Les renseignements en litige ne concernent aucun fonds public mais plutôt les avoirs financiers d'un groupe d'individus. C'est par une succession complexe d'événements historiques et constitutionnels que ces avoirs sont détenus en fiducie pour le compte des bandes par le gouverne- ment fédéral. C'est dans ce contexte de relation de fiduciaire que les parties se transmettent les rensei- gnements financiers. Dans toute autre situation semblable, od le fiduciaire n'est pas le gouverne- ment, il va sans dire que l'information serait sou- mise à une obligation de secret. Je ne crois pas que ce soit différent en l'espèce.
La nature confidentielle n'est sans doute aucu- nement anéantie par l'obligation du conseil de la bande de rendre compte à ses membres. Comme je l'ai mentionné plus haut, les fonds appartiennent à chacun des membres de la bande et ils ont un même intérêt dans les renseignements concernant ces fonds. Pour cette raison, le fait que les mem- bres aient le droit d'examiner les dossiers, ou même d'en prendre des copies, ne modifie nulle- ment la nature confidentielle de ces dossiers.
Je ne crois pas non plus que l'obligation d'affi- cher les renseignements soulevée par l'intimé rende ces dossiers publics. Même si l'on avait rempli cette obligation, les renseignements n'auraient été affichés que sur la propre réserve de la bande. Les réserves indiennes sont des propriétés privées et et quiconque y pénètre sans l'autorisation de la bande
est passible de poursuite (Loi sur les Indiens, articles 30 et 31). Par conséquent, il n'est pas possible de dire que d'afficher les renseignements sur une réserve, équivaut à les rendre disponibles au public en général.
Enfin, je rejette l'argument de l'intimé portant que les dépenses de nature municipale sont auto- matiquement des renseignements publics. Il doit évidemment y avoir un compte rendu aux membres de la communauté qui bénificie des dépenses, mais en l'espèce, cette obligation n'existe qu'envers les membres de la bande et personne d'autre.
Il me reste à décider si les dossiers ont été traités, de façon constante, d'une manière confi- dentielle par les tiers. À mon avis, ils l'ont été. Tout ce que j'ai déjà dit plus haut est applicable ici. La preuve révèle qu'à la bande Montana, il était d'usage d'autoriser les membre à examiner les états financiers au bureau de la bande, mais sur place seulement. La permission était accordée à tous ceux qui en faisait la demande. De plus, les comptables et conseillers en gestion de la bande avaient accès à ces renseignements. Ces personnes ne se sont pas engagées à garder le secret et la bande n'a pris aucune résolution déclarant que ces dossiers étaient confidentiels.
Rien dans la preuve ne me porte à conclure que ces dossiers n'ont pas été traités de façon confiden- tielle par la bande. Rien n'obligeait la bande ou ses membres à déclarer expressément que ces rensei- gnements étaient confidentiels—ils l'étaient par leur nature même. Ce n'était pas une erreur grave non plus de ne pas exiger des membres un engage ment de garder le secret lorsqu'ils examinaient leurs propres états financiers. Si l'on acceptait cet argument, toute famille ou compagnie privée qui ne demande pas expressément un engagement de garder le secret de la part de ses membres mettrait en danger la nature privée de leurs dossiers. Il n'était pas non plus nécessaire d'exiger, de la part des professionnels dont les services étaient retenus par la bande en qualité de fiduciaires, un engage ment à garder le secret, puisque conformément à leur contrat d'emploi, les comptables et les consul tants avaient, envers la bande, une obligation de garder le secret (Finn, Paul D. Fiduciary Obliga tions (Sydney; The Law Book Company Limited, 1977), page 137). L'idée que le fait de transmettre des renseignements à des professionnels met en
danger la nature confidentielle desdits renseigne- ments n'est pas fondée.
La plus importante considération est que ni l'intimé ni la partie intervenante n'a pu fournir aucune preuve que ces renseignements étaient dis- ponibles quiconque à part les membres de la bande et ses fiduciaires. Par conséquent, j'ai conclu que les états financiers sont de nature confidentielle ayant été traités comme telle par les tiers au sens de l'alinéa 20(1)b), tout au moins quant aux par ties des états financiers qui décrivent les fonds de la bande.
Comme je l'ai mentionné ci-dessus, les requé- rantes ont admis que les renseignements concer- nant les fonds publics, c'est-à-dire les octrois et deniers de contribution, ne sont pas de nature confidentielle. L'intimé conclut alors que tous tels renseignements inclus dans les états financiers devraient être prélevés et communiqués en vertu de l'article 25 de la Loi. L'article prévoit:
25. Le responsable d'une institution fédérale, dans les cas il pourrait, vu la nature des renseignements contenus dans le document demandé, s'autoriser de la présente loi pour refuser la communication du document, est cependant tenu, nonobstant les autres dispositions de la présente loi, d'en communiquer les parties dépourvues des renseignements en cause, à condition que le prélèvement de ces parties ne pose pas de problèmes sérieux.
Je ne suis pas d'accord. Tous les deniers reçus par la bande, sous forme d'octroi ou d'accords de contribution sont inscrits dans d'autres documents du Ministère, détaillant les projets en vertu des- quels les fonds ont été transférés. Plusieurs de ces documents ont été déposés en preuve comme pièce «Cn à l'affidavit de Peden. A mon avis, une demande d'accès à ces renseignements doit être présentée pour ces documents, lesquels sont sans contredit des renseignements publics d'une institu tion fédérale. Les dossiers inclus dans la pièce «CD donneraient une information plus complète et utile concernant le montant des contributions transfé- rées et l'objet auquel elles étaient destinées. Il n'y a aucune raison de chercher à prélever les informa- tions minimes eu égard à ces deniers dans des états financiers confidentiels.
De plus, je ne crois pas que les informations concernant les fonds publics soient faciles à préle- ver. Si l'on se conformait à l'article 25, il en résulterait la communication d'un document com- plètement censuré, laissant voir tout au plus deux
ou trois lignes. Sorties de leurs contexte, ces infor- mations seraient inutiles. Le travail de prélève- ment nécessaire de la part du Ministère n'est pas raisonnablement proportionné à la qualité de l'ac- cès qui s'ensuivrait.
Pour ces motifs, j'ordonne que les états finan ciers demandés ne soit pas divulgués par le Minis- tère. La demande fondée sur l'article 44 est, par conséquent, accueillie avec dépens.
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