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A-329-89
Sa Majesté la Reine du chef du Canada, le minis- tre de l'Emploi et de l'Immigration et William Hoogerdyk (appelants) (défendeurs)
c.
Said Mohamed Kigowa (intimé) (demandeur)
RÉPERTORIÉ: KIGOWA C. CANADA (CA.)
Cour d'appel, juges Heald, Mahoney et Desjar- dins, J.C.A.—Vancouver, 8 janvier; Ottawa, 26 janvier 1990.
Compétence de la Cour fédérale Section de première instance Un marin étranger a déserté son navire en Colom- bie-Britannique Détenu par un agent d'immigration Action en dommages-intérêts contre l'agent d'immigration pour arrestation et détention illégales alléguant la violation des droits accordés par la Charte Requête visant le rejet de l'action pour incompétence au motif que la Charte n'est pas une «loi du Canada» au sens de l'art. 101 de la Loi constitu- tionnelle Respect du triple critère énoncé par la Cour suprême pour établir la compétence de la Cour fédérale: la Loi sur l'immigration est une règle de droit fédérale sur laquelle se fonde l'action de l'intimé, elle est essentielle à la solution du litige et elle constitue le fondement de l'attribution de compé- tence à l'art. 17(5) de la Loi sur la Cour fédérale.
Immigration Un marin étranger a déserté son navire en Colombie-Britannique Détenu par un agent d'immigration agissant en application de la Loi sur l'immigration Compé- tence de la Cour fédérale pour juger l'action en dommages- intérêts contre l'agent d'immigration pour violation des droits garantis par la Charte à la suite d'une arrestation et d'une détention illégales: la Loi sur l'immigration est une règle de droit fédérale sur laquelle se fonde l'action de l'intimé, elle est essentielle à la solution du litige, et elle constitue le fondement de l'attribution de compétence à l'art. 17(5) de la Loi sur la Cour fédérale.
Droit constitutionnel Charte des droits Procédures criminelles et pénales L'agent d'immigration, agissant en application de la Loi sur l'immigration, a détenu un marin étranger qui avait déserté son navire en Colombie-Britannique Action en dommages-intérêts contre un agent d'immigra- tion pour arrestation et détention illégales en violation des art. 7 et 9 de la Charte Requête visant le rejet de l'action pour incompétence La Constitution et la Charte ne sont pas des «lois du Canada» au sens de l'art. 101 de la Loi constitution- nelle Cependant, la Cour fédérale a compétence car il y a respect du critère à trois volets: la Loi sur l'immigration est une règle de droit fédérale sur laquelle se fonde l'action de l'intimé, elle est essentielle à la solution du litige et elle constitue le fondement de l'attribution de compétence à l'art. 17(5) de la Loi sur la Cour fédérale.
L'intimé, un marin résidant au Kenya, a déserté son navire à Nanaimo (Colombie-Britannique). Il a été arrêté par un agent d'immigration, l'appelant William Hoogerdyk, le 22 mars 1987, et il a été détenu jusqu'au jour suivant. L'agent d'immi- gration a soutenu avoir agi en application du paragraphe
104(2) de la Loi sur l'immigration de 1976 qui autorisait les agents de la paix à arrêter et à détenir toute personne illégale- ment au Canada qui «constitue une menace pour le public ou qu'à défaut de cette mesure, elle ne se présentera pas à l'enquête ou n'obtempérera pas à l'ordonnance de renvoi».
L'intimé a alors engagé une action en dommages-intérêts contre l'agent d'immigration, alléguant que celui-ci n'avait aucun motif de croire que l'intimé constituait une menace pour le public ou qu'il ne se présenterait pas à son enquête, et que par conséquent son arrestation et sa détention violaient le droit à la liberté (article 7) et le droit à la protection contre la détention arbitraire (article 9) garantis par la Charte. L'appe- lant avait demandé au juge de première instance une ordon- nance rejetant l'action pour incompétence. Il s'agissait d'un appel contre le rejet de cette requête en annulation.
Arrêt: l'appel devrait être rejeté.
Le juge Mahoney, J.C.A.: Le paragraphe 17(5) de la Loi sur la Cour fédérale, qui donne compétence à la Cour dans les actions contre les fonctionnaires ou préposés de la Couronne, se trouve limité de façon inhérente par l'article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui permet à la Couronne de juger les demandes qui nécessitent l'administration des «lois du Canada». Et puisque les tribunaux ont statué que les Lois constitutionnelles de 1867 1982, et par conséquent la Charte, n'ayant pas été adoptées par le Parlement du Canada, ne sont pas des «lois du Canada» au sens de l'article 101, la Cour n'aurait donc pas eu la compétence nécessaire pour être saisie de cette affaire uniquement pour ce motif. Il ne reste donc que la Loi sur l'immigration de 1976 comme fondement de la compétence contestée.
La Cour suprême du Canada a établi un critère à trois volets applicable à la compétence de la Cour fédérale sur une question quelconque: (1) il doit y avoir attribution de compétence par une loi fédérale; (2) il doit exister un ensemble de règles de droit fédérales qui soit essentiel à la solution du litige et constitue le fondement de l'attribution légale de compétence; (3) la loi invoquée dans l'affaire doit être «une loi du Canada» au sens cette expression est employée à l'article 101.
En l'espèce, c'est l'alinéa 17(5)b) de la Loi sur la Cour fédérale qui donnait compétence à la Cour. La règle de droit essentielle à la solution du litige ne sera pas nécessairement celle qui constitue le fondement de l'attribution légale de compétence. Il se peut que lorsque le troisième volet est res pecté par la présence d'un cadre législatif détaillé, celui-ci peut en soi être considéré comme étant l'ensemble de règles de droit fédérales qui constitue le fondement de l'attribution légale de compétence dans une mesure suffisamment grande pour se passer largement des règles de droit fédérales essentielles à la solution du litige.
Le paragraphe 104(2) de la Loi sur l'immigration de 1976 ne définit pas seulement le pouvoir des agents d'immigration et d'autres personnes d'arrêter et de garder des étrangers au Canada aux fins de la Loi; il fixe les limites imposées au droit de ces derniers de rester en liberté au Canada en attendant leur enquête ou leur renvoi. Ce sont des règles de droit fédérales qui, en l'espèce, constituent le droit sur lequel se fonde l'action de l'intimé, qui sont essentielles à la solution du litige et aussi qui constituent le fondement de l'attribution légale de compétence au paragraphe 17(5) de la Loi sur la Cour fédérale.
Le juge Heald, J.C.A.: Le droit de l'intimé de se trouver au Canada et d'y rester en liberté émanait entièrement des disposi tions de la Loi sur l'immigration de 1976. Si les délits d'arres- tation et d'emprisonnement illégaux ont été commis, c'est parce qu'il y a eu atteinte au droit du demandeur de rester libre qui lui est conféré par les dispositions de la Loi sur l'immigration de 1976. Le droit à la liberté du demandeur lui vient non pas de la common law, mais des dispositions de la Loi. En consé- quence, il y a eu respect du critère à trois volets applicable à la compétence contestée.
Le juge Desjardins, J.C.A.: Bien que l'intimé ait réclamé des dommages-intérêts, son action ne repose pas sur un droit en common law à la protection contre l'arrestation illégale. En vertu de la common law, un étranger ne jouit d'aucun droit d'entrée au Canada et donc, d'aucun droit d'y circuler après être entré illégalement. Tout droit de circulation auquel pouvait prétendre l'intimé était régi par la Loi sur l'immigration de 1976, une «loi du Canada». II y a eu respect du critère à trois volets.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982 chap. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), Appendice II, 44], art. 7, 9.
Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vict., chap. 3 (R.-U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, chap. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, 1) [L.R.C. (1985), Appendice I1, No. 5], art. 101. Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2° Supp.), chap. 10, art. 2.
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, art. 17(5)b).
Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), chap. 1-2, art. 12, 103(2).
Loi sur l'immigration de 1976, S.C. 1976-77, chap. 52, art. 27(2)j), 104(2).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
ITO—International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc. et autre, [1986] I R.C.S. 752; (1986), 28 D.L.R. (4th) 641; 34 B.L.R. 251; 68 N.R. 241; Roberts c. Canada, [1989] 1 R.C.S. 322; [1989] 3 W.W.R. 117; (1989), 35 B.C.L.R. (2d) 1; 92 N.R. 241; Rhine c. La Reine; Prytula c. La Reine, [1980] 2 R.C.S. 442; (1980), 116 D.L.R. (3d) 385; 34 N.R. 290.
DÉCISIONS EXAMINÉES:
Northern Telecom Canada Ltée et autre c. Syndicat des travailleurs en communication du Canada et autre, [1983] 1 R.C.S. 733; (1983), 147 D.L.R. (3d) 1; 83 CLLC 14,048; 48 N.R. 161; Oag c. Canada, [1987] 2 C.F. 511; (1987), 33 C.C.C. (3d) 430; 73 N.R. 149 (C.A.).
DÉCISIONS CITÉES:
McNamara Construction (Western) Ltée et autre c. La Reine, [1977] 2 R.C.S. 654; (1977), 75 D.L.R. (3d) 273; 13 N.R. 181; Oag c. La Reine et autres, [1983] 1 R.C.S. 658; (1983), 52 A.R. 347; 41 O.R. (2d) 271; 147 D.L.R. (3d) 528; [1984] 1 W.W.R. 191; 29 Alta. L.R. (2d) 1; 33 C.R. (3d) 97; 52 N.R. 258; Marshall c. La Reine, [1986] 1 C.F. 437 (1" inst.); Varnam c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), [1988] 2 C.F. 454; (1988), 50 D.L.R. (4th) 44; 17 F.T.R. 240; 84 N.R. 163 (C.A.); R. v. Governor of Pentonville Prison, ex parte Azam, [1973] 2 All ER 741 (C.A.); Quebec North Shore Paper Co. et autre c. Canadien Pacifique Ltée et autre, [1977] 2 R.C.S. 1054; (1976), 9 N.R. 471.
AVOCATS:
Paul F. Partridge pour les appelants (défen-
deurs).
Carolyn McCool pour l'intimé (demandeur).
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour les appelants (défendeurs).
Legal Services Society of British Columbia,
(Vancouver), pour l'intimé (demandeur).
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE HEALD, J.C.A.: J'ai lu le projet des motifs de jugement rédigés par mon collègue le juge Mahoney, J.C.A., et je suis d'accord avec l'issue qu'il propose.
L'intimé (le demandeur) est un marin qui vit au Kenya. Il est entré au Canada en qualité de membre de l'équipage d'un navire. Il a déserté celui-ci alors qu'il mouillait à Nanaimo (Colom- bie-Britannique). En conséquence de quoi il est allégué que lorsqu'il a déserté son navire, il est devenu membre de la catégorie de personnes non admissibles visée à l'alinéa 27(2)j) de la Loi sur l'immigration de 1976 [S.C. 1976-77, chap. 52], c'est-à-dire une personne qui «est entrée au Canada à titre de membre de l'équipage d'un véhicule ... et a, sans l'autorisation d'un agent d'immigration, négligé de regagner le véhicule lors de son départ d'un point d'entrée». Selon la décla- ration, le demandeur a été arrêté par le défendeur Hoogerdyk, un agent d'immigration, le 22 mars 1987, et il a été détenu sous garde jusqu'au 23 mars 1987. On a donné comme fondement juridi-
que de l'arrestation le paragraphe 104(2) de la Loi sur l'immigration de 1976'.
À mon avis, l'intimé n'avait aucun droit, comme tel, d'entrer au Canada et d'y demeurer. Son droit de se trouver au Canada et d'y rester en liberté existait seulement tant qu'il était membre de l'équipage d'un navire, et tant que ce navire restait au Canada. Son droit d'être au Canada et son droit d'y être libre émanait entièrement des dispo sitions de la Loi sur l'immigration de 1976. La perte de ,cette liberté a aussi été attribuée aux dispositions de la Loi sur l'immigration de 1976.
La question litigieuse soulevée par la déclaration est fort précise, à savoir, le défendeur Hoogerdyk, lorsqu'il a arrêté le demandeur, avait-il des motifs de croire que celui-ci constituait une menace pour le public ou qu'à défaut de cette mesure, il ne se présenterait pas à l'enquête on n'obtempérerait pas à l'ordonnance de renvoi. Il est allégué dans la déclaration qu'il y a eu délit d'arrestation et d'em- prisonnement illégaux. Si ces délits ont été commis, c'est parce qu'il y a eu atteinte au droit du demandeur de rester libre qui lui est conféré par les dispositions de la Loi sur l'immigration de 1976. Conséquemment, les délits reprochés dépen- dent d'une loi fédérale, à savoir, la Loi sur l'immi- gration de 1976. Le préjudice qui aurait été infligé découlerait nécessairement de la privation d'un droit dont la seule source est une loi fédérale. L'unique droit à la liberté du demandeur lui vient non pas de la common law, mais des dispositions de la Loi sur l'immigration de 1976. En consé- quence, je suis d'accord qu'il a été satisfait au critère à trois volets dont ont parlé mes deux collègues, et que l'appel devrait donc être rejeté avec dépens.
'Le paragraphe est libellé comme suit:
104... .
(2) Tout agent de la paix au Canada, nommé en vertu d'une loi fédérale, provinciale ou d'un règlement municipal, et tout agent d'immigration peuvent, sans mandat, ordre ou directive à cet effet, arrêter et détenir ou arrêter et ordonner la détention
a) aux fins d'enquête, de toute personne soupçonnée, pour des motifs valables, de faire partie de l'une des catégories visées aux alinéas 27(2)b), e), J), g), h), i), ou j), ou
b) aux fins de renvoi du Canada, de toute personne frap- pée par une ordonnance de renvoi exécutoire,
au cas ils estiment que ladite personne constitue une menace pour le public ou qu'à défaut de cette mesure, elle ne se présentera pas à l'enquête ou n'obtempérera pas à l'ordon- nance de renvoi.
* * *
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY, J.C.A.: La Cour est saisie d'un appel interjeté contre le refus de la Section de première instance [T-612-89, juge Collier, ordon- nance en date du 26-6-89, encore inédite] de reje- ter l'action de l'intimé dans la mesure elle vise l'appelant, William Hoogerdyk, pour absence de compétence de la part de la Cour fédérale. La déclaration allègue que l'intimé est un marin rési- dent du Kenya, et que Hoogerdyk est un agent d'immigration qui était, à l'époque concernée, directeur du Centre d'Immigration Canada à Nanaimo (C.-B.). Il est allégué que Hoogerdyk a arrêté l'intimé vers 10 h 10 le dimanche, 22 mars 1987 et qu'il l'a fait détenir jusque vers 15 h 45 le 23 mars 1987.
La déclaration ajoute ce qui suit:
[TRADUCTION] 5. Le défendeur Hoogerdyk a prétendu procé- der à cette arrestation et imposer cette détention sous le régime du paragraphe 104(2) de la Loi sur l'immigration de 1976, S.C. 1976-77, chap. 52 (tel qu'il était à l'époque).
6. Le défendeur Hoogerdyk n'avait aucun motif de croire, ni ne croyait ou était d'avis que le demandeur
a) constituait une menace pour le public, ou
b) qu'à défaut de cette mesure, il ne se présenterait pas à l'enquête ou n'obtempérerait pas à l'ordonnance de renvoi
au sens du paragraphe 104(2) (tel qu'il était à l'époque) de la Loi sur l'immigration de 1976.
7. Le défendeur Hoogerdyk n'avait pas l'autorité nécessaire pour arrêter et détenir le demandeur, si ce n'est en vertu du paragraphe 104(2) (tel qu'il était à l'époque) de la Loi sur l'immigration de 1976.
8. Le défendeur Hoogerdyk a agi selon un motif irrégulier en arrêtant le demandeur et en le faisant détenir.
Pour terminer, la déclaration allègue que l'arresta- tion et la détention de l'intimé constituent l'une et l'autre une violation des droits conférés à ce der- nier par les articles 7 et 9 de la Charte canadienne des droits et libertés [qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, 44]] en vertu de quoi des dommages-intérêts généraux non précisés sont réclamés.
La Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, prévoit ce qui suit:
17....
(5) La Section de première instance a compétence concur- rente, en première instance, dans les actions en réparation intentées:
b) contre un fonctionnaire ou préposé de la Couronne pour des faits—actes ou omissions—survenus dans le cadre de ses fonctions.
C'est l'article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867 [30 & 31 Vict., chap. 3 (R.-U) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1) [L.R.C. (1985), Appendice II, No. 5]] qui accorde au Parlement et qui précise son auto- rité législative.
101. Le parlement du Canada pourra, nonobstant toute dis position contraire énoncée dans le présent acte, lorsque l'occa- sion le requerra, adopter des mesures à l'effet de créer, mainte- nir et organiser une cour générale d'appel pour le Canada, et établir des tribunaux additionnels pour la meilleure administra tion des lois du Canada.
Donc, bien qu'en vertu du paragraphe 17(5) de la Loi sur la Cour fédérale, il semble que le Parle- ment ait clairement conféré compétence à la Sec tion de première instance à l'égard de l'action de l'intimé, cette compétence se trouve limitée de façon inhérente par l'article 101. Elle n'existe que si l'action nécessite l'administration «des lois du Canada», au sens de cette expression à l'article 101.
Dans l'arrêt Northern Telecom Canada Ltée et autre c. Syndicat des travailleurs en communica tion du Canada et autre, [1983] 1 R.C.S. 733; (1983), 147 D.L.R. (3d) 1; 83 CLLC 14,048; 48 N.R. 161, le juge Estey, qui se prononçait pour la majorité, a dit ce qui suit aux pages 744 et 745 R.C.S.:
Le juge en chef Anglin, dans l'arrêt Consolidated Distilleries Ltd. v. Consolidated Exporters Corporation Ltd., [1930] R.C.S. 531, à la p. 534, dit que l'expression «lois du Canada» signifie [TRADUCTION] a... les lois adoptées par le Parlement fédéral et qui sont de son ressort.» J'interprète dans le même sens les motifs du Juge en chef de cette Cour dans les arrêts McNamara ([1977] 2 R.C.S. 654) et Quebec North Shore ([1977] 2 R.C.S. 1054), précités.
Il y a lieu d'ajouter un dernier point à cette discussion de la compétence. La Loi constitutionnelle de 1867, et modifications, n'est pas, cela va de soi, une «loi du Canada» dans le sens des exemples qui précèdent parce qu'elle n'a pas été adoptée par le
Parlement du Canada. La limite inhérente que l'art. 101 précité impose à la compétence que le Parlement peut accorder à la Cour fédérale pourrait donc exclure une procédure fondée sur la Loi constitutionnelle.
Il s'ensuit que les dispositions de la Charte sur lesquelles se fonde la présente action ne sont pas des lois du Canada au sens de l'article 101, et qu'il ne nous reste que la Loi sur l'immigration de 1976 comme fondement de la compétence contestée.
La Cour suprême du Canada a eu l'occasion, à commencer par les arrêts McNamara Construc tion (Western) Ltée et autre c. La Reine, [1977] 2 R.C.S. 654; (1977), 75 D.L.R. (3d) 273; 13 N.R. 181; et Quebec North Shore Paper Co. et autre c. Canadien Pacifique Ltée et autre, [1977] 2 R.C.S. 1054; (1976), 9 N.R. 471 mentionnés par le juge Estey, de rechercher le sens de l'expression «lois du Canada» à l'article 101 depuis que notre Cour a été établie en 1970. Le critère actuellement reconnu a été exposé par le juge McIntyre dans l'arrêt ITO—International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc. et autre, [1986] 1 R.C.S. 752; (1986), 28 D.L.R. (4th) 641; 34 B.L.R. 251; 68 N.R. 241, la page 766 R.C.S. Je crois fort utile de le reproduire tel qu'il a été le plus récemment cité, par le juge Wilson, pour une cour unanime, dans l'arrêt Roberts c. Canada, [1989] 1 R.C.S. 322; [1989] 3 W.W.R. 117; (1989), 35 B.C.L.R. (2d) 1; 92 N.R. 241, aux pages 330 et suivantes R.C.S., en raison de son contexte dans l'espèce.
I. Il doit y avoir attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral.
2. Il doit exister un ensemble de règles de droit fédérales qui soit essentiel à la solution du litige et constitue le fondement de l'attribution légale de compétence.
3. La loi invoquée dans l'affaire doit être «une loi du Canada» au sens cette expression est employée à l'art. 101 de la Loi constitutionnelle de 1867.
Ce critère est bien établi comme étant celui qu'il faut appliquer dans toute affaire la compétence de la Cour fédérale est en cause.
Bien qu'il y ait nettement un chevauchement entre les deuxième et troisième éléments du critère applicable pour établir la compétence de la Cour fédérale, le deuxième, tel que je le comprends, exige qu'il existe un ensemble de règles de droit fédérales applicables à l'objet de la contestation, en l'espèce le droit relatif aux Indiens et à leurs intérêts dans les terres des réserves, et le troisième, que la loi spécifique qui servira à trancher le litige soit «une loi du Canada» au sens de l'art. 101 de la Loi constitutionnelle de 1867. On n'aura aucune difficulté à respecter le troisième élément du critère si le litige doit être tranché en fonction d'un texte de loi fédéral existant.
Comme on le verra, des problèmes peuvent cependant surgir si la loi du Canada invoquée est non pas un texte de loi fédéral mais ce qu'on appelle de la «common law fédérale», ou si la loi fédérale n'est pas la seule applicable à la question en litige.
En l'espèce, il n'est pas contesté que l'alinéa 17(5)b) de la Loi sur la Cour fédérale satisfait au premier critère.
En refusant de rejeter l'action de l'intimé dans la mesure elle vise Hoogerdyk, le juge de première instance s'est appuyé sur la décision de cette Cour dans l'affaire Oag c. Canada, [1987] 2 C.F. 511; (1987), 33 C.C.C. (3d) 430; 73 N.R. 149, dont il a dit «l'affaire Oag est celle qui présente le plus d'analogies, parmi un ensemble impressionnant et déroutant de décisions de la Section d'appel de cette Cour, avec la présente situation». Oag avait intenté une action en domma- ges-intérêts contre la Couronne du chef du Canada et certains de ses préposés à la suite d'une affirma tion de la Cour suprême du Canada, Oag c. La Reine et autres, [1983] 1 R.C.S. 658; (1983), 52 A.R. 347; 41 O.R. (2d) 271; 147 D.L.R. (3d) 528; [1984] 1 W.W.R. 191; 29 Alta. L.R. (2d) 1; 33 C.R. (3d) 97; 52 N.R. 258, voulant que la Com mission nationale des libérations conditionnelles ait à tort révoqué sa libération sous surveillance obligatoire. Le juge Stone, qui rendait le jugement de notre Cour, a statué aux pages 520 et suivantes C.F.:
Il en résulte donc, pour utiliser l'expression du juge en chef Laskin dans l'affaire Rhine et Prytula, «un cadre législatif détaillé» de droit fédéral en vertu duquel l'appelant a acquis non seulement le droit d'être libre mais également celui de le rester. Il faut souligner que, comme il restait sous l'effet d'une condamnation, la liberté dont il jouissait n'était pas la même que celle que possède une personne qui ne fait pas l'objet d'une condamnation. Ses limites étaient fixées par des lois fédérales. S'il y a eu arrestation illégale et emprisonnement arbitraire comme il a été allégué, ces délits ont été commis parce qu'on a porté atteinte au droit de l'appelant, ainsi délimité, de rester libre. Je ne crois pas que la loi ait à prévoir expressément un recours à l'égard d'une telle atteinte pour que les demandes soient régies par elle. L'existence de ces délits, à mon avis, repose sur le droit fédéral; les dommages-intérêts qui résultent de la perpétration de ces délits prouvables peuvent être recou- vrés en Division de première instance. J'en suis arrivé à la conclusion que les demandes sont prévues dans les «lois du Canada» ou le «droit fédéral».
Peut-on dire que les limites du droit de l'intimé de rester en liberté, que Hoogerdyk aurait excédées,
étaient également fixées par la Loi sur l'immigra-
tion de 1976?
La disposition expressément invoquée est le paragraphe 104(2) de la Loi sur l'immigration de 1976, aujourd'hui le paragraphe 103(2) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), chap. I-2.
103... .
(2) L'agent de la paix, qu'il soit nommé en vertu d'une loi fédérale ou provinciale ou d'un règlement municipal, et l'agent d'immigration peuvent, sans mandat, ordre ou instruction à cet effet, arrêter et garder ou arrêter et faire garder:
a) aux fins d'enquête, toute personne soupçonnée, pour des motifs raisonnables, de faire partie de l'une des catégories visées aux alinéas 27(2)b), e),.1), g), h), i) ou j) et qui, à leur avis, constitue une menace pour la sécurité publique ou se dérobera à l'enquête;
b) aux fins de renvoi du Canada, toute personne frappée par une mesure de renvoi exécutoire et qui, à leur avis, constitue une menace pour la sécurité publique ou n'obtempérera pas à la mesure.
Jusqu'à maintenant, il semble que la Cour suprême ait reconnu, dans ses arrêts publiés, deux genres de situations qui nécessitent l'application du droit fédéral, en l'absence d'une disposition expresse dans une loi fédérale, de façon à entraîner la compétence de la Cour fédérale. La première situation vise l'insertion dans le droit fédéral au moyen d'une loi, du droit autre que le droit écrit, et la seconde implique l'existence d'un cadre légis- latif fédéral étayant une cause d'action bien que le règlement de cette dernière puisse exiger, dans une grande mesure sinon entièrement, l'application d'un droit qui n'est ni une loi fédérale, ni incorporé dans le droit fédéral par une disposition législative. Les arrêts ITO et Roberts illustrent la première situation; la seconde se retrouve dans l'arrêt Rhine c. La Reine et Prytula c. La Reine, [ 1980] 2 R.C.S. 442; (1980), 116 D.L.R. (3d) 385; 34 N.R. 290.
Dans l'arrêt ITO, il a été statué que le droit maritime canadien relevait de la première catégo- rie susmentionnée, alors que dans l'arrêt Roberts, la même conclusion a été tirée à l'égard de la common law du titre aborigène. Dans le premier cas, l'adoption par le Parlement, au moyen de l'article 2 de la Loi sur la Cour fédérale [S.R.C. 1970 (2 e Supp.), chap. 10], d'une définition qui comprenait le droit non écrit sur lequel reposait la cause d'action a été trouvée suffisante.
2. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.
«droit maritime canadien» Droit—compte tenu des modifica tions y apportées par la présente loi ou par toute autre loi fédérale—dont l'application relevait de la Cour de l'Échi- quier du Canada, en sa qualité de juridiction de l'Amirauté, aux termes de la Loi sur l'Amirauté, chapitre A-1 des Statuts révisés du Canada de 1970, ou de toute autre loi, ou qui en aurait relevé si ce tribunal avait eu, en cette qualité, compétence illimitée en matière maritime et d'amirauté.
Le juge McIntyre, à la page 774 [ITO], a exprimé la conclusion suivante:
À mon avis, la seconde partie de la définition que donne l'art. 2 du droit maritime canadien a été adoptée afin d'assurer que le droit maritime canadien comprenne une compétence illimitée en matière maritime et d'amirauté. A ce titre, elle constitue une reconnaissance légale du droit maritime canadien comme ensemble de règles de droit fédérales portant sur toute demande en matière maritime et d'amirauté. On ne saurait considérer ces matières comme ayant été figées par la Loi d'amirauté, 1934. Au contraire, les termes «maritime» et «amirauté■ doivent être interprétés dans le contexte moderne du commerce et des expéditions par eau. En réalité, l'étendue du droit maritime canadien n'est limitée que par le partage constitutionnel des compétences établie par la Loi constitutionnelle de 1867.
De la même façon, à la page 340 de l'arrêt Roberts, le juge Wilson a expliqué les raisons pour lesquelles elle en est arrivée à la conclusion que le droit applicable au titre aborigène était de la common law fédérale.
... la question à laquelle nous devons donc répondre est donc de savoir si la loi applicable au titre aborigène est de la common law fédérale.
Je crois qu'elle l'est ... Bien que, comme le dit clairement l'arrêt Guerin, ([1984] 2 R.C.S. 335) le par. 18(1) de la Loi sur les Indiens n'ait pas créé la relation unique qui existe entre la Couronne et les Indiens, il l'a certainement incorporée dans la loi fédérale en affirmant que «Sa Majesté détient des réserves à l'usage et au profit des bandes respectives pour lesquelles elles furent mises de côté».
L'arrêt Roberts nous éclaire à deux autres égards. Il répète, à la page 338, la proposition exprimée à l'origine dans l'arrêt McNamara, vou- lant que la compétence législative fédérale ne suf- fise pas à elle seule à satisfaire au troisième volet du critère qui sert à établir la compétence de la Cour fédérale. Il examine également, aux pages 331 et suivantes sans toutefois tirer de conclusion à cet égard, la notion de compétence fondée sur des demandes «étroitement liées» exposée par la Sec tion de première instance dans l'arrêt Marshall c. La Reine, [1986] 1 C.F. 437. Il laisse cependant entendre, à la page 334, que cette notion «ne paraît cependant pas trouver appui dans la jurisprudence
existante ... ni même dans le texte de l'art. 101». Cette Cour, dans l'arrêt Varnam c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), [1988] 2 C.F. 454; (1988), 50 D.L.R. (4th) 44; 17 F.T.R. 240; 84 N.R. 163 (C.A.), a statué que la décision rendue dans l'affaire Mar- shall était erronée.
L'arrêt Rhine et Prytula, dont fait mention le juge Stone dans le passage précité de l'arrêt Oag, illustre l'autre catégorie d'instances dont les causes d'actions, selon les conclusions de la Cour suprême, s'appuient sur les lois du Canada au sens de l'article 101. Cet arrêt traitait du recouvrement de dettes par la Couronne du chef du Canada auprès de particuliers. Les dettes découlaient res- pectivement des dispositions de la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies, aujourd'hui le chapitre P-18 des L.R.C. de 1985, et de la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants, aujourd'hui le chapitre S-23 des L.R.C. de 1985. Dans le premier cas, la dette résultait d'un paie- ment anticipté direct de la Couronne; dans le second cas, elle résultait de la garantie par la Couronne de sommes avancées par la banque. Le considérant de la décision concernant les paie- ments anticipés pour le grain, énoncé aux pages 445 et suivantes, était le suivant:
... on prétend qu'il s'agit simplement de l'exécution d'une obligation contractuelle ordinaire qui ne relève aucunement de la législation fédérale, si ce n'est qu'elle tire son origine de l'autorisation législative de verser le paiement anticipé.
Je ne peux admettre que l'on puisse régler l'affaire en des termes aussi simples. Nous sommes en présence d'un cadre législatif détaillé qui autorise des paiements anticipés pour des livraisons éventuelles de grain; c'est un élément d'un plan d'ensemble pour la commercialisation du grain produit au Canada. Un examen de la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies elle-même met en lumière la place que celle-ci prend dans le plan d'ensemble. Certes, l'application de la Loi emporte un engagement ou des conséquences contrac- tuelles, mais cela ne veut pas dire que la Loi est mise à l'écart une fois l'engagement pris ou le contrat signé. La Loi a constamment des répercussions sur l'engagement, de sorte que l'on peut dire à bon droit qu'il existe une législation fédérale valide qui régit l'opération, objet du litige devant la Cour fédérale. Est-il nécessaire d'ajouter qu'on ne peut invariable- ment attribuer les «contrats» ou les autres créations juridiques, comme les délits et quasi-délits, au contrôle législatif provincial exclusif, ni les considérer, de même que la common law, comme des matières ressortissant exclusivement au droit provincial.
Cela s'est appliqué, avec des raffinements sans importance pour la présente discussion en raison de la garantie, aux prêts aux étudiants.
Je devrais probablement éviter d'ajouter à l'en- semble impressionnant et déroutant de décisions de cette Cour mais il me semble, en toute déférence, que la reconnaissance toute récente, dans l'arrêt Roberts, du chevauchement évident des deuxième et troisième volets du critère en cause suggère un fondement à la conciliation rationnelle de la confu sion. Le second volet exige l'existence d'un ensem ble de règles de droit fédérales qui doit avoir deux vocations tout à fait différentes; il doit être (1) essentiel à la solution du litige et (2) constituer le fondement de l'attribution légale de compétence. Il vise le même ensemble de règles de droit, mais il semble évident que les règles de droit' essentielles à la solution du litige ne seront pas nécessairement les mêmes qui constitueront le fondement de l'at- tribution légale de compétence. Il se peut que lorsque le troisième volet est respecté, comme c'est le cas dans l'arrêt Rhine et Prytula, par la pré- sence d'un cadre législatif détaillé, celui-ci peut en soi être considéré comme étant l'ensemble de règles de droit fédérales qui constitue le fondement de l'attribution légale de compétence dans une mesure suffisamment grande pour se passer large- ment, sinon complètement, des règles de droit fédérales essentielles à la solution du litige. En d'autres termes, le rapport entre les parties décou- lant uniquement du droit fédéral, le droit applica ble au règlement des litiges qui procèdent de ce rapport est aussi considéré comme étant des règles de droit fédérales, bien qu'elles ne soient ni expo sées ni expressément incorporées dans une loi fédé- rale. Il semblerait que cela ait été le cas dans l'arrêt Rhine et Prytula qui ne laisse nullement entendre que le droit applicable à la responsabilité du débiteur à l'égard de la Couronne est autre chose que celui qui sert aussi communément à établir la responsabilité d'un débiteur à l'égard d'une dette commerciale ordinaire.
Le paragraphe 103(2) de la Loi sur l'immigra- tion ne définit pas seulement le pouvoir des agents d'immigration et d'autres personnes d'arrêter et de garder des étrangers au Canada aux fins de la Loi; il fixe les limites imposées au droit de ces derniers de rester en liberté au Canada en attendant leur enquête ou leur renvoi, selon le cas. Ce sont des règles de droit fédérales qui, dans la cause d'action plaidée en l'espèce, constituent le droit sur lequel se fonde l'action de l'intimé, qui sont essentielles à la solution du litige et aussi qui constituent le
fondement de l'attribution légale de compétence au paragraphe 17(5) de la Loi sur la Cour fédérale.
Les trois éléments du critère sont respectés en l'espèce. Je rejetterais l'appel avec dépens.
* * *
Ce qui est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.: Said Mohamed Kigowa, l'intimé en l'espèce, est un résident du Kenya qui a déserté son navire à Nanaimo (Colombie-Britannique). Vraisemblablement, il était alors tenu de se présenter à un point d'en- trée 2 . Son arrestation par un agent d'immigration le 22 mars 1987 et sa détention jusqu'à l'après- midi du 23 mars 1987 l'ont incité à engager une action en dommages-intérêts devant la Section de première instance le 22 mars 1989, au motif qu'il y avait eu arrestation et détention illégales de la part de l'agent d'immigration.
La question litigieuse soulevée par les appelants vise la compétence de la Cour fédérale du Canada à l'égard de cette affaire.
Je suis d'accord avec les motifs de jugement du juge Mahoney, J.C.A., dont j'ai eu l'avantage de lire le projet. Je n'ajouterai qu'un bref commen- taire.
Bien que l'intimé réclame des dommages-inté- rêts en guise de réparation, son action ne repose pas sur un droit en common law à la protection contre l'arrestation illégale. Étant un étranger, il
2 Le paragraphe 12(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), chap. I-2, prévoit ce qui suit:
12. (1) Quiconque cherche à entrer au Canada est tenu de se présenter devant un agent d'immigration à un point d'entrée ou à tout autre lieu désigné par l'agent principal en vue de l'interrogatoire visant à déterminer s'il est autorisé à entrer au Canada ou s'il peut y être admis.
ne jouissait d'aucun droit d'entrée au Canada en vertu de la common law 3 , et donc, d'aucun droit d'y circuler après être entré illégalement. L'action en l'espèce diffère des actions en dommages-inté- rêts prévues par la common law qui pourraient s'offrir à l'intimé comme à quiconque. Si l'intimé avait été blessé par un véhicule automobile ou agressé, il aurait pu engager une action délictuelle comme toute autre personne au Canada. Mais en l'espèce, tout droit de circulation auquel peut pré- tendre l'intimé et qu'il souhaite faire respecter est régi par la Loi sur l'immigration, une «loi du Canada».
Le critère à trois volets applicable à la compé- tence de la Cour fédérale étant respecté, je rejette- rais l'appel avec dépens.
3 R. v. Governor of Pentonville Prison, ex parte Azam, [1973] 2 All ER 741 (C.A.), à la p. 747.
[TRADUCTION] En common law, aucun étranger n'a le droit d'entrer dans ce pays si ce n'est par autorisation de la Couronne, et celle-ci peut refuser son autorisation sans donner de motif: voir Schmidt v Secretary of State for Home Affairs ([1969] 2 Ch. 149, à la p. 168). La Couronne peut imposer à celui qui entre au pays grâce à son autorisation les conditions qu'elle estime indiquées, qu'elles concernent la durée de son séjour ou autre chose. L'étranger ne possède aucun droit de demeurer ici. Il peut être renvoyé dans son propre pays en tout temps si la Couronne estime que sa présence chez nous n'est pas dans l'intérêt public; et à cette fin, l'exécutif peut l'arrêter et le mettre à bord d'un navire ou d'un aéronef en partance pour son propre pays: voir R v Brixton Prison (Governor), ex parte Soblen ([1963] 2 QB 243, aux p. 300 et 301). Divers règlements ont depuis traité de la situation des étrangers en common law, mais les principes restent les mêmes.
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