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A-395-89
Friends of the Old Man River Society (appelante) (requérante)
c.
Ministre des Transports et ministre des Pêches et des Océans et Sa Majesté la Reine du chef de l'Alberta, représentée par le ministre des Travaux publics, Approvisionnement et Services (intimés) (intimés)
RÉPERTORIÉ: FRIENDS OF THE OLDMAN RIVER SOCIETY C. CANADA (MINISTRE DES TRANSPORTS) (CA.)
Cour d'appel, juges Heald, Urie et Stone, J.C.A.— Ottawa, 23 et 24 janvier et 13 mars 1990.
Environnement Construction d'un barrage sur la rivière Oldman, en Alberta Lorsqu'une proposition a des répercus- sions environnementales sur des questions ressortissant à la responsabilité fédérale, le Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'envi- ronnement lie les ministres auxquels une demande d'approba- tion est présentée ou auprès desquels est effectuée une démar- che sollicitant certaines mesures, de même que les ministres chargés des questions de responsabilité fédérale sur lesquelles la proposition aura des répercussions environnementales Contrairement aux études sur les incidences environnementales menées par l'Alberta, le Décret sur les lignes directrices permet une participation pleine et entière du public et assure une grande indépendance à la commission d'examen.
Couronne Prérogatives La couronne provinciale n'est pas soustraite aux exigences d'approbation de la Loi sur la protection des eaux navigables Il ressort clairement de l'économie de la Loi que le Parlement avait l'intention de lier la couronne provinciale La Loi n'atteindrait pas son but si ses dispositions ne liaient pas la Couronne provinciale.
Contrôle judiciaire Brefs de prérogative Construction d'un barrage sur la rivière Oldman, en Alberta Les minis- tres fédéraux intimés ne se sont pas conformés au Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'exa- men en matière d'environnement Les ministres se trouvant liés par le Décret sur les lignes directrices, un bref de certiorari et un bref de mandamus seront délivrés.
En mars 1986, le ministère de l'Environnement de l'Alberta a entrepris des démarches auprès du ministre fédéral des Trans ports pour obtenir son approbation sous le régime de l'article 5 de la Loi sur la protection des eaux navigables à l'égard de la construction d'un barrage sur la rivière Oldman. Cette appro bation a été accordée sans que les incidences environnementales du projet n'aient été soumises à l'examen préalable ou à l'évaluation initiale prévus au Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'envi- ronnement. Cette question n'a pas non plus été soumise au ministre de l'Environnement du Canada pour qu'un examen public soit mené sous le régime de cette ordonnance.
En 1987, il a été demandé au ministre des Pêches et des Océans et au ministre de l'Environnement d'intervenir pour
assurer que le projet ferait l'objet de l'examen prévu au Décret sur les lignes directrices. Tous deux ont refusé, en disant que l'Alberta prendrait charge de tout problème relié au barrage.
L'appel en l'espèce est interjeté de la décision de la Section de première instance qui a rejeté une demande sollicitant un bref de certiorari qui aurait annulé l'approbation ainsi qu'un bref de mandamus qui aurait obligé les deux ministres à se conformer au Décret sur les lignes directrices. L'appelante soutient que le juge de première instance a commis une erreur en concluant (1) que le Décret sur les lignes directrices ne s'applique pas à une demande sollicitant l'approbation du ministre des Transports conformément au paragraphe 5(1) de la Loi sur la protection des eaux navigables, (2) que le Décret sur les lignes directrices ne s'applique pas au pouvoir décision- nel du ministre des Pêches et des Océans dans les circonstances de la présente espèce et (3) que la présente espèce n'est pas de celles dans lesquelles un bref de certiorari ou de mandamus doit être accordé. Une quatrième question se pose, qui est celle de savoir si la Couronne provinciale est assujettie aux procédu- res de la présente Cour et si elle est soustraite aux exigences d'approbation édictées dans les dispositions législatives fédéra- les.
Arrêt: l'appel devrait être accueilli.
Comme cette Cour l'a décidé dans l'arrêt Fédération cana- dienne de la faune, le Décret sur les lignes directrices est une loi d'application générale. Les directives doivent être utilisées par les ministères dans l'exercice de leurs pouvoirs et de leurs fonctions pour aider à l'exercice des fonctions et des pouvoirs du ministre fédéral de l'Environnement qui portent sur la qualité de l'Environnement. Le Décret sur les lignes directrices est destiné à lier les ministres fédéraux lorsque leurs devoirs et leurs fonctions s'exercent à l'égard de problèmes environnemen- taux touchant des questions de compétence fédérale.
L'alinéa 6b) du Décret sur les lignes directrices déclare que celles-ci s'appliquent aux propositions pouvant avoir des réper- cussions environnementales sur une question de compétence fédérale. La preuve présentée en l'espèce a établi clairement que la construction et l'exploitation du barrage et du réservoir de la rivière Oldman pourraient avoir des répercussions envi- ronnementales sur au moins trois questions de compétence fédérale, savoir les pêcheries, les Indiens et les terres réservées aux Indiens.
Le juge de première instance a commis une erreur en déci- dant que le ministre des Transports pouvait seulement prendre en considération les facteurs touchant la navigation et n'était pas habilité à exiger un examen des incidences environnementa- les. Les dispositions du Décret sur les lignes directrices s'appli- quent à toute proposition à l'égard de laquelle le ministère, exerçant le pouvoir de décision, est le ministère responsable. À la suite de la proposition en l'espèce, le ministère des Trans ports est devenu le ministère responsable en qualité de minis- tère qui exerce le pouvoir de décision. Les incidences environne- mentales qu'une décision accordant la demande pouvait entraîner pour toute question de compétence fédérale devaient être examinées conformément au dispositions du Décret sur les lignes directrices.
Le ministre des Pêches et des Océans est également lié par le Décret sur les lignes directrices. La définition du terme «propo- sition» figurant dans le Décret sur les lignes directrices n'exige aucunement qu'il y ait une sorte de demande. Il est seulement
exigé que le ministre prenne connaissance de l'existence d'une «entreprise ou activité». Cette prise de connaissance pourrait certainement avoir lieu à la suite d'une démarche d'un particu- lier sollicitant des mesures spécifiques ressortissant aux respon- sabilités du ministre. Dans de telles circonstances, s'il existe une «entreprise ou activité» à l'égard de laquelle le gouvernement du Canada exerce «le pouvoir de décision», il existe également une «proposition». En l'espèce, il existe une entreprise et il existe des problèmes risquant d'affecter les ressources halieutiques. Par la demande qui lui a été faite de s'acquitter de sa responsabilité en intervenant pour protéger les ressources halieutiques, le minis- tre est devenu celui qui «exerce le pouvoir de décision» en ce qui concerne les mesures à prendre à cet égard. La compétence du ministre des Pêches et des Océans a également été déclenchée par la demande d'approbation présentée au ministre des Trans ports: le Décret sur les lignes directrices commande la partici pation de tout ministère chargé d'une question de compétence fédérale à l'égard de laquelle une proposition aura des inciden ces environnementales.
En règle générale, une Cour d'appel est réticente à modifier une décision rendue par un juge de première instance dans l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire; en l'espèce, cependant, le juge de première instance s'est trompé en concluant que le fait de se conformer au Décret sur les lignes directrices entraî- nerait une répétition inutile d'une procédure qui a fait l'objet d'un examen minutieux et complet au cours des vingt dernières années. Libellées comme elles le sont, les dispositions du Décret sur les lignes directrices accordent au public une participation beacoup plus étendue que celle prévue sous le régime provin cial. De plus, l'indépendance garantie aux commissions d'exa- men par le Décret sur les lignes directrices est beaucoup plus importante que celle qui est assurée au niveau provincial.
En l'espèce, la Cour est compétente à l'égard de Sa Majesté la Reine du chef de l'Alberta. L'arrêt Adidas (Can.) Ltd. c. Skoro Enterprises Ltd. a établi le principe suivant lequel toute personne à qui une ordonnance comme celle demandée en l'espèce risque d'être défavorable peut être jointe comme partie à l'instance de manière à lui permettre d'obtenir toute répara- tion pouvant s'offrir à elle par voie d'appel de cette ordonnance.
La Couronne provinciale n'est pas non plus soustraite aux exigences d'approbation édictées par la Loi sur la protection des eaux navigables. Il ressort clairement de l'économie de la Loi que le Parlement avait l'intention de lier la Couronne provinciale. De plus, la Loi manquerait entièrement d'atteindre son but si ses dispositions ne liaient pas les différents gouvernements.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement, DORS/84-467, art. 2, 3, 4, 6, 10, 12, 13, 15, 18, 19, 21, 22, 27, 28, 29, 30, 31, 33, 36.
Department of the Environment Act, R.S.A. 1980, chap. D-19.
Environmental Council Act, R.S.A. 1970, chap. 125; R.S.A. 1980, chap. E-13.
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, art. 2, 18.
Loi sur la protection des eaux navigables, L.R.C. (1985), chap. N-22, art. 4, 5, 6.
Loi sur le ministère de l'Environnement, L.R.C. (1985), chap. E-10, art. 6.
Loi sur les ouvrages destinés k l'amélioration des cours d'eau internationaux, L.R.C. (1985), chap. I-20.
Loi sur les pêches, L.R.C. (1985), chap. F-14, art. 35, 37.
JURISPRUDENCE
DÉCISION INFIRMÉE:
Friends of the Oldman River Society c. Canada (Minis- tre des Transports), [1990] 1 C.F. 248; [1990] 2 W.W.R. 150; 30 F.T.R. 108 (1 re inst.).
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Fédération canadienne de la faune, Inc. c. Can. (Min. de l'Environnement), [1990] 2 W.W.R. 69; (1989), 27 F.T.R. 159; 99 N.R. 72 (C.A.F.); Reg. v. All Saints, Wigan (Churchwardens of) (1875-76), 1 App. Cas. 611 (H.L.); Adidas (Can.) Ltd. c. Skoro Enterprises Ltd., [1971] C.F. 382; (1971), 12 C.P.R. (2d) 67 (C.A.).
DISTINCTION FAITE AVEC:
Fédération canadienne de la faune Inc. c. Canada (Ministre de l'Environnement), [1990] 1 C.F. 595 (Ire inst.).
DÉCISION EXAMINÉE:
Alberta Government Telephone c. Canada (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes), [1989] 2 R.C.S. 225; [1989] 5 W.W.R. 388; (1989), 98 N.R. 161.
DÉCISIONS MENTIONNÉES:
Rodd v. County of Essex (1910), 44 R.C.S. 137; Polylok Corporation c. Montreal Fast Print (1975) Ltd., [1984] 1 C.F. 713; (1983), 1 C.I.P.R. 113; 76 C.P.R. (2d) 151; 41 C.P.C. 294; 52 N.R. 218 (C.A.); Fédération canadienne de la faune Inc. c. Canada (Ministre de l'Environne- ment), T-2102-89, juge Muldoon, ordonnance en date du 28-12-89, encore inédite.
AVOCATS:
Brian A. Crane et Martin W. Mason pour l'appelante (requérante).
Brian J. Saunders pour le ministère des Transports.
Dennis R. Thomas et Andrea B. Moen pour la province d'Alberta.
PROCUREURS:
Cowling, Strathy & Henderson, Ottawa, pour l'appelante (requérante).
Le sous-procureur général du Canada pour le ministère des Transports.
Milner & Steer, Edmonton, pour la province d'Alberta.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE STONE, J.C.A.: Le présent appel con- teste une ordonnance prononcée par le juge en chef adjoint le 11 août 1989 [[1990] 1 C.F. 248] qui a rejeté une demande présentée en vertu de l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7. L'appelante sollicitait un bref de certio- rari qui aurait annulé une approbation accordée par le ministre des Transports le 18 septembre 1987 au ministère de l'Environnement de la prov ince d'Alberta relativement à la construction d'un barrage sur la rivière Oldman' de cette province sous le régime des dispositions de la Loi sur la protection des eaux navigables, L.R.C. (1985), chap. N-22, ainsi qu'un bref de mandamus qui aurait enjoint à la fois au ministre des Transports et au ministre des Pêches et des Océans de se conformer au Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement, DORS/84-467 (le «Décret sur les lignes directrices») édicté en vertu de l'article 6 de la Loi sur le ministère de l'Envi- ronnement, S.R.C. 1970 (2 e Supp.), chap. 14 présent, L.R.C. (1985), chap. E-10).
LE LITIGE
Au coeur du présent litige se situe l'assertion selon laquelle l'approbation en cause n'a pas été légalement accordée parce que le ministre des Transports et le ministre des Pêches et des Océans ont manqué de se conformer au Décret sur les lignes directrices. Ce litige est semblable à celui de l'affaire Fédération canadienne de la faune, Inc. c. Can. (Min. de l'Environnement), [1990] 2 W.W.R. 69 (C.A.F.), dans laquelle la délivrance d'un permis par le ministre de l'Environnement (du Canada) sous le régime d'une autre loi fédérale 2 et
1 Le dossier établissant clairement que ce nom, plutôt que celui figurant dans l'intitulé de la cause, est le nom exact de la rivière, je désignerai ce cours d'eau sous le nom «Oldman» tout au long des présents motifs de jugement.
2 Loi sur les ouvrages destinés à l'amélioration des cours d'eau internationaux, L.R.C. (1985), chap. 1-20.
de ses règlements d'application était contestée. Notre Cour (par l'intermédiaire du juge Hugessen, J.C.A., à la page 70) a clairement établi dans cette affaire que le ministre était tenu de suivre le Décret sur les lignes directrices «tout comme il doit respecter toute autre loi d'application générale».
LES QUESTIONS SOULEVÉES
Les trois principales questions soumises par l'ap- pelante sont les suivantes:
[TRADUCTION] (I) Le juge de première instance a-t-il commis une erreur en concluant que le Décret sur les lignes directrices ne s'applique pas à une demande sollicitant l'approbation du ministre des Transports conformément au paragraphe 5(1) de la Loi sur la protection des eaux navigables?
(2) Le juge de première instance s'est-il trompé en concluant que le Décret sur les lignes directrices ne s'applique pas au pouvoir décisionnel du ministre des Pêches et des Océans dans les circonstances de la présente espèce sous le régime des articles 35 et 37 de la Loi sur les pêches?
(3) Le juge de première instance s'est-il trompé en concluant que la présente espèce n'est pas de celles dans lesquelles un bref de certiorari ou de mandamus devrait être accordé?
Une quatrième question se pose, qui est celle de savoir si la Couronne provinciale est assujettie aux procédures de notre Cour et si elle est soustraite aux exigences d'approbation édictées dans les dis positions législatives fédérales.
LE CONTEXTE FACTUEL
Il n'est possible de saisir la véritable portée des questions soulevées qu'en les examinant dans leur contexte factuel. L'Alberta est en train de cons- truire un barrage sur l'emplacement de Three Rivers de la rivière Oldman à un coût budgété de 353 millions de dollars. Le 31 mars 1989, le bar rage était déjà complété à 40 %. Cet ouvrage a pour objet de rendre sûr l'approvisionnement en eau du Bassin de la rivière Saskatchewan-sud dans le sud de l'Alberta. La rivière Oldman tire sa source des montagnes Rocheuses, situées à l'ouest de l'emplacement du barrage. Le débit de ce cours d'eau fluctue, pour atteindre son niveau le plus élevé lors de l'écoulement printanier. Le barrage permettrait de retenir les eaux de la rivière dans un réservoir afin qu'elles puissent plus tard être utilisées par, entre autres, des fermiers, des exploi- tants de ranchs, des municipalités et des industries.
L'idée d'un réservoir pour le stockage de l'eau de la rivière Oldman est née en 1958 lorsque
l'Alberta a demandé au gouvernement fédéral d'évaluer la possibilité de la construction d'un tel ouvrage à Livingstone Gap. En décembre 1966, le rapport «Progress Report Preliminary Engineering Investigations Oldman River Project, Proposed Three River Dam and Reservoir» [[TRADUCTION] «Rapport d'étage—Enquête préliminaire d'ingénie- rie—projet rivière Oldman, Barrage et réservoir projetés sur l'emplacement de Three Rivers»], de l'Administration du rétablissement agricole des Prairies du ministère fédéral de l'Agriculture, énonçait des doutes sur l'emplacement de Living- stone Gap tout en suggérant que des études plus poussées soient menées relativement à l'emplace- ment de Three Rivers. Entre 1966 et 1974, l'Al- berta et le Canada ont participé à une étude fédérale-provinciale sur l'approvisionnement en eau au terme de laquelle ont été considérés plu- sieurs emplacements, dont celui de Three Rivers.
En 1974, l'Alberta a entrepris des études visant à examiner les besoins en eau et à déterminer quels emplacements de la rivière Oldman et de ses affluents seraient susceptibles de servir au stoc- kage de l'eau. Ces études devaient se dérouler en deux phases. La première, une évaluation des emplacements au stockage de l'eau de la rivière, a été menée par le «Technical Advisory Committee» [le comité consultatif technique] mis sur pied par le ministre de l'Environnement de l'Alberta. Ce comité était formé de représentants de divers ministères du gouvernement provincial, dont celui de l'Environnement, ainsi que de représentants d'autres organismes. Le rapport soumis par ce comité' a été rendu public en juillet 1976 afin que la population l'examine et le commente. Le minis- tre de l'Environnement de l'Alberta a rencontré des personnes intéressées par ces études, et il en a discuté avec elles; de plus, d'autres ministères du
1 La pièce «E» annexée à l'affidavit de Lorand K. Szojka en date du 13 juin 1989, Dossier d'appel, vol. 1, à la p. 134 (l'[TRADucTION] «affidavit de M. Szojka»). Ce rapport, qui comporte cinq volumes, est intitulé «Oldman River Flow Regu lation: Preliminary Planning Studies» [[TRADUCTION] «Gestion du débit de la rivière Oldman: Études préliminaires de planifi- cation»]; il traite des besoins et des ressources en eau, des considérations environnementales et de l'évaluation économique et environnementale du projet. Le Volume IV parle des consi- dérations environnementales en jeu; une étude sur le poisson rédigée par D.S. Radford s'y trouve comprise; il y a été fait référence dans les rapports fédéraux par Environnement Canada et le ministère des Pêches.
gouvernement, de même que des autorités et des associations locales, lui ont fait part de leurs réac- tions. Plusieurs des questions étudiées au cours de la seconde phase tiraient leur origine des réponses ainsi obtenues.
Au début de l'année 1977, le ministre de l'Envi- ronnement de l'Alberta a annoncé la mise sur pied du «Oldman River Study Management Commit tee» [le comité de gestion de l'étude sur la rivière Oldman], qui était formé de six représentants du public et de trois représentants du gouvernement provincial. Ce comité avait pour mandat de mener les études de la seconde phase, et de [TRADUC- TION] «présenter des recommandations sur' la ges- tion générale des eaux du bassin, qui tiendront notamment compte des préoccupations des rési- dants de la région» 4 ; au préalable, il devait avoir examiné en outre des points tels [TRADUCTION] «la salinisation, la sédimentation, les loisirs, l'habi- tat du poisson ainsi que d'autres questions environ- nementales touchant différents emplacements et différentes mesures susceptibles de remplacer la construction d'un barrage» 5 . Certaines démarches ont été entreprises pour encourager le public à participer au processus: des distributions d'encarts et de bulletins d'information dans différents foyers, des communiqués de presse, des conférences de presse et des séances «portes ouvertes» d'échange public d'information ont eu lieu. Dans le cadre de ces études, plusieurs rencontres ont été tenues avec des conseils de districts municipaux, de zones d'aménagement, de villes, de municipalités et de villages de la région, et des ateliers ont été dirigés par le comité de gestion. Des opinions ont été exprimées oralement ou par écrit par diverses organisations gouvernementales et non gouverne- mentales, parmi lesquelles figuraient des associa tions de chasse et de pêche et des bandes d'Indiens. En 1978, le comité de gestion a soumis son rap port, qui avait pour titre «Oldman River—Final Report, 1978» [[TRADUCTION] «Rivière Oldman— Rapport final, 1978»] 6 .
L'affaire a alors été confiée à une commission du «Environmental Council of Alberta», un orga-
L'affidavit de M. Szojka, à la p. 135.
5 Ibid.
6 L'affidavit de M. Szojka, la pièce «S», à la p. 137; le rapport .Oldman River Basin—Phase Il studies: Report and Recom-
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nisme constitué par une Loi'. En juillet 1978, le lieutenant-gouverneur en conseil a ordonné à cet organisme de recevoir les exposés et les observa tions portant sur les questions relatives au barrage. Plusieurs audiences publiques ont été tenues dans le sud de l'Alberta au cours du mois de novembre 1978, et de nombreux exposés supplémentaires et présentations ont été reçus de différentes sources, parmi lesquelles figuraient des groupes voués à la protection de l'environnement ou d'autres groupes à revendications particulières. En août 1979, le «Environmental Council of Alberta» a soumis un rapport 8 au ministre de l'Environnement de l'Al- berta. Les exposés reçus, et le rapport lui-même, discutent en outre de l'habitat du poisson. Ce rapport ainsi que le «Oldman River—Final Report, 1978» [[TRADUCTION] «Rivière Oldman—Rap- port final, 1978»] ont ensuite été examinés par des fonctionnaires provinciaux et par un comité secret du gouvernement provincial. Le 29 août 1980, l'Alberta a annoncé sa décision de construire le barrage, en indiquant que l'emplacement de Three Rivers était l' [TRADUCTION] «emplacement privi- légié» mais que la décision définitive quant à ce choix serait reportée pour permettre à la Bande indienne de Peigan de présenter une proposition concernant un autre emplacement possible situé en aval sur sa réserve près de Brocket. La Bande a présenté sa position par écrit 9 au ministre de l'En- vironnement de l'Alberta en novembre 1983. En août 1984, l'Alberta a annoncé qu'elle avait décidé de procéder à la construction du barrage à l'empla-
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mendations: August, 1978» [[TRADUCTION] «Bassin de la rivière Oldman—Etudes de la Phase I1: Rapport et recomman- dations; août, 1978»]. Ce rapport discute du système d'approvi- sionnement en eau, du système de distribution d'eau et de la gestion des eaux, et il comporte une section d'études techniques qui, elle-même, comprend une sous-section intitulée «Environ- mental Overview» ([TRADUCTION] «Aperçu général des inci dences environnementales»).
' Environmental Council Act, R.S.A. 1970, chap. 125 présent R.S.A. 1980, chap. E-13).
8 L'affidavit de M. Szojka, la pièce «X», à la p. 138; «Public Hearings on Management of Water Resources within the Oldman River Basin: Report and Recommendations» [[TRA- DUCTION] «Audiences publiques sur la gestion des ressources en eau du bassin de la rivière Oldman: Rapport et recomman- dations»]. Ce rapport discute de la gestion des eaux, de l'irriga- tion, des utilisations municipales et industrielles des eaux, des marchés, de la réhabilitation (agricole), du stockage des eaux, d'une analyse coûts/bénéfices, d'indemnisation et d'expropria- tion, ainsi que des réserves indiennes.
9 L'affidavit de M. Szojka, les pièces «BB» et «CC».
cement de Three Rivers. Le Décret sur les lignes directrices était déjà en vigueur.
Les efforts ont ensuite porté sur le plan, la construction et l'exploitation du barrage. Le plan a été complété en 1985, et la construction d'un tunnel de diversion relié à l'ouvrage a été commen cée en 1986. Au même moment, des mesures d'atténuation des incidences environnementales du projet ont été prises—celles-ci se poursuivent tou- jours. En octobre 1984, des avis ont été publiés dans les journaux locaux pour inviter le public à participer à des rencontres [TRADUCTION] «portes ouvertes» destinées à des échanges d'information et à l'expression par la population de ses préoccupa- tions touchant l'archéologie, l'habitat du poisson, les loisirs, la faune et l'irrigation. Plusieurs de ces rencontres ont été tenues. Un bureau d'informa- tion a été ouvert par le ministère de l'Environne- ment de l'Alberta près de l'emplacement de Three Rivers afin de répondre aux questions du public. De plus, l'examen de certains aspects du projet a été poursuivi par divers sous-comités établis par un district municipal de la région et assistés par le ministère de l'Environnement de l'Alberta.
En janvier 1985, un «Local Advisory Commit tee» [comité consultatif local] a été nommé par ordre du ministère de l'Environnement de l'Al- berta pour conseiller le ministre sur des questions relatives au projet, notamment l'agriculture, le replacement de routes, les emplacements des pas sages du réservoir, les préoccupations locales tou- chant le poisson et la faune ainsi que les possibili- tés offertes en matière de loisirs. Ce comité, qui était formé de résidants de la région et de repré- sentants d'une municipalité et d'un village voisins, a tenu un certain nombre de réunions publiques. En juin 1988, le comité consultatif local a soumis au ministre de l'Environnement de l'Alberta un rapport présentant des recommandations au sujet des pêches, de la faune, des ressources historiques,
L'affidavit de M. Szojka, la pièce «HH», à la p. 142; le rapport aOldman River Report—Local Advisory. Committee Report and Recommendations to the Minister of the Environ ment, June 30, 1988» [[TRADUCTION] «Rapport sur la rivière Oldman—Rapport et recommandations du comité consultatif local au ministre de l'Environnement, 30 juin 1988»]. Les études et les rapports présentés au Comité comprennent quel- que 42 volumes portant sur l'atténuation des incidences sur les pêcheries et sur des sujets connexes.
de l'agriculture, des loisirs et du transport. Finale- ment, les préoccupations relatives aux incidences du barrage sur les terres de la Bande indienne de Peigan ont fait l'objet d'une étude, ainsi qu'il ressort d'un rapport présenté par cette bande au ministre de l'Environnement de l'Alberta en février 1987.
Un contrat de construction du barrage a été adjugé par l'Alberta en février 1988. Les travaux de construction visés en l'espèce se sont déroulés sous le régime de cette entente.
L'APPROBATION
Le 10 mars 1986, le ministère de l'Environne- ment de l'Alberta a entrepris des démarches auprès du ministre aux fins d'obtenir son approba tion sous le régime de l'article 5 de la Loi sur la protection des eaux navigables. Le sous-ministre des Transports a publié un avis de cette demande dans des journaux locaux; il y annonçait le dépôt d'une description de l'emplacement et des plans du projet du barrage sur la rivière Oldman auprès du ministère, en ajoutant que, à l'expiration d'une période d'un mois suivant la date de la publication, le ministère de l'Environnement de l'Alberta pré- senterait, sous le régime de la Loi, une demande [TRADUCTION] «sollicitant l'approbation dudit emplacement et desdits plans». En temps voulu, le 18 septembre 1987, l'approbation a été accordée mais à certaines conditions, qui, toutes, avaient trait à la navigation. L'approbation du ministre des Transports n'a pas été précédée de l'examen préalable ou de l'évaluation initiale des incidences environnementales prévus au Décret sur les lignes directrices. Cette question n'a pas non plus été soumise au ministre de l'Environnement du Canada pour qu'un examen public soit mené sous le régime de cette ordonnance.
L'APPELANTE
L'appelante a été constituée en société le 8 septembre 1987. Avant cette date, dans une lettre adressée au ministre des Pêches et des Océans au début d'août 1987, le Southern Alberta Environ mental Group avait fait valoir que ce ministre devait se conformer au Décret sur les lignes direc- trices. Voici une partie de cette lettre:
[TRADUCTION] Selon le document «Procédures pour les réu- nions publiques», qui a été publié par le Bureau fédéral d'exa-
men des évaluations environnementales en 1985, le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement exige que les ministères fédéraux tiennent compte des questions environ- nementales tout au long de la planification et de la mise en œuvre des projets ayant des répercussions environnementales sur une question de compétence fédérale.
La protection de l'habitat du poisson et des pêcheries est une question fédérale relevant de votre Ministère. Il est clair que le barrage de la rivière Oldman aura des répercussions sur les ressources halieutiques. En conséquence, en votre qualité de ministre des Pêches et des Océans, votre ministère ordonnera- t-il la tenue d'une évaluation environnementale initiale des incidences du barrage de la rivière Oldman sur les ressources halieutiques de la rivière Oldman et de ses affluents sous la supervision du Bureau fédéral d'examen des évaluations envi- ronnementales, et votre Ministère considérera-t-il l'opportunité d'une évaluation et d'un examen complets des incidences envi- ronnementales du projet?
Dans sa réponse du 25 août 1987, le ministre déclarait, entre autres:
[TRADUCTION] Les fonctionnaires des pêches ont soulevé plu- sieurs difficultés auprès des promoteurs du barrage; ils atten- dent à présent des, propositions de mesures d'atténuation ou d'indemnisation qui remédieraient aux problèmes que ce projet risque d'engendrer pour les ressources halieutiques.
Considérant les arrangements administratifs qui régissent depuis longtemps la gestion des pêches en Alberta, et le fait que les problèmes risquant d'être causés par le barrage se trouvent pris en charge, je n'ai pas l'intention d'intervenir dans ce dossier.
Dans une lettre du 3 décembre 1987, l'appelante a demandé au ministre de l'Environnement du Canada que le projet soit examiné sous le régime du Décret sur les lignes directrices. Le 15 janvier 1988, le cabinet du ministre lui a fait la réponse suivante:
[TRADUCTION] Comme vous pouvez le savoir, le projet de barrage de la rivière Oldman relève fondamentalement de la compétence provinciale. Le gouvernement fédéral n'est pas directement visé par la proposition, de sorte qu'il serait inap- proprié pour Environnement Canada ou Pêches et Océans Canada d'intervenir directement en tentant de la relier à la Politique fédérale relative aux eaux.
Il incombe néanmoins à Environnement Canada de s'assurer de la mise en œuvre des dispositions sur le contrôle de la pollution de la Loi sur les pêches fédérale. L'article 33 de cette Loi énonce les dispositions antipollution prohibant le dépôt de substances nocives dans les eaux vivent les poissons. Les fonctionnaires du bureau régional de l'Ouest et du Nord d'En- vironnement Canada à Edmonton ont examiné un bon nombre de rapports sur les pêches et sur l'environnement qui sont pertinents au projet. Même si ces examens ont identifié plu- sieurs problèmes reliés au projet, Environnement Canada est confiant que les plans d'atténuation proposés par l'Alberta pallieront tout effet néfaste de celui-ci sur les ressources halieutiques.
Considérant les arrangements administratifs qui régissent depuis longtemps la réception des propositions relatives aux incidences environnementales et aux pêcheries de l'Alberta, et considérant que des mesures sont prises pour régler les problè- mes pouvant découler du barrage, Environnement Canada n'est pas justifié d'intervenir. Soyez assurés, toutefois, que les orga- nismes fédéraux et provinciaux concernés suivront de près le déroulement des procédures intentées devant les tribunaux sur cette question, et qu'ils contrôleront le projet pour s'assurer du respect des lignes directrices et des règlements régissant la construction et l'exploitation du barrage.
Un permis provincial accordé pour la construc tion du barrage par le ministère de l'Environne- ment de l'Alberta a été attaqué par deux fois par l'appelante devant les tribunaux albertains. En octobre 1987, la première de ces contestations a abouti à l'annulation du permis délivré et à la délivrance d'un second permis. Une demande solli- citant l'annulation de ce second permis a été reje- tée en avril 1988. Il ressort clairement du dossier que l'appelante n'a eu connaissance de l'approba- tion que le 16 février 1989. Les procédures qui la contestent présentement n'ont été entamées devant la Section de première instance que le 21 avril de cette même année.
LE DÉCRET SUR LES LIGNES DIRECTRICES
Avant de discuter des questions soulevées dans le présent appel, nous devons examiner le contenu et la portée du Décret sur les lignes directrices. L'article 6 de la Loi sur le ministère de l'Environ- nement, sous le régime duquel le Décret a été adopté, déclare:
6. Au titre de celles de ses fonctions qui portent sur la qualité de l'environnement, le ministre peut par arrêté, avec l'approbation du gouverneur en conseil, établir des directives à l'usage des ministères et organismes fédéraux et, s'il y a lieu, à celui des sociétés d'État énumérées à l'annexe III de la Loi sur la gestion des finances publiques et des organismes de régle- mentation dans l'exercice de leurs pouvoirs et fonctions.
L'article 2 du Décret sur les lignes directrices prévoit un certain nombre de définitions:
2. Les définitions qui suivent s'appliquent aux présentes lignes directrices.
«Bureau» Le Bureau fédéral d'examen des évaluations environ- nementales chargé d'administrer le processus et relevant directement du Ministre.
«commission» Commission d'évaluation environnementale char gée, en vertu de l'article 21, de réaliser l'examen public d'une proposition.
«énoncé des incidences environnementales» Évaluation détaillée des répercussions environnementales de toute proposition dont les effets prévus sur l'environnement sont importants, qui est effectuée ou fournie par le promoteur en conformité avec les directives établies par une commission.
«ministère» S'entend:
a) de tout ministère, commission ou organismes fédéraux, ou
b) dans les cas indiqués, l'une des corporations de la Cou- ronne nommées à l'annexe D de la Loi sur l'administration financière ou tout organisme de réglementation.
«ministère responsable» Ministère qui, au nom du gouverne- ment du Canada, exerce le pouvoir de décision à l'égard d'une proposition.
«Ministre» Le ministre de l'Environnement.
«processus» Le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement, administré par le Bureau.
«promoteur» L'organisme ou le ministère responsable qui se propose de réaliser une proposition.
«proposition» S'entend en outre de toute enteprise ou activité à l'égard de laquelle le gouvernement du Canada participe à la prise de décisions.
Les articles 3, 6, 10, 12, 13, 15 et 19 du Décret sur les lignes directrices édictent diverses disposi tions à caractère général, qui prévoient un examen préalable ou une évaluation initiale d'une demande. Ils sont ainsi libellés:
3. Le processus est une méthode d'auto-évaluation selon laquelle le ministère responsable examine, le plus tôt possible au cours de l'étape de planification et avant de prendre des décisions irrévocables, les répercussions environnementales de _toutes les propositions à l'égard desquelles il exerce le pouvoir de décision.
6. Les présentes lignes directrices s'appliquent aux proposi tions
a) devant être réalisées directement par un ministère responsable;
b) pouvant avoir des répercussions environnementales sur une question de compétence fédérale;
c) pour lesquelles le gouvernement du Canada s'engage financièrement; ou
d) devant être réalisées sur des terres administrées par le gouvernement du Canada, y compris la haute mer.
10. (1) Le ministère responsable s'assure que chaque propo sition à l'égard de laquelle il exerce le pouvoir de décision est soumise à un examen préalable ou à une évaluation initiale, afin de déterminer la nature et l'étendue des effets néfastes qu'elle peut avoir sur l'environnement.
(2) Les décisions qui font suite à l'examen préalable ou à l'évaluation initiale visés au paragraphe (1) sont prises par le ministère responsable et ne peuvent être déléguées à nul autre organisme.
12. Le ministère responsable examine ou évalue chaque pro position à l'égard de laquelle il exerce le pouvoir de décision, afin de déterminer:
a) si la proposition est d'un type compris dans la liste visée à l'alinéa 1 l a), auquel cas elle est réalisée telle que prévue;
b) la proposition est d'un type compris dans la liste visée à l'alinéa 1 1 b), auquel cas elle est soumise au Ministre pour qu'un examen public soit mené par une commission;
c) si les effets néfastes que la proposition peut avoir sur l'environnement sont minimes ou peuvent être atténués par l'application de mesures techniques connues, auquel cas la proposition est réalisée telle que prévue ou à l'aide de ces mesures, selon le cas;
d) si les effets néfastes que la proposition peut avoir sur l'environnement sont inconnus, auquel cas la proposition est soumise à d'autres études suivies d'un autre examen ou évaluation initiale, ou est soumise au Ministre pour qu'un examen public soit mené par une commission;
e) si, selon les critères établis par le Bureau, de concert avec le ministère responsable, les effets néfastes que la proposition peut avoir sur l'environnement sont importants, auquel cas la proposition est soumise au Ministre pour qu'un examen public soit mené par une commission; ou
f) si les effets néfastes que la proposition peut avoir sur l'environnement sont inacceptables, auquel cas la proposition est soit annulée, soit modifiée et soumise à un nouvel examen ou évaluation initiale.
13. Nonobstant la détermination des effets d'une proposi tion, faite conformément à l'article 12, le ministère responsable soumet la proposition au Ministre en vue de la tenue d'un examen public par une commission, chaque fois que les préoc- cupations du public au sujet de la proposition rendent un tel examen souhaitable.
15. Le ministère responsable doit s'assurer
a) après qu'une détermination sur les effets d'une proposi tion a été faite conformément à l'article 12 ou après qu'une proposition a été soumise au Ministre conformément à l'arti- cle 13, et
b) avant la mise en application de mesures d'atténuation et d'indemnisation conformément à l'article 14,
que le public a accès à l'information concernant cette proposi tion conformément à la Loi sur l'accès à l'information.
19. lI incombe à tout ministère à vocation spécialisée ou ayant des responsabilités à une proposition donnée:
a) de fournir au ministère responsable, sur demande, des données, des renseignements ou des avis concernant:
(i) les exigences réglementaires afférentes à la proposition, et
(ii) les effets de la proposition sur l'environnement ainsi que les répercussions sociales qui y sont directement liées; et
b) au besoin, de proposer des mesures de protection pour les ressources renouvelables dont il a la responsabilité.
Le Décret sur les lignes directrices prévoit la tenue des examens publics pouvant être requis en vertu des articles 12 et 13. Ces examens sont menés par une commission d'évaluation environne- mentale sous le régime d'un ensemble complexe de dispositions énoncées aux articles 21 à 32 du Décret sur les lignes directrices. Les membres de la commission doivent «faire preuve d'objectivité et ne pas être dans une situation il y a risque de conflit d'intérêts quant à la proposition» (alinéa 22a)), être «à l'abri de l'ingérence politique» (alinéa 22b)) et posséder «des connaissances parti- culières et une expérience se rapportant aux effets prévus de la proposition sur les plans technique, environnemental et social» (alinéa 22c)). Les audiences d'une commission doivent être tenues en public (paragraphe 27(1)); la commission doit mener «une campagne d'information pour tenir le public au courant de l'examen entrepris et s'assu- rer qu'il a accès à l'information pertinente» (para- graphe 28(1)); tous les renseignements présentés à une commission «sont rendus publics» (paragraphe 29(1)); le public doit avoir suffisamment de temps pour pouvoir prendre connaissance des renseigne- ments reçus par une commission au sujet d'une proposition et donner ses commentaires à ce propos (paragraphe 29(2)); lors de l'examen d'une proposition, le ministère responsable étudie «les préoccupations du public qui concernent la propo sition et ses effets possibles sur l'environnement» (alinéa 4(1)b)); le Bureau fédéral d'examen des évaluations environnementales, qui est chargé d'administrer le processus d'examen et qui relève directement du ministre de l'Environnement du Canada, doit notamment aider les ministères res- ponsables «dans la prestation de renseignements et l'obtention de la réaction du public aux proposi tions» pour s'assurer que «l'opinion du public soit entendue» en temps opportun (alinéa 18b)).
En vertu de l'article 36 du Décret sur les lignes directrices, certaines des responsabilités afférentes à l'examen public sont confiées à des ministère du gouvernement du Canada autres que le «ministère responsable»:
36. Lors d'un examen public, il incombe à tout ministère à vocation spécialisée ou ayant des responsabilités liées à une proposition donnée:
a) de fournir, sur demande, des données, des renseignements et des conseils aux membres de la commission et aux autres participants de l'examen public;
b) d'assurer la présence de spécialistes lors des audiences publiques de la commission afin que ceux-ci fassent des présentations ou répondent à des questions; et
c) d'encourager, au besoin, la protection des intérêts dont il est responsable.
L'article 31 du Décret sur les lignes directrices prévoit ce qui doit être fait une fois un examen terminé. Il déclare:
31. (1) Une fois l'examen terminé, la commission:
a) rédige un rapport contenant ses conclusions et les recom- mandations qu'elle adresse aux ministres responsables; et
b) fait parvenir le rapport visé à l'alinéa a) au Ministre et au ministre chargé du ministère responsable.
(2) Le Ministre et le ministre chargé du ministère responsa- ble rendent le rapport visé à l'alinéa (1)a).
QUESTIONS DE COMPÉTENCE FÉDÉRALE
Point n'est besoin d'un examen approfondi pour constater que la construction et l'exploitation du barrage et du réservoir de la rivière Oldman peu- vent avoir des répercussions environnementales sur des questions de compétence fédérale. Au moins trois de ces questions sembleraient être ainsi visées, soit les pêcheries, les Indiens et les terres réservées aux Indiens. À mon sens, la preuve établit avec force et éloquence que la présence d'un barrage et d'un réservoir risque effectivement d'avoir des répercussions néfastes sur ces domaines particu- liers de la compétence fédérale.
Les pêcheries
Les études effectuées pour le compte des autori- tés provinciales mettent en évidence une foule d'incidences néfastes que pourraient subir les populations de poissons de la rivière Oldman à la suite de l'accroissement des charges de sédiments, de la pollution des eaux, des obstacles à la migra tion et de l'utilisation d'explosifs au cours de la construction du barrage. Ont également été identi fiées certaines conséquences pouvant résulter, en amont comme en aval, du barrage, du réservoir et du captage des eaux.
En février 1987, Environnement Canada a pré- paré une «Environmental Impact Evaluation» [[TRADUCTION] «Évaluation des incidences envi- ronnementales»] en se fondant sur des rapports élaborés par ces autorités et la Bande indienne de Peigan ou pour celles-ci. Aux pages 9 et 10 de ce document, il est déclaré:
[TRADUCTION] La construction du barrage de la rivière Oldman changera radicalement l'habitat des poissons, à la fois en amont et en aval. En aval, les effets prévus se feront sentir durant la construction et après la mise en exploitation. Ils ont été analysés par Radford (1975), McCart (1978) et Allen (1985), d'où les renseignements suivants sont tirés.
Durant la construction, l'augmentation de la sédimentation pourra réduire à court terme de la population des invertébrés benthiques, qui servent de nourriture aux poissons. L'effet direct sur les poissons de cette sédimentation accrue serait vraisemblablement limité aux œufs et aux alevins, mais l'im- portance du frai dans la zone en cause est mal connue. Les déversements de matières toxiques peuvent agir directement ou indirectement sur les poissons, selon la quantité et la substance déversée. L'emploi d'explosifs pourrait causer de fortes mortali- tés, en particulier durant les migrations de printemps ou d'au- tomne. La grande vitesse de l'eau dans les tunnels de dérivation pourrait nuire aux migrations à la hauteur du barrage durant la construction.
La stratification thermique dans le lac de retenue peut donner lieu à un rejet d'eau très froide, qui refroidirait l'eau en aval l'été, ce qui entraînerait peut-être un remplacement de la composition en espèces dans la zone touchée au dépens d'espè- ces d'eau chaude (brochet et doré) et au profit d'espèces d'eau froide (truite et corégone de montagne). Les poissons qui habitent cette zone pourraient croître plus lentement.
La migration (truite arc-en-ciel et corégone de montagne, p.ex.) sera complètement bloquée par le barrage, ce qui nuira à des espèces comme la truite qui utilise à l'heure actuelle la rivière en amont et en aval du barrage à différents stades de sa vie. Une chute des effectifs de la truite pourrait survenir en amont, à moins que l'espèce ne trouve un milieu naturel de remplacement acceptable dans le lac de retenue.
Les poissons bloqués en aval pourraient se concentrer au pied du barrage, ils seraient très vulnérables à une surpêche.
Des préoccupations du même ordre ont été exprimées dans le document «Comments on the Oldman River Dam Proposai» [[TRADUCTION] «Commentaires sur le projet de barrage de la rivière Oldman»], daté du 24 février 1987 et pré- paré par la Région du Centre et de l'Arctique du ministère des Pêches et des Océans. À la demande du ministère des Affaires indiennes et du Nord, six rapports provinciaux portant sur le projet étaient examinés. Ceux-ci traitaient de l'évaluation des ressources halieutiques et de l'atténuation des inci dences du projet. Cet examen visait à identifier les répercussions majeures possibles du projet, à faire ressortir les mesures d'atténuation s'offrant à leur égard et à mesurer les conséquences du projet sur les pêches de la réserve indienne de Peigan. Les observations suivantes, figurent aux pages 1 et 2 de ce rapport sous le titre «Fisheries Impacts» [ [TRA- DUCTION] «Incidences sur les pêches»]:
1) Les espèces de pêche sportive d'eau froide et d'eau fraîche seront touchées. Les premières sont, par ordre d'abondance, le corégone de montagne, la truite arc-en-ciel et les espèces occasionnelles, Dolly Varden, truite brune et truite fardée. Les poissons du second groupe comprennent le corégone de lac, le brochet du Nord et deux espèces rares, le doré et la laquaiche. Les poissons non pêchés les plus communs sont les meuniers.
2) Le barrage de la rivière Oldman noyera (par ordre d'impor- tance pour l'habitat des poissons) 6,5 km de la rivière du Nid-de-Corbeau, 17,5 km de la rivière Oldman et 9,5 km de la rivière Castle.
3) Le lac de retenue de 2 300 ha sera très productif au début (2 ou 3 ans), à cause de l'arrivée de matières nutritives en provenance des terres nouvellement noyées. Après cependant, la productivité chutera et pourra supporter beaucoup moins de poissons de pêche sportive que les milieux fluviaux actuels (bien que le lac sera une vingtaine de fois plus grand que la superficie noyée des rivières, il ne pourra vraisemblablement pas produire la moitié des poissons de pêche sportive chaque année). L'eau froide et le taux élevé de renouvellement de l'eau sont les principales causes de cette faible productivité. Le lac offrira aux poissons un habitat de piètre qualité, à cause du marnage excessif prévu (jusqu'à 20 m). L'érosion des rives due à cette fluctuation de niveau donnera lieu à un accroissement de la sédimentation. Les forts vents dominants rendront la navigation périlleuse et les conditions des glaces rendues dangereuses par le marnage limiteront les possibilités de pêche blanche. Les populations de poissons du lac seront dominées par des espèces non sportives, notamment le meunier noir. La contamination des poissons par le mercure est possible.
4) La biocénose aquatique de la rivière Oldman en aval du barrage sera vraisemblablement modifiée par l'eau plus froide et plus riche en matières nutritives qui proviendra du lac de retenue. Au début, cette eau pourrait être de qualité suffisam- ment mauvaise pour causer des mortalités de poissons en aval. A la longue, le refroidissement de l'eau pourrait nuire aux espèces d'eau fraîche. Les substrats directement en aval du barrage seront modifiés par la vitesse accrue du courant.
5) Plusieurs effets de la construction sont à signaler, comme une augmentation de l'érosion et de l'envasement, l'élimination d'eau usée et de déchets, l'utilisation d'explosifs, ainsi que les déversements de produits pétroliers et chimiques.
6) Le barrage de la rivière Oldman bloquera les déplacements de poissons et affectera les espèces qui partagent leur cycle vital entre l'amont et l'aval du barrage. Dans le cas de la truite arc-en-ciel, l'exclusion de la partie aval devrait avoir un effet minimal. Les truites qui utilisent l'aval pour croître et hiverner sont peu nombreuses par rapport à l'effectif total. La plupart d'entre elles fraient en amont du niveau maximal du barrage, et on ne croit pas la population très mobile. Les principaux lieux d'alimentation estivale et d'hivernage du cours inférieur des rivières du Nid-de-Corbeau et Oldman sera noyé. Les milieux de remplacement disponibles après la construction du barrage seront probalement de moins bonne qualité.
Le corégone de montagne, contrairement à la truite arc-en-ciel, effectue des migrations considérables dans les limites du terri- toire étudié. Certains poissons hivernent en amont du barrage, mais la plupart hivernent probablement en aval. Le frai et l'alimentation ont lieu en bonne partie en amont, secteur que le barrage rendra inaccessible. Cependant, il y a beaucoup de frai en aval du barrage, et on prévoit qu'une population de corégone y demeurera. On prévoit que celle-ci sera moins nombreuse,
parce qu'une bonne partie de l'habitat d'alimentation se trouve en amont du barrage.
Les Indiens et les terres réservées aux Indiens
À la page 4 du document «Comments on the Oldman River Dam Proposai» [[TRADUCTION] «Commentaires sur le projet de barrage de la rivière Oldman»] ressortent des observations addi- tionnelles exposant les incidences néfastes que le projet est susceptible d'entraîner sur les terres de la Bande indienne de Peigan et des réserves situées en aval de l'emplacement du barrage:
[TRADUCTION] I) La construction pourra altérer la qualité et la quantité d'eau dans la réserve indienne de Peigan, dont la limite ouest est située à une douzaine de km en aval du barrage. L'augmentation des matières en suspension, les déversements de produits pétroliers et chimiques sont autant de possibilités.
2) Si l'accroissement du débit est intégré dans le régime de fonctionnement du barrage de la rivière Oldman, les pêches en aval en bénéficieront et le barrage aura alors un effet positif dans cette zone.
3) Durant les premières années de fonctionnement ; la libéra- tion d'eau pauvre en oxygène et peut-être toxique de l'hypolim- nion pourrait causer des mortalités de poissons en aval du barrage (cependant, on ne sait pas jusqu'où ces effets pour- raient se faire sentir en aval).
4) À la longue, on s'attend que les régimes thermiques seront abaissés et que la concentration en éléments nutritifs et la productivité seront plus forts en aval. Ici encore, il est difficile de prévoir jusqu'où en aval la température et la productivité seront modifiées sans connaître les régimes d'exploitation du barrage. À l'heure actuelle, la section du chenal principal de la rivière Oldman de Brocket à Lethbridge est considérée comme une zone de transition occupée à la fois par des espèces d'eau froide et d'eau fraîche. Le refroidissement de l'eau, l'accroisse- ment de la productivité et surtout du débit devraient transfor mer une portion de cette zone en pêcherie d'eau froide de grande qualité.
De plus, à la page 12, l'«Évaluation des incidences environnementales» susmentionnée expose d'autres conséquences possibles du projet sur les terres réservées aux Indiens:
[TRADUCTION] En outre, les tempêtes de poussière qui tou- chent la Réserve pourraient augmenter par suite de l'érosion éolienne du sol exposé par le marnage annuel du lac de retenue. Les travaux pourraient accroître la concentration de mercure chez les poissons et amener la disparition locale de la forêt alluviale de peupliers. Ces deux conséquences ne sont pas certaines, et devraient être contrôlées ou étudiées durant la prochaine décennie.
ANALYSE
Je traiterai à présent des questions qui ont été soulevées dans le cadre du présent appel.
Le ministre des Transports est-il lié par le Décret sur les lignes directrices?
La première question est celle de savoir si le juge des requêtes s'est trompé en décidant que le ministre des Transports n'était pas lié par le Décret sur les lignes directrices lorsqu'il accordait une approbation en vertu de la Loi sur la protec tion des eaux navigables. Les articles 5 et 6 de cette Loi sont ainsi libellés:
5. (I) Il est interdit de construire ou de placer un ouvrage dans des eaux navigables ou sur, sous, au-dessus ou à travers de telles eaux à moins que:
a) préalablement au début des travaux, l'ouvrage, ainsi que son emplacement et ses plans, n'aient été approuvés par le ministre selon les modalités qu'il juge à propos;
b) la construction de l'ouvrage ne soit commencée dans les six mois et terminée dans les trois ans qui suivent l'approba- tion visée à l'alinéa a) ou dans le délai supplémentaire que peut fixer le ministre;
e) la construction, l'emplacement ou l'entretien de l'ouvrage ne soit conforme aux plans, aux règlements et aux modalités que renferme l'approbation visée à l'alinéa a).
(2) Sauf dans le cas d'un pont, d'une estacade, d'un barrage ou d'une chaussée, le présent article ne s'applique pas à un ouvrage qui, de l'avis du ministre, ne géne pas sérieusement la navigation.
6. (I) Dans les cas un ouvrage visé par la présente partie est construit ou placé sans avoir été approuvé par le ministre ou est construit ou placé sur un emplacement non approuvé par le ministre ou n'est pas construit ou placé conformément à des plans ainsi approuvés ou, après avoir été ainsi construit ou placé, n'est pas entretenu conformément à ces plans et aux règlements, le ministre peut:
a) ordonner au propriétaire de l'ouvrage de l'enlever ou de le modifier;
b) lorsque le propriétaire de l'ouvrage n'obtempère pas à un ordre donné sous le régime de l'alinéa a), enlever et détruire l'ouvrage et aliéner—notamment par vente ou don—les matériaux qui le composent;
c) enjoindre à quiconque d'arrêter la construction de l'ou- vrage lorsqu'il est d'avis qu'il gêne ou gênerait la navigation ou que sa construction est en contravention avec la présente loi.
(2) Quiconque n'obtempère pas à un ordre donné sous le régime de l'alinéa (1)a) ou c) commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de cinq mille dollars.
(3) Les frais entraînés par l'enlèvement, la destruction ou l'aliénation d'un ouvrage par le ministre en application de l'alinéa (1)b) sont, après déduction du montant qui peut être réalisé notamment par vente, recouvrables du propriétaire, ainsi que les frais de recouvrement, au nom de Sa Majesté.
(4) Le ministre peut, sous réserve de dépôt et d'annonce comme dans le cas d'un ouvrage projeté, approuver un ouvrage, ainsi que ses plans et son emplacement, après le début de sa construction; l'approbation a alors le même effet que si elle avait été donnée avant le début des travaux.
Les motifs sur lesquels le juge a fondé sa conclu sion sont énoncés aux pages 268 et 269 de ses motifs d'ordonnance:
La présente demande veut faire annuler l'approbation donnée par le ministre sous le régime du paragraphe 5(1) au motif que le ministre a omis de déclencher un examen des incidences gouvernementales conformément au Décret sur les lignes direc- trices. Ce raisonnement tenu par la requérante se fonde sur une prémisse erronée puisque la Loi sur la protection des eaux navigables n'établit point d'obligation de tenir quelque examen public que ce soit, et que la Loi sur le ministère des Transports, L.R.C. (1985), chap. T-18 ne stipule aucunement que le minis- tre doive prendre en considération les facteurs environnemen- taux dans l'accomplissement des fonctions de sa charge. Comme les facteurs touchant la navigation sont les seuls à pouvoir être considérés par le ministre lorsqu'il décide de l'approbation d'un projet, je conclus que le ministre n'était pas habilité à exiger un examen des incidences environnementales. Un bref de certiorari sera délivré lorsqu'il y aura absence de compétence, une notion qui comprend le fait d'agir sur le fondement de considérations non pertinentes, le défaut de respecter l'équité ou l'erreur de droit ressortant à la lecture du dossier. Je suis incapable de conclure que le ministre des transports ait commis une erreur appartenant à l'une ou à l'autre de ces catégories. L'approbation accordée en l'espèce respectait les limites du pouvoir conféré par la Loi sur la protection des eaux navigables. En fait, le déclenchement des procédures prévues au Décret sur les lignes directrices par ce ministre l'aurait obligé à excéder les limites de ses pouvoirs. En conséquence, aucun bref de certiorari ne devrait être délivré contre le ministre des Transports. De plus, comme j'ai conclu que ni la Loi sur la protection des eaux navigables ni la Loi sur le ministère des Transports n'exigeaient que la procédure de l'examen environnemental soit invoquée, l'ordonnance de man- damus qui a été demandée pour obliger le ministre à se conformer à une telle procédure est également refusée.
Avec déférence, je suis incapable de souscrire à la proposition que, lorsqu'il a décidé s'il accordait ou non son approbation, le ministre des Transports pouvait seulement prendre en considération les facteurs touchant la navigation, et n'était pas habi- lité à exiger un examen des incidences environne- mentales. De telles conclusions semblent assez incompatibles avec la portée véritable et, certes, très étendue du Décret sur les lignes directrices. Le projet de barrage auquel se rapportait l'approba- tion tombait nettement sous le coup de l'alinéa 6b) du Décret sur les lignes directrices en ce qu'il faisait partie des «propositions ... pouvant avoir des répercussions environnementales sur une ques tion de compétence fédérale». À la suite de cette
«proposition», le ministère des Transports est devenu le «ministère responsable» en qualité de ministère qui «exerce le pouvoir de décision». Les incidences environnementales qu'une décision accordant la demande pouvait entraîner pour toute question de compétence fédérale devaient être exa minées conformément aux dispositions du Décret sur les lignes directrices. Ce Décret s'appliquait dans ses moindres détails.
Les intimés sont en faveur d'une interprétation beaucoup plus étroite du Décret sur les lignes directrices. Selon eux, il n'est pas applicable lors- que les dispositions d'une loi spécialisée exigent la considération de critères statutaires non directe- ment reliés à des préoccupations environnementa- les, ce qui serait le cas en l'espèce, le libellé de la Loi sur la protection sur les eaux navigables restreint l'examen du ministre à la «navigation». À mon sens, accepter cette prétention serait omettre de tenir compte du caractère véritable du Décret sur les lignes directrices qui, ainsi que l'a conclu l'arrêt Fédération canadienne de la faune, est une loi d'application générale. En vertu de l'article 6 de la Loi sur le ministère de l'Environnement, les directives établies doivent être utilisées par les «ministères ... dans l'exercice de leurs pouvoirs et fonctions» pour aider à l'exécution des fonctions du ministre de l'Environnement du Canada lui-même qui «portent sur la qualité de l'environnement». Je conclus que le Décret sur les lignes directrices a été destiné à lier le ministre dans l'exercice de ses fonctions. Il a créé une fonction qui s'ajoute à l'exercice des autres pouvoirs qui lui sont conférés par des lois. Le fondement du pouvoir et de la responsabilité du ministre de prendre en charge les problèmes environnementaux touchant des ques tions de compétence fédérale ne réside pas dans ces lois mais dans le Décret sur les lignes directrices lui-même. Le ministre avait une obligation positive à respecter.
Avant d'en terminer avec cette question, je veux me prononcer sur une autre prétention du ministre. Se fondant sur le Décret sur les lignes directrices lui-même, il prétend que ses dispositions n'ont jamais été destinées à s'appliquer à une espèce comme la présente espèce parce qu'elles sont nette- ment incompatibles et nettement en conflit avec le mécanisme d'approbation établi par la Loi sur la protection des eaux navigables. Alors que l'article
3 du Décret sur les lignes directrices exige que le ministère responsable «examine, le plus tôt possible au cours de l'étape de planification et avant de prendre des décisions irrévocables, les répercus- sions environnementales de toutes les proposi tions», en vertu du paragraphe 6(4) de la Loi, le ministre peut «approuver un ouvrage, ainsi que ses plans et son emplacement, après le début de sa construction», et l'approbation a alors «le même effet que si elle avait été donnée avant le début des travaux». Selon le ministre, il y a incompatibilité ou conflit par le fait que ce pouvoir d'accorder une approbation après le début de la construction d'un ouvrage peut être exercé bien après le stade décrit par le membre de phrase «le plus tôt possible au cours de l'étape de planification et avant de pren- dre des décisions irrévocables».
À mon avis, les dispositions de l'article 6 de la Loi concernent les pouvoirs de redressement que détient le ministre lorsqu'il détermine les mesures qu'il pourrait prendre advenant un défaut d'obte- nir une approbation conformément à l'article 5 avant le début de la construction. Le pouvoir prévu au paragraphe (4) de l'article 6 constitue une exception à la règle générale; il est entièrement discrétionnaire et se trouve clairement subordonné à l'exigence fondamentale de l'alinéa 5(1)a) selon laquelle une approbation doit être obtenue avant le début de la construction. Je suis également incapa ble de trouver dans le Décret sur les lignes directri- ces une disposition qui empêcherait le ministre de se conformer à ses prescriptions dans toute la mesure du possible lorsqu'il exerce son pouvoir discrétionnaire sous le régime du paragraphe 6(4) de la Loi sur la protection des eaux navigables. Cela étant, je ne puis conclure à aucune incompa- tibilité et à aucun conflit entre ces deux textes de la législation fédérale.
Le ministre des Pêches et des Océans est-il lié par le Décret sur les lignes directrices?
La deuxième question est celle de savoir si le juge des requêtes s'est trompé en concluant qu'un bref de mandamus ne pouvait être délivré pour enjoindre au ministre des Pêches et des Océans de se conformer au Décret sur les lignes directrices. Lorsqu'il a décidé qu'aucun bref de mandamus n'était recevable contre le ministre, le juge de première instance a tout d'abord noté que la demande mettait en jeu une question de fait qui
devait être tranchée dans le cadre d'un procès, pour ensuite ajouter (aux pages 270 et 271):
L'article 6 de la Loi sur le ministère de l'Environnement, L.R.C. (1985), chap. E-10 déclare que le Décret sur les lignes directrices est destiné à être utilisé par les ministères et organis- mes fédéraux dans l'exercice de leurs pouvoirs et fonctions. Le Décret sur les lignes directrices lui-même s'adresse aux ministè- res fédéraux qui, à l'égard de certaines «propositions», consti tuent des «ministères responsables». Les définitions données à ces termes exigent que le ministère fédéral exerce le pouvoir de décision à l'égard du projet concerné. L'alinéa 6b) prévoit que les lignes directrices s'appliqueront aux propositions pouvant avoir des répercussions environnementales sur une question de compétence fédérale.
Rien ne me porte à conclure que, lorsqu'il a édicté le Décret sur les lignes directrices, le Parlement avait l'intention d'éten- dre un tel pouvoir au-delà des organismes fédéraux. Il est donc clair que le ministre des Pêches et des Océans ne peut être obligé à procéder à un examen environnemental parce que son ministère n'a pas entrepris de réaliser un projet. Par contre, dans l'hypothèse les lignes directrices peuvent être étendues aux projets initiés par les provinces, l'utilisation du mot «propo- sition» doit signifier qu'un ministère fédéral fera entrer en jeu les lignes directrices s'il reçoit effectivement une proposition exigeant son approbation. Comme la Loi sur les pêcheries ne prévoit pas de procédure d'approbation qui serait applicable à un permis ou à une licence, le ministre n'est pas obligé de soumettre le projet à l'étude environnementale prévue sous le régime du Décret sur les lignes directrices. Il s'ensuit donc qu'un bref de mandamus ne peut être délivré pour ordonner au ministre des Pêches et des Océans de procéder à un tel examen.
De façon aussi importante, j'éprouve à cet égard les doutes mêmes que j'ai exprimés relativement au pouvoir du ministre des Transports de prendre en considération les facteurs tou- chant l'environnement sous le régime de la Loi sur la protection des eaux navigables. Même si la Loi sur les pêcheries prévoyait la délivrance d'un permis ou d'une licence, les pouvoirs détenus par le ministre relativement à l'examen de certains facteurs sont limités par la portée de cette Loi et de la Loi sur le ministère des Pêches et des Océans, L.R.C. (1985), chap. F-I5. Les facteurs environnementaux ne sont soulevés ni par l'une ni par l'autre, et je ne crois pas que le ministre intimé soit justifié d'aucune manière de mettre en cause le ministre de l'Environ- nement ou de déclencher l'application du Décret sur les lignes directrices.
Les intimés ont tenté de démontrer le bien-fondé de ces conclusions en faisant référence à certains termes qui se rencontrent à la fois dans la Loi sur les pêches, L.R.C. (1985), chap. F-14 et dans le Décret sur les lignes directrices. Leurs arguments s'opposaient à l'assertion de l'appelante selon laquelle, lus ensemble, le Décret sur les lignes directrices et les articles 35 et 37 de la Loi sur les pêches" obligent le ministre des Pêches et des
" Ces articles sont ainsi libellés:
35. (1) II est interdit d'exploiter des ouvrages ou entrepri- ses entraînant la détérioration, la destruction ou la perturba tion de l'habitat du poisson.
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Océans à se conformer au Décret sur les lignes directrices. Selon les intimés, le ministre n'était aucunement tenu de le faire à moins que ne lui ait été soumise une «proposition» à l'égard de laquelle il «exerce le pouvoir de décision». En ce qui con- cerne le projet de barrage de la rivière Oldman, une telle situation ne pourrait se présenter que si une personne avait invoqué la compétence visée à l'article 37, selon laquelle le ministre peut autori- ser un ouvrage qui est de nature à «faire détériorer, perturber ou détruire l'habitat du poisson». Aucune telle demande n'ayant été faite au minis- tre, aucune «proposition» ne lui a été soumise pour qu'il en décide et, en conséquence, il n'était assu- jetti à aucune obligation légale de se conformer au Décret sur les lignes directrices.
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(2) Le paragraphe (1) ne s'applique pas aux personnes qui détériorent, détruisent ou pertubent l'habitat du poisson avec des moyens ou dans des circonstances autorisés par le minis- tre ou conformes aux règlements pris par le gouverneur en conseil en application de la présente loi.
37. (1) Les personnes qui exploitent ou se proposent d'ex- ploiter des ouvrages ou entreprises de nature à entraîner soit l'immersion de substances nocives dans des eaux vivent des poissons ou leur rejet en quelque autre lieu si le risque existe que la substance nocive en cause, ou toute autre substance nocive provenant de son rejet, pénètre dans ces eaux, soit la détérioration, la perturbation ou la destruction de l'habitat du poisson, doivent, à la demande du ministre— ou de leur propre initiative, dans les cas et de la manière prévus par les règlements d'application pris aux termes de l'alinéa (3)a)—, lui fournir les documents—plans, devis, études, pièces, annexes, programmes, analyses, échantil- lons—et autres renseignements pertinents, concernant l'ou- vrage ou l'entreprise ainsi que les eaux, lieux ou habitats du poisson menacés, qui lui permettront de déterminer, selon le cas:
a) si l'ouvrage ou l'entreprise est de nature à faire détério- rer, perturber ou détruire l'habitat du poisson en contra vention avec le paragraphe 35(1) et quelles sont les mesu- res éventuelles à prendre pour prévenir ou limiter les dommages;
b) si l'ouvrage ou l'entreprise est ou non susceptible d'en- traîner l'immersion ou le rejet d'une substance en contra vention avec l'article 36 et quelles sont les mesures éven- tuelles à prendre pour prévenir ou limiter les dommages.
(2) Si, après examen des documents et des renseignements reçus et après avoir accordé aux personnes qui les lui ont fournis la possibilité de lui présenter leurs observations, il est d'avis qu'il y a infraction ou risque d'infraction au paragra- phe 35(I) ou à l'article 36, le ministre ou son délégué peut, par arrêté et sous réserve des règlements d'application de
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Je suis incapable de souscrire à cette analyse. Bien que, dans son acception courante, le terme «proposition» puisse impliquer un genre de demande, dans le Décret sur les lignes directrices ce mot est un terme défini dont la portée est beaucoup plus large que sa portée courante. Cette définition est ainsi libellée:
«proposition» S'entend en outre de toute entreprise ou activité à l'égard de laquelle le gouvernement du Canada participe à la prise de décisions.
Manifestement, les termes utilisés dans cette défi- nition n'exigent en rien qu'il y ait une sorte de demande. A mon point de vue, les demandes ou les requêtes sollicitant des autorisations ou des appro bations ne sont que des moyens, parmi d'autres, d'attirer l'attention du ministre sur l'existence d'une «entreprise ou activité». Un ministre peut être mis au courant de l'existence d'une «entreprise ou activité» par d'autre moyens, au nombre des- quels figure, à mon sens, une démarche d'un parti- culier sollicitant des mesures spécifiques ressortis- sant aux responsabilités du ministre aux termes d'une loi qu'il est chargé d'appliquer pour le compte du gouvernement du Canada. Dans de telles circonstances, s'il existe une «entreprise ou activité» à l'égard de laquelle le gouvernement du Canada exerce «le pouvoir de décision», il existe également une «proposition».
Il est également évident que l'«entreprise ou activité» concernée doit tomber sous le coup d'une des catégories énumérées à l'article 6 du Décret sur les lignes directrices. Lorsque tel est le cas, il incombe à tout «ministère responsable» exerçant à son égard le pouvoir de décision» de la traiter comme une «proposition» conformément au para-
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l'alinéa (3)b) ou, à défaut, avec l'approbation du gouverneur
en conseil:
a) soit exiger que soient apportées les modifications et adjonctions aux ouvrages ou entreprises, ou aux documents s'y rapportant, qu'il estime nécessaires dans les circons- tances;
b) soit restreindre l'exploitation de l'ouvrage ou de l'entreprise.
Il peut en outre, avec l'approbation du gouverneur en conseil dans tous les cas, ordonner la fermeture de l'ouvrage ou de l'entreprise pour la période qu'il juge nécessaire en l'occurrence.
graphe 10(1) en soumettant ses incidences envi- ronnementales «à un examen préalable ou à une évaluation initiale».
Les questions cruciales consistent donc à savoir si, en l'espèce, le ministre se trouvait en présence d'une «proposition» «pouvant avoir des répercus- sions environnementales sur une question de com- pétence fédérale» à l'égard de laquelle il «exerce le pouvoir de décision».
En ce qui concerne la première question, le dossier établit clairement que, de façon évidente, le ministre était au courant du projet de barrage et de réservoir ainsi que des incidences néfastes que ces ouvrages risquaient d'avoir sur les pêcheries de la rivière Oldman. Cette conclusion ressort nette- ment du document «Commentaires sur le projet de barrage de la rivière Oldman», daté du 24 février 1987 et préparé par son ministère, ainsi que de la lettre du 25 août 1987 dans laquelle le ministre annonçait sa décision de ne pas intervenir pour [TRADUCTION] «remédier aux problèmes que ce projet risque d'engendrer pour les ressources halieutiques». Selon moi, la détérioration, la per turbation ou la destruction de l'habitat du poisson par le projet était une question de compétence fédérale et constituait une «entreprise ou activité» au sens de la définition du terme «proposition» de l'article 2 du Décret sur les lignes directrices.
Il reste toutefois à déterminer si, dans les cir- constances, la «proposition» a déclenché une obli gation pour le ministre de se conformer au Décret sur les lignes directrices. La prétention des intimés qu'elle ne l'a pas fait est fondée sur une interpréta- tion littérale des articles 35 et 37 de la Loi sur les pêches, qui reconnaissent au ministre le pouvoir d'autoriser une modification de l'habitat du pois- son dans certaines circonstances. Ce que dit essen- tiellement cet argument, c'est que rien dans le dossier n'établit que le ministre ait jamais eu à décider si une telle autorisation devait être accor- dée, de sorte que ni le ministre, ni son ministère, dans les circonstances, n'exerçe le pouvoir de décision» à l'égard d'une «proposition» «pouvant avoir des répercussions environnementales sur une question de compétence fédérale»—c.-à-d. les pêcheries. Dans l'hypothèse le ministre aurait décidé de faire une «demande» conformément au paragraphe 37(1), il aurait ultimement eu à déci- der s'il autorisait ou non une telle modification, et
il aurait se conformer au Décret sur les lignes directrices; dans l'hypothèse contraire, il n'était pas tenu de le faire 12 .
Je ne puis accepter ces prétentions. Au début d'août 1987, il a été expressément demandé au ministre d'intervenir dans le but de protéger les ressources halieutiques de la rivière Oldman dans le contexte du projet de construction du barrage et du réservoir, un projet qui, comme je l'ai déjà dit, constituait une «entreprise ou activité» visée par la définition du terme «proposition» du Décret sur les lignes directrices. La protection de l'habitat du poisson et des pêcheries ressortissent manifeste- ment à la compétence exercée par le ministre et par son ministère sous le régime de la Loi sur les pêches. La lettre d'août 1987 demandait en fait au ministre de s'acquitter de sa responsabilité de pro- téger cet habitat du poisson et ces ressources halieutiques de la rivière Oldman, une responsabi- lité qui est reconnue par les articles 35 et 37 de la Loi sur les pêches; en raison de cette lettre, le ministre est devenu celui qui «exerce le pouvoir de décision» en ce qui concerne les mesures à prendre à cet égard. Le ministre pouvait choisir soit de ne pas intervenir, soit de faire une «demande» au promoteur du barrage en procédant sous le régime de l'article 37. Cette décision, il l'a effectivement prise. Ce faisant, le ministre est tombé sous le coup des obligations d'un «ministère responsable» en devenant celui qui «exerce le pouvoir de décision» relativement à une «entreprise ou activité à l'égard de laquelle le gouvernement du Canada participe à la prise de décisions» «pouvant avoir des répercus- sions environnementales sur une question de com- pétence fédérale». Le refus du ministre de prendre des mesures sous le régime de la Loi sur les pêches ne l'a pas soustrait à son obligation de se confor- mer au Décret sur les lignes directrices.
Selon mon interprétation du Décret sur les lignes directrices, la compétence et la responsabi- lité du ministre des Pêches et des Océans ont également été déclenchées par la demande d'ap- probation présentée au ministre des Transports en vertu de la Loi sur la protection des eaux naviga- bles. Plusieurs articles du Décret sur les lignes directrices semblent militer clairement en faveur
' 2 Aucune disposition n'a été adoptée pour permettre au ministre d'agir [TRADUCTION] «sans qu'on ne lui en ait fait la demande».
d'une telle interprétation. L'article 3 exige que le ministère responsable «examine, le plus tôt possible au cours de l'étape de planification et avant de prendre des décisions irrévocables, les répercus- sions environnementales de toutes les propositions à l'égard desquelles il exerce le pouvoir de déci- sion»; l'article 6 rend le Décret sur les lignes directrices applicable «aux propositions ... pou- vant avoir des répercussions environnementales sur une question de compétence fédérale»; en même temps, l'article 19 déclare que «tout ministère à vocation spécialisée ou ayant des responsabilités [liées] à une proposition donnée» doit, «au besoin, ... proposer des mesures de protection pour les ressources renouvelables dont il a la responsabi- lité». Plus tard, une fois l'examen public terminé, la commission d'évaluation environnementale doit rédiger un rapport contenant les «conclusions et les recommandations qu'elle adresse aux ministres responsables», une expression qui, à mon sens, désigne tout ministre chargé d'une question de compétence fédérale à l'égard de laquelle une pro position aura des incidences environnementales. Subséquemment, les dispositions des alinéas 33(1)c) et d) sembleraient s'appliquer à la fois en ce qui concerne le ministre des Transports et en ce qui concerne le ministre des Pêches et des Océans:
33. (1) Lors d'un examen public, il incombe au ministère responsable:
c) sous réserve du paragraphe (2), de décider, en collabora tion avec d'autres ministères, commissions ou organismes fédéraux visés par les recommandations de la commission, de la mesure dans laquelle ces recommandations devraient deve- nir des exigences fédérales avant d'autoriser la mise en oeuvre d'une proposition;
d) sous réserve du paragraphe (2), s'assurer, en collabora tion avec d'autres organismes responsables, que les décisions prises par les ministres responsables à la lumière des conclu sions et des recommandations qu'a formulées une commis sion à la suite de l'examen public d'une proposition, sont prises en considération dans la conception, la réalisation et l'exploitation de cette proposition et que des programmes appropriés de mise en oeuvre, d'inspection et de surveillance environnementale sont établis; 13
13 Les dispositions des alinéas 33(1)c) et d) sont assujetties au paragraphe 33(2); selon celui-ci, lorsque le ministère respon- sable «a un rôle de réglementation à l'égard de la proposition», ces dispositions doivent être modifiées «de façon à tenir compte des décisions de ce ministère et à ne pas y nuire». Si le ministère des Transports pouvait être considéré comme exerçant un tel rôle, il n'a pas été établi que les responsabilités énumérées aux alinéas (1)c) et (1)d) nuiraient à son exercice.
Interprétées ensemble, ces dispositions suggèrent que toute incidence risquant d'être néfaste pour l'habitat du poisson et les ressources en poisson de la rivière Oldman devait être assujettie aux procé- dures prévues au Décret sur les lignes directrices avant qu'une approbation ne soit accordée; elles veulent également que, en qualité de ministre res- ponsable de la protection de l'habitat du poisson et des ressources halieutiques de la rivière Oldman, le ministre des Pêches et des Océans ait été tenu de jouer pleinement le rôle que lui assignait le Décret sur les lignes directrices. Il revenait ensuite au ministre du «ministère responsable«, celui des Transports, d'accorder ou de refuser l'approbation au terme de ce processus d'examen.
La modification d'une décision prise dans l'exer- cice d'un pouvoir discrétionnaire
La troisième question soulevée est celle de savoir si le juge des requêtes a commis une erreur dans la façon dont il a exercé son pouvoir discrétionnaire. Il semble évident que, malgré ses conclusions anté- rieures, il a ici tenu pour acquis que le Décret sur les lignes directrices liait à la fois le ministre des Transports et le ministre des Pêches et des Océans, pour parvenir à la décision que les circonstances de l'espèce militaient contre l'octroi de la réparation discrétionnaire sollicitée. Les motifs de cette con clusion figurent aux pages 273 et 274 de ses motifs d'ordonnance:
Je traiterai finalement du caractère discrétionnaire du redressement recherché. Dans le cadre de cette démarche, j'examinerai l'historique du présent projet et la question du retard. L'approbation prévue à la Loi sur la protection des eaux navigables a été accordée le 18 septembre 1987 à la suite de la publication, en août 1986, des avis publics annonçant que l'examen de la demande d'approbation de l'Alberta était en cours. Aucune mesure n'a été prise pour annuler cette approba tion et pour faire ordonner l'application du Décret sur les lignes directrices jusqu'à ce que le présent avis de requête soit déposé le 21 avril 1989. A cette date, le projet de la rivière Oldman était déjà complété à environ 40 %. Je noterais également que, même si l'association intimée n'était pas constituée, un grand nombre de ses membres étaient au courant de l'existence du projet et s'y étaient individuellement opposés depuis le début des années 1970. La requérante connaissait également la posi tion de non-intervention adoptée par le ministre des Pêches et des Océans à l'égard du projet en août 1987. Rien ne justifie la requérante d'avoir permis le déroulement de toutes ces activités avant d'entamer la présente contestation. A mon sens, il serait entièrement inapproprié pour nous d'accorder maintenant le redressement sollicité.
Je ne puis non plus omettre de tenir compte de l'étendue et du caractère exhaustif de l'examen des incidences environne-
mentales effectué par la province d'Alberta. Je suis convaincu que le processus d'examen public qui s'est déroulé en l'espèce a permis le recensement complet des questions pouvant faire l'objet de préoccupations sociales environnementales, en sorte de donner à tous les citoyens, y compris les membres de l'organisation requérante, l'entière possibilité d'exprimer leur opinion et de se mobiliser en vue de contester le projet. A mon sens, si le pouvoir discrétionnaire du tribunal était exercé de façon à accorder le redressement recherché, il y aurait répéti- tion inutile d'une procédure qui a fait l'objet d'un examen minutieux et complet au cours des vingt dernières années.
Les intimés soutiennent que notre Cour ne serait pas justifiée de modifier en appel la décision prise dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire en cause, le juge des requêtes ayant agi de façon raisonnable en fondant son refus sur le retard et le double emploi. Qu'il entrât dans la compétence du juge de première instance d'accorder ou de refuser cette réparation semble avoir été bien établi par de hautes instances. Dans l'arrêt Reg. v. All Saints, Wigan (Churchwardens of) (1875-76), 1 App. Cas. 611 (H.L.), lord Chelmsford a énoncé ce principe de la façon suivante à la page 620:
[TRADUCTION] Maintenant, cette question me semble avoir donné lieu à une légère confusion, qui peut être facilement dissipée. Un bref de mandamus est une ordonnance de préroga- tive et non une ordonnance de plein droit; dans ce sens, la décision de l'accorder ou non appartient à la Cour et est discrétionnaire. Ce n'est pas seulement en appréciant le bien- fondé de la demande que la Cour peut refuser d'accorder un tel bref; elle est également en droit de le faire en raison d'un retard, ou pour un autre motif, qui serait personnel à la partie sollicitant le bref. En cela, la Cour rend une décision discrétion- naire qui ne peut être remise en question. En conséquence, dans les affaires le droit à l'égard duquel une ordonnance de mandamus a été accordée apparaît douteux à la présentation des arguments s'opposant à une telle décision [»upon shewing cause»], la Cour accorde fréquemment un bref de mandamus afin que le droit visé puisse être jugé après le rapport de celui-ci; il s'agit, encore, d'une décision discrétionnaire.
Voir également l'arrêt Rodd v. County of Essex (1910), 44 R.C.S. 137, la page 143.
En règle générale, une cour d'appel ne modifiera une décision rendue par un juge de première ins tance dans l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire que si ce juge a agi sur le fondement d'un principe erroné ou d'une appréciation fautive des faits, ou si l'ordonnance prononcée n'est pas juste et raisonna- ble. Certaines des décisions faisant autorité sur ce point sont énumérées par le juge en chef Thurlow dans l'arrêt Polylok Corporation c. Montreal Fast Print (1975) Ltd., [1984] 1 C.F. 713 (C.A.), aux pages 723 725. A mon sens, toutefois, le juge de première instance a commis un type d'erreur justi-
fiant clairement notre Cour de faire obstacle à sa décision discrétionnaire. Abstraction faite de sa conclusion selon laquelle l'appelante s'y serait prise trop tard pour intenter ses procédures devant la Section de première instance (une conclusion dont je doute qu'elle soit bien fondée dans son principe 14 ), il semble clair que la décision du juge découlait également de sa conclusion qu'il y avait doublement du processus de l'examen environne- mental au motif que, pour employer ses propres termes, se conformer au Décret sur les lignes directrices entraînerait «une répétition inutile d'une procédure qui a fait l'objet d'un examen minutieux et complet au cours des vingt dernières années».
Comme le volumineux dossier qui nous est soumis l'établit clairement, des études et des tra- vaux importants et détaillés ont été effectués par l'Alberta ou pour son compte, comme par d'autres intéressés, lors de l'examen des différentes inciden ces environnementales du projet de barrage, notamment celles visant les pêcheries de la rivière Oldman. L'avocat de l'Alberta a présenté une analyse comparant chacune des démarches effec- tuées pour ces études à celles du processus d'exa- men et d'évaluation exigé par le Décret sur les lignes directrices; cependant, comme l'avocat de l'appelante, je dois conclure que cette comparaison échoue au moins sous deux aspects cruciaux. Con- trairement au régime provincial, le Décret sur les lignes directrices a été clairement rédigé pour per- mettre l'expression des préoccupations du public et offrir à la population toutes les occasions voulues de participer au processus d'évaluation et d'exa- men en matière d'environnement. Bien que des informations et des préoccupations aient été com-
14 Le dossier semble expliquer amplement le retard. L'appe- lante n'a pas été constituée avant septembre 1987 et, comme il est noté plus haut, elle n'a eu connaissance de la décision d'accorder l'approbation qu'environ deux mois avant que les procédures ne soient réellement entamées. Entretemps, elle avait tenté sans succès de contester le permis provincial autori- sant la construction du barrage, et elle avait obtenu une opinion juridique sur la question de savoir si les ministres fédéraux étaient liés par le Décret sur les lignes directrices. La décision de la Section de première instance qui a conclu, dans l'affaire Fédération canadienne de la faune, Inc., susmentionnée, que l'ordonnance liait le ministre de l'Environnement du Canada, a été déposée au début d'avril 1989, quelques jours seulement avant le commencement des procédures devant la Section de première instance.
muniquées par le public dans le cadre des études menées sous le régime provincial, les lois en vertu desquelles ces études ont été réalisées mettent beaucoup moins l'accent sur le rôle du public face aux répercussions environnementales que ne le fait le Décret sur les lignes directrices 15 . Deuxième- ment, rien dans ces lois ne garantit une mesure perceptible d'indépendance des commissions d'examen 16 ou, certainement, n'assure de leur part une indépendance aussi grande que celle prévue à l'article 22 du Décret sur les lignes directrices. L'idée d'accorder au public la possibilité d'expri- mer ses préoccupations environnementales devant une commission indépendante est évidemment au centre du mécanisme établi par les dispositions fédérales, que le juge Muldoon a récemment décrit pour la Section de première instance dans l'arrêt Fédération canadienne de la faune Inc. c. Canada (Ministre de l'Environnement) (N° de greffe T-2102-89, le 28 décembre 1989), la page 10 de ses motifs d'ordonnance:
[TRADUCTION] À la fin de son travail, la commission d'évalua- tion de l'environnement doit rédiger un rapport énonçant ses conclusions et les recommandations—formulées pendant et après un processus entièrement public et obligatoirement équi- table—qu'elle adresse aux ministres responsables, et elle doit faire parvenir ce rapport au ministre, qui, en l'espèce, est également le ministre chargé du «ministère responsable». La ligne directrice 32 poursuit, et prend fin, en ordonnant au ministre de rendre public le rapport de la commission. réside la grande force du mécanisme prévu par ces dispositions législa- tives. Il oppose les forces respectives, d'une part, de l'informa- tion, des connaissances et, ultimement, de l'opinion du public, et, d'autre part, du pouvoir du ministre et du gouvernement en place, qui peuvent, à la lumière de leur conception des hautes fins de l'État, écarter de façon assez nette les recommandations de la commission. Évidemment, ils peuvent aussi adopter ou adapter les recommandations de la commission de façon à
15 Voir, par exemple, l'alinéa 4b) et les articles 13, 15, 28, 29 et 30 du Décret sur les lignes directrices.
16 Les assises juridiques que la loi albertaine fournissait au Comité consultatif technique, au Comité de gestion et au Comité consultatif local n'ont pas été établies devant notre Cour, bien qu'elles découlent probablement des pouvoirs confé- rés au ministre de l'Environnement de l'Alberta sous le régime de la Department of the Environment Act, R.S.A. 1980, chap. D-19. Il est toutefois noté que plusieurs des membres de ces deux derniers comités non gouvernementaux auraient pu avoir un degré d'indépendance moindre que celui exigé par le Décret sur les lignes directrices: en qualité d'exploitants de ranchs et de fermiers, la constitution des nouvelles ressources en eau pouvaient leur être avantageuse. Rien dans la Environmental Council Act n'exige expressément qu'une commission consti- tuée en vertu de ses dispositions remplisse, en ce qui concerne l'indépendance de ses membres, les mêmes conditions que les commissions visées au Décret sur les lignes directrices.
sauvegarder à la fois l'environnement et le projet, selon qu'ils l'estiment approprié et réalisable.
LA COURONNE PROVINCIALE
Deux questions doivent maintenant être discu- tées: celle de savoir si la Cour est compétente à l'égard de Sa Majesté la Reine du chef de l'Al- berta en qualité d'intimée; et, en second lieu, celle de savoir si cette partie est à l'abri des dispositions de la Loi sur la protection des eaux navigables.
La compétence
Cette question a été soulevée devant notre Cour sans l'avoir été devant la Section de première instance. Elle découle de la décision prononcée par la Section de première instance le 30 novembre 1989 dans l'affaire Fédération canadienne de la faune Inc. c. Canada (Ministre de l'Environne- ment), [[1990] 1 C.F. 595 (1 r° inst.)]. Il y a été conclu que la Cour n'était pas compétente à l'égard d'un des intimés parce que, en qualité d'organisme constitué et établi par les lois de la Saskatchewan, il ne constituait pas un «office fédé- ral» au sens de la définition de l'article 2 de la Loi sur la Cour fédérale. La question en l'espèce consiste à savoir si Sa Majesté la Reine du chef de l'Alberta doit être considérée de la même façon, et si, en conséquence, nous devrions conclure que notre Cour est sans compétence en ce qui concerne cette partie.
Ce point me semble avoir été réglé par cette Cour dans l'arrêt Adidas (Can.) Ltd. c. Skoro Enterprises Ltd., [1971] C.F. 382, que j'interprète comme concluant que toute personne à qui une ordonnance comme celle demandée en l'espèce risque d'être défavorable peut être jointe comme partie à l'instance «de manière à lui permettre d'obtenir toute réparation pouvant s'offrir à elle par voie d'appel de cette ordonnance». À mon avis, Sa Majesté du chef de l'Alberta comparaît réguliè- rement devant notre Cour en qualité de partie intimée.
L'immunité de la Couronne
Finalement, il est soutenu que Sa Majesté du chef de l'Alberta est soustraite aux exigences d'ap- probation édictées par la Loi sur la protection des eaux navigables. Cette prétention explique appa- remment le fait que, le 9 juin 1989, le ministre de l'Environnement de l'Alberta a renvoyé l'approba-
tion au ministère des Transports en demandant son annulation—qui a été refusée. L'avocat des minis- tres fédéraux conteste évidemment une telle prétention.
L'argument présenté se fonde sur les critères établis par le juge en chef Dickson dans l'arrêt Alberta Government Telephone c. Canada (Con- seil de la radiodiffusion et des télécommunica-
tions canadiennes), [1989] 2 R.C.S. 225, la page 281:
À mon avis, compte tenu des affaires PWA et Eldorado, la portée des termes «mentionnée ou prévue» doit s'interpréter indépendamment de la règle de common law supplantée. Toute- fois, les réserves exprimées dans l'arrêt Bombay, précité, sont fondées sur de bons principes d'interprétation que le temps n'a pas complètement effacés. Il me semble que les termes «men- tionnée ou prévue» contenus à l'art. 16 peuvent comprendre: (1) des termes qui lient expressément la Couronne («Sa Majesté est liée»); (2) une intention claire de lier qui, selon les termes de l'arrêt Bombay, «ressort du texte même de la loi», en d'autres termes, une intention qui ressorte lorsque les dispositions sont interprétées dans le contexte d'autres dispositions, comme dans l'arrêt Ouellette, précité; et (3) une intention de lier lorsque l'objet de la loi serait «privé [...] de toute efficacité» si l'État n'était pas lié ou, en d'autres termes, s'il donnait lieu à une absurdité (par opposition à un simple résultat non souhaité). Ces trois éléments devraient servir de guide lorsqu'une loi comporte clairement une intention de lier la Couronne.
Il est soutenu qu'aucun de ces critères n'est satisfait.
La Loi sur la protection des eaux navigables ne comporte pas de termes liant expressément la Cou- ronne provinciale. Je suis néanmoins convaincu que l'examen des dispositions textuelles de cette Loi dans le contexte d'autres dispositions textuelles permet de constater une intention de lier la Cou- ronne provinciale. Par exemple, aux termes de l'article 4 ", la Couronne provinciale n'est expres- sément soustraite à l'application de la Loi que dans la mesure un ouvrage est autorisé en vertu d'une loi d'une législature provinciale «adoptée avant que la province devienne partie du Canada». Cette disposition révèle certainement une intention du législateur que la Couronne provinciale soit par ailleurs liée par la Loi.
" 4. Sauf les dispositions qui ont trait à la reconstruction, à la réparation ou à la modification d'un ouvrage légalement construit, la présente partie ne s'applique pas à un ouvrage construit sous l'autorité d'une loi fédérale, d'une loi de la législature de l'ancienne province du Canada ou d'une loi d'une législature provinciale adoptée avant que la province devienne partie du Canada.
M. Crane soutient également que la Loi man- querait entièrement d'atteindre son but si ses dis positions ne liaient pas le gouvernement, puisqu'il est notoire qu'un grand nombre d'ouvrages obs- truant des eaux navigables (par exemple, des quais, des docks, des jetées) sont construits par le gouvernement, fédéral ou provincial, ou à sa demande. J'accepte cette prétention, et je fais mienne la substance de son affirmation, selon laquelle une conclusion que la Couronne est exemptée des exigences d'approbation posées par la Loi pourrait rendre les eaux navigables dange- reuses, contrairement à l'esprit véritable de la Loi et à l'intention ayant présidé à son adoption.
DÉCISION
Je déciderais donc d'accorder le présent appel avec dépens à la fois devant cette Cour et devant la Section de première instance, et j'accorderais à l'appelante
(a) un bref de certiorari annulant l'approbation en date du 18 septembre 1987 délivrée par le ministre des Transports au ministre de l'Environnement de l'Alberta pour autoriser l'exécution des travaux relatifs à la construction d'un barrage sur la rivière Oldman dans la province d'Alberta sous le régime de la Loi sur la protection des eaux navigables;
(b) un bref de mandamus enjoignant au ministre des Transports de se conformer au Décret sur les lignes directrices;
(c) un bref de mandamus enjoignant au ministre des Pêches et des Océans de se conformer au Décret sur les lignes directrices.
LE JUGE HEALD, J.C.A.: J'y souscris. LE JUGE URIE, J.C.A.: Je suis d'accord.
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