T-298-90
Distribution Canada Inc. (requérante)
c.
Ministre du Revenu national (intimé)
RÉPERTORIÉ: DISTRIBUTION CANADA INC. c. M.R.N. (1 1e
INST.)
Section de première instance, juge Strayer—
Vancouver, 23 octobre; Ottawa, 14 novembre
1990.
Douanes et accise — Tarif des douanes — Requête en
mandamus visant à contraindre le ministre à percevoir les
droits prescrits par l'art. 4 du Tarif — Les agents des douanes
exercent un pouvoir discrétionnaire au sujet de la perception
des droits peu élevés — Le Ministère a pour politique de ne
pas percevoir les droits d'un dollar ou moins — La requérante
(un organisme regroupant des épiciers indépendants préoccu-
pés par la concurrence américaine) n'a pas qualité pour agir et
elle ne peut exiger l'exécution d'une obligation en recourant au
tribunal — Le ministre ne refuse pas d'appliquer le Tarif
mais exerce un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne les
moyens à prendre pour le faire respecter en utilisant des
ressources limitées.
Contrôle judiciaire — Brefs de prérogative — Mandamus
— Requête en mandamus visant à contraindre le ministre à
faire respecter rigoureusement l'art. 4 du Tarif des douanes
qui exige le paiement de droits sur les articles qui entrent au
Canada — Le Ministère a pour politique de ne pas percevoir
les droits qui s'élèvent à un dollar ou moins — Les moyens à
prendre pour faire respecter le Tarif sont laissés à la discrétion
du ministre — Le ministre ne refuse pas d'appliquer le Tarif
comme en fait foi l'existence d'un système de perception — Le
fait de fermer les yeux sur certaines omissions de payer des
droits ne donne pas ouverture à un contrôle judiciaire à moins
qu'il ait été tenu compte de considérations qui ne sont pas
pertinentes ou qui dénotent de la mauvaise foi ou des motifs
illégitimes.
Pratique — Parties — Qualité pour agir — Requête en
mandamus visant à contraindre le ministre à faire respecter
rigoureusement l'art. 4 du Tarif des douanes qui exige le
paiement de droits sur les articles qui entrent au Canada — La
requérante (un organisme regroupant des épiciers indépendants
préoccupés par la concurrence américaine) n'a pas qualité pour
agir car elle ne peut exiger l'exécution d'une obligation en
recourant au tribunal — Même si les tribunaux étendent la
qualité pour agir dans les actions en jugement déclaratoire
sans contestation de constitutionnalité, il n'y a pas d'extension
comparable de la qualité pour agir dans le cas du mandamus.
Il s'agit d'une requête visant à obtenir un bref de mandamus
pour contraindre le ministre du Revenu national à faire respec-
ter rigoureusement l'article 4 du Tarif des douanes qui prévoit
la perception de droits de douanes sur certains articles entrant
au Canada. Les agents des douanes ne perçoivent aucun droit
sur la plupart des provisions achetées par des Canadiens qui
séjournent aux États-Unis pendant moins de 24 heures, c'est-à-
dire pendant une période pour laquelle il n'y a pas d'exemption
légale de paiement des droits de douane. La requérante, un
organisme qui regroupe des épiciers indépendants, prétend que
bon nombre de ses membres subissent un manque à gagner
important à cause de la concurrence déloyale que leur livrent
les magasins des États-Unis, où les prix des marchandises et les
taxes sont plus bas qu'au Canada. Les agents des douanes
exercent un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne la
question de savoir s'il y a lieu de percevoir des droits peu élevés,
et le Ministère a pour politique de ne pas procéder à la
perception lorsque les droits exigibles s'élèvent à un dollar ou
moins. De plus, ils peuvent renoncer à percevoir des montants
plus élevés lorsque d'autres priorités l'exigent, comme, par
exemple, lorsque le volume de la circulation causerait des
retards inacceptables pour les voyageurs et des embouteillages
du côté américain de la frontière. Les questions en litige sont
celles de savoir si la requérante a qualité pour agir et si l'intimé
est tenu envers la requérante de s'acquitter d'une obligation
dont on peut exiger l'exécution en recourant au tribunal.
Jugement.• la requête devrait être rejetée.
La requérante n'a pas qualité pour solliciter un mandamus.
Même si les tribunaux ont étendu la qualité pour agir dans les
actions en jugement. déclaratoire sans contestation de constitu-
tionnalité, il n'y a pas eu d'extension comparable de la qualité
pour agir en ce qui concerne le mandamus. Même si l'on devait
retenir une conception plus généreuse de la qualité pour agir, il
est toujours absolument essentiel qu'il existe une obligation
dont on peut obtenir l'exécution forcée en recourant au
tribunal.
Parfois, la distinction entre les obligations dont on peut
exiger l'exécution en recourant au tribunal et celles dont on ne
peut obtenir l'exécution forcée par les voies de justice est
formulée en fonction de la personne au profit de qui l'on est
tenu d'exécuter l'obligation. Si un fonctionnaire est tenu de par
la loi d'accomplir un acte déterminé dans des circonstances
déterminées au profit de personnes déterminées, ces dernières
peuvent s'adresser aux tribunaux pour obtenir l'exécution
forcée de l'obligation. Si le fonctionnaire s'est vu attribuer un
pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne les actes qu'il accom-
plit, la manière de les exécuter, ou le destinataire ou le bénéfi-
ciaire des actes en question, il n'existe pas alors d'obligation,
dont on peut obtenir l'exécution forcée en justice, qui le force à
accomplir un acte déterminé à un moment déterminé ou au
profit d'une personne déterminée: les recours qui peuvent être
exercés pour sanctionner son inaction ou son action fautive sont
d'ordre politique, et non judiciaire. Même si l'article 4 du Tarif
des douanes prévoit qu'il doit être prélevé des droits, l'intimé a
un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne les moyens à
prendre pour faire respecter la loi. Cet article impose des
obligations qui ne pèsent pas seulement sur les percepteurs des
douanes mais aussi sur les personnes qui ramènent au Canada
des articles soumis à des droits de douane. Le ministre doit
établir un système crédible de recouvrement, mais s'il ferme les
yeux sur certaines omissions de payer les droits de douane, cela
ne donne pas à la Cour le droit d'intervenir.
Le recours en mandamus peut être exercé dans certaines
circonstances pour exiger l'observation de la loi, mais on a
établi en jurisprudence une distinction entre le fait de contrain-
dre un fonctionnaire à appliquer la loi lorsque le fonctionnaire
en question s'est complètement abstenu d'agir, et le fait de
dicter à un fonctionnaire les moyens prendre pour appliquer
la loi. Le tribunal ne peut intervenir que dans le premier cas. Le
ministre n'a pas totalement refusé ou négligé d'appliquer le
Tarif des douanes. Il applique activement le Tarif en procédant
à des recouvrements dans la mesure où les ressources que le
Parlement met à sa disposition le lui permettent, et il a
manifestement le pouvoir discrétionnaire d'agir ainsi. Il a tenu
compte des répercussions que les différents degrés d'application
de la loi auraient sur les mouvements de touristes américains
venant au Canada et sur les files d'attente aux points d'entrée
au Canada. Si ces considérations n'avaient eu rien à voir avec
l'application régulière de la loi ou si elles avaient dénoté de la
mauvaise foi ou des motifs illégitimes de la part du ministre ou
de son personnel, elles auraient pu donner ouverture à un
contrôle judiciaire.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la
Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B,
Loi de 1982 sur le Canada, chap. 11 (R.-U.) [L.R.C.
(1985), appendice II, n° 44], art. 6.
Tarif des douanes, L.R.C. (1985), chap. C-54, art. 4.
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Rothmans of Pall Mall Canada Ltd. c. Le ministre du
Revenu national (N° 1), [1976] 2 C.F. 500; (1976), 67
D.L.R. (3d) 505; [1976] CTC 339; 10 N.R. 153 (C.A.);
Regina v. Comr. of Police of the Metropolis, Ex parte
Blackburn (No. 3), [1973] Q.B. 241 (C.A.).
DISTINCTION FAITE AVEC:
Re North Vancouver (district de) et autres et Conseil des
ports nationaux et autres (1978), 89 D.L.R. (3d) 704; 10
C.E.L.R. 31; 7 M.P.L.R. 151 (C.F. 1" inst.); Friends of
the Oldman River Society c. Canada (Ministre des
Transports), [1990] 2 C.F. 18; (1990), 68 D.L.R. (4th)
375 (C.A.).
DÉCISION EXAMINÉE:
R. v. Metropolitan Police Comr., Ex parte Blackburn,
[1968] 1 All. E.R. 763 (C.A.).
DÉCISIONS CITÉES:
Ministre de la Justice du Canada et autre c. Borowski,
[1981] 2 R.C.S. 575; (1981), 130 D.L.R. (3d) 588;
[1982] 1 W.W.R. 97; 12 Sask. R. 420; 64 C.C.C. (2d)
97; 24 C.P.C. 62; 24 C.R. (3d) 352; 39 N.R. 331; Finlay
c. Canada (Ministre des Finances), [1986] 2 R.C.S. 607;
(1986), 33 D.L.R. (4th) 321; [1987] 1 W.W.R. 603; 23
Admin. L.R. 197; 17 C.P.C. (2d) 289; 71 N.R. 338.
AVOCATS:
Jack N. Cram pour la requérante.
Gunnar O. Eggertson pour l'intimé.
PROCUREURS:
Cram & Wicks, Vancouver, pour la requé-
rante.
Le sous-procureur général du Canada, pour
l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs
de l'ordonnance rendus par
LE JUGE STRAYER:
Réparation demandée
Il s'agit d'une requête visant à obtenir la répara-
tion suivante:
[TRADUCTION] Un bref de mandamus ou une autre réparation
de la même nature pour contraindre l'intimé, LE MINISTRE DU
REVENU NATIONAL, à se conformer aux dispositions de l'article
4 du Tarif des douanes relativement à la perception des droits
prescrits par cette loi à l'égard des Canadiens rentrant au
Canada avec des articles achetés aux États-Unis lorsqu'ils ont
été à l'extérieur du Canada pendant une période de moins de 24
heures, et à se conformer aux dispositions de la Loi sur les
douanes, de la Loi sur les licences d'exportation et d'importa-
tion et de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les
États-Unis.
Les faits
La requérante, Distribution Canada Inc., est un
organisme sans but lucratif dont les membres sont
des épiciers indépendants de quelque 1 300 maga-
sins situés dans cinq provinces, dont la Colombie-
Britannique. Elle négocie au nom de ses membres
avec des fournisseurs en alimentation de façon à
permettre à ses membres de livrer plus facilement
concurrence aux chaînes d'alimentation plus
importantes. Elle fait également pression sur les
gouvernements au nom de ses membres et s'occupe
de divers problèmes juridiques pour eux. La pré-
sente requérante a remplacé les requérants ini-
tiaux, qui étaient propriétaires de magasins d'ali-
mentation. En partie à cause de la réaction
négative des clients de ces magasins face à l'intro-
duction de la présente instance, les épiciers indivi-
duels ont été remplacés par la présente requérante.
La Couronne convient que si les requérants ini-
tiaux avaient qualité pour intenter la présente
poursuite, Distribution Canada Inc. a également
cette qualité.
La requérante se plaint du fait que le ministre
du Revenu national n'applique pas rigoureusement
le tarif douanier, comme il est tenu selon elle de le
faire aux termes de l'article 4 du Tarif des doua-
nes'. Cet article dispose:
4. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi
et de la Loi sur les douanes, chapitre C-40 des Statuts revisés
du Canada de 1970, il doit être prélevé, perçu et payé sur toutes
les marchandises énumérées à l'annexe II, ou qui sont mention-
nées comme n'y étant pas énumérées, lorsque ces marchandises
sont importées au Canada ou sorties d'entrepôt pour y être
consommées, les divers taux de droits de douane indiqués en
regard de chaque article respectivement ou imposés sur les
marchandises non énumérées, dans la colonne du tarif applica-
bles aux marchandises, sous réserve des conditions énoncées
dans le présent article et dans les articles 5 à 16.
En particulier, la requérante prétend qu'aucun
droit n'est perçu sur la plupart des provisions
achetées aux Etats-Unis par des Canadiens qui
séjournent dans ce pays pendant moins de vingt-
quatre heures, c'est-à-dire pendant une période
pour laquelle il n'y a pas d'exemption légale de
paiement pour les articles soumis à des droits de
douane. Une grande partie de la preuve porte sur
cinq points frontaliers particulièrement fréquentés
de la Colombie-Britannique, dont quatre sont les
plus actifs du Canada pour ce qui est des «menues
perceptions» (perception de droits et de taxes sur
les articles non commerciaux importés). On a éga-
lement présenté certains éléments de preuve ten-
dant à démontrer qu'il y avait aussi un relâche-
ment dans l'application de la loi à certains points
de la frontière de l'Ontario et des États-Unis. La
requérante prétend que bon nombre de ses épiciers
membres subissent un manque à gagner important
à cause de la concurrence déloyale que leur livrent
selon eux les magasins américains situés près de la
frontière, où les prix des marchandises et les taxes
sont plus bas qu'au Canada.
Le ministre intimé reconnaît que ses fonction-
naires exercent un pouvoir discrétionnaire en ce
qui concerne la question de savoir s'il y a lieu de se
donner la peine de percevoir des droits peu élevés,
et que le Ministère a pour politique de ne pas
procéder à la perception lorsque les droits exigibles
s'élèvent à un dollar ou moins. Il est constant que
la politique du Ministère est correctement exposée
dans une lettre que le ministre du Revenu national,
M. Otto Jelinek, a envoyée le 3 août 1989 à M.
Gerry Prins, le président de la requérante. En voici
le paragraphe clé:
[TRADUCTION] Pour commencer, je tiens à préciser que mon
Ministère a pour politique de ne pas demander aux inspecteurs
L.R.C. (1985), chap. C-54.
des douanes d'exiger des voyageurs le paiement des droits sur
leurs marchandises lorsque le montant exigible est d'un dollar
ou moins. De plus, ils peuvent renoncer à percevoir des mon-
tants plus élevés lorsque d'autres priorités l'exigent. Lorsque,
par exemple, le volume de la circulation cause des retards
inacceptables, ou que des activités d'interdiction sont en cours,
il est reconnu que les inspecteurs des douanes peuvent renoncer
à réclamer des montants de deux, trois, quatre dollars ou plus,
selon les circonstances et leur aptitude à écouler efficacement la
circulation.
En réponse à cette lettre, M. Prins a envoyé le 24
octobre 1989 au ministre une lettre dans laquelle il
a prié instamment le ministre d'appliquer unifor-
mément le tarif douanier. Il a notamment écrit:
[TRADUCTION] Il ne vous appartient pas de décider quelles lois
doivent être observées et quelles lois ne doivent pas être appli-
quées. Nous vous demandons donc respectueusement de pren-
dre immédiatement des mesures pour corriger ce problème qui
s'aggrave.
Une demande semblable a été envoyée le 19
décembre 1989. De même, les procureurs de la
requérante ont adressé les 27 et 28 décembre 1989
au ministre des lettres dans lesquelles ils ont mis
en demeure le ministre d'[TRADUCTION] «appli-
quer rigoureusement» le Tarif des douanes
[TRADUCTION] ... en ce qui concerne les droits et les taxes qui
doivent être réclamés des Canadiens pour les articles importés
au Canada en provenance des États-Unis lorsqu'ils n'ont pas
été à l'étranger assez longtemps pour que les articles qu'ils ont
achetés soient exonérés de ces droits.
Les autres éléments de preuve présentés par les
parties ne me sont pas d'un grand secours pour
régler les questions juridiques essentielles en litige,
si ce n'est qu'ils démontrent qu'il existe des diver
gences honnêtes d'opinion sur la question de savoir
si l'on peut appliquer strictement le tarif douanier
et, dans l'affirmative, de quelle manière. La preuve
présentée par la requérante, même si elle est dans
une très large mesure anecdotique, contient des
statistiques qui démontrent, selon elle, qu'à cinq
points frontaliers de la Colombie-Britannique, on
ne perçoit des droits que d'environ douze pour cent
des véhicules rapportant des articles soumis à des
droits de douane. On a également présenté certains
éléments de preuve qui tendent à démontrer que
les recettes additionnelles qu'on pourrait obtenir si
l'on appliquait rigoureusement la loi dépasseraient
largement les coûts que cela entraînerait. D'autre
part, dans sa preuve, l'intimé met sérieusement en
doute la valeur de l'analyse statistique de la requé-
rante. Il affirme que dans bon nombre des exem-
ples cités dans la preuve de la requérante au sujet
des Canadiens qui rentreraient au pays sans être
tenus de payer des droits, les articles qu'ils impor-
tent n'étaient passibles d'aucun droit ou n'étaient
assujettis qu'à des droits négligeables. En outre,
l'intimé affirme, dans sa preuve, qu'il serait impos
sible d'appliquer la loi rigoureusement ou qu'on
n'y parviendrait qu'au prix de files inacceptables,
de retards considérables pour les voyageurs et
d'embouteillages du côté américain de la frontière
qui susciteraient sans tarder des objections énergi-
ques. Il prétend que ces embouteillages à la fron-
tière consterneraient et décourageraient les touris-
tes américains venant au Canada même s'ils ne
seraient pas assujettis à des droits, et dans les cas
extrêmes, pourraient être considérés comme une
violation du droit de tout Canadien d'entrer au
Canada que garantit l'article 6 de la Charte cana-
dienne des droits et libertés [qui constitue la
Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982,
annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap.
11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, n° 44]].
Quant aux coûts d'une application stricte, certains
des éléments de preuve présentés par l'intimé don-
nent à penser que le coût de ces perceptions dépas-
serait les recettes qu'on pourrait en retirer. En
outre, l'intimée prétend qu'en ce qui concerne les
parcs de stationnement, les bureaux et le person
nel, les ressources ministérielles sont présentement
utilisées au maximum aux points frontaliers très
fréquentés. Même si une application stricte devait
rapporter davantage de recettes, celles-ci ne profi-
teraient au Ministère que si le Parlement votait
des crédits supplémentaires à l'intention de l'admi-
nistration douanière. Le ministère du Revenu
national ne peut dépenser que les crédits que lui
attribue le Parlement, peu importe la provenance
de ces sommes. La preuve est également contradic-
toire en ce qui concerne la question de savoir si,
par le passé, l'application stricte a eu pour effet
d'augmenter ou de diminuer les files d'attente.
Questions en litige
L'intimé invoque plusieurs moyens pour contes-
ter la requête en mandamus. Je n'aborderai que
deux de ces moyens. Il prétend que la requérante
n'a pas qualité pour solliciter un mandamus et que
l'intimé n'est pas tenu envers la requérante de
s'acquitter d'une obligation dont on peut exiger
l'exécution en recourant au tribunal.
Conclusions
J'estime que les prétentions de l'intimé sont bien
fondées et qu'elles suffisent à faire échouer la
cause de la requérante.
Une des décisions de principe de notre Cour est
l'arrêt Rothmans of Pall Mall Canada Ltd. c. Le
ministre du Revenu national (N° 1) 2 . Dans cette
affaire, les requérantes sollicitaient des brefs de
prohibition, de mandamus et de certiorari et une
injonction pour annuler une politique par laquelle
le ministère du Revenu national ne tenait pas
compte de la longueur du filtre pour calculer la
taxe d'accise ou les droits de douane sur les ciga
rettes en fonction de la longueur de celles-ci.
Même si elles ne fabriquaient pas elles-mêmes des
cigarettes comportant de tels filtres, les requéran-
tes s'opposaient à ce que leur concurrents bénéfi-
cient de cette décision favorable relativement au
calcul de la taxe ou des droits perçus sur leurs
produits. Au nom de la Cour d'appel fédérale, le
juge Le Dain a statué:
Les décisions de la Cour suprême du Canada, Thorson c. Le
procureur général du Canada [1975] 1 R.C.S. 138, et McNeil
c. Nova Scotia Board of Censors, (1975) 5 N.R. 43; nous ont
été citées comme indiquant un relâchement de l'exigence de la
qualité pour agir. Une lecture attentive de ces décisions montre,
à mon avis, que la considération essentielle sous-jacente à ces
décisions est l'importance, dans un État fédéral, de la possibilité
de contester la validité constitutionnelle des lois. Cette considé-
ration n'est pas applicable ici. On prétend qu'une considération
comparable d'intérêt public sous-tend la possibilité de contester
la validité de l'action administrative, et ce point de vue trouve
un certain appui dans la reconnaissance du pouvoir discrétion-
naire judiciaire d'autoriser un tiers à demander un bref de
certiorari ou de prohibition dans certaines affaires. La présente
affaire ne soulève pas la question des limites d'un pouvoir légal.
Il s'agit tout au plus d'une question d'interprétation administra
tive nécessaire à l'application de la loi en vigueur. En fait l'acte
incriminé dans la présente affaire ne prête pas à contestation
par voie de certiorari ou de bref de prohibition. Il ne s'agit pas
d'une décision visant les droits ou obligations individuels,
encore moins ceux des appelantes. Voir Landreville c. La
Reine, [1973] C.F. 1223. I1 n'y a aucune obligation d'agir de
façon judiciaire ou impartiale au sens procédural de ces termes.
Pour ce qui est du mandamus, il n'existe pas d'obligation
publique dont les appelantes auraient le droit de demander
l'exécution. L'obligation qui pèse sur les fonctionnaires intimés
en vertu de l'article 202 de la Loi sur l'accise est due à la
Couronne plutôt qu'aux appelantes. Voir La Reine c. Lord
Commissioners of the Treasury (1871-72) 7 L.R.Q.B. 387. En
ce qui concerne l'injonction, mis à part la question de savoir si
elle peut être demandée dans certains cas contre les fonction-
naires de la Couronne, il n'y a pas d'atteinte aux droits des
2 [1976] 2 C.F. 500 (C.A.).
appelantes les autorisant à adresser une injonction aux pouvoirs
publics. Cowan c. C.B.C. [1966] 2 O.R. 309 3 . [Mots soulignés
par mes soins.]
Même si depuis cet arrêt, la Cour suprême du
Canada a rendu d'autres décisions dans lesquelles
elle a étendu la qualité pour agir dans les actions
en jugement déclaratoire sans contestation de
constitutionnalité dans lesquelles le litige portait
sur un présumé conflit entre la loi en question et la
Déclaration canadienne des droits 4 [S.R.C. 1970,
Appendice III] ou sur l'inobservation présumée
d'une loi fédérale par un ministres, il n'y a pas eu
d'extension comparable de la qualité pour agir en
ce qui concerne le mandamus.
Dans les affaires portant sur le mandamus, la
question de la qualité pour agir du requérant et
celle de l'existence d'une obligation dont on peut
exiger l'exécution en recourant au tribunal ont
tendance à s'entremêler. Mais même si l'on devait
retenir une conception plus généreuse de la qualité
pour agir eu égard à la portée plus grande qui a été
donnée à ce concept dans le cas des autres recours
de droit public, il y a toujours la nécessité fonda-
mentale de mettre le doigt sur une obligation dont
on peut obtenir l'exécution forcée en recourant au
tribunal. Parfois, la distinction entre les obliga
tions dont on peut exiger l'exécution en recourant
au tribunal et celles dont on ne peut obtenir l'exé-
cution forcée par les voies de justice est formulée
en fonction de la personne au profit de qui l'on est
tenu d'exécuter l'obligation. Si un fonctionnaire a
une «obligation envers le législateur», un citoyen
peut s'adresser aux tribunaux pour obtenir l'exécu-
tion de l'obligation, tandis que si un fonctionnaire
a une «obligation envers la Couronne», un citoyen
ne peut obtenir l'exécution forcée de l'obligation.
C'est peut-être une autre façon de dire que si un
fonctionnaire est tenu de par la loi d'accomplir un
acte déterminé dans des circonstances déterminées
au profit de personnes déterminées, ces dernières
peuvent s'adresser aux tribunaux pour obtenir
l'exécution forcée de l'obligation. Si, par contre, le
fonctionnaire s'est vu attribuer un pouvoir discré-
tionnaire en ce qui concerne les actes qu'il accom-
plit, la manière de les exécuter, ou le destinataire
Ibidem, aux p. 510 et 511.
4 Ministre de la Justice du Canada et autre c. Borowski,
[1981] 2 R.C.S. 575.
5 Finlay c. Canada (Ministre des Finances), [1986] 2 R.C.S.
607.
ou le bénéficiaire des actes en question, il n'existe
pas alors d'obligation, dont on peut obtenir l'exé-
cution forcée en justice, qui le force à accomplir un
acte déterminé à un moment déterminé ou au
profit d'une personne déterminée: si le fonction-
naire est responsable envers quelqu'un, c'est envers
les organes politiques de l'Etat, soit directement
soit indirectement, et les recours qui peuvent être
exercés pour sanctionner son inaction ou son action
fautives sont d'ordre politique, et non judiciaire.
Ainsi, dans l'extrait précité de l'arrêt Rothmans,
lorsqu'on dit que l'obligation qui pesait sur les
intimés est «due à la Couronne plutôt qu'aux appe-
lantes», on reconnaît que le ministre du Revenu
national et ses fonctionnaires ont, à l'égard de
l'interprétation qu'ils donnent au mot «cigarettes»,
un pouvoir souverain d'appréciation dans l'exercice
duquel le tribunal ne peut intervenir au profit du
fabricant qui subit un préjudice sur le plan de la
concurrence en raison de cette interprétation, à
moins qu'on réussisse à établir que cette interpré-
tation est incompatible avec la loi.
Même si, dans la présente action, l'article 4 du
Tarif des douanes prévoit qu'«il doit être prélevé,
perçu et payé sur toutes les marchandises énumé-
rées ... les divers taux de droits de douane ...»
[soulignement ajouté], j'estime que l'intimé a un
pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne les
moyens à prendre pour faire respecter la loi. On
considérera que les obligations imposées par cet
article ne pèsent pas seulement sur les percepteurs
des douanes mais aussi sur les personnes qui ramè-
nent au Canada des articles soumis à des droits de
douane sur lesquels, aux termes de la loi, «il doit
être ... payé» les droits requis. Il n'y a pas de
doute que, pour répondre à l'obligation que lui
impose l'article 4, le ministre doit de bonne foi
établir une système crédible de recouvrement, mais
si son système n'est pas «étanche» ou même s'il
ferme les yeux sur certaines omissions de payer les
droits de douane, cela ne donne pas à la Cour le
droit de contrôler la façon dont les droits doivent
être perçus.
Il est vrai que le recours en mandamus peut être
exercé dans certaines circonstances pour exiger
l'observation de la loi. Il me semble toutefois qu'en
règle générale, on a établi en jurisprudence une
distinction entre, d'une part, le fait pour le tribunal
de contraindre un fonctionnaire à appliquer la loi
lorsque le fonctionnaire en question s'est complète-
ment abstenu d'agir, et, d'autre part, le fait pour le
tribunal de dicter à un fonctionnaire les moyens à
prendre pour appliquer la loi. Le tribunal ne peut
intervenir que dans le premier cas. J'estime que
l'on peut, à partir de ce principe, établir des dis
tinctions entre les affaires de mandamus les plus
pertinentes citées par la requérante. Dans l'affaire
Re North Vancouver (district de) et autres c.
Conseil des ports nationaux et autres 6 , les requé-
rants étaient cent quarante-deux résidents de Deep
Cove (qui fait partie du port de Vancouver) et de
la municipalité adjacente, la corporation du dis
trict de North Vancouver. Ils avaient demandé au
Conseil des ports nationaux de faire respecter la
Loi sur le Conseil des ports nationaux [S.R.C.
1970, chap. N-8] et ses règlements d'application à
l'égard des bateaux et houseboats mouillés illicite-
ment dans les eaux de Deep Cove. En réponse aux
demandes que les requérants lui avaient faites de
faire respecter la loi, le Conseil a déclaré qu'il
attendait, avant de prendre des mesures, de con-
naître les recommandations d'une commission du
Greater Vancouver Regional District qui, on le
remarquera, n'avait pas de compétence ou de res-
ponsabilité directe en ce qui concerne le port. En
accordant le mandamus, le juge Collier, de notre
Cour, a déclaré:
À mon avis le Conseil a l'obligation, d'ordre public, d'admi-
nistrer, de gérer et de régir le port de Vancouver conformément
à l'article 7 de la Loi et au règlement A-1. Il n'a pas le pouvoir
discrétionnaire de faire ou de ne pas faire son devoir. Il doit le
faire, autrement la loi, et toute son économie, n'ont pas de sens.
Le Conseil possède, en grande partie, dans les limites circons-
crites par la loi et les règlements, le pouvoir discrétionnaire des
moyens à prendre pour s'exécuter. Un tribunal peut forcer un
organisme, comme le Conseil, à exécuter ses obligations. Il ne
saurait lui dicter les moyens à prendre lorsque la loi lui en
abandonne le choix 7 .
On a donc fait une nette distinction entre le fait
d'obliger le Conseil à prendre certaines mesures en
vue de faire respecter la loi, ce que le tribunal peut
faire, et le fait de lui dicter les moyens d'appliquer
la loi, ce que le tribunal ne peut faire.
Une situation assez semblable existait dans l'ar-
rêt Friends of the Oldman River Society c.
Canada (Ministre des Transports) 8 , dans lequel la
6 (1978), 89 D.L.R. (3d) 704 (C.F. i'inst.).
7 Ibid., à la p. 712.
8 [1990] 2 C.F. 18 (C.A.).
Cour d'appel fédérale a infirmé la décision du juge
de première instance [ [ 1990] 1 C. F. 248 (1 re inst.) ]
et a accordé un bref de certiorari à la requérante
[appelante] pour annuler une décision par laquelle
le ministre des Transports avait autorisé la pro
vince de l'Alberta, en vertu de la Loi sur la
protection des eaux navigables 9 , à construire un
barrage sur la rivière Oldman. Elle a également
accordé un mandamus obligeant le ministre des
Transports à se conformer au Décret sur les lignes
directrices visant le processus d'évaluation et
d'examen en matière d'environnement 10 pour déci-
der s'il y avait lieu d'accorder cette autorisation. Il
convient de noter que le juge de première instance
avait expressément présumé, sans trancher cette
question, que la requérante, un groupe écologique,
avait la qualité pour solliciter un mandamus. La
Cour d'appel n'a pas expressément abordé la ques
tion de la qualité pour agir ni celle de la possibilité
d'obtenir un mandamus dans ces circonstances. Il
est clair, cependant, que la Cour a délivré un
mandamus, non pas pour dicter aux ministres la
manière de procéder à un examen environnemen-
tal, mais pour leur dire qu'ils devaient procéder à
cet examen comme l'exigeait le Décret, ce qu'ils
avaient omis de faire jusqu'alors.
L'avocat de la présente requérante s'est fondé en
partie sur l'arrêt R. v. Metropolitan Police Comr.,
Ex parte Blackburn". Dans cette affaire, le requé-
rant, M. Blackburn, un citoyen intéressé, sollicitait
un mandamus pour contraindre le commissaire de
la police métropolitaine à appliquer les lois contre
le jeu. À cause d'une profonde incertitude quant à
l'interprétation qu'il convenait de donner à ces lois,
le commissaire avait envoyé une directive d'orien-
tation confidentielle aux cadres supérieurs de la
police métropolitaine dans laquelle il leur deman-
dait de ne pas effectuer de surveillance dans les
maisons de jeu sans autorisation spéciale et dans
laquelle il précisait que cette surveillance n'était
justifiée que si des plaintes de tricherie avaient été
portées ou s'il existait des motifs de penser qu'une
maison particulière était fréquentée par des crimi-
nels. Par conséquent, on a laissé de grosses mai-
sons de jeu se livrer à leurs activités sans interven
tion policière. Même si cette directive a été retirée
L.R.C. (1985), chap. N-22.
10 DORS/84-467.
" [1968] 1 A11 E.R. 763 (C.A.).
avant que la Cour d'appel ne rende sa décision, la
Cour a déclaré qu'elle serait intervenu en prenant
les mesures qui s'imposaient si la directive n'avait
pas été retirée. Lord Denning, maître des rôles, a
notamment déclaré que si un commissaire de
police devait formuler une directive prévoyant l'ab-
sence de poursuites dans le cas de vols de biens
d'une valeur de moins de 100 livres, le tribunal
pourrait annuler cette directive parce que le com-
missaire de police manquerait ainsi à son obliga
tion d'appliquer la loi. Il y a lieu de noter que les
déclarations formulées par la Cour d'appel dans
cette affaire n'étaient que des remarques inciden-
tes parce que la directive portant sur la surveil
lance des maisons de jeu avait déjà été retirée. De
surcroît, tous les juges avaient dit qu'ils doutaient
que le requérant avait qualité pour obtenir un
mandamus et ils se sont manifestement abstenus
de trancher cette question en sa faveur. De plus,
dans une décision ultérieure de la Cour d'appel
dans laquelle lord Denning, maître des rôles, agis-
sait également comme président, l'affaire Regina
v. Comr. of Police of the Metropolis, Ex parte
Blackburn (No. 3) 12 , la Cour d'appel a refusé de
délivrer un bref de mandamus contre le commis-
saire de la police métropolitaine pour le contrain-
dre à appliquer la loi contre la publication et la
vente de publications pornographiques. Dans cette
affaire, il y avait également une directive d'orien-
tation prévoyant qu'aucune accusation ne serait
portée à l'égard de la publication et de la vente de
telles publications, sauf sur ordre formel du minis-
tère public. Certaines mesures de répression ont
toutefois été prises par la police, en particulier la
saisie de publications jugées choquantes. Les
publications saisies ont été soumises au ministère
public pour examen, puis ont été soit rendues à
leur propriétaire si elles étaient jugées inoffensives,
soit conservées en vertu d'une renonciation accor-
dée par leur propriétaire. Faute de renonciation,
une ordonnance de confiscation pouvait être
demandée aux tribunaux. Pour refuser d'ordonner
par mandamus que l'on adopte plutôt une politi-
que générale de poursuite, lord Denning a déclaré:
[TRADUCTION] Dans l'arrêt Reg. v. Commissioner of Police
of the Metropolis, Ex parte Blackburn, [1968] 2 Q.B. 118, aux
pages 136, 138, 148 et 149, nous avons bien précisé que, pour
s'acquitter de leur obligation d'appliquer la loi, les policiers ont
un pouvoir discrétionnaire dans l'exercice duquel les tribunaux
refusent d'intervenir. Il peut se présenter, cependant, des cas
12 [1973] Q.B. 241 (C.A.).
extrêmes où le policier n'a pas accompli son devoir. En pareil
cas, nous pourrions intervenir. Je ne crois pas que la présente
affaire justifie notre intervention. Par le passé, le commissaire a
pris tous les moyens que le régime existant et que la main
d'oeuvre disponible lui permettaient de prendre. Le nouveau
commissaire fait plus. Il augmente les effectifs de l'escouade
des publications obscènes à 18 personnes et il en réforme la
composition et l'administration. On ne pourrait raisonnable-
ment lui en demander davantage''. [Mots soulignés par mes
soins.]
Conformément à ces décisions, j'estime qu'en
l'espèce le ministre du Revenu national n'a pas
totalement refusé ou négligé d'appliquer le Tarif
des douanes. Il a plutôt comme politique et comme
habitude d'appliquer cette Loi en procédant à des
recouvrements dans la mesure où cela est faisable,
compte tenu des ressources que le Parlement met à
sa disposition par le financement de son personnel
et de ses installations. Il a aussi manifestement
tenu compte des répercussions que les différents
degrés d'application de la loi auraient sur les mou-
vements de touristes américains venant au Canada
et sur les files d'attente aux points d'entrée au
Canada. Il est de droit constant que si ces considé-
rations n'ont rien à voir avec l'application régulière
de la Loi ou si elles dénotent de la mauvaise foi ou
des motifs illégitimes de la part du ministre et de
son Ministère, elles peuvent donner ouverture à un
quelconque contrôle judiciaire. Mais je ne décèle
rien de tel dans les explications fournies par le
ministre au sujet de la politique consistant à ne pas
réclamer systématiquement le paiement de tous les
droits des personnes qui séjournent aux États-Unis
pour une période de moins de vingt-quatre heures.
La chose a été bien formulée par lord Denning,
maître des rôles, dans un style qui rappelle quelque
peu celui de Churchill dans le deuxième arrêt
Blackburn:
[TRADUCTION] Si les gens de notre pays veulent déraciner la
pornographie, le législateur doit modifier la Obscene Publica
tions Act 1959 pour qu'elle porte manifestement sur la porno-
graphie; et il doit définir les pouvoirs et les fonctions des
policiers pour leur permettre de prendre des mesures efficaces à
cette fin. Les policiers peuvent bien dire au législateur: «Don-
nez-nous les outils et nous ferons le travail». Mais, sans outils
efficaces, on ne peut s'attendre à ce qu'ils déracinent la porno-
graphie. M. Blackburn a bien fait d'appeler notre attention sur
cette question; mais je ne crois pas qu'il y ait lieu d'accorder un
mandamus en l'espèce. Je suis par conséquent d'avis de rejeter
l'appel 14•
l ' Ibid., à la p. 254.
14 Ibid., à la p. 254.
Je conclus donc que le ministre applique active-
ment le Tarif des douanes et que les moyens à
prendre pour ce faire relèvent de son pouvoir dis-
crétionnaire. Rien ne permet de conclure qu'il
n'exerce pas ce pouvoir discrétionnaire de bonne
foi et pour des motifs légitimes. La Cour ne saurait
dicter par voie de mandamus au ministre les
moyens à prendre pour faire respecter la Loi. Dans
l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le minis-
tre est responsable devant les organes politiques de
l'État et n'a pas de compte à rendre à la requé-
rante ou à la Cour.
La requête est par conséquent rejetée.
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