IMM -1-91
Joseph Smith et Sarah Smith (requérants)
c.
Sa Majesté la Reine (intimée)
RÉPERTORIÉ: SMITH C. CANADA aa 1e INST.)
Section de première instance, juge Cullen—
Toronto, 5 et 12 février; Ottawa, 11 mars 1991.
Immigration — Statut de réfugié — Les requérants sont des
citoyens iraqiens — Ils sont entrés au Canada grâce à de faux
documents avec une liste de prix d'armes et des documents
publiés par une organisation islamique chiite militante qui
s'oppose au régime iraqien — Ils ont été placés sous garde au
motif qu'ils constituaient un danger possible pour la sécurité
— Une attestation a été délivrée en vertu de l'art. 40.1
déclarant que les requérants ne remplissaient pas les condi
tions requises pour être admis parce qu'on les soupçonnait
d'appartenir à des catégories non admissibles — La Cour
annule l'attestation au motif qu'elle n'est pas raisonnable —
Lorsque la liberté d'une personne est en jeu, le degré de
probabilité exigé est élevé — Une explication crédible a été
fournie au sujet de la liste d'armes — Les requérants recon-
naissent leur rattachement à l'organisation — Sans d'autres
éléments de preuve sur la propension ou la participation des
requérants au terrorisme, le maintien de leur détention n'est
pas raisonnable.
Immigration — Pratique — Le ministre a délivré, en vertu
de l'art. 40.1 de la Loi, une attestation déclarant que les
requérants ne remplissaient pas les conditions requises pour
être admis au Canada parce qu'ils étaient soupçonnés d'appar-
tenir à des catégories non admissibles — La Cour a prononcé
une ordonnance prorogeant le délai imparti pour signifier aux
requérants l'avis de procédure, autorisant l'intimé à faire
entendre un agent du SCRS et permettant que l'audience se
déroule à huis clos et que les renseignements secrets en matière
de sécurité soient mis sous scellés — Le respect des disposi
tions de l'art. 40.1(3)b) relatives à l'avis ne constitue pas une
condition préalable à l'exercice du pouvoir d'examen que l'art.
40.1(4) confère à la Cour, bien que l'on ne ferme les yeux sur
les dérogations à la norme prévue par la loi que lorsque le
délai de trois jours a été respecté dans l'ensemble et qu'il n'y a
pas atteinte aux droits de l'intéressé — La Cour a le pouvoir
d'accorder ex parte une prorogation de délai — Étant donné
qu'il se voit conférer par l'art. 40.1(4)a) le pouvoir discrétion-
naire de recueillir des éléments de preuve ex parte lorsque leur
communication porterait atteinte à la sécurité nationale, le
juge peut implicitement prononcer des ordonnances accessoires
à l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire — L'art. 40.1(4)a)
permet expressément à la Cour d'entendre des témoignages à
huis clos pour des raisons de sécurité nationale et, implicite-
ment, de décider à huis clos d'entendre ces témoignages —
L'art. 40.1(4)b) n'oblige pas le juge à préparer le résumé
lui-même — L'attestation a été transmise à la Cour aussitôt
que possible dans les circonstances, ce qui satisfait à l'art.
40.1(3)a), qui exige qu'elle soit transmise «sans délai» —
L'art. 40.1(4) accorde au juge chargé d'examiner l'attestation
le pouvoir discrétionnaire de refuser la communication d'une
partie des éléments d'information au motif que leur divulga-
tion porterait atteinte à la sécurité nationale ou à celle de
personnes — Application des lignes directrices formulées dans
le jugement Henrie c. Canada (Comité de surveillance des
activités de renseignements de sécurité) — La communication
des documents se trouvant sous pli scellé porterait atteinte à la
sécurité nationale.
Il s'agit d'une instance introduite en vertu de l'article 40.1 de
la Loi sur l'immigration en vue de faire examiner une attesta
tion délivrée en vertu de la Loi en question pour que la Cour
décide si l'attestation était raisonnable. Les requérants, qui sont
des citoyens iraqiens, sont entrés au Canada le 9 janvier 1991
avec de faux documents et ont revendiqué le statut de réfugié
au sens de la Convention. Ils avaient en leur possession une liste
d'armes et de munitions et des documents publiés par le parti
Ad-Da'wa, une organisation islamique chiite militante qui s'op-
pose au gouvernement iraqien actuel et qui s'est livrée à des
activités terroristes contre l'Iraq avec l'appui du gouvernement
iranien. Le SCRS croyait que l'Ad-Da'wa était impliquée dans
des attentats à la bombe perpétrés contre les ambassades
françaises et américaines au Koweït. M. Smith (les requérants
sont désignés sous les pseudonymes de Joseph et de Sarah
Smith à la suite d'une ordonnance de la Cour) a reconnu son
affiliation à l'Ad-Da'wa. Il a passé deux ans en prison en Iraq
en raison de son appartenance présumée à l'Ad-Da'wa. Après
sa libération, il s'est réfugié en Iran et a combattu contre l'Iraq
en 1984. Par le biais de l'Ad-Da'wa, il a donné en 1985 des
instructions religieuses élémentaires à des Kurdes. Il est
retourné en Iran, où il a rencontré et épousé sa femme. À la
suite de l'invasion du Koweït par l'Iraq, les exilés iraqiens se
trouvant en Iran devaient être rapatriés de force en Iraq. Smith
a décidé de s'enfuir au Canada car il craignait que sa vie soit en
danger s'il devait retourner en Iraq. Il a déclaré que la liste
d'armes avait été dressée en 1986 alors qu'il se trouvait à la
base de l'Ad-Da'wa en Iraq. Un marchand d'armes kurde lui
avait donné le prix des articles de son inventaire pour le cas où
l'Ad-Da'wa serait intéressée à en acheter.
Les Smith ont été placés sous garde au motif qu'ils consti-
tuaient un danger possible pour la sécurité. Le ministre de
l'Emploi et de l'Immigration et le solliciteur général ont signé
en vertu de l'article 40.1 de la Loi sur l'immigration une
attestation dans laquelle ils ont déclaré que les requérants ne
remplissaient pas les conditions requises pour être admis parce
qu'ils étaient soupçonnés d'appartenir à l'une des catégories non
admissibles. Cette attestation a eu pour effet de prolonger la
détention des requérants et de suspendre toute enquête sur leur
statut de réfugié jusqu'à ce que la Cour fédérale examine
l'attestation pour décider si elle est raisonnable.
Après examen des renseignements secrets en matière de
sécurité dont le ministre et le solliciteur général avaient eu
connaissance et après avoir entendu le témoignage d'un agent
du SCRS, le juge Cullen a prononcé une ordonnance proro-
geant le délai imparti pour signifier aux requérants l'avis de
procédure prévu à l'alinéa 40.1(3)6), accordant ainsi un délai
de quatre jours à compter de la date de la remise de l'attesta-
tion au lieu du délai de trois jours prévu. L'ordonnance autori-
sait également les intimés à faire entendre un agent du SCRS
et prévoyait que l'audience se déroulerait à huis clos en l'ab-
sence des requérants et que les renseignements secrets seraient
mis sous scellés et qu'ils seraient séparés des autres dossiers
publics de la Cour.
Les requérants formulent les objections suivantes: (1) la
Cour n'avait pas compétence pour prolonger le délai de signifi
cation, et le respect des exigences du paragraphe 40.1(3) en
matière d'avis est une condition préalable à l'exercice du pou-
voir d'examen de la Cour; (2) la Cour n'avait pas compétence
pour prononcer ex parte les ordonnances en question; (3)
l'article 40.1 autorise uniquement l'examen à huis clos des
renseignements de sécurité, de sorte que la décision de la Cour
d'entendre à huis clos le témoignage supplémentaire de l'agent
du SCRS n'aurait pas dû être prononcée à huis clos; (4) le
résumé des renseignements fourni aux requérants ne respectait
pas les exigences de l'alinéa 40.1(4)b), étant donné que le juge
ne l'avait pas rédigé personnellement; (5) l'attestation n'avait
pas été transmise «sans délai» à la Cour fédérale comme l'exige
l'alinéa 40.1(3)a); (6) la Cour devrait ordonner que les requé-
rants obtiennent une communication plus complète.
Jugement: l'attestation devrait être annulée.
Sur les objections préliminaires: (1) le respect des disposi
tions de l'alinéa 40.1(3)6) relatives à l'avis ne constitue pas une
condition préalable à l'exercice du pouvoir d'examen que le
paragraphe 40.1(4) confère à la Cour. Le fait que le législateur
fédéral n'entendait pas exiger un strict respect des dispositions
relatives à l'avis comme condition préalable à la compétence de
la Cour est appuyé par le fait que la Loi prévoit que, dans
certains cas, il est possible de procéder à l'examen avant que la
personne désignée dans l'attestation soit informée de la remise
de l'attestation. Les mots «est tenu de» au paragraphe 40.1(3)
sont indicatifs, et non impératifs. Même si les dispositions
législatives devraient être observées dans toute la mesure du
possible, il n'est peut-être pas toujours pratique, lorsque la
sécurité nationale est menacée, d'exiger un strict respect lors-
que la personne désignée ne subit pas de préjudice grave. De
plus, aucune conséquence précise n'est prévue en cas de défaut
de donner avis. Comme la personne désignée dans l'attestation
n'intervient qu'après que l'examen à huis clos a eu lieu, le
défaut d'aviser les requérants dans le délai prescrit de trois
jours ne leur a pas causé de préjudice grave. Comme le but de
cette disposition en matière d'avis est de s'assurer que la
personne soit informée de la raison de sa mise sous garde et du
fait qu'elle peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion, on ne
devrait fermer les yeux sur une dérogation à la norme prévue
par la Loi que lorsque les dispositions relatives au délai de trois
jours ont été respectées dans l'ensemble et qu'il n'y pas atteinte
aux droits de la personne désignée. On a retardé d'une journée
l'envoi de l'avis, et ce retard n'était pas important ou indûment
préjudiciable.
(2) L'alinéa 40.1(4)a) accorde à la Cour le pouvoir discré-
tionnaire d'entendre des témoignages en l'absence de la per-
sonne désignée dans l'attestation lorsque leur communication
porterait atteinte à la sécurité nationale ou à celle de personnes.
Ce droit s'étend implicitement au prononcé des ordonnances
nécessairement accessoires à l'exercice de ce pouvoir discrétion-
naire et il n'est donc pas nécessaire que le juge entende des
observations sur ces ordonnances.
(3) L'alinéa 40.1(4)a) accorde expressément au juge le pou-
voir discrétionnaire de «recueillir [...] les autres éléments de
preuve ou d'information» à huis clos pour des raisons de
sécurité nationale. La décision d'entendre à huis clos des témoi-
gnages peut donc aussi être prononcée à huis clos.
(4) L'alinéa 40.1(4)b) n'exige pas explicitement que le juge
rédige lui-même le résumé. Le rôle du juge consiste à s'assurer
que l'intéressé soit suffisamment informé.
(5) Il a été jugé que, par «sans délai», il faut entendre «dès
que possible eu égard aux circonstances». L'attestation a été
transmise à la Cour dès qu'il était raisonnablement possible de
le faire dans les circonstances. Lorsque la liberté d'une per-
sonne est en jeu, la question devrait être soumise au tribunal
avec diligence raisonnable. Il était nécessaire pour l'intimée de
recueillir les éléments de preuve et d'information nécessaires
qui devaient être présentés à la Cour. De telles recherches
demandent nécessairement un certain temps à partir de la
délivrance de l'attestation. Comme une partie du temps s'est
écoulé pendant une fin de semaine, le temps qui s'est écoulé
était raisonnable dans les circonstances.
(6) Le paragraphe 40.1(4) accorde au juge chargé d'exami-
ner l'attestation le pouvoir discrétionnaire de refuser la commu
nication d'une partie des éléments d'information ou de preuve
au motif que leur divulgation porterait atteinte à la sécurité
nationale ou à celle de personnes. La communication des
documents se trouvant dans les dossiers scellés porterait
atteinte à la sécurité nationale. Si l'on applique les principes
directeurs énoncés dans le jugement Henrie c. Canada (Comité
de surveillance des activités de renseignements de sécurité), il
serait contre-indiqué de faire des commentaires sur les raisons
pour lesquelles les documents ont été scellés, car on pourrait
ainsi découvrir les éléments de preuve. Il en irait de même pour
la demande de contre-interrogatoire des personnes.
L'attestation n'était pas raisonnable. Lorsque la liberté indi-
viduelle est en jeu, la norme de preuve appliquée pour juger du
caractère raisonnable est celle de la grande probabilité. La
preuve était insuffisante pour permettre au ministre de conclure
que les requérants appartenaient aux catégories non admissi-
bles. Même s'il existait des éléments de preuve concernant les
activités suspectes de l'Ad-Da'wa, aucune preuve n'a été pré-
sentée au sujet des activités subversives auxquelles les requé-
rants pourraient se livrer personnellement. On ne peut pas non
plus raisonnablement penser que les requérants commettront
des actes de violence de nature à porter atteinte à la vie
humaine au Canada ou qu'ils appartiennent à une organisation
susceptible de commettre de tels actes. Sans d'autres éléments
de preuve sur la propension ou la participation personnelle des
requérants au terrorisme ou à d'autres actes violents, le main-
tien de leur détention n'est pas raisonnable.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la
Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B,
Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.)
[L.R.C. (1985), appendice II, n° 44], art. 7.
Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), chap. I-2, art. 2,
12, 19(1)f),g), 40, 40.1 (édicté par L.R.C. (1985), (4'
suppl.), chap. 29, art. 4), 103(3)b) (mod. par L.R.C.
(1985) (4' suppl.), chap. 28, art. 27), 103.1 (édicté,
idem, art. 12).
Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663.
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
R. c. Parrot (1979), 27 O.R. (2d) 333; 106 D.L.R. (3d)
296; 51 C.C.C. (2d) 539 (C.A.); Henrie c. Canada
(Comité de surveillance des activités de renseignements
de sécurité), [1989] 2 C.F. 229; (1988), 53 D.L.R. (4th)
568 (1" inst.); Reg. v. Secretary of State for the Home
Department, Ex parte Khawaja, [1984] A.C. 74 (H.L.).
DISTINCTION FAITE AVEC:
Neal c. P.G. (Sask.) et autre, [1977] 2 R.C.S. 624;
(1977), 56 C.C.C. (2d) 128; 17 N.R. 67; R. c. Garofoli,
[1990] 2 R.C.S. 1421; (1990), 80 C.R. (3d) 317.
DÉCISION EXAMINÉE:
Secretary of State for Education and Science v. Tame-
side Metropolitan Borough Council, [1977] A.C. 1014
(H.L.).
DOCTRINE
Jones, David Phillip and De Villars, Anne S. Principles
of Administrative Law, Toronto: Carswell Co. Ltd.,
1985.
AVOCATS:
Clayton Ruby et Gregory James pour les
requérants.
Winston K. H. Fogarty, Josée Desjardins et
Mylène Bouzigon pour l'intimée.
PROCUREURS:
Ruby & Edwardh, Toronto, pour les requé-
rants.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
de l'ordonnance rendus par
LE JUGE CULLEN: Dans la présente affaire, les
requérants ont présenté une demande en vue d'être
admis au Canada à titre de réfugiés. Ils ont été
placés sous garde au motif qu'ils constituaient un
danger possible pour la sécurité publique et ont
ensuite été amenés devant un arbitre qui a exa-
miné les circonstances ayant donné lieu à leur
détention. L'arbitre a statué que la prolongation de
leur garde n'était pas justifiée et a ordonné leur
mise en liberté à certaines conditions. Le ministre
de l'Emploi et de l'Immigration et le solliciteur
général ont ensuite délivré une attestation en vertu
de l'article 41 de la Loi sur l'immigration de 1976
(S.C. 1976-77, chap. 52, édicté par L.C. 1988,
chap. 36, art. 4, maintenant l'art. 40.1 de la Loi
sur l'immigration, L.R.C. (1985), chap. I-2, édicté
par L.R.C. (1985) (4e suppl.), chap. 29, art. 4)
(ci-après appelée «la Loi»). Dans l'attestation, les
ministres déclarent qu'à leur avis les requérants ne
remplissent pas les conditions requises pour être
admis au Canada parce qu'ils appartiennent aux
catégories de personnes visées aux alinéas 19(1)f)
et 19(1)g) de la Loi, dont voici le libellé:
19. (1) Les personnes suivantes appartiennent à une catégo-
rie non admissible:
J ) celles dont on peut penser, pour des motifs raisonnables,
que, pendant leur séjour au Canada, elles travailleront ou
inciteront au renversement d'un gouvernement par la force;
g) celles dont on peut penser, pour des motifs raisonnables,
qu'elles commettront des actes de violence de nature à porter
atteinte à la vie ou à la sécurité humaines au Canada, ou
qu'elles appartiennent à une organisation susceptible de com-
mettre de tels actes ou qu'elles sont susceptibles de prendre
part aux activités illégales d'une telle organisation;
Cette attestation a pour effet de prolonger la
détention des requérants malgré l'ordonnance de
l'arbitre et de suspendre toute enquête sur leur
statut de réfugié tant que la Cour fédérale n'a pas
examiné l'attestation. L'attestation ministérielle a
été renvoyée à la Cour fédérale du Canada confor-
mément à l'alinéa 40.1(3)a) de la Loi pour que je
l'examine en ma qualité de juge délégué par le
juge en chef et que je décide si l'attestation est
raisonnable compte tenu des éléments de preuve et
d'information à ma disposition.
FAITS À L'ORIGINE DU LITIGE
Je me propose d'examiner à fond les faits de la
présente affaire avant de passer aux questions
d'ordre juridique. Les requérants, qui sont mari et
femme, sont des citoyens iraqiens. Ils sont entrés
au Canada le 9 janvier 1991 l'aéroport interna
tional Pearson de Toronto en provenance de
Tokyo. À leur arrivée, ils ont cherché à entrer au
Canada à titre de réfugiés au sens de la Conven
tion et ont été interrogés par un agent d'immigra-
tion en vertu de l'article 12 de la Loi. Les requé-
rants ont déclaré qu'ils avaient quitté l'Iran le Zef
janvier 1991 destination de Kuala Lumpur, en
Malaisie, où ils ont séjourné illégalement pendant
sept jours. Ils se sont ensuite envolés pour le
Canada après avoir fait une escale d'une journée à
Tokyo. Suivant les fonctionnaires de l'immigra-
tion, les requérants ont voyagé grâce à un passe-
port saoudien falsifié et endommagé.
Au cours de l'interrogatoire, on a découvert que
Mme Smith avait en sa possession un carnet
d'adresses dont l'une des pages contenait l'inscrip-
tion suivante en arabe (la traduction est celle
qu'ont fournie le ministre de l'Emploi et de l'Im-
migration et le Service canadien du renseignement
de sécurité (SCRS)):
[TRADUCTION]
missile 10 dinars
fusées-détonateurs
balles de mitraillettes 120 fels
balles de mitraillettes lourdes 150 fels
Thagar noir 17 dinars
balles traçantes 30 dinars
Le carnet d'adresses contenait également plu-
sieurs adresses et numéros de téléphone, ainsi
qu'un certain nombre de phrases écrites à la main
en arabe. Voici la traduction que le SCRS a
donnée de l'une de ces phrases:
[TRADUCTION] Nous sèmerons la plus profonde terreur dans le
cœur des infidèles qui croient en plusieurs dieux.
Mme Smith avait également une carte d'identité
sur laquelle était inscrit le nom d'emprunt qu'elle
avait utilisé en Iraq à titre de membre de l'Union
islamique des étudiants iraqiens, qui serait, selon le
SCRS, liée à l'organisation Ad-Da'wa.
En fouillant les bagages des requérants, on a
découvert notamment un faux passeport iraqien,
des lettres apparemment écrites par la police
secrète iraqienne dans lesquelles il était précisé
qu'on avait pris la décision d'arrêter M. Smith
pour trahison, et une carte d'identité indiquant que
M. Smith faisait partie de la garde révolutionnaire
islamique, une division de l'armée iranienne. On a
en outre découvert des brochures et des tracts
apparemment publiés par le parti Ad-Da'wa. Par
suite de la découverte de ces objets, les requérants
ont été interrogés par les agents du SCRS au sujet
des circonstances entourant leur arrivée au
Canada et au sujet de leurs rapports avec
1'Ad-Da'wa.
L'Ad-Da'wa
Il serait utile, à ce moment-ci, d'examiner les
renseignements qui ont été mis à la disposition de
la Cour au sujet de l'Ad-Da'wa. Suivant la preuve
que l'intimée a fournie et qui consiste surtout en
des articles de magazines et de journaux et en des
extraits d'ouvrages de référence déjà répandus
dans le public, l'Ad-Da'wa est une organisation
islamique chiite intégriste et militante qui s'oppose
au régime relativement sécularisé du parti Baas de
Saddam Hussein et qui est alignée sur le gouverne-
ment révolutionnaire islamique de l'Iran. Lorsque
la guerre éclata entre l'Iraq et l'Iran en 1980,
Bagdad a déporté en Iran des milliers de chiites du
sud de l'Iraq, où ils sont majoritaires. Certains de
ces exilés iraqiens se sont livrés à des activités
terroristes organisées par l'Ad-Da'wa contre l'Iraq,
avec l'appui du gouvernement iranien. L'Ad-
Da'wa opère présentement à partir de l'Iran, mais
continue à oeuvrer clandestinement en Iraq où elle
a perpétré des attentats à la bombe et des détour-
nements contre le gouvernement Hussein et d'au-
tres États du Moyen-Orient.
Le SCRS croit que l'Ad-Da'wa a été impliquée
dans des attentats terroristes commis contre des
intérêts occidentaux au Moyen-Orient, et notam-
ment dans les attentats à la bombe dont les ambas-
sades françaises et américaines au Koweït ont fait
l'objet en 1983. Le SCRS croit que ces attentats
ont été exécutés avec l'appui et l'encouragement de
l'Iran. Il affirme également que l'Ad-Da'wa a
participé à des activités terroristes avec le groupe
libanais Hezbollah, un groupe chiite intégriste qui
serait également associé à l'Iran.
Entrevue avec le SCRS
Le dossier de l'entrevue révèle que M. Smith a
répondu très franchement aux questions que les
agents du SCRS lui ont posées au sujet de son
association avec l'Ad-Da'wa. Il convient de noter
que l'intimée a reconnu que les agents du SCRS
n'ont pas, avant l'entrevue, informé les requérants
de leur droit de se faire représenter par un avocat
et qu'ils ne leur en ont pas accordé la possibilité.
Cependant, à cause de la conclusion à laquelle j'en
suis finalement arrivé dans la présente affaire, je
ne juge pas nécessaire d'examiner les possibles
violations de la Charte [Charte canadienne des
droits et libertés, qui constitue la Partie I de la Loi
constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982
sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.) [L.R.C.
(1985), appendice II, n° 44]] découlant de cet
aveu. En tout état de cause, il s'agit à mon avis
d'un cas dans lequel la totale franchise dont les
requérants ont fait preuve a joué en leur faveur
malgré l'absence d'avocat.
M. Smith a déclaré qu'il s'était pour la première
fois occupé du parti en Iraq en 1979 en distribuant
des tracts en son nom et en participant à des
manifestations. À la suite du déclenchement de la
guerre entre l'Iran et l'Iraq en 1980, le gouverne-
ment Hussein croyait que l'Iran appuyait des grou-
pes d'opposition chiites comme l'Ad-Da'wa dans le
but de déstabiliser le régime iraqien. La police
secrète iraqienne a été chargée de se mettre à la
recherche de ces intégristes chiites et de les mettre
en prison. Les membres de l'Ad-Da'wa qui étaient
découverts étaient exécutés. M. Smith a été arrêté
et emprisonné en 1981. On n'a cependant pas
réussi à le rattacher directement à l'Ad-Da'wa et il
a été relâché en 1983.
Après sa libération, M. Smith s'est enfui de
l'Iraq et s'est réfugié en Iran. En tant qu'Iraqien, il
lui fallait se trouver un parrain approuvé par l'État
pour pouvoir demeurer en Iran durant la guerre.
M. Smith a été parrainé par le parti Ad-Da'wa. À
ce moment-là, il a pris un nom d'emprunt pour
protéger sa famille en Iraq pour le cas où le
gouvernement iraqien découvrirait son affiliation à
l'Ad-Da'wa par l'intermédiaire d'indicateurs et
d'agents iraqiens. Pendant son séjour en Iran, il
s'est engagé comme volontaire dans la garde révo-
lutionnaire islamique et, après une brève période
d'instruction militaire, il a combattu contre l'Iraq
pendant trois mois en 1984. Il est ensuite retourné
à Téhéran, où il a travaillé pour un magazine
pendant une année.
Par la suite, M. Smith a de nouveau oeuvré
activement au sein de l'Ad-Da'wa et s'est proposé
pour se rendre au Kurdistan d'Iraq à une base de
l'Ad-Da'wa qui devait servir de centre des opéra-
tions de sabotage contre les installations iraqien-
nes. M. Smith a dit au SCRS qu'il n'avait pris part
à aucune mission de sabotage et que son rôle était
celui de conseiller spirituel des Kurdes de la
région. Le SCRS lui a demandé pourquoi on lui
avait confié cette responsabilité, étant donné qu'il
n'avait reçu aucune formation religieuse. Il a
déclaré qu'il donnait des instructions très élémen-
taires, étant donné que les paysans kurdes n'ont
qu'une connaissance très rudimentaire de leur reli-
gion. Il a passé un an à la base. Pendant cette
période un nombre limité de missions ont été
entreprises contre l'Iraq, et une seule a réussi. Il a
affirmé qu'il ne connaissait pas l'identité véritable
des saboteurs et qu'il s'agissait probablement d'une
mesure de précaution prise contre l'infiltration par
les agents iraqiens, et a ajouté qu'il possédait très
peu de renseignements au sujet de leur formation.
En 1986, M. Smith a été libéré de ses fonctions
à la base et a passé six mois dans la ville iranienne
de Qom. C'est là qu'il a rencontré et épousé Mme
Smith en 1987. Mme Smith avait quitté l'Iraq en
1980 et était allée s'installer en Iran après avoir
passé trois années en Syrie à titre de visiteuse
autorisée. Ils sont ensuite retournés à Téhéran, où
M. Smith a repris son ancien poste au magazine.
Avec la fin de la guerre entre l'Iran et l'Iraq en
1988, les relations entre les anciens ennemis ont
commencé à s'améliorer. Les relations se sont
améliorées encore plus à la suite de l'invasion du
Koweït par l'Iraq en 1990, et M. Smith a déclaré
qu'il avait été prévenu, avec d'autres membres de
la communauté iraqienne en exil, que l'une des
modalités de ce rapprochement était que les exilés
iraqiens se trouvant en Iran seraient rapatriés de
force en Iraq. Il craignait qu'en tant qu'opposant
au régime Hussein sa vie soit en danger s'il devait
retourner en Iraq. Il a également déclaré qu'il
craignait que l'on se serve de l'ambassade ira-
qienne qui venait d'ouvrir à Téhéran pour identi
fier et éliminer des dissidents exilés en Iran.
M. Smith déclare qu'il a alors décidé de se
réfugier au Canada à cause de sa réputation de
société libre et démocratique. Il a emprunté de
l'argent et a acheté les faux passeports iraqiens et
saoudiens et des billets d'avion pour le Canada.
Les passeports ont été délivrés sous le nom d'em-
prunt que les Smith avaient utilisé pendant leur
séjour en Iran. Un ami qui se trouvait à Téhéran
leur a fourni le nom de personnes à contacter à
Toronto qui pourraient être en mesure de les aider
à leur arrivée.
Les agents du SCRS ont demandé à M. Smith
de leur expliquer l'allusion aux armes dans le
carnet d'adresses. Il a déclaré qu'il avait dressé la
liste en 1986 alors qu'il se trouvait à la base de
l'Ad-Da'wa en Iraq. Il avait été approché par un
marchand d'armes kurde, qui savait que M. Smith
était membre de l'Ad-Da'wa. Le marchand a
demandé à M. Smith d'inscrire le prix de certains
articles de son inventaire pour le cas où l'Ad-
Da'wa serait intéressée à en acheter. M. Smith a
déclaré qu'il avait transmis ces renseignements à
ses collègues de la section militaire de la base, et
qu'il ignorait si des achats avaient eu lieu.
Le SCRS a également demandé à M. Smith
d'expliquer la déclaration faite en arabe dans le
carnet au sujet des «infidèles». Il a déclaré qu'il
s'agissait d'un verset du Coran dont les membres
de l'Ad-Da'wa se servaient entre eux comme mot
de passe. Ce mot de passe lui avait été donné avant
qu'il quitte la base située en Iraq pour se rendre à
Qom et il devait s'en servir pour entrer en commu
nication avec d'autres membres de l'Ad-Da'wa à
son arrivée à Qom. Il a déclaré qu'il avait écrit le
verset dans le carnet pour pouvoir s'en souvenir
lorsqu'il arriverait à Qom.
M. Smith a terminé son entrevue en déclarant
aux agents du SCRS qu'il était venu au Canada
pour des motifs pacifiques, et qu'il n'avait pas
l'intention de se joindre de nouveau à l'Ad-Da'wa
si on l'autorisait à demeurer au Canada.
DÉTENTION DES SMITH
Les Smith ont été placés sous garde pendant
sept jours en vertu de l'alinéa 103.1(1) a) [édicté
par L.R.C. (1985) (4e suppl.), chap. 29, art. 12] de
la Loi, au motif qu'ils étaient incapables d'établir
leur identité à la satisfaction de l'agent d'immigra-
tion et qu'ils étaient soupçonnés de faire partie de
l'une des catégories non admissibles. Il a été
ordonné que les Smith soient gardés dans des
centres de détention différents. Le 16 janvier 1991,
un agent principal a ordonné la prolongation de la
garde après examen de l'affaire par un arbitre.
Le 23 janvier 1991, le ministre de l'Emploi et de
l'Immigration a délivré, en vertu du paragraphe
103.1(2) [édicté, idem] de la Loi, une attestation
déclarant que l'identité des requérants n'avait pas
encore été établie et qu'il avait des raisons de
soupçonner que les requérants faisaient partie de
l'une des catégories de personnes non admissibles.
Le ministre a déclaré qu'il était nécessaire de
prolonger la garde pour enquêter sur ces questions,
et les requérants ont ensuite été amenés devant un
autre arbitre conformément au paragraphe
103.1(5) [édicté, idem] de la Loi pour que l'arbitre
détermine si le ministre faisait des efforts valables
pour faire enquête et si ces efforts justifiaient une
prolongation de leur garde.
Audience devant l'arbitre-23 et 24 janvier 1991
À l'audience, un agent principal a déclaré que
les requérants faisaient l'objet d'une enquête de la
part du Service canadien du renseignement de
sécurité (SCRS), qui les soupçonnait de constituer
un danger pour la sécurité publique, au motif
qu'ils étaient entrés au Canada à l'aide de docu
ments falsifiés, que M. Smith avait reconnu son
association avec l'Ad-Da'wa, et qu'il avait été en
possession de la liste d'armes inscrite dans le
carnet. L'agent a reconnu que l'Ad-Da'wa n'ap-
puyait pas le gouvernement iraqien actuel, mais il
a fait valoir que, compte tenu de l'état de guerre
qui existait entre l'Alliance des Nations Unies et
l'Iraq, il était concevable que les requérants puis-
sent agir au Canada pour le compte de l'Iraq si la
guerre devait mal tourner pour l'Iraq. L'agent a
assuré l'arbitre qu'une enquête était en cours au
sein du SCRS, et qu'il avait un rapport du SCRS
en sa possession. Il a toutefois refusé de produire à
l'audience ce rapport ou tout autre élément de
preuve démontrant les efforts entrepris pour faire
enquête sur la question.
L'arbitre a conclu que le ministre ne l'avait pas
convaincu qu'il faisait des efforts valables pour
enquêter sur l'identité des requérants ou sur leur
appartenance présumée à l'une des catégories non
admissibles, étant donné que l'agent d'immigration
ne lui avait pas fourni de données de fait lui
permettant d'établir si les efforts étaient valables.
Il a donc refusé d'ordonner la prolongation de la
garde en vertu du paragraphe 103.1(5) de la Loi.
Il a déclaré que même si les faits communiqués par
l'agent d'immigration auraient pu justifier la garde
initiale, ils ne constituaient pas des efforts valables
d'enquête qui justifieraient une prolongation de la
garde.
L'agent d'immigration a ensuite fait valoir que
l'arbitre devait ordonner la prolongation de la
garde des requérants en vertu de l'alinéa 103(3)b)
[mod. par L.R.C. (1985) (4e suppl.), chap. 28, art.
27] de la Loi au motif que les requérants consti-
tuaient une menace pour la sécurité publique. À
l'appui de sa thèse, il a fait valoir que les requé-
rants faisaient partie d'un groupe terroriste qui,
suivant le SCRS, était hostile à l'Occident, qu'ils
n'avaient pas de pièces d'identité en règle, et il a
mentionné les inscriptions du carnet d'adresses où
il était question d'armes et de [TRADUCTION]
«terreur profonde».
L'avocat des requérants affirme que les rensei-
gnements que le SCRS possède au sujet de l'Ad-
Da'wa sont erronés et périmés. Il prétend que les
requérants ne constituent pas une menace pour le
Canada à cause de leur appartenance à l'Ad-
Da'wa, et que leur affiliation à l'Ad-Da'wa est la
raison initiale pour laquelle ils ont sollicité le
statut de réfugié au Canada. Il fait observer que
M. Smith a passé deux ans en prison à cause de
son opposition au gouvernement iraqien, ce qui
renforce la crédibilité de sa revendication du statut
de réfugié. Il fait valoir qu'il est peu probable
qu'une personne qui entre au Canada dans le but
de commettre des actes de terrorisme porte sur elle
des brochures concernant sa cause, ou qu'elle entre
au Canada grâce à des passeports falsifiés et
endommagés. Quant aux inscriptions figurant dans
le carnet d'adresses, il souligne que M. Smith a
fourni des explications franches et crédibles à leur
sujet. Quant à M me Smith, elle est maintenant
enceinte et il est peu probable qu'elle constitue un
danger pour le Canada.
L'arbitre à ordonné la mise en liberté des requé-
rants à certaines conditions. Il a déclaré que les
éléments de preuve qui lui avaient été communi-
qués ne lui permettaient pas de conclure que les
requérants constituaient une menace pour la sécu-
rité publique. Il a reconnu que l'Ad-Da'wa était
opposée au gouvernement iraqien et qu'elle s'était
probablement livrée à une opposition armée à
celui-ci. Il a toutefois déclaré que le ministre
n'avait fourni aucun élément de preuve hormis
l'affirmation de l'agent d'immigration que l'Ad-
Da'wa était susceptible de commettre des actes
hostiles à l'Amérique du Nord ou d'autres mem-
bres de l'Alliance. En outre, il a conclu qu'il n'y
avait aucun élément de preuve permettant de
croire que les requérants avaient eux-mêmes
commis des actes terroristes, et que même si M.
Smith avait déjà participé à la résistance armée
contre le régime iraqien, rien ne permettait de
penser qu'il commettrait des actes de violence
pendant son séjour au Canada. L'arbitre a égale-
ment conclu que les explications fournies par M.
Smith au sujet du carnet d'adresses étaient crédi-
bles et qu'elles se conciliaient avec la revendication
du statut de réfugié qu'il présentait en tant qu'op-
posant au gouvernement iraqien.
L'ATTESTATION PRÉVUE AU PARAGRA-
PHE 40.1(1) DE LA LOI
Le 25 janvier 1991, le ministre de l'Emploi et de
l'Immigration et le solliciteur général ont remis
une attestation à un agent principal en vertu de
l'article 40.1 [édicté par L.R.C. (1985) (4e suppl.),
chap. 29, art. 4] de la Loi, qui dispose (je cite les
dispositions pertinentes à la présente affaire):
40.1 (1) Par dérogation aux autres dispositions de la présente
loi, le ministre et le solliciteur général peuvent, s'ils sont d'avis,
à la lumière de renseignements secrets en matière de sécurité ou
de criminalité dont ils ont eu connaissance, qu'une personne qui
n'est ni citoyen canadien ni résident permanent appartiendrait à
l'une des catégories visées aux alinéas 19(1)d),e),/),g) ou j), ou
27(2)c), signer et remettre une attestation à cet effet à un agent
d'immigration, un agent principal ou un arbitre.
(2) En cas de remise de l'attestation visée au paragraphe (1),
l'enquête prévue par ailleurs aux termes de la présente loi sur
l'intéressé ne peut être ouverte tant que la décision visée à
l'alinéa (4)d) n'a pas été rendue. L'agent principal ou l'arbitre
doit, par dérogation aux articles 23 ou 103, retenir l'intéressé
ou prendre une mesure à cet effet contre lui en attendant la
décision.
(3) En cas de remise de l'attestation prévue au paragraphe
(1), le ministre est tenu:
a) d'une part, d'en transmettre sans délai un double à la
Cour fédérale pour qu'il soit décidé si l'attestation doit être
annulée;
b) d'autre part, dans les trois jours suivant la remise, d'en-
voyer un avis à l'intéressé l'informant de la remise et du fait
que, à la suite du renvoi à la Cour fédérale, il pourrait faire
l'objet d'une mesure d'expulsion.
(4) Lorsque la Cour fédérale est saisie de l'attestation, le
juge en chef de celle-ci ou le juge de celle-ci qu'il délègue pour
l'application du présent article:
a) examine dans les sept jours, à huis clos, les renseignements
secrets en matière de sécurité ou de criminalité dont le
ministre et le solliciteur général ont eu connaissance et
recueille les autres éléments de preuve ou d'information
présentés par ces derniers ou en leur nom; il peut en outre, à
la demande du ministre ou du solliciteur général, recueillir
tout ou partie de ces éléments en l'absence de l'intéressé et du
conseiller la représentant, lorsque, à son avis, leur communi-
cation porterait atteinte à la sécurité nationale ou à celle de
personnes;
b) fournit à l'intéressé un résumé des informations dont il
dispose, à l'exception de celles dont la communication pour-
rait, à son avis, porter atteinte à la sécurité nationale ou à
celle de personnes, afin de permettre à celui-ci d'être suffi-
samment informé des circonstances ayant donné lieu à
l'attestation;
c) donne à l'intéressé la possibilité d'être entendu;
d) décide si l'attestation est raisonnable, compte tenu des
éléments de preuve et d'information à sa disposition, et, dans
le cas contraire, annule l'attestation;
e) avise le ministre, le solliciteur général et l'intéressé de la
décision rendue aux termes de l'alinéa d).
(5) Pour l'application du paragraphe (4), le juge en chef ou
son délégué peut recevoir et admettre les éléments de preuve ou
d'information qu'il juge utiles, indépendamment de leur receva-
bilité devant les tribunaux.
(6) La décision visée à l'alinéa (4)d) ne peut être portée en
appel ni être revue par aucun tribunal.
(7) Si l'attestation n'est pas annulée en vertu de l'alinéa
(4)d):
a) elle fait foi du fait que la personne qui y est nommée
appartient à l'une des catégories visées aux alinéas
19(1)d),e)J),g) ou j), ou 27(2)c);
b) la personne nommée dans l'attestation doit, par dérogation
aux articles 23 ou 103, être retenue jusqu'à son renvoi du
Canada.
Un agent principal a ensuite ordonné la mise
sous garde des requérants.
L'article 41 [maintenant article 40.1] a été
édicté par la Loi modifiant la Loi sur l'immigra-
tion de 1976 et apportant des modifications corré-
latives au Code criminel, L.C. 1988, chap. 36, art.
4, maintenant L.R.C. (1985) (4e suppl.), chap. 29,
art. 4 et est entré en vigueur le 3 octobre 1988.
L'article 40.1 prévoit une sorte de contrôle judi-
ciaire dans le cas d'une personne qui sollicite le
statut de réfugié et qui n'est pas un résident per
manent du Canada et qui, pour des raisons de
sécurité ou d'autres raisons spécifiées, ne peut être
admise au Canada. Les ministres concernés trans-
mettent à notre Cour une attestation de leur con
clusion qu'une personne ne remplit pas les condi
tions requises pour être admise afin que la Cour
l'examine et décide si l'attestation est raisonnable
compte tenu des éléments de preuve et d'informa-
tion fournis au juge. L'enquête sur le statut de
réfugié du requérant ne peut être ouverte ou pour-
suivie tant que cette décision n'a pas été rendue et
que l'attestation n'a pas été annulée ou confirmée.
Le 31 janvier 1991, j'ai présidé une audience au
cours de laquelle j'ai examiné les renseignements
secrets en matière de sécurité dont le ministre et le
solliciteur général avaient eu connaissance. J'ai
également entendu un autre témoignage, celui
d'un agent du SCRS, Gregory Pearce. A l'issue de
cette audience, j'ai signé une ordonnance proro-
geant au 29 janvier 1991 le délai imparti pour
signifier aux requérants l'avis de procédure prévu à
l'alinéa 40.1(3)b), accordant ainsi un délai de
quatre jours à compter de la date de la remise de
l'attestation au lieu du délai de trois jours prévu à
l'alinéa 40.1(3)b). J'ai également autorisé les inti-
més à faire entendre Gregory Pearce, j'ai ordonné
que l'audience se déroule à huis clos en l'absence
des personnes désignées dans l'attestation et du
conseiller les représentant, et j'ai ordonné que les
renseignements secrets obtenus par le service de
sécurité soient mis sous scellés et qu'ils soient
séparés des autres dossiers publics de la Cour. J'ai
examiné le résumé des renseignements qui m'a été
fourni et qui a été rédigé par le SCRS, je l'ai
corrigé et j'ai ordonné qu'il soit signifié aux requé-
rants. J'ai ensuite fixé au 5 février 1991 la date à
laquelle les requérants auraient «la possibilité
d'être entendus».
AUDIENCES DES 5 ET 12 FÉVRIER 1991
L'audience s'est déroulée en séance publique à
la demande des requérants, sans opposition de
l'intimée. J'ai également ordonné, à la demande
des requérants et sans opposition de l'intimée, que
dans l'intérêt véritable des requérants ceux-ci
soient désignés dans la présente instance sous les
pseudonymes de Joseph Smith et de Sarah Smith.
À l'audience, l'avocat des requérants a essayé de
me soumettre une requête en bref de certiorari
pour faire annuler l'ordonnance de détention pro-
noncée par l'agent principal le 25 janvier 1991.
Cependant, comme l'avocat n'avait pas obtenu
l'autorisation de présenter la requête, je n'ai pas
permis que la requête soit déposée à l'audience.
L'avocat des requérants a alors déclaré qu'il
essayerait d'obtenir l'autorisation de présenter la
requête selon la procédure normale dans le cadre
d'une demande distincte de la présente instance
fondée sur l'article 40.1 de la Loi.
À l'audience, les requérants ont formulé plu-
sieurs objections préliminaires au sujet de la procé-
dure que la Cour et l'intimée ont suivie en l'espèce
et qui, de l'avis des requérants, rend la Cour
incompétente pour examiner le caractère raisonna-
ble de l'attestation. Voici les objections en
question:
a) je n'avais pas compétence pour rendre l'ordonnance de
prolongation du délai de signification de l'avis aux requérants,
et le respect des exigences prévues au paragraphe 40.1(3) en
matière d'avis est une condition préalable à la compétence de la
Cour sur l'objet de présent litige;
b) la Cour n'avait pas compétence pour prononcer ex parte
l'ordonnance de prorogation de délai ou les autres ordonnances;
c) la décision de la Cour d'entendre à huis clos le témoignage
supplémentaire de Gregory Pearce n'aurait pas dû être pronon-
cée à huis clos;
d) le résumé fourni aux requérants ne respecte pas les exigences
de l'alinéa 40.1(4)b) de la Loi, étant donné qu'il n'a pas été
rédigé personnellement par le juge délégué;
e) l'attestation n'a pas été transmise «sans délai» à la Cour
fédérale comme l'exige l'alinéa 40.1(3)a) de la Loi;
f) la Cour devrait ordonner une communication plus complète
des documents scellés aux requérants, la communication inté-
grale des témoignages entendus à huis clos, la datation de
l'encre et du papier du carnet d'adresses au moyen des techni
ques de la médecine légale, la possibilité pour les requérants de
contre-interroger les agents du SCRS qui les ont interrogés
ainsi que la possibilité de contre-interroger le traducteur des
documents et la production du dossier intégral que le SCRS
possède au sujet de l'Ad-Da'wa pour que les requérants
l'utilisent.
L'affaire a ensuite été ajournée au 12 février 1991,
date à laquelle les observations des parties au sujet
des objections préliminaires ont été entendues. A
la suite du débat sur ces questions, j'ai remis le
prononcé de ma décision. Il a alors été convenu
que si je jugeais mal fondées les objections prélimi-
naires, les requérants auraient, le 26 mars 1991,
«la possibilité d'être entendu[s]» que leur accorde
l'alinéa 40.1(4)c) de la Loi. En ce qui concerne la
question de la communication plus complète, les
avocats des deux parties se sont engagés à se
consulter l'un l'autre pour savoir s'ils pourraient
s'entendre sur les conditions auxquelles le témoi-
gnage des agents du SCRS serait soumis à la
Cour. La Cour a subséquemment été informée par
une lettre datée du 22 février 1991 que les avocats
ne pouvaient pas parvenir à une entente. Quant à
la question de la datation de l'encre et du papier
du carnet d'adresses, l'intimée a déclaré qu'elle
était disposée à accepter l'aveu de M. Smith que la
date la plus récente à laquelle le carnet d'adresses
avait été utilisé remontait à 1986.
OBJECTIONS PRÉLIMINAIRES
Les objections des requérants portent sur la
compétence de notre Cour pour statuer sur la
présente affaire au fond. Bien que la conclusion à
laquelle j'en suis finalement arrivé en ce qui con-
cerne le caractère raisonnable de l'attestation
tende à rendre théoriques la plupart des questions
soulevées dans l'analyse qui suit, j'estime qu'elles
doivent être abordées étant donné que la compé-
tence de la Cour pour se prononcer sur le caractère
raisonnable de l'attestation est contestée.
1. Ordonnance de prorogation de délai
L'intimée fait valoir plusieurs moyens pour
riposter à la prétention des requérants suivant
laquelle notre Cour n'a pas compétence pour
accorder une prorogation de délai. Premièrement,
l'intimée prétend que le respect des dispositions de
l'alinéa 40.1(3)b) relatives à l'avis ne constitue pas
une condition préalable à la compétence de la
Cour pour examiner le caractère raisonnable de
l'attestation. L'intimée soutient en outre que, dans
le contexte des dispositions relatives à l'avis, les
mots «est tenu de» devraient être interprétés
comme ayant une connotation indicative et non
impérative dans ce contexte particulier. À titre
subsidiaire, elle soutient que la Cour a le pouvoir
implicite de proroger le délai dans le but de pou-
voir exercer de façon efficace les pouvoirs d'exa-
men de l'attestation que lui accorde expressément
la Loi. Finalement, l'intimée affirme que les dispo
sitions des Règles de la Cour fédérale [C.R.C.,
chap. 663] relatives au calcul des délais devraient
s'appliquer à la présente instance.
Je suis d'accord avec l'intimée pour dire que le
respect des dispositions relatives à l'avis ne consti-
tue pas une condition préalable à l'exercice du
pouvoir d'examen que prévoit le paragraphe
40.1(4). Il convient de noter qu'aux termes de
l'alinéa 40.1(4)a), la Cour est tenue de procéder à
l'examen à huis clos dans les sept jours suivant la
date à laquelle l'attestation est renvoyée à la Cour
en vertu du paragraphe 40.1(3). Le renvoi à la
Cour doit avoir lieu «sans délai» après que l'attes-
tation a été, conformément au paragraphe 40.1(1),
remise au fonctionnaire compétent de l'immigra-
tion. La personne désignée dans l'attestation doit
être informée de la remise dans les trois jours de
celle-ci. Il est donc possible qu'une attestation soit
remise, puis renvoyée à la Cour et examinée avant
l'expiration du délai de trois jours. Il est vrai qu'en
l'espèce, les requérants n'ont été avisés qu'après
que quatre jours se furent écoulés à compter de la
remise de l'attestation, et que la Cour n'a procédé
à l'examen que six jours plus tard. Cependant, il
faut quand même faire observer que la loi prévoit
que dans certains cas il est possible de procéder à
l'examen avant que la personne désignée dans
l'attestation soit informée de la remise de l'attesta-
tion. Compte tenu de ce qui précède, je conclus
donc que le législateur fédéral ne voulait pas que
les dispositions relatives à l'avis soient strictement
observées pour que la Cour puisse examiner l'at-
testation en vertu du paragraphe 40.1(4).
Je suis également persuadé que l'intimée a
raison de dire que les mots «est tenu de» au para-
graphe 40.1(3) devraient être interprétés comme
étant indicatifs et non comme étant impératifs.
Dans leur ouvrage Principles of Administrative
Law (1985, Carswell), Jones et de Villars font
observer, aux pages 110 et 111, que pour détermi-
ner si une condition prévue par la loi est impéra-
tive ou indicative, le tribunal doit tenir compte
[TRADUCTION] ... de l'esprit de la loi, de l'ensemble de ses
dispositions, de la raison pour laquelle on a inclus l'exigence
législative en question, de la question de savoir si la loi prévoit
des conséquences en cas d'inobservation, et des effets pratiques
de l'inobservation sur le plaignant ou sur toute autre personne.
À mon avis, le cadre législatif concernant les
délais était conçu comme indicatif et non comme
impératif. L'esprit et l'objet de la Loi sur l'immi-
gration qui sont énoncés à l'article 2 de la Loi
mettent en équilibre les intérêts du pays en matière
de sécurité et les droits individuels des personnes
qui cherchent à entrer au Canada, et ils pourraient
donc être interprétés comme appuyant l'une ou
l'autre qualification. Cependant, même si les dis
positions législatives devraient être observées dans
toute la mesure du possible, il n'est peut-être pas
toujours pratique, lorsque la sécurité nationale est
menacée, d'exiger un strict respect lorsque la per-
sonne désignée ne subira pas de préjudice grave.
De plus, aucune conséquence précise n'est prévue
en cas de défaut de donner avis. Comme la per-
sonne désignée dans l'attestation n'avait aucune
raison d'intervenir tant que l'examen à huis clos
n'avait pas eu lieu, eu égard aux circonstances de
l'espèce, le défaut de l'intimée d'aviser les requé-
rants dans le délai prescrit de trois jours ne leur a
pas causé de préjudice grave. Cela ne veut cepen-
dant pas dire que la Cour devrait excuser d'impor-
tants retards à respecter les exigences de la loi en
matière d'avis en les considérant comme de sim-
ples vices de procédure. Il semblerait que le but de
cette condition particulière de la Loi en matière
d'avis est de s'assurer que la personne désignée
dans l'attestation soit informée de la raison du
maintien de sa mise sous garde et du fait qu'elle
pourrait faire l'objet d'une mesure d'expulsion. À
mon avis, ce sont des droits importants qui doivent
être protégés, et on ne devrait fermer les yeux sur
une dérogation à la norme prévue par la loi que
lorsque les dispositions relatives au délai de trois
jours ont été respectées dans l'ensemble et qu'il n'y
a pas atteinte aux droits de l'intéressé. En l'espèce,
on a retardé d'une journée l'envoi de l'avis aux
requérants, et ce retard n'était pas important ou
indûment préjudiciable dans les circonstances.
Je suis donc d'avis de conclure, sur le fondement
de ce qui précède, que la compétence de la Cour
pour examiner le caractère raisonnable du certifi-
cat n'a pas été touchée par le défaut des intimés
d'observer rigoureusement les exigences relatives à
l'avis. Il n'est donc pas nécessaire d'examiner les
moyens subsidiaires que l'intimé fait valoir sur
cette question.
2. Procédure ex parte
L'avocat des requérants prétend que la Cour
n'avait pas compétence pour rendre ex parte l'or-
donnance de prorogation de délai et pour accorder
ex parte les autres éléments de l'ordonnance. À
l'appui de cette prétention, il invoque l'arrêt Neal
c. P.G. (Sask.) et autre, [1977] 2 R.C.S. 624, dans
lequel la Cour suprême du Canada a annulé la
demande présentée par le ministère public en vue
d'obtenir ex parte la prorogation du délai imparti
pour interjeter appel d'un verdict d'acquittement
dans une affaire de déclaration de culpabilité par
procédure sommaire.
Ce moyen est, selon moi, dénué de tout fonde-
ment. À mon avis, on peut facilement distinguer la
présente affaire de l'arrêt Neal. C'est un principe
élémentaire de droit que, dans une poursuite judi-
ciaire, l'usage courant veut que l'on avise la partie
adverse et que celle-ci ait la possibilité de faire
valoir son point de vue. J'estime toutefois qu'en
l'espèce l'alinéa 40.1(4)a) de la Loi accorde à la
Cour le pouvoir de procéder ex parte. À la diffé-
rence de la situation qui existait dans l'arrêt Neal,
la loi à l'examen en l'espèce accorde manifeste-
ment au juge qui préside le pouvoir discrétionnaire
de recueillir tout ou partie des éléments de preuve
et d'information présentés en l'absence de la per-
sonne désignée dans l'attestation ou du conseiller
la représentant, lorsque leur communication porte-
rait atteinte à la sécurité nationale ou à celle de
personnes. À mon avis, ce droit d'exclusion s'éten-
drait implicitement au prononcé des ordonnances
nécessairement accessoires à l'exercice de ce pou-
voir discrétionnaire et il n'est donc pas nécessaire
que le juge entende des observations sur ces ordon-
nances. En l'espèce, l'ordonnance prescrivant l'au-
dition du témoignage de Gregory Pearce à huis
clos était accessoire à la décision de non-divulga-
tion de la preuve, laquelle est une décision que le
juge est expressément habilité à rendre. On pour-
rait en dire autant des ordonnances prescrivant le
déroulement à huis clos de toute l'audience, la
conservation sous pli scellé des renseignements, et
la communication d'un résumé vérifié. Quant à
l'ordonnance de prorogation de délai, je suis con-
vaincu qu'elle pourrait aussi avoir lieu à huis clos
dans le cadre de l'instance générale, et de toute
façon, pour les raisons déjà exposées, le fait qu'il
n'a pas été possible de présenter des observations
sur ce point n'a causé aucun préjudice.
3. Audience à huis clos
Les requérants prétendent que l'article 40.1 ne
permet que dans des circonstances limitées l'exa-
men à huis clos des renseignements secrets en
matière de sécurité dont les ministres ont eu con-
naissance, ainsi que d'autres éléments d'informa-
tion comme le témoignage de Pearce. Ils préten-
dent également que la décision de permettre la
présentation d'autres éléments de preuve à huis
clos ne peut être prononcée à huis clos.
À mon avis, cette prétention est également
dénuée de fondement. L'alinéa 40.1(4)a) accorde
expressément au juge le pouvoir discrétionnaire de
«recueil[lir] les autres éléments de preuve ou d'in-
formation» à huis clos pour des raisons de sécurité
nationale. Il n'y a aucune raison d'exclure les
témoignages du champ d'application de cette dis
position. Quant à l'argument que cette décision ne
peut pas elle-même être prononcée à huis clos, je le
rejette pour les mêmes motifs que ceux que j'ai
avancés dans la section relative à la procédure ex
parte.
4. Le résumé
Les requérants soutiennent en outre que le
résumé des informations dont les requérants ont
besoin pour être suffisamment informés des cir-
constances ayant donné lieu à l'attestation doit
être rédigé par le juge lui-même. L'alinéa
40.1(4)b) n'exige pas explicitement que le juge
rédige lui-même le résumé, et je refuse de conclure
à l'existence de cette obligation en l'absence de
raisons sérieuses. À mon avis, le rôle que joue le
juge dans le cas présent consiste à s'assurer que
l'intéressé soit suffisamment informé. En l'espèce,
j'ai examiné et approuvé le compte rendu des
éléments de preuve mis à ma disposition et, en
vertu de mon pouvoir discrétionnaire, j'ai ordonné
que certaines parties soient retranchées du résumé
dans l'intérêt de la sécurité nationale sans porter
atteinte au droit des requérants d'être suffisam-
ment informés. Je tiens également à souligner qu'il
existe des situations analogues dans lesquelles les
tribunaux retranchent une partie des renseigne-
ments qui lui ont été communiqués, comme par
exemple dans le cas des affidavits des informateurs
de police lorsqu'on demande l'accès au paquet
scellé dans une affaire d'écoute électronique (voir
l'arrêt R. c. Garofoli, [1990] 2 R.C.S. 1421).
5. «Sans délai»
Les requérants prétendent également que
comme l'attestation n'a été transmise à la Cour
fédérale qu'après que quatre jours se furent écou-
lés à compter de la date de la remise de l'attesta-
tion, celle-ci n'a pas été transmise «sans délai»
comme l'exige l'alinéa 40.1(3)a) de la Loi.
La Cour d'appel de l'Ontario a examiné le sens
de l'expression «sans délai» dans l'arrêt R. c.
Parrot (1979), 27 O.R. (2d) 333. Le dirigeant
syndical accusé était tenu, en vertu d'une loi for-
çant le retour au travail, d'aviser «sans délai» (en
anglais, forthwith) ses compagnons de travail que
la grève était devenue illégale. La Cour s'est pen-
chée sur le sens des mots «sans délai» aux pages
339 et 340:
[TRADUCTION] Finalement, .. . nous sommes convaincus qu'il
faut interpréter l'expression «sans délai» à l'art. 3(1) de la Loi
comme signifiant «immédiatement» ou [TRADUCTION] «dès que
possible eu égard aux circonstances et en tenant compte de la
nature de l'acte à accomplir» (37 Hals., 3° éd., à la p. 103) ou
[TRADUCTION] «aussi promptement qu'il est raisonnablement
possible ou réalisable en tenant compte de toutes les circons-
tances» (R. v. Bell, [1969] 2 C.C.C. 9, à la p. 18) ...
Il semble ressortir de toutes les décisions publiées que «sans
délai» ne veut pas dire «instantanément» (R. v. Cuthbertson,
précité) mais plutôt «dans un délai raisonnable», en tenant
compte [TRADUCTION] «du but visé par le principe, et des
circonstances de l'affaire» (le maître des rôles Jessel dans le
jugement Ex parte Lamb (1881), 19 Ch. D. 169, la p. 173.. .
Voir également Mihm et autres c. Ministre de la Main-d'oeu-
vre et de l'Immigration, [1970] R.C.S. 348, la p. 358.. .
En l'espèce, je suis persuadé que l'attestation a été
transmise à la Cour dès qu'il était raisonnablement
possible de le faire dans les circonstances. Il est
évidemment souhaitable, lorsque la liberté d'une
personne est en jeu, que la question soit soumise au
tribunal avec diligence raisonnable. En l'espèce, il
était nécessaire pour l'intimée de recueillir les
éléments de preuve et d'information nécessaires
qui devaient être présentés à la Cour. De telles
recherches demandent nécessairement un certain
temps à partir du moment de la délivrance de
l'attestation et, en l'espèce, eu égard au fait qu'une
partie du temps s'est écoulé pendant une fin de
semaine, je suis persuadé que le temps que l'inti-
mée a pris était raisonnable dans les circonstances.
Je signale que la loi prévoit que la Cour doit
examiner les renseignements secrets qui sont
portés à sa connaissance notamment en matière de
sécurité dans les sept jours de la délivrance de
l'attestation et qu'en l'espèce les quatre jours qui
se sont effectivement écoulés laissaient à la Cour
suffisamment de temps pour examiner la preuve.
6. Communication plus complète
Comme je l'ai déjà signalé, les requérants récla-
ment une communication plus complète des docu
ments qui ont été mis à la disposition de la Cour
durant l'audience à huis clos. Ils sollicitent la
communication intégrale des documents se trou-
vant dans les dossiers scellés; ils veulent qu'on leur
communique tous les détails au sujet du témoi-
gnage donné par les témoins à l'audience, et ils
demandent de pouvoir contre-interroger l'auteur
des documents qui m'ont été soumis. Ils deman-
dent également qu'on leur permette de contre-
interroger les agents qui les ont fouillés et ques-
tionnés, et de pouvoir contre-interroger le traduc-
teur. Ils demandent également l'accès aux dossiers
que le SCRS pourrait posséder au sujet de
1'Ad-Da'wa.
L'intimée a déclaré à l'audience qu'elle s'oppo-
sait à ce que les agents du SCRS qui ont interrogé
les requérants soient contre-interrogés, mais elle
s'est dite prête à permettre aux requérants de
soumettre par écrit des questions au sujet de possi
bles violations de la Charte ou autres irrégularités
qui auraient pu se produire au cours de l'entrevue
et elle a précisé que les agents y répondraient par
affidavit. L'intimée s'est opposée à la demande de
production des documents scellés, des dossiers et
des autres éléments de preuve exclus de l'audience
au motif qu'ils ne pouvaient être communiqués
pour des raisons de sécurité nationale. Pour la
même raison, l'intimée s'est opposée à ce que le
traducteur du SCRS comparaisse pour être contre-
interrogé. Quant à la demande de contre-interro-
gatoire de l'auteur des documents, cette requête a
été jugée acceptable à condition que le contre-
interrogatoire ne porte que sur des questions ne
touchant pas au domaine de la sécurité nationale.
Le paragraphe 40.1(4) de la Loi m'accorde, en
ma qualité de juge chargé d'examiner l'attestation,
le pouvoir discrétionnaire de refuser la communi
cation d'une partie des éléments d'information ou
de preuve à ma disposition au motif que leur
divulgation porterait atteinte à la sécurité natio-
nale ou à celle de personnes. Je suis persuadé que,
dans les circonstances, la communication des docu
ments des dossiers scellés porterait atteinte à la
sécurité nationale. À cet égard, je fais miennes les
observations formulées par le juge Addy dans le
jugement Henrie c. Canada (Comité de surveil
lance des activités de renseignement de sécurité),
[1989] 2 C.F. 229 (i ie inst.), aux pages 242 et 243
et les considère comme des principes directeurs
appropriés pour l'exercice de mon pouvoir discré-
tionnaire:
Il importe de se rendre compte qu'un [TRADUCTION] «obser-
vateur bien informé», c'est-à-dire une personne qui s'y connaît
en matière de sécurité et qui est membre d'un groupe consti-
tuant une menace, présente ou éventuelle, envers la sécurité du
Canada, ou une personne associée à un tel groupe, connaîtra les
rouages de celui-ci dans leurs moindres détails ainsi que les
ramifications de ses opérations dont notre service de sécurité
pourrait être relativement peu informé. En conséquence de quoi
l'observateur bien informé pourra parfois, en interprétant un
renseignement apparemment anodin en fonction des données
qu'il possède déjà, être en mesure d'en arriver à des déductions
préjudiciables à l'enquête visant une menace particulière ou
plusieurs autres menaces envers la sécurité nationale. Il pour-
rait, par exemple, être en mesure de déterminer, en tout ou en
partie, les éléments suivants: (1) la durée, l'envergure et le
succès ou le peu de succès d'une enquête; (2) les techniques
investigatrices du service; (3) les systèmes typographiques et de
téléimpression utilisés par le SCRS; (4) les méthodes internes
de sécurité; (5) la nature et le contenu d'autres documents
classifiés; (6) l'identité des membres du service ou d'autres
personnes participant à une enquête.
Pour ces motifs, il m'est impossible de faire des
commentaires directs sur les raisons pour lesquel-
les des documents ont été mis sous scellés en
l'espèce, car on pourrait se servir de mes commen-
taires pour découvrir les éléments de preuve et les
autres éléments énumérés par le juge Addy. Les
mêmes considérations s'appliqueraient à la
demande de contre-interrogatoire formulée par les
requérants. Les requérants citent l'arrêt R. c.
Garofoli, précité, à l'appui de leur demande de
contre-interrogatoire des agents du SCRS. La si
tuation en cause dans l'arrêt Garofoli était diffé-
rente parce que même si l'on craignait pour la
confidentialité et l'efficacité des enquêtes policiè-
res, cette crainte n'existait pas à propos de la
sécurité nationale.
Il est quand même possible que la procédure
prévue à l'article 40.1 viole la Charte. La question
de savoir si la procédure d'examen de l'attestation
de sécurité, de communication de la preuve et de
détention prévue à l'article 40.1 de la Loi viole
l'article 7 de la Charte a été abordée au cours des
débats, mais aucune prétention détaillée n'a été
présentée sur cette question. Les requérants s'ap-
prêtaient probablement à présenter une argumen
tation détaillée fondée sur la Charte à l'audience
fixée pour le 26 mars 1991, celle où on leur
donnait «la possibilité d'être entendu[s]». J'en suis
toutefois venu à la conclusion que, pour donner
aux requérants la possibilité d'être entendus, il
n'est pas nécessaire de leur accorder plus de temps
que celui qu'ils ont eu pour présenter les observa
tions déjà formulées, parce qu'il me semble que le
ministre n'a pas démontré que l'attestation était
raisonnable d'après les éléments de preuve qui
m'ont été soumis. Comme les questions relatives à
la Charte n'ont pas été débattues en détail et
qu'aucune preuve n'a été présentée en vertu de
l'article premier, je n'exprime aucune opinion
quant à la question de savoir si l'article 40.1
pourrait résister à un examen minutieux fondé sur
les dispositions de la Charte.
CARACTÈRE RAISONNABLE DE L'ATTES-
TATION
Comme j'ai conclu que j'ai compétence pour
rendre la présente décision, on pourrait s'attendre
normalement à ce que nous prenions maintenant
des mesures en vertu de l'alinéa 40.1(4)c) pour
donner aux personnes désignées dans l'attestation
la possibilité d'être entendues et, c'est effective-
ment ce qui devait se produire le 26 mars 1991.
Cependant, après avoir procédé à un examen
approfondi des points litigieux et après avoir
entendu la thèse des requérants, je ne vois pas la
nécessité d'entendre les personnes retenues parce
que la question de fond peut être tranchée dès
maintenant.
DÉCISION
La première étape consiste à déterminer le sens
exact qu'il convient d'accorder au mot «raisonna-
ble» qu'on trouve à l'alinéa 40.1(4)d). Lorsque la
Cour procède au contrôle judiciaire des actes de
l'administration, son rôle consiste habituellement
non pas à examiner le bien-fondé de la décision,
mais plutôt à déterminer si la personne qui a pris
la décision a agi conformément à la loi. Habituel-
lement, si la loi applicable soumet explicitement le
fonctionnaire à l'obligation d'agir de façon raison-
nable, celui-ci doit, si on lui reproche sa conduite,
justifier sa décision en présentant des éléments de
preuve qui démontreraient que sa décision était
raisonnablement justifiée et qu'il n'a pas fondé ses
conclusions sur des considérations non pertinentes.
On trouve un exemple d'une conception relative-
ment restrictive du caractère raisonnable dans l'ar-
rêt Secretary of State for Education and Science
v. Tameside Metropolitan Borough Council,
[1977] A.C. 1014 (H.L.), à la page 1064, dans
lequel lord Diplock déclare que lorsqu'une loi
oblige une autorité publique à exercer un pouvoir
discrétionnaire «de manière raisonnable», on doit
considérer que cette exigence interdit [TRADUC-
TION] «toute conduite qu'une autorité sensée et
dûment consciente de ses responsabilités n'aurait
pas décidé d'adopter».
J'estime toutefois qu'il y a lieu d'appliquer une
norme de preuve plus élevée en ce qui concerne le
caractère raisonnable lorsque la liberté individuelle
est en jeu. Dans l'arrêt Reg. v. Secretary of State
for the Home Department, Ex parte Khawaja,
[1984] A.C. 74, la Chambre des lords a examiné
certaines dispositions de la Immigration Act
[(R.-U.), 1971, chap. 77] britannique et a statué
que si un agent d'immigration faisait garder une
personne au motif qu'elle se trouve illégalement en
Angleterre, il ne suffirait pas de justifier la mesure
en invoquant certains motifs raisonnables. Comme
la liberté individuelle est compromise à cause de la
détention, l'agent d'immigration doit satisfaire à
une norme de preuve civile plus élevée en démon-
trant qu'il est très probable que la personne déte-
nue se trouve illégalement en Angleterre. Ainsi
que lord Scarman l'a déclaré aux pages 113 et 114
au nom de la majorité:
[TRADUCTION] Vos Seigneuries, j'estime qu'il y a lieu d'adop-
ter la norme civile qui est appliquée avec souplesse dans les cas
où l'exécutif restreint la liberté de la personne ... Il n'est pas
nécessaire d'incorporer dans les poursuites civiles dans lesquel-
les le tribunal exerce un contrôle judiciaire la formule conçue
par les juges pour guider les jurés en matière criminelle. La
liberté est en jeu: c'est, comme le tribunal l'a reconnu, dans les
décisions Bater v. Bater [1951] P. 35 et Hornal v. Neuberger
Products Ltd. [1957] 1 Q.B. 247, une grave question. Le
tribunal qui procède au contrôle judiciaire devra donc être
convaincu que les faits nécessaires à la justification de la limite
apportée à la liberté existent effectivement. La souplesse de la
norme de preuve civile suffit pour garantir que le tribunal
exigera le degré élevé de probabilité qui convient à ce qui est en
jeu: [TRADUCTION] « . la façon de se convaincre de la
véracité d'une question dépend nécessairement de la nature et
la gravité de cette question» (le juge Dixon dans l'arrêt Wright
v. Wright (1948) 77 C.L.R. 191, la page 210). J'adopterais
donc la norme civile qui est appliquée avec souplesse de la
manière qui est expliquée dans la jurisprudence que j'ai men-
tionnée. Et je souscris entièrement à l'observation formulée par
mon éminent collègue, lord Bridge of Harwich, suivant laquelle
les difficultés de la preuve dans de nombreuses affaires d'immi-
gration ne justifient aucunement l'affaiblissement de la norme
de preuve exigée.
Si j'applique la norme établie dans l'arrêt Kha-
waja, il me semble évident que l'attestation déli-
vrée en vertu de l'article 40.1 n'est pas raisonnable
et qu'elle devrait par conséquent être annulée.
J'estime, suivant la norme établie dans l'arrêt
Khawaja, que la preuve était insuffisante pour
permettre au ministre de conclure que les requé-
rants appartenaient aux catégories non admissibles
prévues aux alinéas 19(1)f) et 19(1)g) de la Loi. Il
n'existe pas de motifs suffisants pour croire que les
requérants essayeront d'inciter au renversement
d'un gouvernement par la force pendant leur
séjour au Canada. Le rattachement des requérants
à l'Ad-Da'wa, qu'ils reconnaissent librement, ne
constitue pas à mon avis une raison suffisante pour
conclure que les requérants commettront des actes
subversifs sans preuve convaincante démontrant
qu'ils commettront personnellement des actes sub-
versifs pendant leur séjour au Canada. La preuve
fournie par l'intimée portait sur les activités sus-
pectes de l'Ad-Da'wa, mais elle n'a présenté
aucune preuve quant aux activités subversives aux-
quelles les requérants seraient personnellement
susceptibles de se livrer. Ainsi que l'arbitre l'a
souligné, le fait que M. Smith se soit engagé par le
passé dans la résistance armée contre l'Iraq ne
veut pas dire qu'il le fera pendant son séjour au
Canada. Quant au carnet d'adresses, je suis d'ac-
cord avec l'arbitre pour dire que les explications
fournies par les requérants étaient dignes de foi et
qu'elles sont conciliables avec la revendication du
statut de réfugié des requérants.
Je suis également d'avis de conclure que l'on ne
peut raisonnablement penser que les requérants
commettront des actes de violence de nature à
porter atteinte à la vie humaine pendant leur
séjour au Canada, ou qu'ils appartiennent à une
organisation susceptible de commettre de tels
actes. L'intimée n'a présenté aucune preuve ten-
dant à démontrer que l'Ad-Da'wa a commis de tels
actes au Canada ou qu'elle est susceptible de le
faire à l'avenir. On pourrait en dire autant des
requérants. Les déductions que l'on pourrait peut-
être tirer de leur association avec l'Ad-Da'wa ou
du carnet d'adresses sont à mon avis insuffisantes
vu l'absence d'éléments de preuve plus directs et
personnalisés au sujet de la probabilité qu'ils parti-
cipent à de telles activités. À mon avis, il est
possible que des groupes qui prennent part à des
activités terroristes — comme il semble que l'Ad-
Da'wa le fasse dans certaines circonstances — ne
sont pas monolithiques, mais peuvent compter
dans leurs rangs ceux qui sont le moins enclins à la
violence ou qui sont mêmes tout à fait passifs. Sans
d'autres éléments de preuve sur la propension ou la
participation des requérants au terrorisme ou à
d'autres actes violents, j'estime que le maintien de
leur détention n'est pas raisonnable.
À mon avis, les activités des requérants sont
conciliables avec la revendication de statut qu'ils
ont présentée en vue d'être reconnus comme réfu-
giés (lequels arrivent dans bien des cas dans notre
pays avec des documents douteux). Il semble que
la revendication du statut de réfugié des requé-
rants soit authentique et qu'elle soit fondée sur
leur opposition au régime de Saddam Hussein. De
toute façon, il est difficile de croire que, si les
requérants avaient l'intention de commettre des
actes subversifs, ils seraient entrés au Canada avec
des tracts d'identification et qu'ils fourniraient
volontiers aux fonctionnaires de l'immigration un
récit détaillé de leur affiliation à un groupe
suspect.
Je suis donc d'avis d'ordonner l'annulation de
l'attestation. Il est évidemment loisible à l'intimée,
si des preuves incriminantes contre l'une ou l'autre
personne étaient portées à son attention, de présen-
ter une autre requête fondée sur l'article 40.1,
mais dans les circonstances, les personnes retenues
sont libres de poursuivre leur revendication du
statut de réfugié.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.