A-772-90
Sa Majesté la Reine (appelante)
c.
Mohawk Oil Co. Ltd. (intimée)
RÉPERTORIA' MOHAWK OIL CO. C. CANADA (C.A.)
Cour d'appel, juges Heald, Hugessen et Stone, J.C.A.
—Vancouver, 10 décembre 1991; Ottawa, 27 janvier
1992.
Impôt sur le revenu — Calcul du revenu — La contribuable
a conclu un contrat prévoyant l'installation d'une usine de
retraitement d'huile usée — L'usine n'a pas fonctionné —
Négociations d'un règlement financier des réclamations —
Traitement du paiement comme un poste extraordinaire ne
constituant pas un revenu — Dans une nouvelle cotisation, le
M.R.N. l'a traité en partie comme un revenu et en partie
comme un gain en capital — Le juge de première instance a
conclu que le paiement n'était pas assujetti à l'impôt puisqu'il
constituait un gain fortuit — Le M.R.N. soutient que le juge de
première instance n'a pas tenu compte du contexte dans lequel
le paiement a été effectué — La façon dont le payeur a qualifié
le montant du règlement est un critère peu sûr dans la détermi-
nation de sa véritable nature — Le règlement inclut une indem-
nité pour les profits perdus et les dépenses faites inutilement —
Renvoi à la jurisprudence anglaise sur la question de savoir si
un paiement est réellement volontaire — Justesse de la nou-
velle cotisation.
Il s'agit d'un appel interjeté contre un jugement rendu par la
Section de première instance, par lequel elle a accueilli l'appel
de l'intimée à l'encontre de la nouvelle cotisation établie à
l'égard de son année d'imposition 1982.
En 1978, l'intimée a conclu un contrat avec Phillips Petro
leum Company relativement à l'installation, aux locaux de
l'intimée, d'une usine recyclant l'huile usée en lubrifiants.
L'usine, en contrepartie de laquelle l'intimée a payé à Phillips
la somme de 3,9 millions de dollars, a été installée en janvier
1980. L'intimée a également engagé des dépenses de 6 mil
lions de dollars afin de mettre en place l'infrastructure et des
services connexes tels des moyens de lutte contre l'incendie et
des chemins. La compagnie a traité ces dépenses comme des
dépenses en immobilisations. Elle a également engagé et
déduit, pour les déplacements, les frais de bureaux et d'autres
frais réliés à l'installation, près de 1,2 million de dollars à
l'égard de chacune des années 1981 et 1982.
L'intimée ne pouvant faire fonctionner l'usine, elle a avisé
Phillips de son obligation de l'indemniser pour tous les coûts
et les pertes reliés au non-fonctionnement de l'usine. Au cours
d'une rencontre entre les représentants des deux compagnies,
l'intimée a dressé une liste de toutes les dépenses imaginables
engagées relativement au projet, totalisant environ 15 mil
lions de dollars. Les parties ont conclu une convention de
règlement résiliant la convention antérieure, permettant à Phil-
lips de reprendre la plupart des pièces et prévoyant une libéra-
tion mutuelle et le paiement par Phillips de plus de 7 mil
lions de dollars en devises canadiennes. L'intimée ayant par la
suite fait installer une usine de retraitement d'huile usée par
une compagnie différente, elle a pu utiliser les installations
connexes.
Les administrateurs de l'intimée ont d'abord eu l'intention
de comptabiliser le montant du règlement en le partageant
entre les frais de développement différés, les pertes d'exploita-
tion et le produit de l'aliénation de l'usine; toutefois, sur le
conseil de ses vérificateurs, la compagnie l'a inclus dans ses
états financiers comme un poste extraordinaire. Elle l'a traité,
dans sa déclaration de revenus, comme une rentrée ne consti-
tuant pas un revenu, ne l'incluant pas dans son revenu imposa-
ble. Dans une nouvelle cotisation, le ministre a considéré
3,4 millions de dollars comme un recouvrement des pertes
d'exploitation, donc comme un revenu, et 3,7 millions de dol
lars comme un produit de disposition de biens amortissables,
soit un gain en capital. Le juge de première instance a conclu
que l'argent versé par Phillips ne visait à compenser aucun des
frais supportés par l'intimée, mais seulement à empêcher une
poursuite et l'embarras en résultant; le montant constituant «un
gain fortuit», il n'était pas un revenu imposable.
Arrêt: l'appel devrait être accueilli.
La question de savoir si le paiement est un revenu d'entre-
prise dépend non pas du motif du payeur, mais de la nature du
paiement dans les mains du bénéficiaire. Peu importe que le
paiement soit effectué en raison d'un revenu diminué ou de
dépenses plus élevées. L'intimée a cherché, au cours des négo-
ciations menant à un règlement, à être indemnisée, notamment
des profits perdus et des dépenses en immobilisations faites
inutilement. La convention de règlement visait explicitement à
résilier la transaction commerciale ayant entraîné ces pertes, et
le paiement a été effectué parce que les modalités de la con
vention l'exigeaient. La preuve appuie la cotisation selon
laquelle le paiement est une indemnité pour les profits perdus
et les dépenses engagées. L'intimée a subi des pertes en raison
des dépenses d'exploitation engagées pour l'usine non fonc-
tionnelle. Le payeur a accepté de payer un montant supérieur
au prix de vente initial, reconnaissant ces pertes. La preuve
appuie l'attribution au produit de disposition d'un bien en
immobilisation, puisque Phillips a repris l'usine qu'elle avait
installée deux ans plus tôt.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, ch. 63, art.
9(1), 13(21)d) (mod. par S.C. 1977-78, ch. 1, art. 6(8)),
14(1) (mod., idem, art. 7).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS EXAMINÉES:
Federal Farms Ltd. v. Minister of National Revenue,
[ 1959] R.C.É. 91; [ 1959] C.T.C. 98; (1959), 59 DTC
1050; Simpson (Inspector of Taxes) v John Reynolds & Co
(Insurances) Ltd, [1975] 2 All ER 88 (C.A.); Murray (Ins-
pector of Taxes) y Goodhews, [1978] 2 All ER 40 (C.A.);
Donald Fisher (Ealing) Ltd y Spencer [Inspector of
Taxes], [1987] STC 423 (Ch. D.); Raja's Commercial
College y Gian Singh & Co Ltd, [1976] STC 282 (P.C.);
MRN c Import Motors Ltd, [1973] CTC 719; (1973), 73
DTC 5530 (C.F. lrc inst.).
DÉCISIONS CITÉES:
R. c. Cranswick, [1982] 1 C.F. 813; [1982] CTC 69;
(1982), 82 DTC 6073; 40 N.R. 296 (C.A.); Courrier M H
Inc c La Reine, [1976] CTC 567; (1976), 76 DTC 6331
(C.F. 1« inst.); Glisic c. Canada, [1988] 1 C.F. 731;
(1987), 80 N.R. 39 (C.A.); TRW Inc. v. Walbar of Canada
Inc., A-107-91, juge Stone, J.C.A., jugement en date du
31-10-91, C.A.F., encore inédit.
APPEL d'un jugement de la Section de première
instance ([1990] 2 C.T.C. 173) accueillant l'appel du
contribuable contre la nouvelle cotisation établie à
l'égard de son année d'imposition 1982 relativement
à une somme reçue à titre de règlement de réclama-
tions pour violation de contrat. Appel accueilli.
AVOCATS:
Ian S. MacGregor et Al Meghji pour l'appelante.
I. H. Pitfield et Karen R. Sharlow pour l'intimée.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour l'ap-
pelante.
Thorsteinssons, Vancouver, pour l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs du
jugement rendus par
LE JUGE STONE, J.C.A.: Il s'agit d'un appel interjeté
à l'encontre d'un jugement rendu par la Section de
première instance le 11 juillet 1990 [[1990] 2 C.T.C.
173], par lequel elle a accueilli l'appel de l'intimée à
l'encontre de la nouvelle cotisation établie par le
ministre du Revenu national le 6 août 1987 à l'égard
de l'année d'imposition 1982. Dans ce jugement, le
juge de première instance a statué que la somme de
7 062 187 $ versée par Phillips Petroleum Company à
l'intimée au cours de l'année 1982 à titre de règle-
ment des réclamations pour violation de contrat
n'était pas assujettie à l'impôt pour le motif qu'elle
constituait «un gain fortuit».
Voici un résumé des faits. En novembre 1978, l'in-
timée a conclu un contrat avec Phillips Petroleum
Company («Phillips») de Bartlesville, en Oklahoma,
en vertu duquel Phillips convenait de fournir et d'ins-
taller aux locaux de l'intimée à Vancouver Nord une
usine de retraitement d'huile usée («l'usine») en vue
d'extraire de celle-ci des lubrifiants de haute qualité.
L'usine, en contrepartie de laquelle l'intimée a payé à
Phillips la somme de 3 942 000 $ (2 885 000 $ US), a
été installée au cours du mois de janvier 1980. L'inti-
mée a également engagé des dépenses de 6 042 000 $
pour l'achat d'un terrain, de réservoirs destinés à
l'entreposage, de services d'approvisionnement en
électricité, de moyens de lutte contre l'incendie, d'un
entrepôt, de chemins et d'une centrale de vapeur
nécessaires à l'acquisition et à l'installation de
l'usine. En outre, l'intimée a déduit, dans le calcul de
son revenu, les dépenses supplémentaires engagées
pour les salaires, les déplacements et les frais de
bureaux. À l'égard des exercices financiers se termi-
nant le 30 septembre 1981 et le 30 septembre 1982,
l'intimée a déduit les sommes de 1 184 235 $ et de
1 164 296 $ respectivement à titre de «dépenses
nettes engagées» relativement à l'usine. L'intimée a
soit inclus, dans le coût en capital de biens amortis-
sables, le coût de l'usine et du terrain et des installa
tions connexes déjà mentionnés, qui totalisent
9 984 000 $, ou elle a capitalisé ces coûts à titre de
frais de développements différés, plutôt que de les
déduire dans le calcul de son revenu.
En 1981, l'intimée a interrompu l'exploitation de
l'usine après avoir tenté sans succès de la faire fonc-
tionner de façon satisfaisante.
Dans une lettre du 21 octobre 1981, l'intimée avi-
sait formellement Phillips de reconnaître son [TRA-
DUCTION] «obligation de nous indemniser en nous
remettant notamment l'intérêt de tout le capital
investi (puisque, en fait, il s'agit d'argent emprunté)
et une somme représentant la perte de profits», et elle
soutenait que Phillips [TRADUCTION] «devrait payer
une pénalité pour les difficultés, l'embarras, la perte
de clientèle et la perte financière subie pour avoir dû
renoncer à d'autres occasions». En outre, l'intimée
suggérait que Phillips, en fait, acquière l'usine et
tente de la faire fonctionner, et que l'intimée ait la
faculté de l'acquérir de nouveau dans les deux ans.
La lettre se terminait ainsi: [TRADUCTION] «Si vous
refusez cette offre, nous devrons alors en venir à un
règlement financier équitable qui indemnise Mohawk
et qui reconnaisse le préjudice que ce projet a causé à
notre compagnie». L'intimée a joint à cette lettre une
annexe contenant la ventilation des «coûts subis au
30 septembre 1981», d'un montant global de
15 612 000 $.
Phillips a rejeté cette offre dans une lettre du
18 novembre 1981 où elle a plutôt offert de refaire la
conception de l'usine. À titre de solution de rempla-
cement, Phillips a formulé la contre-offre suivante:
[TRADUCTION] À défaut de solution à cette apparente impasse,
un règlement proposé suivant les modalités du contrat semble
être la seule solution de remplacement. Dans un tel cas, nous
proposons, sous réserve de l'approbation de la direction de
Phillips, le démontage de l'usine, le remboursement du prix
d'achat, et un règlement en argent de 1,5 million de dollars
(US) pour les coûts supplémentaires engagés par Mohawk à
partir du l février 1981.
Dans une lettre du 2 décembre 1981, l'intimée a
rejeté cette offre. La contre-offre faisant partie de
cette lettre prévoyait entre autres que Phillips [TRA-
DUCTION] «payerait immédiatement à Mohawk une
somme convenue pour les coûts supplémentaires
réels que Mohawk devrait supporter jusqu'à l'entrée
en vigueur de cette offre».
Les négociations menant à un règlement du litige
ont abouti lors de pourparlers tenus en face à face au
bureau principal de Phillips en Oklahoma, au début
du mois de janvier 1982. Seul M. Frederick Gingell,
administrateur, vice-président et secrétaire-trésorier
de l'intimée, a été appelé à témoigner au procès. Son
témoignage a porté sur le déroulement des négocia-
tions. Il faisait partie du groupe de cinq personnes,
dont le président de l'intimée, formant l'équipe de
négociations. L'intimée a dressé une liste de toutes
les dépenses imaginables engagées au cours des
années 1978 à 1981 relativement à l'usine, ces dépen-
ses, selon le témoignage de M. Gingell, se situant
[TRADUCTION] «aux environs de 15 millions de dol
lars» puisqu'elles incluaient les dépenses connexes
mentionnées précédemment. Les parties n'ont pu
régler leur différend malgré plusieurs journées de
négociations, jusqu'au matin du 8 janvier 1982. Ce
jour-là, comme M. Gingell a témoigné, Phillips [TRA-
DUCTION] «est venue à la table et nous a offert la
somme de 6 million de dollars pour que nous dispa-
raissions». Les modalités convenues par les parties en
vue de résilier la convention du 27 janvier 1978, ainsi
que la convention à option subséquente, ont été con-
signées dans une lettre de convention du 8 janvier
1982, par laquelle il était également permis à Phillips
de reprendre tous les pièces et éléments de l'usine, à
l'exception de l'unité d'hydrotraitement. Le règle-
ment prévoyait la libération mutuelle [TRADUCTION]
«de toute responsabilité à l'égard de toutes les
créances, quelle qu'elles soient, de nature contrac-
tuelle ou délictuelle, se rapportant de quelque
manière que ce soit à la convention d'achat».
Lors d'une réunion tenue le 15 février 1982, le
conseil d'administration de l'intimée a approuvé le
traitement suivant du paiement reçu de Phillips:
[TRADucTION] Produit en devises
canadiennes (6 100 000 $ US) 7 277 906 $
Réparti comme suit:
Avance—Convention d'option
(100000$US) 115 718 $
Frais de développement différés 2 640 614 $
Perte d'exploitation pour 1981 1 184 234 $
Perte—du 1" octobre 1981
au 31 décembre 1981
Charges d'exploitation 542 304 $
Charges—prêt remboursable sur
demande 289 966 $
Produit de l'aliénation de l'usine de
lubrifiants 2 505 069 $
(6 000 000 $ US) 7 162 187 $
Total (6 000 000 $ US) 7 277 905 $
Il ressort de la preuve que cette façon de traiter le
paiement visait à éliminer le compte portant sur le
projet et à faire mieux paraître les états financiers
auprès des banquiers de l'intimée. Toutefois, sur le
conseil de ses vérificateurs, - celle-ci a ultérieurement
décidé de traiter ce montant différemment à compter
de son exercice financier prenant fin le 30 septembre
1982. Ainsi, le paiement a été inclus dans son revenu
à titre de «poste extraordinaire», comme il est
expliqué à la note 13 suivante de ses états financiers
pour cet exercice financier:
[TRADUCTION] 13. POSTE EXTRAORDINAIRE
Au cours de l'année, la compagnie a conclu un règlement avec
le fournisseur original de l'usine de lubrifiants, mettant fin à la
convention originale d'achat datée du 27 janvier 1978, et des
dommages-intérêts de 7 062 187 $ (6 000 000 $ US) ont été
reçus en conséquence. L'usine originale a été en grande partie
mise hors de service et l'opération a été comptabilisée comme
suit:
Dommages-intérêts 7 062 187 $
Moins:
Amortissement de l'usine de
lubrifiants 2 086 873 $
Radiation des frais de développement
différés 2 640 614 $ (4 727 487 $)
Recouvrement des impôts différés
sur le revenu 2 412 020 $
Poste extraordinaire net 4 746 720 $
Dans le calcul de son revenu aux fins de l'impôt à
l'égard de l'exercice financier en question, l'intimée
a traité tout le paiement reçu en vertu du règlement, à
l'exception de 100 000 $, comme une «rentrée ne
constituant pas un revenu», et elle n'a pas inclus le
solde dans son revenu imposable. La somme de
100 000 $, qui représente un versement initial effec-
tué en vertu de la convention d'option subséquente,
n'est pas en litige.
Dans son avis de nouvelle cotisation du 6 août
1987, le ministre a réparti le paiement du règlement
de la façon suivante, relativement à l'exercice finan
cier de 1982:
Traitement fiscal
Revenu Capital
Frais de développement
différés 1 427 203 $ 1 213 411 $
Recouvrement de la
perte d'exploitation
pour 1981 1 184 233
Perte pour l'année 1982
jusqu'au 31 décembre
1981:
Intérêt sur le prêt
remboursable sur
demande 289 966
Perte d'exploitation 542 304
Usine d'agents d'activa-
tion 2 505 069
Total 3 443 708 $ 3 718 430 $
La nouvelle cotisation considérait la somme de
3 443 708 $ comme un revenu, et la somme de
3 718 430 $ comme un capital, représenté par le pro-
duit de disposition de biens amortissables. Lorsque ce
dernier montant a été crédité à la catégorie 29 de l'in-
timée aux fins du pool de déduction pour amortisse-
ment, il en est résulté un gain en capital de 350 884 $.
Le 27 juin 1989, en réponse à l'avis d'opposition
de l'intimée déposé le 26 août 1987, le ministre a
confirmé la nouvelle cotisation pour le motif que le
montant du règlement n'était pas une «rentrée non
imposable», mais plutôt que la somme de 3 443 708 $
devait être incluse dans le calcul du revenu de l'inti-
mée pour l'année 1982 conformément au paragraphe
9(1)t de la Loi de l'impôt sur le revenu [S.C. 1970-
71-72, ch. 63] et que la somme de 3 718 430 $ devait
être traitée comme le «produit de disposition d'un
bien» au sens de l'alinéa 13(21)d) 2 [mod. par S.C.
1977-78, ch. 1, art. 6(8)] de la Loi.
Dans les motifs de son jugement, le juge de pre-
mière instance a dit [à la page 181] que la question
dont il était saisi consistait à savoir si le montant du
Le paragraphe 9(1) est ainsi libellé:
9. (1) Sous réserve des dispositions de la présente Partie,
le revenu tiré par un contribuable d'une entreprise ou d'un
bien pour une année d'imposition est le bénéfice qu'il en tire
pour cette année.
2 L'alinéa 13(21)d) est ainsi libellé:
13....
(21) ...
d) le «produit de disposition» de biens comprend
(i) le prix de vente des biens qui ont été vendus,
(ii) toute indemnité pour biens pris illégalement,
(iii) toute indemnité afférente à la destruction de biens
et toute somme payable en vertu d'une police d'assu-
rance du fait de la perte ou de la destruction de biens,
(iv) toute indemnité afférente aux biens pris en vertu
d'une loi ou le prix de vente des biens vendus à une
personne ayant donné un avis de son intention de les
prendre en vertu d'une loi,
(v) toute indemnité afférente aux biens ayant subi un
préjudice, légalement ou illégalement, ou en vertu
d'une loi ou de toute autre façon,
(vi) toute indemnité afférente aux dommages causés
aux biens et toute somme payable en vertu d'une police
d'assurance au titre de dommages causés à des biens,
sauf dans la mesure où cette indemnité ou cette somme,
suivant le cas, a, dans un délai raisonnable après que les
dommages ont été subis, été dépensée pour la répara-
tion des dommages,
(vii) le montant de la réduction de la dette dont un con-
tribuable est débiteur envers un créancier hypothécaire
découlant de la vente du bien hypothéqué en vertu
(Suite à la page suivante)
règlement «devrait être inclus dans le revenu imposa-
ble ou si la somme reçue constitue un gain fortuit», et
il a ajouté, à la page 182:
Je suis d'avis que pour faire une telle détermination, il est
nécessaire d'examiner toutes les raisons pour lesquelles l'ar-
gent a été payé, c'est-à-dire pourquoi Phillips a versé
6 000 000 $ US à Mohawk. Cette somme a-t-elle été payée en
raison de la rupture du contrat et ne peut, par conséquent, être
qualifiée soit de revenu d'une profession ou d'un emploi, soit
de revenu tiré d'une entreprise ou d'un commerce, ou dois-je
regarder au-delà du dédommagement pour trouver les raisons
qui ont donné lieu au versement et déterminer alors s'il s'agis-
sait d'un dédommagement pour de l'argent qui aurait dû être
payé aux termes d'un contrat commercial et, si oui, si tout ou
partie des sommes versées au titre du contrat aurait été consi-
déré comme revenu ou capital.
Sa réponse à cette question se trouve aux pages 182
et 183, où il a affirmé:
Il ressort du témoignage non contredit de Gingell que lors-
que Mohawk a d'abord présenté sa réclamation à Phillips, la
réclamation comprenait les sommes qu'elle lui avait versées,
de même que tout ce qui avait été payé pour le travail sur les
lieux tels que les réservoirs et les chemins, et tout ce qui avait
été calculé comme des profits perdus. La première réclamation
que Mohawk a soumise à Phillips visait une somme d'environ
15 000 000 $ US. On ne m'a pas fait part de la ventilation de
cette somme, mais elle comprenait un montant pour la perte de
profits futurs. La preuve révèle que cette première réclamation
n'a pas été acceptée et qu'après un certain nombre de jours de
négociation, un règlement a été conclu pour la somme de
6 000 000 $ US. Gingell déclare qu'il ne sait pas pourquoi
Phillips a offert 6 000 000 $ US, mais qu'après avoir reçu l'of-
fre lui et ses associés l'ont examinée et l'ont acceptée à condi
tion qu'elle soit accompagnée d'une unité d'hydrotraitement.
La preuve révèle que cette demande a été acceptée par Phillips
pour «en finir avec» la réclamation de Mohawk.
Je suis convaincu que l'offre faite par Phillips n'était pas
basée sur la perte de profits futurs que subirait Mohawk et
qu'elle n'avait pour autre justification que de tirer Phillips d'un
très mauvais pas, cette dernière ayant et pouvant toujours avoir
une excellente réputation dans le domaine de la technologie
pétrolière.
Si j'avais été saisi de quelque preuve établissant qu'une par-
tie des 6 000 000 $ US était destinée à dédommager Mohawk
pour la perte de profits, j'aurais conclu que cette partie du
règlement devrait être considérée comme revenu tiré d'une
entreprise, car elle aurait été versée au titre de la perte d'un
(Suite de la page précédente)
d'une clause du contrat d'hypothèque, plus toute partie
du produit d'une telle vente reçue par le contribuable,
et
(viii) toute somme incluse, en vertu de l'alinéa 79c),
dans le calcul du produit de la disposition de biens
revenant à un contribuable;
profit que Mohawk aurait réalisé. Les faits indiquent seulement
que l'argent a été payé à titre de dommages-intérêts pour
empêcher une poursuite qui aurait pu être considérée comme
une cause d'embarras pour Phillips et rien de plus.
J'accepte la prétention des avocats de Mohawk selon
laquelle le remboursement des sommes déduites antérieure-
ment au titre d'une dépense n'en fait pas un revenu imposable.
L'argent reçu par Mohawk est un revenu et doit être indiqué
comme tel. Le fait que la somme de 6 000 000 $ US a été
indiquée comme revenu ne fait pas de ce revenu un revenu
imposable. Le revenu de 6 000 000 $ US devait être indiqué
dans la déclaration d'impôt de la demanderesse Mohawk con-
formément aux principes comptables généralement reconnus,
mais l'ensemble de la preuve me convainc qu'il ne s'agit pas
d'un revenu devant être inclus aux fins de l'impôt sur le revenu
dans le revenu puisqu'il ne s'agit d'un revenu au sens des
articles 3, 4 ou 9 de la Loi de l'impôt sur le revenu.
Je n'ai pas examiné le fait que le conseil d'administration de
Mohawk (Gingell) a réparti les fonds d'une manière particu-
lière. Les avocats des deux parties conviennent que l'inscrip-
tion dans les livres de la compagnie n'en fait pas, par elle-
même, de la somme reçue de Phillips un revenu imposable, et,
il n'y a donc rien d'autre à ajouter.
Par conséquent, j'estime que la somme de 6 000 000 $ US
(7 162 138 $ CAN) n'est pas un revenu imposable, mais des
dommages-intérêts résultant de la rupture du contrat, ces dom-
mages-intérêts étant versés non en réparation de la perte de
profits, mais pour empêcher une poursuite et la perte de réputa-
tion.
L'appelante soutient que le juge de première ins
tance a commis une erreur en traitant le montant du
règlement comme un «gain fortuit» puisqu'ainsi, il
n'a pas tenu compte du contexte commercial dans
lequel le paiement a été effectué et parce que sa con
clusion repose sur l'opinion erronée selon laquelle la
nature du paiement doit être déterminée en fonction
du mobile du payeur, et non en fonction de la nature
réelle de la perte à l'égard de laquelle le paiement a
été reçu.
L'intimée, pour sa part, est d'accord avec le juge-
ment rendu en première instance et prétend que le
montant du règlement a été payé suite à ses préten-
tions selon lesquelles Phillips avait fondamentale-
ment violé la convention d'achat et avait, en fait, con-
venu de payer des dommages-intérêts. Ces
dommages-intérêts, prétend-on, ne pouvaient être
imposables que s'ils avaient été versés suite à la vio
lation d'un contrat commercial dont l'exécution
aurait entraîné des revenus ou s'ils avaient été versés
autrement qu'à l'égard d'une violation de contrat en
guise d'indemnisation pour le revenu ou les profits
qui auraient été tirés n'eût été le préjudice causé au
bénéficiaire. À cette prétention subsidiaire, s'ajoute
l'observation selon laquelle il n'existait aucune rela
tion commerciale contractuelle entre Phillips et l'inti-
mée à l'égard de laquelle on pourrait dire que, n'eut
été la violation du contrat par Phillips, celle-ci aurait
été obligée de payer une somme à l'intimée à titre de
revenu. Enfin, selon l'intimée, aucun montant n'a été
versé pour la perte de profits comme tel, aucune
réclamation pour profits perdus n'a jamais été éva-
luée et Phillips n'a jamais convenu de payer un mon-
tant pour la perte de profits.
On n'a soumis à la Cour aucune jurisprudence
selon laquelle un paiement qui n'est pas un «gain for-
tuit» devrait néanmoins être traité, pour les fins de
l'impôt sur le revenu, «comme un gain fortuit». La
jurisprudence paraît effectivement appuyer la préten-
tion de l'appelante selon laquelle, pour déterminer si
le contribuable a reçu un «gain fortuit» non imposa-
ble, il faut tenir compte du contexte commercial dans
lequel le paiement en question a été effectué et reçu.
Dans l'arrêt Federal Farms Ltd. v. Minister of Natio
nal Revenue, [1959] R.C.É. 91, la Cour a annulé une
cotisation d'impôt sur le revenu pour un montant
payé au contribuable sur un fonds constitué avec des
dons publics pour venir en aide aux victimes de l'ou-
ragan Hazel qui s'est abattu sur la province de l'On-
tario en octobre 1954. En statuant ainsi, le juge
Cameron, après avoir étudié la jurisprudence citée
par les deux parties, dont celle ayant traité du traite-
ment à accorder au produit d'une assurance à l'égard
d'un stock détruit au cours d'un incendie, a affirmé,
aux pages 97 et 98:
[TRADUCTION] En l'espèce, je ne vois aucune analogie entre
l'argent reçu du fonds de secours et l'argent reçu des polices
d'assurance prises sur le stock détruit par l'incendie. Le fonds
de secours n'a rien reçu de l'appelante à titre de contribution,
de prestations d'assurance, de services, de prime de sauvetage
ou autre. L'appelante n'avait en aucun temps le droit légal
d'exiger le paiement d'un montant auprès du fonds de secours
et, manifestement, à l'époque de sa perte, elle ne pouvait s'at-
tendre à recevoir quoi que ce soit. Aucun contrat ne liait le
donateur et la donataire, et les administrateurs du fonds de
secours, à leur discrétion, pouvaient ne rien donner à l'appe-
lante. Rien dans les circonstances soulignées n'indique que le
versement et la réception du montant étaient en quelque façon
une transaction commerciale ou découlaient de l'entreprise du
contribuable.
Il appert que le don dont il s'agit en l'espèce a été fait à titre
purement personnel et n'a absolument aucun rapport avec les
activités commerciales de l'appelante. Le fait que la bénéfi-
ciaire est constituée en personne morale et que le don était con-
sidérable n'affecte en rien la vraie nature du paiement qui, à
mon avis, est exactement de la même nature que le montant qui
aurait été versé à un voisin de l'appelante ayant subi des dom-
mages à la suite d'une inondation, mais qui serait un particulier
et qui aurait reçu une somme moindre que celle reçue par l'ap-
pelante.
Et, à la page 100, il a ajouté:
[TRADUCTION] En l'espèce, comme je l'ai mentionné précé-
demment, le paiement n'était en aucun sens une «indemnité»
ou un «revenu»; il était peu susceptible d'être fait plus d'une
fois, et il ne résultait ni directement ni indirectement d'une
transaction commerciale.
Voir aussi R. c. Cranswick, [1982] 1 C.F. 813 (C.A.).
Le juge de première instance a conclu que Phillips
a consenti au paiement du règlement pour «en finir
avec» la réclamation de Mohawk et protéger sa répu-
tation, et que ce même paiement était supérieur au
montant prévu dans la clause de limitation des dom-
mages-intérêts contenue dans la convention d'achat
du 27 janvier 1978. La façon dont le payeur a qualifié
le montant du règlement au cours des négociations
semble être un critère peu sûr dans la détermination
de sa vraie nature. Les motifs qui poussent le payeur
à régler un litige peuvent être nombreux et variés
dans tous les cas, et il est sûrement difficile de con-
naître précisément la nature de son mobile réel, parti-
culièrement lorsque le montant du règlement consti-
tue une somme globale que la documention n'attribue
à aucune catégorie de réclamation particulière. Je ne
vois pas comment le montant du règlement peut être
considéré comme constituant «un gain fortuit» sim-
plement parce que l'intimée affirme que Phillips l'a
versé afin d'en finir avec sa réclamation.
De même, je ne suis pas convaincu que le montant
du règlement doit être considéré comme «un gain for-
tuit» parce qu'il est supérieur au montant prévu dans
la clause de limitation des dommages-intérêts incluse
dans la convention d'achat. La preuve démontre clai-
rement que, bien que Phillips s'y soit refusée, l'inti-
mée a cherché dès le début et tout au long des négo-
ciations à être indemnisée en réclamant notamment
une indemnité pour les profits perdus et les dépenses
faites inutilement. Le dossier laisse supposer que,
outre les profits perdus, les autres pertes subies par
l'intimée étaient liées au coût de l'usine elle-même et
à certaines dépenses engagées, soit pour acquérir le
terrain et installer des installations connexes, soit
pour tenter de faire fonctionner l'usine. La preuve
démontre également clairement que la perte subie au
chapitre du terrain et des installations connexes ne
s'est pas produite parce que ces installations étaient
nécessaires à l'exploitation de la nouvelle usine. À
mon avis, le montant du règlement incluait nécessai-
rement une indemnité pour les profits perdus et les
dépenses faites inutilement. Cette indemnité ne peut,
il me semble, être considérée comme «un gain for-
tuit».
Au Royaume-Uni, les tribunaux ont dû se pronon-
cer sur la question de savoir si un paiement est réelle-
ment volontaire ou s'il est payé pour quelque autre
motif. Apparemment, un paiement volontaire n'est
pas imposable dans ce pays. Les dispositions de la
législation du Royaume-Uni ne sont évidemment pas
identiques à celles invoquées en l'espèce, mais je
crois que les principes de la jurisprudence anglaise et
le raisonnement sur lequel ils s'appuient sont perti-
nents. En voici quelques exemples.
Dans l'arrêt Simpson (Inspector of Taxes) y John
Reynolds & Co (Insurances) Ltd, [1975] 2 All ER 88
(C.A.), le juge Stamp a affirmé ce qui suit quant à la
nature du paiement en question dans cette affaire, aux
pages 91 et 92:
[TRADUCTION] Le fait que la série de paiements, dont faisait par-
tie ce paiement de 1 000 livres, ait été faite et promise volon-
tairement, n'est pas en litige. Un ancien client a promis d'ef-
fectuer les paiements après que la relation de client et de
courtier a pris fin. Ces paiements n'ont pas été effectués en vue
de respecter une obligation légale, réelle ou imaginaire, à
laquelle le client était, ou croyait être, assujetti. Les paiements
n'ont pas été effectués au moyen d'une récompense supplé-
mentaire pour un certain service rendu par les courtiers ou pour
leurs services en général. Ils n'ont pas été effectués conformé-
ment aux modalités d'un contrat commercial ou à titre d'in-
demnité suite à la violation de ce contrat.
Dans l'arrêt Murray (Inspector of Taxes) y Good-
hews, [1978] 2 All ER 40 (C.A.), le juge Buckley,
après avoir étudié certaines décisions antérieures,
dont l'arrêt Simpson, précité, a formulé les principes
suivants, à la page 46:
[TRADUCTION] La lecture de cette jurisprudence me force à
conclure que chaque cas de paiement volontaire, et nous ne
considérons que les cas de cette nature dans le présent appel,
doit être considéré en fonction de son propre contexte en vue
d'établir la nature de la rentrée entre les mains du bénéficiaire.
Il faut tenir compte de toutes les circonstances pertinentes.
Celles-ci peuvent comprendre notamment l'objectif visé par
celui qui effectue le paiement, ou les modalités, le cas échéant,
en vertu desquelles il est effectué, comme par exemple dans
l'affaire Falkirk ([1975] STC 434), où le paiement a été effec-
tué en vue d'être ensuite affecté à l'entreprise du bénéficiaire;
ou il peut être effectué pour augmenter volontairement le prix
des biens ou des services fournis antérieurement par le contri-
buable dans le cadre de son commerce ou de son entreprise,
comme dans les affaires Australia (Commonwealth) Comr of
Taxation v Squatting Investment Co Ltd ([1954] 1 All ER 349,
[1954] AC 182), Severn v Dadswell ([1954] 3 All ER 243,
[1954] 1 WLR 1204, 35 Tax Cas 649) et McGowan y Brown
and Cousins ([1977] 3 All ER 844, [1977] 1 WLR 1403,
[1977] STC 342); ou le paiement peut être simplement versé à
titre de témoignage ou de réparation morale qui, tout en recon-
naissant la valeur des services passés, n'est pas effectué préci-
sément à l'égard d'un de ces services, ou de services prévus
pour l'avenir, rendus par le contribuable au payeur, comme
c'est le cas dans les affaires Chibbett y Joseph Robinson &
Sons ((1924) 9 Tax Cas 48, [ 1924] All ER Rep 684), Walker v
Carnaby, Harrower, Barham & Pykett ([1970] 1 All ER 502,
[1970] 1 WLR 276, 46 Tax Cas 561) et Simpson v John Rey-
nolds & Co. (Insurances) Ltd ([1975] 2 All ER 88, [1975] 1
WLR 617, [1975] STC 271). Je tiens à souligner que c'est la
nature de la rentrée du point de vue du bénéficiaire qu'il est
important de considérer; le motif du payeur n'est important
que dans la mesure où il est relié, si c'est le cas, à cette nature.
Sir John Pennycuick, dans un jugement concourant, a
ajouté les commentaires suivants, à la page 48:
[TRADUCTION] L'avocat de la Couronne a admis qu'il n'existe
aucune règle universelle en vertu de laquelle un commerçant
est tenu de tenir compte d'un paiement volontaire. Sauf si je
l'ai mal compris, il a toutefois formulé un principe général
dans les termes suivants: le motif pour lequel le payeur a effec-
tué le paiement est le facteur déterminant; s'il s'agit d'un motif
commercial, le paiement est imposable dans les mains du béné-
ficiaire du paiement. Avec égards, j'estime que cette formula
tion du principe est erronée. A ce chapitre, le principe fonda-
mental consiste à considérer la nature de la rentrée du point de
vue du bénéficiaire. Ainsi, comme il a été souvent souligné, il
faut tenir compte du motif du payeur, mais traiter ce motif
comme le facteur déterminant de la nature de la rentrée du
point de vue du bénéficiaire revient à inverser le principe fon-
damental.
Il semble également que le résultat soit le même
lorsque le paiement est effectué en raison de dépen-
ses plus élevées plutôt que pour une perte de profits
en soi. Ainsi, dans l'arrêt Donald Fisher (Ealing) Ltd
y Spencer [Inspector of Taxes], [ 1987] STC 423 (Ch.
D.), le juge Walton a affirmé, à la page 433:
[TRADUCTION] Évidemment, en l'espèce, il s'agit de ce que
l'avocat de la Couronne a heureusement appelé le reflet de
cette situation. L'indemnité est ici versée en raison de dépen-
ses plus élevées, et c'est pour cette raison qu'on obtient un
reflet, et non en raison du défaut du commerçant de recevoir
l'argent qui, s'il avait été reçu, aurait été crédité aux profits (le
cas échéant) tirés, dans une année, du commerce qu'il exploi-
tait au moment où l'indemnité a été reçue; cela signifie que
l'indemnité est payable à l'égard des dépenses plus élevées—
non pas des rentrées inférieures mais des dépenses plus éle-
vées. Mais du point de vue du commerçant, le résultat est iden-
tique dans les deux cas, c'est-à-dire que les profits sont infé-
rieurs à ce qu'ils auraient dû être. Si une indemnité reçue est
payable, essentiellement, parce que ce qui devait être reçu ne
l'a pas été ou parce qu'aucune dépense supplémentaire n'aurait
dû être engagée si tout s'était passé normalement, il me semble
que le principe est tout à fait identique.
Enfin, dans l'affaire Raja's Commercial College y
Gian Singh & Co Ltd, [1976] STC 282 (P.C.), lord
Fraser a affirmé, aux pages 284 et 285:
La question de savoir si les sommes accordées par les tribu-
naux constituent un revenu, assujetti ou non à l'impôt sur le
revenu, s'est soulevée dans plusieurs causes publiées. Ces
sommes ont connu différentes appellations: les mots «dom-
mages-intérêts», «intérêt» et «indemnité» ont tous été utilisés,
mais, refusant de se laisser enchaîner par la terminologie utili
sée, les tribunaux ont toujours essayé d'aller au-delà et «de
résoudre la question de fond» pour employer les termes du
juge Rowlatt dans l'arrêt Simpson v. Bonner Maurice's Execu
tors ((1929) 14 Tax Cas 580, p. 592) relativement à la nature
véritable de cette somme. [C'est moi qui souligne.]
Ici, au Canada, les tribunaux ont aussi eu à étudier
la même question générale. Dans l'arrêt MRN c
Import Motors Ltd, [1973] CTC 719 (C.F. Ife inst.),
le juge Urie, alors juge de première instance, a for-
mulé un critère visant à déterminer si une perte est
déductible du revenu. À la page 727, il a affirmé:
C'est la vraie nature de la perte, et non les avis subjectifs des
parties à ce sujet qui est importante.
Voir également Courrier M H Inc c La Reine, [ 1976]
CTC 567 (C.F. Ire inst.), par le juge Dubé, à la page
571.
Il me semble que les principes formulés dans ces
affaires s'appliquent en l'espèce. Le règlement, en
plus de mettre fin à une opération commerciale qui
avait manifestement tourné au vinaigre, montrait que
Phillips reconnaissait le droit de l'intimée à être
indemnisée jusqu'à concurrence du montant effecti-
vement versé. Manifestement, ce paiement a été
effectué parce que les modalités de la convention de
règlement du 8 janvier 1982 l'exigeaient. Il s'agit là
de l'une des modalités en vertu desquelles les parties
ont convenu de mettre fin à la relation née de la con
vention du 27 janvier 1978. L'échange des libérations
mutuelles était également prévu. Rien dans la con
vention de règlement ne laisse supposer que le mon-
tant en question a été versé à un titre autre qu'une
exécution partielle d'un règlement obligatoire. En
l'occurrence, il ne peut guère être considéré comme
consituant un «gain fortuit».
Je dois maintenant étudier la justesse de la nou-
velle cotisation elle-même. La première question est
de savoir si le ministre a, à juste titre, cotisé la
somme de 3 443 708 $ à titre d'indemnité pour les
profits perdus et les dépenses engagées. J'estime que
la preuve appuyait cette cotisation. J'ai déjà fait men
tion de la correspondance et de la documentation
indiquant que l'intimée a effectivement cherché à être
indemnisée, notamment en réclamant une indemnité
pour les profits perdus. Son traitement du montant du
règlement dans ses livres comptables est au même
effet. De plus, la preuve révèle qu'au cours de ses
exercices financiers de 1981 et 1982, l'intimée a subi
une perte de profits en raison des dépenses d'exploi-
tation engagées pour l'usine non fonctionnelle. La
preuve démontre également que, dans le calcul de son
revenu pour ces mêmes exercices financiers, l'inti-
mée a déduit à titre de «dépenses nettes engagées» les
montants de 1 184 235 $ et de 1 164 296 $ respecti-
vement. Il ressort en l'espèce que Phillips a accepté
de reprendre l'usine et, manifestement, de reconnaître
dans le règlement une partie de la réclamation de l'in-
timée qui n'était pas représentée par les dépenses
relatives au terrain, aux réservoirs destinés à l'entre-
posage et aux installations connexes que l'intimée a
finalement décidé de conserver et, de fait, elle les a
apparemment utilisés après avoir acquis une nouvelle
usine auprès d'un fournisseur différent.
Nous devons également décider si, dans la nou-
velle cotisation, il était juste d'attribuer jusqu'à
3 718 430 $ du montant du règlement au «produit de
disposition d'un bien en immobilisation». À mon
avis, la réponse à cette question ne peut être positive
que si la preuve appuie cette attribution faite par le
ministre dans la nouvelle cotisation. À mon humble
avis, c'est le cas. En premier lieu, il n'y a aucun
doute que le montant du règlement incluait effective-
ment une indemnité pour l'usine elle-même qui, à
l'exception de l'unité d'hydrotraitement, a été
retournée à Phillips qui a alors décidé de la démonter
sur les lieux. Ce poste représentait à lui seul, pour
l'intimée, une dépense en immobilisation de
3 942 000 $ CAN (2 850 000 $ US) en contrepartie
de l'achat. Encore une fois, l'intimée, en tentant
d'être indemnisée, a cherché à l'être à l'égard de son
investissement en capital. En outre, dans ses propres
livres comptables, approuvés par son conseil d'admi-
nistration, elle a attribué une partie du montant du
règlement au «produit de disposition de l'usine de
lubrifiants» et une autre partie aux «coûts de dévelop-
pement différés».
Enfin, l'appelante soumet un argument subsidiaire
s'appuyant sur le paragraphe 14(1) [mod. par S.C.
1977-78, ch. 1, art. 7] de la Loi de l'impôt sur le
revenu. Elle prétend que si le montant du règlement a
été payé par Phillips afin de protéger sa réputation, il
s'agit de la rentrée d'un «bien en immobilisation
admissible» et que, par conséquent, l'intimée doit
inclure dans le calcul de son revenu pour l'année
1982 la moitié du montant du règlement.
Compte tenu des conclusions que j'ai mentionnées
précédemment, il est inutile d'étudier le bien-fondé
de cette prétention. Quoi qu'il en soit, j'aurais été peu
disposé à le faire en raison des actes de procédures.
Nulle part dans la défense de l'appelante cette ques
tion était-elle plaidée expressément. Ce défaut, à mon
avis, empêche l'appelante de la soulever dans le pré-
sent appel. Voir les arrêts Glisic c. Canada, [1988] 1
C.F. 731 (C.A.), aux pages 739 et 740; TRW Inc. c.
Walbar of Canada Inc. (no de greffe A-107-91, le
juge Stone, J.C.A., jugement rendu le 31 octobre
1991, encore inédit), à la page 24.
Pour ces motifs, j'accueillerais l'appel avec
dépens, j'annulerais le jugement de la Section de pre-
mière instance rendu le 11 juillet 1990, et je rejette-
rais l'action avec dépens.
LE JUGE HEALD, J.C.A.: Je souscris à ces motifs.
LE JUGE HUGESSEN, J.C.A.: Je souscris à ces motifs.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.