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A-869-91
Ashford Mahabir (requérant) c.
Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration (intimé)
RÉPERTORIÉ' MAHABIR C. CANADA (MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE L'IMMIGRATION) (CA.)
Cour d'appel, juges Mahoney, Desjardins et Linden, J.C.A.—Toronto, 8 octobre; Ottawa, 17 octobre 1991.
Immigration Pratique Audience tenue en application de l'art. 46 de la Loi sur l'immigration pour statuer sur l'exis- tence d'une preuve crédible ou digne de foi Requête présen- tée au tribunal en vertu de l'art. 24 de la Charte en vue d'obte- nir une déclaration portant que les dispositions législatives visées étaient rendues inopérantes par l'art. 52 de la Loi cons- titutionnelle Prétention rejetée Requête tendant à obtenir la révision de la décision du tribunal sous le régime de l'art. 28 de la Loi sur la Cour fédérale Il a été ordonné au requé- rant de démontrer la raison pour laquelle sa demande ne devait pas être annulée puisqu'elle a été faite sans autorisation (Loi sur l'immigration, art. 82.1(1)) Une autorisation est- elle nécessaire lorsque la décision attaquée est le refus de déclarer inopérantes les dispositions législatives dont l'orga- nisme décisionnel tire son pouvoir ou un refus d'exciper d'une exception d'ordre constitutionnel dans des circonstances parti- culières? S'agit-il d'une «décision définitive» pouvant faire l'objet de la révision prévue à l'art. 28 Bien que les disposi tions de la Charte aient été invoquées, la Cour ne peut pas ne pas tenir compte de l'art. 82.1 de la Loi sur l'immigration qui modifie le droit de demander une révision judiciaire.
Contrôle judiciaire Demandes de révision Le tribunal chargé de se prononcer sur le statut de réfugié a rejeté la pré- tention fondée sur les dispositions de la Charte voulant que la législation autorisant la tenue d'une audience pour statuer sur l'existence d'une preuve crédible ou digne de foi soit rendue inopérante par l'art. 52 de la Loi constitutionnelle S'agit-il d'une «décision définitive» pouvant faire l'objet de la révision prévue à l'art. 28 La nécessité d'obtenir une autorisation pour présenter une demande de révision, prévue à l'art. 82.1 de la Loi sur l'immigration, s'applique-t-elle lorsque la déci- sion attaquée est le refus de déclarer inopérante la législation habilitante La Cour ne peut pas ne pas tenir compte de la modification apportée par l'art. 82.1 au droit de demander une révision judiciaire Examen de la jurisprudence sur ce que constitue une «décision» au sens de l'art. 28.
Compétence de la Cour fédérale Section d'appel Rejet pour manque de compétence de la demande présentée en vertu de l'art. 28 en vue d'obtenir la révision de la décision du tribu nal chargé de se prononcer sur le statut de réfugié rejetant la prétention voulant que les dispositions de la Loi sur l'immigra-
tion qui autorisent la tenue d'une audience pour statuer sur l'existence d'une preuve crédible ou digne de foi sont rendues inopérantes par l'art. 52 de la Loi constitutionnelle Défaut d'obtenir l'autorisation requise pour entamer les procédures Il ne s'agit pas d'une «décision définitive» susceptible de révision en vertu de l'art. 28.
Droit constitutionnel Recours Argument selon lequel la demande présentée sous le régime de l'art. 28 de la Loi sur la Cour fédérale en vue d'obtenir la révision de la décision d'un tribunal chargé de se prononcer sur le statut de réfugié étant fondée sur l'art. 24 de la Charte, il ne faut pas tenir compte de l'obligation d'obtenir l'autorisation prévue par la Loi sur l'im- migration La prétention du requérant procède d'un faux rai- sonnement Ayant choisi de demander une réparation aux termes de la Charte dans le cadre d'une instance autorisée par la Loi sur l'immigration, le requérant est lié par la condition préalable, soit l'obtention d'une autorisation L'art. 24 per- met d'accorder un redressement lorsque la Cour est régulière- ment saisie.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, 44], art. 24.
Code canadien du travail, L.R.C. (1985), chap. L-2, art. 22.
Loi canadienne sur les droits de la personne, S.C. 1976- 77, chap. 33.
Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44], art. 52.
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, art. 28.
Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), chap. I-2, art. 46, 82.1 (édicté par L.R.C. (1985) (4e suppl.), chap. 28, art. 19; L.C. 1990, chap. 8, art. 53).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Brennan c. La Reine, [1984] 2 C.F. 799; (1985), 85 CLLC 17,006; 57 N.R. 116 (C.A.); Armadale Communications Ltd. c. Arbitre (Loi sur l'immigration), [1991] 3 C.F. 242 (C.A.).
DÉCISIONS EXAMINÉES:
Bains c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigra- tion) (1990), 47 Admin L.R. 317; 8 Imm. L.R. (2d) 165; 109 N.R. 239 (C.A.F.); Ferrow c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1983] 1 C.F. 679; (1983), 144 D.L.R. (3d) 364; [1983] 3 W.W.R. 289; 46 N.R. 299 (C.A.); In re la Loi antidumping et in re Danmor Shoe Co. Ltd., [1974] 1 C.F. 22; (1974), 1 N.R. 422 (C.A.).
DÉCISION CITÉE:
Mills c. La Reine, [1986] 1 R.C.S. 863; (1986), 29 D.L.R. (4th) 161; 26 C.C.C. (3d) 481; 52 C.R. (3d) 1; 21 C.R.R. 76; 67 N.R. 241; 16 O.A.C. 81.
AVOCATS:
Barbara L. Jackman et Gladys MacPherson pour le requérant.
Donald A. Macintosh et Deirdre A. Rice pour l'intimé.
PROCUREURS:
Jackman, Joseph & Associates, Toronto, pour le requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour l'in- timé.
Ce gui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY, J.C.A.: Il a été ordonné au requérant de démontrer la raison pour laquelle sa demande fondée sur l'article 28 ne devait pas être annulée puisqu'elle a été faite sans l'autorisation préalable requise par le paragraphe 82.1(1) de la Loi sur l'immigration ) et qu'elle vise une décision non susceptible de révision aux termes de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale 2 . Le tribunal, composé d'un arbitre et d'un membre de la section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du sta- tut de réfugié, a rendu sa décision alors qu'il agissait en vertu de l'article 46 de la Loi sur l'immigration afin de statuer sur l'existence d'une preuve crédible ou digne de foi sur laquelle la section pouvait s'ap- puyer pour accorder au requérant le statut de réfugié au sens de la Convention. Le requérant s'est adressé au tribunal, conformément au paragraphe 24(1) de la Charte canadienne des droits et libertés, [qui consti- tue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44]], afin d'obtenir une déclaration portant que, soit en général ou en l'occurrence, les dispositions de la Loi sur l'im- migration autorisant le tribunal à instruire l'instance en litige étaient rendues inopérantes par l'article 52
de la Loi constitutionnelle de 1982 [annexe B, Loi de
1 L.R.C. (1985), chap. 1-2, édicté par L.R.C. (1985) (4e suppl.), chap. 28, art. 19; L.C. 1990, chap. 8, art. 53.
2 L.R.C. (1985), chap. F-7.
1982 sur le Canada, 1982, chap 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44]]. Le tribunal a conclu qu'elles n'étaient pas inopérantes et il a alors statué que la preuve n'était pas crédible ou digne de foi.
Les débats ont également porté sur quatre autres questions, et une cinquième par la suite. Pour cha- cune d'elles, l'avis introductif d'instance de l'article 28 a été déposé sans qu'une autorisation ne soit d'abord obtenue, et dans chacune d'elles, il a été décidé, au cours de la procédure en première ins tance, que l'article 52 n'avait pas pour effet d'empê- cher la continuation de celles-ci. Dans l'affaire San- kar c. M.E.I., dossier A-857-91, une ordonnance justificative a également été rendue, et un tribunal a été saisi de la procédure en première instance. Dans l'affaire Santana c. M.E.I., dossier A-761-91, une ordonnance justificative a été rendue, mais la demande fondée sur l'article 28 visait la décision prise par un arbitre seul tenant une enquête en vertu de l'article 44 des dispositions transitoires de la Loi. Dans les affaires Savicoglu c. M.E.I., dossier A-747- 91 et Ramnath et autres c. M.E.I., dossier A-765-91, la procédure en première instance a été tenue en vertu de l'article 46 de la Loi, mais nous avons été saisis des questions au moyen de requêtes en annulation de l'intimé, et non en vertu d'ordonnances justificatives. Enfin, dans l'affaire entendue par la suite, dossier A- 696-91, dont nous avons été saisis en vertu d'une ordonnance justificative et qui est assujettie à une ordonnance préventive, la procédure a été soumise à la section du statut de réfugié elle-même en vertu de l'article 69.1 de la Loi et elle ne s'est pas soldée, con- trairement aux autres, par une décision statuant sur le droit du requérant à demeurer au Canada.
Ces différences ne sont pas essentielles aux ques tions qu'il faut maintenant trancher. La compétence de l'organisme doté du pouvoir décisionnel de tran- cher une question en vertu de l'article 52 n'est pas en litige en l'espèce. Dans chaque cas, on a demandé qu'une décision soit rendue conformément à l'article 52 en raison d'un présumé retard dans le traitement de la revendication du statut de réfugié, et donc de ce qui serait la violation présumée des droits garantis par les articles 7 et 12 de la Charte. Les questions sont les suivantes:
1. L'exigence de l'article 82.1 de la Loi sur l'immi- gration oblige-t-elle le requérant à demander et à obtenir l'autorisation d'introduire une instance aux termes de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale lorsque la décision qu'il désire faire annuler est soit un refus de déclarer inopérantes les dispositions législatives dont l'organisme décisionnel tire son pouvoir ou un refus d'exciper d'une exception d'or- dre constitutionnel dans les circonstances de l'espèce;
2. S'agit-il d'une «décision définitive» susceptible d'une révision en vertu de l'article 28?
Dans l'arrêt Bains c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) 3 , la Cour a jugé que l'obligation d'obtenir l'autorisation d'en appeler prévue à l'article 83.1 de la Loi ne porte pas atteinte aux droits garantis aux revendicateurs de statut de réfugié par les articles 7 ou 15 de la Charte. Le requérant prétend toutefois que puisque la décision attaquée porte sur des droits garantis par la Charte et non sur des droits découlant de la Loi sur l'immigration, la présente affaire se dis- tingue de l'affaire Bains. Il prétend que bien que la demande fondée sur l'article 28 concerne la Loi sur l'immigration, elle n'est pas soumise en vertu de cette Loi; elle l'est plutôt en vertu de l'article 24 de la Charte et l'obligation d'obtenir une autorisation pré- vue par la Loi sur l'immigration ne peut y faire obsta cle.
À mon avis, l'hypothèse fondamentale sur laquelle le requérant appuie sa prétention procède d'un faux raisonnement évident. La réparation recherchée con- cerne certainement la Loi sur l'immigration, mais elle est également recherchée en vertu de cette Loi puis- que son article 82.1 4 , et l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale autorisent la tenue de l'instance que le requérant a prétendu introduire. L'article 82.1 modi- fie expressément le droit de demander une révision judiciaire par ailleurs prévu à l'article 28. Cette Cour doit tout autant tenir compte de l'article 82.1 lors- qu'elle est saisie d'une demande fondée sur l'article
3 (1990), 47 Admin. L.R. 317 (C.A.F.).
4 82.1 (1) La présentation d'une demande de contrôle judi- ciaire aux termes de la Loi sur la Cour fédérale ne peut, pour ce qui est des décisions ou ordonnances rendues ou mesures prises dans le cadre de la présente loi ou de ses textes d'appli- cation—règlements ou règles—ou de toute question soulevée dans ce cadre, se faire qu'avec l'autorisation d'un juge de la Section de première instance de la Cour fédérale ou de la Cour d'appel fédérale, selon le cas.
28 cherchant à annuler une décision ou ordonnance rendue en application de la Loi sur l'immigration, qu'elle doit tenir compte, notamment, des disposi tions privatives du paragraphe 22(1) du Code cana- dien du travails lorsqu'elle est saisie d'une demande fondée sur l'article 28 visant à faire annuler une déci- sion rendue en vertu de la Partie I du Code. Puisqu'il a choisi de demander une réparation aux termes de la Charte dans le cadre d'une instance autorisée par la Loi sur l'immigration plutôt que, par exemple, d'in- troduire une action afin d'obtenir une déclaration portant sur ces droits, le requérant est lié par la condi tion préalable selon laquelle il est tenu d'obtenir une autorisation pour procéder ainsi. Il est bien établi que ni le paragraphe 24(1) de la Charte ni le paragraphe 52(1) de la Loi constitutionnelle de 1982 ne rendent d'eux-mêmes un tribunal compétent 6 . Le paragraphe 24(1) prévoit plutôt un pouvoir de réparation et le paragraphe 52(1) un pouvoir de déclaration qui doi- vent être exercés par la Cour lorsqu'elle se prononce sur les questions dont elle est régulièrement saisie. Une décision ou ordonnance, qu'elle porte sur la Constitution ou non, est rendue en application de la Loi sur l'immigration lorsqu'elle est rendue par un tribunal tirant son pouvoir décisionnel de cette Loi. En l'absence d'une autorisation, cette Cour n'est pas compétente à entendre une demande fondée sur l'ar- ticle 28 à l'égard d'une décision ou ordonnance ren- due en application de la Loi sur l'immigration.
La dernière question à trancher consiste à savoir si la décision selon laquelle l'article 52 ne rendait pas inopérantes les dispositions de la Loi sur l'immigra- tion en vertu desquelles le tribunal en question agis- sait était en fait une «décision» au sens de l'article 28. La jurisprudence antérieure a été examinée minu- tieusement dans l'arrêt Ferrow c. Ministre de l'Em- ploi et de l'Immigration. Le juge en chef Thurlow, se prononçant au nom de la Cour, a adopté, à la page 687, un exposé antérieur du droit selon lequel
... dans le contexte de la Loi sur la Cour, fédérale [paragraphe 28(1)], il s'agit d'une décision ou ordonnance ultime prise ou rendue par le tribunal en vertu de sa constitution.
Le requérant croit, à juste titre, que les jugements plus récents s'écartent de cette définition.
5 L.R.C. (1985), chap. L-2.
c, Mills c. La Reine, [1986] 1 R.C.S. 863.
7 [1983] 1 C.F. 679 (C.A.).
Il fait référence à l'arrêt Armadale Communica tions Ltd. c. Arbitre (Loi sur l'immigration) 8 , qui trai- tait de la décision d'un arbitre d'exclure les membres de la presse et le public qui désiraient assister à une enquête. Les requérants, dans ce cas, étaient des représentants des média.- Par sa décision de les exclure, l'arbitre a statué définitivement sur tous leurs droits fondamentaux relativement à l'enquête, bien qu'il ne s'agît pas de la décision finale qu'il était autorisé à rendre.
Le requérant renvoie également à l'arrêt Brennan c. La Reine 9 , dans lequel, dissident sur le point, le juge en chef Thurlow a réitéré la conclusion à laquelle il était arrivé dans l'arrêt Ferrow. Cette affaire portait sur une décision rendue par un tribunal d'appel constitué en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personnel, ayant infirmé la conclu sion d'un tribunal selon laquelle l'employeur de la personne reconnue coupable d'avoir commis des actes discriminatoires n'est pas lui-même responsable de ces actes. Le tribunal et le tribunal d'appel n'ont traité que de la responsabilité de l'employé qui a agi de façon discriminatoire et de celle de son employeur, et non du droit de la plaignante à être
indemnisée. -
Le juge MacGuigan, J.C.A., a vu la page 832] dans la déclaration suivante faite par le juge en chef Jackett dans l'arrêt In re la Loi antidumping et in re Danmor Shoe Co. Ltd." la «meilleure analyse des considérations de principe en jeu»:
À mon avis le but des articles 18 et 28 de la Loi sur la Cour fédérale est de fournir un contrôle judiciaire rapide et efficace des travaux des offices, commissions ou autres tribunaux fédé- raux avec une ingérence minimale dans ces travaux. Si, en tenant compte de ce point de vue, on applique l'article 11 de la Loi d'interprétation à la question soulevée par les demandes fondées sur l'article 28, il faut reconnaître que le fait que la Cour n'a pas le pouvoir d'examiner la position prise par un tribunal quant à sa propre compétence ou quant à des questions de procédure au tout début de l'audience peut entraîner, dans certains cas, la tenue d'auditions coûteuses qui seraient sans issue. Par contre, si une des parties, peu désireuse de voir le tribunal s'acquitter de sa tâche, avait le droit de demander à la Cour d'examiner séparément chaque position prise ou chaque
8 [1991] 3 C.F. 242 (C.A.).
9 [1984] 2 C.F. 799 (C.A.).
10 S.C. 1976-77, chap. 33.
11 [1974] 1 C.F. 22 (C.A.), à la p. 34.
décision rendue par un tribunal, lors de la conduite d'une lon- gue audience, elle aurait en fait le droit de faire obstacle au tribunal.
Le juge MacGuigan, J.C.A., a tranché la question à la page 833:
Je statue donc que, parce qu'elle était manifestement destinée à constituer une décision finale sur les questions examinées, la décision partielle du tribunal d'appel en l'espèce peut faire l'objet d'un examen en vertu du paragraphe 28(1) de la Loi sur la Cour fédérale. Cela ne signifie pas que toute décision inter- locutoire d'un tribunal peut faire l'objet d'un examen en vertu du paragraphe 28(1), mais plutôt qu'une décision qui tranche manifestement toutes les questions soumises sauf celle relative à la réparation ou à l'indemnisation devrait faire l'objet d'un tel examen étant donné que, par cette décision, le tribunal tran- che de manière définitive la question de fond dont il a été saisi.
Le juge Pratte, J.C.A., bien que ne souscrivant pas aux motifs du juge MacGuigan, J.C.A., a toutefois convenu que la décision était susceptible de révision aux termes de l'article 28.
Une décision est susceptible de révision aux termes de l'article 28 non seulement, comme la jurispru dence antérieure l'a énoncé, s'il s'agit d'une décision que, par ordre du Parlement, le tribunal est tenu de rendre, mais aussi s'il s'agit d'une décision définitive qui tranche une question fondamentale soumise au tribunal. Celui-ci peut être saisi de plus d'une ques tion fondamentale et, à l'instar de l'affaire Brennan, il peut instruire une affaire de façon à ne trancher que l'une d'elles à l'exclusion d'une ou de plusieurs autres. Le tribunal en l'espèce n'a pas agi ainsi.
La question constitutionnelle, importante en elle- même, n'est pas nécessairement une question fonda-
mentale soumise à un tribunal donné et, à mon avis, elle ne faisait pas partie des questions fondamentales soumises au tribunal en l'espèce. Elle portait sur le droit du tribunal de diriger ses procédures, et non sur les droits fondamentaux en litige garantis au requé- rant. Le tribunal s'est finalement contenté de décider que l'instance se poursuivrait. Puisque la décision du tribunal à l'égard de la question constitutionnelle n'était pas définitive au sens du paragraphe 28(1), elle n'est pas susceptible de révision aux termes de l'article 28.
Je serais d'avis d'annuler la demande fondée sur l'article 28 dans chaque cas au motif que la Cour n'est pas compétente à l'entendre en raison de l'ab-
sence d'autorisation d'introduire l'instance et du fait que la décision qu'on cherche à faire annuler n'est pas susceptible de révision aux termes de l'article 28. À l'exception du dossier A-696-91, je serais d'avis de rendre l'ordonnance annulant la demande sans porter atteinte au droit de chaque requérant, s'il le juge opportun, de solliciter une prorogation de délai en vue de demander l'autorisation de présenter une demande fondée sur l'article 28 à l'égard de la déci- sion définitive rendue par le tribunal. J'ordonnerais également qu'une copie de ces motifs soit déposée dans chaque affaire mentionnée ci-dessus à titre de motifs du jugement.
LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.: Je souscris à ces motifs.
LE JUGE LINDEN, J.C.A.: Je souscris à ces motifs.
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